Tumgik
#J'ai un truc pour les bérêts
abneliaacnh · 3 years
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Partir comme une lente comète vers les anomalies de la Terre.
J'apperçois le bord troué et défoncé de ma casquette posée sur la table tout autant rongée d'un hôtel chinois à 2 euros, et l'envie de partir me reprend encore. Une succession d'images et d'impressions rêvées se bousculent dans mon crâne, comme pour venir chatouiller encore un peu le désir de prendre la route et de partir, peut être pour disparaître. Le rebord défoncé de mon bérêt m'évoque la simplicité d'un objet du quotidien qui me suit tout les jours, perché sur ma tête, et qui apporte un peu de régularité et de cohérence à l'imprévu toujours changeant du voyage. Comme si c'était un repère toujours présent, posé là sur cette table pour me rappeler que c'est toujours bien moi qui avance en terrain inconnu, et qu'il est donc possible et sensé de s'aventurer hors de son propre cadre, loin du cocon des origines, d'aller tâter l'incompréhension d'un autre point du monde. Aussi, cette casquette, éclairée dans la pénombre de ma torche de portable m'indique tout de suite l'aspect rituel du voyage que je suis entrain de vivre. Un geste:  poser la casquette sur la table, quoi de plus instinctif, quoi de plus merdique et ennuyant comme banal, quoi de plus évident. Après ces 4 mois de voyage, le rituel s'installe et m'ancre dans l'évidence de la survie. À force de répétition, les actions simplissimes deviennent sans se montrer les causes d'une survie qui prend tout son sens. La moindre de mes démarches fait écho à la nécessité de faire en sorte de continuer à respirer et de vivre pour continuer à progresser sur le chemin. Avancer devient prétexte à vivre, et vivre devient prétexte à avancer. Certes, nous sommes deux dans ce voyage, et tout cela revêt une importance primordiale du vivre-ensemble, nécessaire comme  enrichissante. Mais parfois, cette sensation de la force sourde des gestes vitaux revient en son de cloche et suscite en moi l'envie de prolonger l'expérience de façon plus radicale encore, seul.
Je me souviens il y a quelques mois avoir voulu décrire de façon imagée cette envie de plonger dans le gouffre du voyage, expliquer ce rêve de coton rocailleux de l'errance dans l'errance. L'image était la suivante. Quelque part dans le conté de Mazar-i-Sharif, Afghanistan, il est 21 heures, le ciel est entre chien et loup, la brise de la soirée s'installe doucement pour venir effacer le poids d'une chaleur écrasante. Je suis sur le quai d'une gare qui n'a jamais été finie de construire. On imagine à peine le porche qui devrait couvrir l'attente du train imaginaire. Au loin, les montagnes qui me séparent de l'Ouzbékistan duquel je viens à pied, par les cols et les vallées encaissées. Les premières étoiles commencent à scintiller dans ce ciel poussiéreux mais épuré, et je m'asseois. Je sors une miche de pain dur du haut de mon sac et commence à enlever patiemment la croûte avant d'y faire une entaille pour y trancher la chaire de mon couteau. Je pense aux mots arabes que j'ai pu apprendre et m'amuse silencieusement de la sonorité de l'un d'entre eux, tout en me disant que ce serait fabuleux si je pouvais me frotter au pachtoune ou au ouïghour. Puis je m'allonge, le regard scindé entre la toile de fond proposée par ce porche en bêton armé et l'immensité de la voie lactée d'Asie centrale. Il me reste de l'eau pour demain, je m'endors sans trop me poser de question, si ce n'est la certitude que demain il faudra reprendre la route.
Ce sont ce genre d'images qui font de temps à autre des bons jusqu'à mon esprit. Elles sont des visions incapables de coler un jour à la réalité, et pourtant elles m'animent et me réconfortent parce qu'elles m'offrent des perspectives. La perspective de pouvoir, un jour, être à un endroit x du globe et savoir, sentir bien profond dans les tripes que j'y suis. Là dedans, rien de bien sensé. Pas de sens politique, pas de sens social, pas de perspective d'avenir lointain, juste le “Dasein”, l'évidence première de l'être-là, et donc de savoir et sentir que non seulement on existe, mais surtout que ça grouille d'existence autour de soi. Il n'y a que cette perdition dans le voyage qui me semble apte à me dévoiler cette évidence, et c'est ce qui me gratte les neurones à chaque fois que je rêve de fuite et d'aventure. Pourtant, si c'est ce genre de banalité du voyage qui peut m'attirer, je sais que le véritable moteur de mon envie de partir s'incarne dans des lieux précis. Au moment où je parle, je me situe dans une position de 22°N 101°E, en Chine, dans le village de Daheishan, face à la rivière qui descend des collines sub-tropicales du Yunnan. Mais d'autres coordonnées m'attirent. Une en particulier:  65°N 169°W, l'île de Petite Diomède, en Alaska, aux confins du Pacifique et de l'Arctique. Cette île m'attire pour de multiples raisons : c'est un des bouts du monde sans être un continent, c'est un lieu chargé d'histoire, et si j'y parvenais, elle serait pour moi le synonyme d'une victoire presque atteinte ainsi que d'une relation quasi charnelle entre la Mort et moi-même. Je m'explique. L'île de Petite Diomède se situe en plein milieu du detroit de Bering, à mi chemin entre la Russie et les Etats Unis, entre la province de Chukotka, en Sibérie, et l'Alaska. Petite Diomède est sur le sol américain, et elle est jumelée avec l'île de Grande Diomède, sa grande soeur russe, située à quelques kilomètres à l'Ouest seulement. Y parvenir, en un jour glacé de janvier signifierait avoir réussi à réaliser tout ceci: prendre le train jusqu'à Iakoutsk, dans la République de Sakha, au coeur de la Sibérie, parcourrir la plaine adjacente sur plusieurs centaines de kilomètres vers l'Est en stop, arriver à la fin de la route, acheter une motoneige et parcourrir les 2500km en hors piste qui me séparent de l'Extrême-Orient sibérien de la Chukotka, avoir bataillé avec l'administration russe pour obtenir la très délicate autorisation de se rendre dans cette province, longer la mer jusqu'au dernier village de l'Est du monde, y vendre ma motoneige contre un traîneau et des vivres, atteindre le bout du monde et se rendre compte qu'il n'est pas tout à fait physiquement fini car l'océan s'est mué en banquise et m'invite à le fouler, parcourrir 40km à pieds sur la glace tout en sachant qu'à tout moment celle-ci peut céder et faire de moi un cadavre flottant dans les eaux hostiles de l'Arctique, atteindre la Grande Diomède russe, obtenir auprès des militaires qui y vivent l'autorisation de quitter la Russie de la sorte ou le faire même si je ne l'ai pas en me disant que je m'en bas les couilles et que je vais pas rebrousser chemin alors que je suis arrivé au bout du monde, parcourrir encore 3 kilomètres de glace salée, et enfin ne pas me faire tirer dessus par d'éventuels soldats américains en poste à la frontière, le tout dans un climat dont la température flirte entre les -35 et les -60°C.  Arriver à Petite Diomède, c'est marquer la victoire d'avoir atteint une des raretés du monde, fêter sans un mot sa présence dans un lieu aussi inutile que surchargé de symboles : la jonction entre l'Eurasie et l'Amérique, la route des espions au temps de la Guerre Froide, le lieu de transformation des Indiens en Amérindiens, il y a maintenant des millions d'années. Petit Diomède, c'est aussi et encore la nécessité d'avancer, de se coltiner encore la Mort sur 40km supplémentaires de mer de glace avant d'atteindre les rivages de l'Alaska et ses ours polaires.
Toute cette entreprise peut bien apparaître comme une lubie dénuée de sens. Après tout, le détroit de Bering, c'est bien ce truc casse-burnes qu'on doit apprendre à un moment au collège.  Pourtant, c'est pour moi le lieu de tout mes fantasmes les plus puissants. S'y rendre semble en apparence ne fournir aucun sens particulier. Je suis d'accord, il n'y aucun sens à cela. Le seul sens que j'y trouve est cependant la plus forte de toute les raisons:  je me dis que mourrir en traversant ce détroit serait un acte involontaire beau et sensé. Tout comme franchir ce lieu serait synonyme d'un accomplissement stupide mais profond, y laisser la vie serait un jeu qui en vaudrait la chandelle, la réalisation de l'être-là pour des temps imémoriaux, un corps flottant dans son rêve pour l'éternité. S'il est vrai que parfois l'idée de mourrir pour quelque chose, pour une cause, et non pas pour la réalité située de la mort, m'apparaît comme beaucoup plus souhaitable, l'inverse m'est tout autant envisageable. Je me dis souvent que mourrir pour défendre autrui, donner sa vie pour celle des autres aurait plus d'écho. Crever sur le front du Rojava, aux côtés des kurdes du YPG et YPJ irait sûrement plus dans le sens d'un apport de ma personne au monde, plus que du sentiment d'être-dans le monde. C'est d'ailleurs bien pour cela que tout mes fantasmes entourant Petite Diomède se forment avec l'idée de la réussite et de la survie, et non pas de la mort. Dans tout les cas, le désir de partir est toujours là, tapis dans l'ombre du quotidien, et il m'interroge beaucoup. Tout ces projets sont-ils la résultante d'une pulsion de fuite?  Le voyage ne serait-il pas au fond la concrétisation de mon abandon de la relation avec mes proches et amis ? Je me dis souvent que ces rêves de Grand Nord et d'Est lointain ne sont là que pour me faire oublier de façon constructive un manque cruel de volonté et de sociabilité dans ma personne. Le B.A.BA du solitaire et de sa solitude comme garde-fou face aux déceptions aux et angoisses de la vie en groupe. Pourtant je reste persuadé de la richesse et de la profondeur dégagée par qui m'entoure ; famille, amis, proches, amours. Mes relations me donnent la sensation de jouer au funambule entre une sur-empathie handicapante et une paradoxale inexistance pure et simple d'empathie. En somme, est-ce parce que je suis trop exposé à l'angoisse et au doute en me projetant avec mes proches que je finis par développer un mécanisme protecteur d'indifférence?  Suis-je au fond un enculé sans affects ou bien me contrains-je moi même à m'en battre les couilles de ceux qui m'accompagnent pour mieux me protéger ? Les réponses affleurent parfois des pentes raides et j'en viens à ne plus trop savoir que faire. Je découvre que je suis entouré d'amis à qui je n'ai jamais vraiment porté attention comme il se devrait, d'idylles amoureux partis dans le silence, et je ne parviens pas à entrevoir où se trouvent les angles morts de mon comportement. Ce qui au sens commun apparaît comme les pilliers de l'amitié -l'écoute, la compassion, la compréhension, la projection commune- me semble parfois n'être que de l'ordre de simple mécanismes de bienséance. Alors je ne sais plus trop, et l'envie de fuite me reprend. Je revois la casquette posée sur la table et m'envole pour ne plus encombrer mes proches de ma présence et de ne plus m'encombrer moi-même de cette culpabilité de ne pas réussir à donner un amour palpable. Peut-être est-il que j'aime mes proches de loin, et que crier leur nom au bout du monde est une façon invisible d'exprimer mon amour des choses et des gens.
Je n'ai pas de réponses, je sais simplement qu'il y aura des fuites et des retours, des amours au fil de la solitude et des rencontres, des silhouettes qui se perdent dans le vent, de morceaux d'âme qui s'envoleront sous les rafales du bout du Monde.
À Léna, qui elle aussi prendra un jour la route.
Mati
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