Mes lectures, des analyses, des commentairesCompte secondaire de @jules-and-company
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La Peste — Albert Camus
Je ne suis pas d’accord avec le parallèle fait entre cette histoire et la Seconde Guerre mondiale. Bien sûr qu’un livre est influencé par son temps ; il ne faut pas pour autant lui nier sa valeur d’universalité.
Pour moi, la peste, c’est la peur, tout simplement. Moi qui suis face aujourd’hui à un monde incertain, je crois sincèrement que la vraie peste, c’est la peur, la peur qu’on essaie de nous faire avoir. Et ce que Camus nous propose face à la peur qui prend, la peur qui fait peur, la peur qui tue, la peur qui fait mourir les autres à c��té de nous sans que nous levions la tête vers eux, c’est de continuer. Juste de continuer. Continuer à vivre, en s’accrochant à ce qu’on peut, continuer à faire son travail d’homme. Et par homme j’entends la généralité du terme ; trop de femmes, je crois, se pensent par habitude femmes et non pas hommes. Elles ont pourtant la même liberté d’esprit, malgré la société. Camus nous confronte à des personnages un peu figures, Rieux qui face à la perte, à l’absurdité de la vie humaine, continue de faire son travail avec la même détermination, Tarrou le pseudo-philosophe qui a le courage, Grand qui n’a consciemment rien de tout cela mais qui est tout aussi important, car il y a un devoir qui doit être fait et qu’il fait jusqu’au bout. Rambert est le plus humain de tous avec son désir de partir, de se libérer, mais qui reste finalement, car là aussi, il y a une souffrance commune, humanitaire, qu’il ne peut laisser derrière lui sans que la honte lui fasse un goût rance et fade dans la gorge. Dans mes heures, je pense à ce livre. Comme beaucoup d’écrits de Camus, il enseigne que l’homme se doit de donner lui-même un sens à sa vie, car personne ne peut le faire à sa place (Rieux/Rambert). Mais il y a pour moi quelque chose de plus clair, de plus évident dans ce livre. La Peste enseigne le courage de vivre.
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Qu’est-ce que l’Énéide ? Pour beaucoup, c’est un poème épique censé être un patchwork de L’Iliade et de L’Odyssée. Chose erronée, déjà.
L’Énéide est un poème épique, très poétique, mais aussi politique. Il faut bien voir dans cette continuation de l’histoire troyenne un lien mythologico-historique avec l’histoire romaine. On me répondra qu’Énée n’a pas fondé Rome ; je dis certes, on dit que son fils Ascagne/Iule a fondé Albe La Longue, l’équivalent de Milan capitale économique pour l’Italie. Mais il faut bien se dire que la filiation n’est pas seulement factuelle, c’est une filiation de valeurs qui est primordiale. Il faut voir chez les Latins la fierté future de Rome, et chez le héros Énée, le « pieux » Énée, un Octave-Auguste imparfait. L’histoire romaine est de toute façon entachée de violence, comme le montre l’histoire de la fondation de Rome qui n’est que violences, exactions, guerres et enlèvements ; le but ici est de donner une « guerre juste » à la mythologie romaine. Il y a là aussi une référence évidente et textuelle à la bataille d’Actium, grande victoire d’Auguste qui a grandement participé à légitimer son pouvoir.
Après avoir replacé le poème dans son contexte, qui permet tout de même d’avoir un niveau de lecture autre que la simple dimension narrative, on peut s’attaquer à cette dimension narrative, qui fait quand même tout l’intérêt de cette histoire. Comme toujours pour moi, il faut voir l’historicité des poèmes épiques avant de la jeter au feu le temps de la lecture pour voir la narration comme un roman actuel, c’est-à-dire une fictivité connue et partagée par l’auteur, un pacte de suspension du jugement. Autrement dit prendre des œuvres qui ont façonné nos traditions comme le dernier Goncourt.
La première chose qui marque le poème, à mon sens, est l’incroyable sensibilité de Virgile. Homère, bien sûr, en fait preuve, les derniers chants de l’Iliade (notamment le chant 24) sont déchirants d’humanité, le personnage d’Ulysse est constamment en recherche d’humanité également. Pourtant, il y a un autre ton chez Virgile, marqué je crois par toutes les larmes versées par les hommes (prenez ça les masculinistes). Une absence d’émotion montrerait une insensibilité qui enlèverait du même coup l’humanité aux hommes, selon l’acceptation virgilienne. Ce qui semble, à mon sens, d’une logique de caractérisation absolue, car les personnages de L’Énéide ont de quoi pleurer. Les deux personnages à retenir en priorité, et sur lesquels on doit s’arrêter dans la lecture, sont Énée et Turnus (dans une certaine mesure, Lavinia aussi).
Lavinia est un personnage similaire et en même temps dissemblable à Hélène de Sparte : elle est « la femme », l’objet de la discorde ; mais contrairement à Hélène, Lavinia est un personnage complètement effacé, presque sans volonté, ou en tout cas sans volonté propre représentée. Ursula Le Guin, je crois, a écrit sur elle. Peut-être est-elle encore plus jouet des dieux que Turnus ou Énée, qui bénéficient d’un semblant de libre arbitre ; elle passe tout, accepte tout, c’est, chez Virgile, un personnage de papier absolu. Donc fascinant.
Turnus est un personnage éminemment tragique. On se dit qu’il est dans son droit, de refuser l’entrée des Troyens dans son territoire, au nom du patriotisme. Mais c’est cela qui est intéressant : il n’était pas contre l’idée. À l’arrivée dans le Latium, Turnus ne voyait pas d’un mauvais œil les immigrés dardaniens. Leur laisser un lopin de terre ? Pourquoi pas ? Donner Lavinia à Énée ? Si les dieux font signe que ce doit être… Et après tout, Énée est un excellent parti. Pas de mauvais sentiments. Mais c’est la Furie Alecto qui va, dans une scène que je trouve affreuse, glaçante, percer Turnus de l’épée de la guerre. Dès lors, et jusqu’à l’instant de sa mort, il sera presque littéralement possédé par l’esprit de la guerre ; son jugement ne sera pas le sien, même si c’est bien lui qui prendra les décisions de « cuisine » du combat. Turnus, blessé, haletant, se sachant proche de la mort, se croyant abandonné de sa sœur divine, et de tous les dieux qui jusque-là lui avaient marqué son soutien, se retrouve seul face à Énée en furie, à genoux devant la lame. Alors pour la première fois depuis des semaines il a l’esprit clair, et se retrouve immédiatement confronté à la vacuité de son existence d’homme, dans le sens où il n’a eu aucun mot à dire sur son destin. Il était « le mal nécessaire » ; rôle éminemment intéressant d’un point de vue théorique, une torture sans nom d’un point de vue interne. D’ailleurs, je trouve que ce qui marque ses derniers instants, c’est une fatigue, une certaine résignation ; il ne demande que de recevoir des funérailles décentes. Et on ne sait vraiment si cela fut, si dans la mort, Turnus trouva un semblant de paix.
Ceci est, bien entendu, dû au personnage d’Énée. Je trouve son évolution fascinante. C’est quelqu’un qui est continuellement en deuil, et je pense que son parcours se ressent de ce deuil. Premièrement la perte : perte de Troie, de sa patrie par le meurtre glaçant de Priam par Néoptolème, de Créüse. Tout quitter, se faire prendre des soldats, des compatriotes, des amis par des querelles de dieux qui le dépassent, autant que la perte de Troie l’a dépassé. Renaissance d’un amour, avant de se le faire voler avec la même brutalité par les dieux, et cela finit encore plus mal : il sent une culpabilité dans la mort de Didon. Puis vient une espèce d’acceptation de tout cela après la descente aux Enfers avec la Sibylle. Pour moi, c’est une espèce de miroir du deuil. Incompréhension, sentiment de solitude cosmique, colère, impression de perte générale s’étendant à tous les paramètres de sa vie, puis résignation face à l’énigme de la mort. Même si on pourrait dire que l’acceptation d’Énée de son destin commence à la mort (glaçante, cruelle) de Palinure avant qu’ils n’accostent les terres de la Sibylle. Les dieux veulent tout me prendre ? Qu’ils prennent ! Je ne me battrais pas, je n’en ai pas la force. Énée est un personnage qui, consciemment ou pas, cherche à retrouver un contrôle. C’est ce que je comprends de la furie d’Énée lors de la bataille finale. « Heavy is the head that wears the crown », il y aurait du Banquo chez cet homme ; Énée se sent et est responsable de toutes ces vies sous son commandement et sa protection ; c’est évident avec le personnage de Pallas. Ce père, décrit textuellement comme aimant, voit comme une mauvaise vision ce visage de vingt ans si similaire à celui de son fils, et du même coup rejette et accepte sa mission divine : il sera impitoyable, il perd de sa nature propre ; il sera « pieux » dans le sens où il suivra les ordres des dieux, mais pour les hommes et peut-être pour lui-même, il sera semblable à Achille dans sa douleur, et c’est d’ailleurs ce qui fait le tableau final et qui pour moi résume le personnage d’Énée : il était prêt à assumer de nouveau son caractère, son humanité caractérisée par une grande douceur, une grande sensibilité, en laissant la vie sauve à Turnus vaincu ; mais il aperçoit le baudrier de Pallas sous l’armure de l’adversaire, et la dernière chose que Turnus voit est le regard écarquillé, enflammé d’Énée qui dans un sursaut de survie presque bestiale, se souvient que Turnus a tué un de ses petits et veut protéger le reste. Ce n’est ni plus ni moins qu’une exécution : mais involontaire pour les deux partis, d’une certaine manière.
L’Énéide est pour moi un must-read, car c’est d’une grande complexité, avec une genèse symbolique, et qui mériterait autant de publicité et d’adaptations que les poèmes d’Homère.
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Les plus attentifs d’entre vous auront remarqué la refonte de ce blog pour rendre hommage au personnage de Grantaire. Je loue votre perspicacité.
Et en effet, j’ai enfin trouvé LE roman, mon coup de cœur absolu et très probablement éternel : Les Misérables de Victor Hugo.
J’avoue, à ma grande honte, avoir vu l’adaptation de 2012 de Tom Hooper avant d’avoir lu le livre. Simultanément la meilleure et la pire adaptation de ce livre, soyons d’accord. Mais peu importe.
J’ai commencé cette énorme BRIQUE (édition pocket : environ 1635 pages) un peu sans trop savoir à quoi m’attendre en matière de narration. J’avais lu cinquante pages de Notre-Dame de Paris, et je savais que j’aimais la prose de Hugo. Sympathie immédiate pour Jean Valjean ; un chapitre pour le moins frappant, celui de l’ultime discussion entre l’abbé Myriel et le conventionnel Monsieur G., que je trouve incroyablement parlant même à deux siècles d’écart. Si j’avoue avoir sauté certains passages (sur les couvents, sur 1830, sur Waterloo, sur l’insurrection — sauf l’argot, ce livre-là, je m’en suis délecté), j’ai globalement lu page à page ce roman qu’on peut très aisément qualifier de roman fleuve. J’ai lâché beaucoup de larmes pour Fantine, pour petite Cosette, pour Éponine, et sur la fin, pour Jean Valjean. Ai pleuré toutes les larmes de mon corps pour les Amis de l’ABC.
Et finalement c’est ça, le vrai pouvoir de ce livre. Bien sûr, les habituelles descriptions de Hugo sont pleines d’un réalisme romantique qui vous représente en même temps l’exactitude d’un monument et son aura, souvent majestueuse. Bien sûr, les réflexions philosophiques, sociales, théologiques même de Hugo méritent qu’on les lise avec attention lors d’une première ou seconde lecture, car non seulement elles sont souvent en adéquation avec le bon sens et avec un sens de la justice aigu qui caractérise l’auteur, mais elles sont aussi d’une beauté stylistique à couper le souffle, des fois. Tout cela étant dit, le vrai pouvoir des Misérables, à mon sens, ce sont ses personnages.
Jamais Hugo ne verse dans l’unidimensionel : même Valjean, Myriel, Javert, qui semblent pourtant monochromes, ont des complexités profondes. Seuls les Amis et Gavroche peuvent apparaître un peu “simplistes” dans leur complexité dans le sens où on ne montre qu’une partie de leur caractère, mais je crois qu’il faut attribuer cela à leur nature de personnages secondaires. En cela, Grantaire (amour de ma vie vous le soupçonnez) est celui qui a le plus de côtés différents à sa personnalité, et connaît le plus d’évolution. Malgré cela ils sont tous terriblement attachants, et leur mort violente les rend d’autant plus dignes d’être aimés. D’où mon soutien indéfectible aux auteurs de fanfiction qui maintiennent mes amours en vie.
Mais typiquement, si je devais ne donner qu’une seule raison de lire Les Misérables, ce serait pour son message. En des temps où ma petite lorgnette observe un repli sur soi de nos sociétés, je crois qu’il est important de lire et de relire Hugo qui nous appelle non seulement à faire appel à notre compassion, à notre compréhension, à notre besoin d’aider plus malheureux que soi face aux misérables des temps modernes (qui n’ont pas vraiment changé de vie depuis la première publication de ce livre) ; mais qui nous appelle surtout à agir : Hugo ne fait pas que nous montrer la misère, il propose des solutions ; éduquez ; apportez la lumière de la connaissance, de la justesse et de la justice, de l’esprit critique, et l’humanité ne pourra s’en porter que mieux. Utopique ? Peut-être. Mais comme l’auteur le dit (ou un personnage ? je ne sais plus) : « Ce n’est pas parce qu’on va vers un idéal qu’il faut détruire le char » (ou à peu près).
Tschuss.
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Incroyable mais vrai, je peux faire une update de ce post !
J’ai vu, depuis, la version de 2021 mise en scène par Ivo Van Hove. Et je n’ai qu’un mot : wow.
Wow en effet, parce que tout est là : décor symbolique, personnages à plusieurs couches, innovation.
J’avais raison au sujet du carré blanc sur l’avant-scène : ça agit bien comme un ring où les personnages s’affrontent, et on met une emphase sur ce processus en demandant aux comédiens de se saluer mutuellement avant d’entrer sur le ring et de parler. Tout se concentre finalement sur ce carré blanc, le reste de la scène (qui a l’air mal finie) est composée d’espaces vides permettant un mouvement plus ample, et deux coursives pour que les acteurs apparaissent (leitmotiv dans les mises en scène de Van Hove, il y a une coursive dans Électre/Oreste et deux dans Les Damnés).
Parlons de Tartuffe en premier. On est terrifié une fois de plus par le jeu de Christophe Montenez, peut-être plus que dans E/O où il est victime plus qu’autre chose, et plus que dans Les Damnés où il est montré comme un pantin violent mais sans réelle volonté. Je maintiens ce que je disais sur son costume : on dirait un cadavre, et il nous met très mal à l’aise avec sa diction doucereuse. Je n’avais jamais vu un Tartuffe qui avait plus l’air de croire ce qu’il disait que lui. Relation très homoérotique avec Podalydès, et une référence peut-être à un gourou de culte ? Cérémonie bizarre pour « nettoyer les mauvaises ondes » d’Orgon à un moment.
Je précise à toutes fins utiles que Marina Hands, en plus d’être une professionnelle de grand talent, est incroyablement belle. Et le fait que son personnage est de mèche avec Tartuffe la rend tellement plus intéressante.
Attention spoilers : je me dois de vous dire que Van Hove a touché à la fin. Il posait des questions au public par l’écran en fond de scène, auxquelles le spectateur averti pensait pouvoir répondre avec le déroulé de la pièce. D’ailleurs je ne l’ai pas dit mais l’évacuation du personnage de Marianne ne change absolument rien et limite aère la pièce. À la fin, chose qui nous (mon ami et moi qui regardions) a mis sur le cul : Tartuffe gagne. Orgon, Valère et Cléante ont été évincés de la maison et ont l’air de clodos ; Mme Pernelle est morte entre temps dans une scène annexe ; Dorine est restée au service des nouveaux maîtres ; Tartuffe et Elmire, maîtres de la demeure, sont maintenant mariés et Elmire est enceinte jusqu’aux dents. Et rideau. Ça, j’avoue, je ne l’avais pas vu venir. Extrêmement intéressant.
Sur Tartuffe : adaptations
Commençons donc avec ce qui a le moins à voir avec la pièce, une version écourtée de la pièce, mise en scène par Maurice Béjart en 1981.
Casting : Cléante - Bernard Dhéran, Mme Pernelle - Catherine Samie, Orgon - Michel Aumont, Elmire - Geneviève Casile, Tartuffe - Michel Duchaussoy, Dorine - Virginie Pradal, Valère - Raymond Acquaviva, Damis - Guy Michel, Mariane - Marcelline Collard
Mise en scène classique, mais saupoudrée de Béjart (donc décors un peu spéciaux, maquillage très marqué pour les personnages doubles comme Tartuffe). Super performance de Michel Aumont, qui donne à voir un Orgon complètement hypnotisé par Tartuffe (et c’est là qu’@aramielles me dit que c’est normal d’être hypnotisé par le talent de Michel Duchaussoy). J’avoue que je n’arrivais pas à déterminer si Elmire était un peu intéressée par lui ou si elle était juste extrêmement saoulée (merci m’dame Casile). Une déclaration d’amour à l’acte III qui est désespérée comme je les aime. Oh nevermind ??? Elmire intéressée ??? OH MY GOD. Orgon qui s’agenouille devant Tartuffe et lui baise la main rien que pour lui dire bonjour. Béjart I love you. Imagerie chrétienne homoérotique, on apprécie. Globalement le Tartuffe de Duchaussoy est un bon petit connard manipulateur, il jette un regard méprisant sur Orgon à ses genoux, franchement une excellente pétasse qui sied bien pour le rôle.
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Deuxième version, celle de 1975, mise en scène de Jacques Charon.
Casting : Orgon - Jacques Charon, Robert Hirsch - Tartuffe, Jacques Toja - Cléante, Michel Duchaussoy - Monsieur Loyal, François Beaulieu - L’Exempt, Jean-Noël Sissia - Damis, Bernard Alane - Valère, Denise Gence - Mme Pernelle, Claude Winter - Elmire, Françoise Seigner - Dorine, Catherine Salviat - Mariane, Denise Pezzani - Flipote
Encore une mise en scène classique, on aime. Cet Orgon a l’air un peu con (spécialité de Charon). Tartuffe, coupe au bol absolument ridicule (la laideur comme laideur de l’âme ? C'est un lieu commun que je repère parfois dans Tartuffe, où un Tartuffe moche est souvent joué comme ridicule, alors qu’un Tartuffe qu’on embellit physiquement est joué comme plutôt charmeur). Légèrement précieux, doucereux, on est carrément dans la première façon de jouer le rôle, c’est-à-dire en gros cliché, et on ne comprend presque pas comment Orgon peut être à ce point aveugle pour ne pas voir qu’il est double. Il est aussi carrément graveleux lors de la déclaration d’amour, et franchement il m’évoque plus une espèce de cancrelat qu’on a envie d’écraser qu’un manipulateur de génie (super performance d’Hirsch cependant). Une Elmire magnifique (merci m’dame Winter) et oh ! Un François Beaulieu sauvage apparaît en fin de pièce pour faire L’Exempt.
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Troisième version, de 1960, mise en scène de Louis Seigner (encore une classique).
Casting : Tartuffe - Louis Seigner, André Falcon - Damis, Paul-Emile Deiber - Orgon, Louis Eymond - L’Exempt, Henri Rollan - Cléante, Jean-Louis Jemma - Valère, René Arrieu - Monsieur Loyal, Berthe Bovy - Mme Pernelle, Andrée de Chauveron - Dorine, Annie Ducaux - Elmire, Nagali de Vendeuil - Mariane, Janine Dehelly - Flipote
L’Orgon de Deiber a l’air un peu neurasthénique, sans avoir l’air con il n’a pas l’air complètement dépendant, ça me donne l’impression bizarre que cet Orgon aurait pu se défendre de tout s’il avait prêté un peu plus attention à ce qu’il se passe chez lui (même si Tartuffe, quand on l’accuse une première fois, use énormément d’ironie pour se qualifier de pécheur, et Orgon prend ça premier degré). Tartuffe-Seigner est parfaitement jouissif à regarder, mais on reste exactement dans le schéma classique d’un personnage ridicule. Succulente Elmire, drôle à souhait (merci Annie Ducaux). Bref, ici la bonne vieille pièce familiale, quoi.
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Quatrième version, de 1971, mise en scène de Marcel Cravenne (une autre mise en scène classique)
Casting : Michel Bouquet - Tartuffe, Delphine Seyrig - Elmire, Jacques Debary - Orgon, Luce Garcia-Ville - Dorine, Madeleine Clervanne - Mme Pernelle, Claude Giraud - Cléante, Edith Garnier - Mariane, Bernard Alane - Valère, Jacques Weber (ô surprise) - Damis, Paul Le Person - Monsieur Loyal, Robert Party - L’Exempt, Christine Chicoine - Flipote
C’est marrant, cet Orgon là a plus l’air amusé en début de pièce de Tartuffe, plutôt que de dépendre de lui. Quand on accuse Tartuffe, il réagit plutôt comme si on avait donné un coup de pied dans son chiot préféré. (grmrgmrmg le Cléante de Giraud. Cet homme me rend fou depuis Les Rois Maudits). Petiot Weber, il est pitchoune. Ah, Delphine Seyrig…La fée des lilas à jamais pour moi, mais quelle bonne Elmire (et quelle belle femme jésus seigneur). Un Tartuffe très intéressant, puisqu’il n’est pas ridicule car il n’a pas l’air faux lors de sa déclaration, il a juste l’air un peu dégueulasse ; mais surtout, il brise l’apparent fil rouge de l’interprétation de ce rôle en étant enlaidi par le costume et les postiches, mais en étant totalement manipulateur.
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Cinquième version, de 1980, mise en scène de Jean Pignol (encore et toujours une mise en scène classique)
Casting : Tartuffe - Michel Galabru, Orgon - Bernard Fresson, Elmire - Yolande Folliot, Dorine - Micheline Dax, Cléante - Pierre Gallon, Mme Pernelle - Germaine Delbat, Mariane - Nathalie Serrault, Valère - Eric Legrand, Damis - Jean-Renaud Garcia, Monsieur Loyal - Georges Montillier, L’Exempt - Pierre Negre, Laurent - Georges Sayad, Flipote - Sonia Laurent
Wow un opening directement sur la petite famille en train de prier avec Tartuffe ? Innovative ! On dirait que Tartuffe est d’abord le dealer d’Orgon parce qu’il est très, très calme au début. Ou alors il est homosexuel, au vu de la façon dont il dit “il venait d’un air doux tout vis-à-vis de moi se mettre à deux genoux”. Le Tartuffe de Galabru est bon mais grâce à l’acteur plutôt qu’au rôle lui-même, parce qu’il lui donne justement ce côté double et ridicule (les cheveux bien gras, on pourrait utiliser la moumoute comme friteuse). Opinion tout à fait personnelle, j’aime pas le jeu de Fresson . Et définitivement, Galabru joue beaucoup sur le côté dégueu et graveleux qu’on peut facilement donner à Tartuffe. Une version, ma foi, pas la meilleure, mais pas un échec non plus.
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Sixième version, de 1997 (retour au Français !), mise en scène de Georges Bensoussan (à quand autre chose qu’une mise en scène classique ?)
Casting : Dorine - Catherine Ferran, Orgon - Jean Dautremay, Mariane - Anne Kessler, Tartuffe - Philippe Torreton, Monsieur Loyal - Igor Tycska, Elmire - Cécile Brune, Mme Pernelle - Nathalie Nerval, Cléante - Christian Blanc, Valère - Olivier Dautrey, Damis - Eric Ruf, L’Exempt - Bruno Raffaelli, Flipote - Stéphanie Labbé, Laurent - Patrick Olivier
Décors blancs, un peu art contemporain, innovative ! Chaque costume est une couleur vive (sauf Tartuffe et Orgon, en noir, et Cléante, en marron), mais qui permet d’identifier immédiatement les personnages et surtout les fait ressortir sur le fond blanc. Jumpscare de Ruf avec une perruque absolument horrible. Aww, mini Anne Kessler, elle est pitchoune. Ô surprise, Ruf a un jeu décent ? (je le respecte en tant que metteur en scène, et je ne m’y connais pas assez en histoire du Français pour dire si c’est un bon administrateur, mais comme comédien…Il m’excusera mais je ne supporte pas son jeu). Je trouve qu’on revient à l’Orgon soit con, soit qui s’en fout un peu en début de pièce. Quoique, on pourrait dire que c’est un Orgon qui commence à développer un autre courant d’interprétation du personnage, celui de la dépendance affective forte (Tartuffe qui lui fait des petites caresses sur l’épaule ???). Dépendance affective de fou ou homosexualité cachée, c’est vous qui voyez. Torreton est jouissif, pétasse à souhait, ironique quand on l’accuse, au physique affreux avec sa perruque graisseuse (leitmotiv chez les costumiers ?). Chose intéressante, la confession de Tartuffe semble désespérée, mais elle est tellement teintée de fausseté qu’on n’y croit pas du tout. Cécile Brune (dieu quelle femme) fait une Elmire hautaine devant Tartuffe que j’A-DORE. Nouveau jumpscare de Ruf qui sort d’une fenêtre cachée haut dans le mur au lieu de sortir d’un cabinet. Bon dieu Cécile Brune, quelle femme, Elmire joue la carte séduction à fond pour l’acte IV. Tartuffe qui commence à se foutre à oilp ??? Ok why not. Costume très très très pailleté pour Tartuffe en fin de pièce. Écoutez, une mise en scène intéressante, des comédiens pas trop tartes, moi je dis que ça fait une bonne pièce.
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Septième version, de 2022, mise en scène Ivo van Hove (youpi ! une mise en scène moderne, histoire de changer un peu)
Casting : Cléante - Loïc Corbery, Orgon - Denis Podalydès, Mme Pernelle - Claude Mathieu, Damis - Julien Frison, Dorine - Dominique Blanc, Tartuffe - Christophe Montenez, Elmire - Marina Hands, Flipote - Héloïse Cholley, et pas de M. Loyal ou d’Exempt ni de Laurent, apparemment ?
Peut-on vraiment dire que je l’ai vue ? Non, je n’ai pas vu cette pièce au cinéma. Mais j’ai des photos et des extraits, de là je pose mon jugement. J’aime beaucoup les mises en scène de van Hove, qui sont souvent minimalistes et font ressortir tout le jeu des comédiens, aussi en posant une sorte de centre de scène où tout se passe. Les costumes noirs tranchent avec la pâleur des comédiens, et le carré blanc en plein milieu de la scène ressemble à un ring où les personnages s’affrontent. Autre lieu commun chez van Hove, on relève la brutalité et la violence et du texte et des personnages en eux-mêmes : tout le monde s’empoigne, se bat, se hurle dessus, c’est une famille complètement disloquée qu’on nous présente. Dominique Blanc en Dorine est parfaite. Corbery est un Cléante désillusionné, à la limite du désespéré de voir son beau-frère comme ça. Julien Frison, lui, campe un Damis qui semble moins furieux, plus un petit garçon qui voit son père s’éloigner de lui. Ma seule question est : comment envisagent-ils la pièce sans Mariane ? Est-elle juste citée ? Le moment très comique entre Orgon et Dorine serait simplement coupé ? Je n’aurais sûrement jamais la réponse, à moins que cette pièce vienne un jour sur le site de l’INA. Marina Hands est une Elmire qui floute complètement la ligne séparant deux interprétations : Elmire qui joue un rôle pour empêcher le mariage entre Tartuffe et Mariane et confondre Tartuffe à l’acte IV, ou une Elmire véritablement intéressée par Tartuffe. Une scène assez éloquente est visible dans la bande-annonce, qu’on peut replacer justement à l’acte IV, et Elmire ne semble pas beaucoup se défendre d’un Tartuffe qui lui embrasse la nuque. Mais les deux personnages les plus intéressants sont ici Orgon et Tartuffe. Pour Orgon, Podalydès joue complètement sur l’ambiguïté constante entre Tartuffe et Orgon : apparemment complètement dépendant affectif, le “il en va de ma vie” semble très vrai ; et certaines images donnent à penser que van Hove introduit dans sa mise en scène un certain homoérotisme malsain entre ces deux personnages (et encore de l’imagerie chrétienne mise au service de l’homoérotisme, merci m’sieur van Hove). Mais pour moi, le personnage le plus fascinant est Tartuffe (Christophe Montenez mon dieu quel talent incroyable). Si il est dans “le modèle Jouvet”, c’est-à-dire un Tartuffe charmant, séduisant même, et surtout très sincère dans sa déclaration à Elmire, et qui pense croire à tout ce qu’il dit sur le Ciel, Montenez a une approche différente du personnage. Il est malsain ; quand il rentre dans une pièce, on a comme un frisson de gêne : le costume (chemise blanche, cravate blanche, mais veste noire à certains moments), la coiffure (des cheveux coupés très ras) et le maquillage (qui lui donne une pâleur mortelle et un visage émacié) n’aident pas à nous le rendre sympathique. Le ton doucereux (méprisant lorsqu’il parle à Dorine) contribue à cette impression. Surtout, c’est un Tartuffe violent, qui arrive à l’Acte III la chemise tachée de sang, due à la mortification qu’il s’est imposé (en début de pièce, apparemment ? la bande-annonce ne permet pas de le situer). Bref, une mise en scène brutale et légèrement subversive, typique du metteur en scène, qui je crois serait très intéressante à voir.
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Je vous ai réservé ma mise en scène préférée pour la fin, huitième version, de 2021, théâtre à la table, direction artistique d’Eric Ruf (qui compte comme une mise en scène moderne ?)
Casting : Mme Pernelle - Claude Mathieu, Tartuffe - Eric Génovèse, Elmire - Clotilde de Bayser, Cléante - Hervé Pierre, Monsieur Loyal, Un Sergent, et L’Exempt - Nicolas Lormeau, Orgon - Didier Sandre, Damis - Laurent Lafitte, Dorine - Anna Cervinka, Mariane - Clémentine Billy, Valère - Antoine de Foucauld
C’est pas ma version préférée pour rien : la proximité de la table permet de transformer la pièce en huis clos, les vêtements des comédiens, sombres pour la plupart, permettent de relever leurs visages, et la caméra capture d’autant mieux leurs visages qu’elle est proche. Anna Cervinka est une Dorine hilarante qui tranche avec le sérieux des autres ; le Damis de Lafitte est très abrasif ; Cléante par Hervé Pierre use toujours d’un ton extrêmement raisonnable ; les deux petits jeunes sont un couple prometteur. Comme d’habitude, je me suis concentré sur les trois personnages centraux : Elmire, Orgon, Tartuffe. Didier Sandre, trônant en bout de table en patriarche, est un Orgon qui joue sur son âge pour apparaître peut-être plus fragile, qui s’il est moins dépendant que l’Orgon de Podalydès, lui semble extrêmement attaché ; sa colère à l’accusation de Tartuffe est assez violente. Elmire, elle, si elle n’est absolument pas intéressée par Tartuffe (madame moi je veux bien prendre votre place si vous ne voulez pas de lui), aime jouer la carte de la séduction pour parvenir à ses fins, et disons-le, Clotilde de Bayser est charmante. Et Tartuffe…Là encore, pas mon Tartuffe préféré pour rien. Eric Génovèse reprend un Tartuffe qu’il avait déjà joué de cette manière (je donnerai TOUT pour voir la mise en scène de 2005 de Marcel Bozonnet). Il est tout en douceur, la déclaration à Elmire est MAGNIFIQUE et DÉSESPÉRÉE comme il sait les faire, et il est totalement dans le modèle Jouvet d’un Tartuffe qui croit à 90% ce qu’il dit. Chose que je n’avais jamais vu faire avant, le “je tâte votre habit” et ce qui s’ensuit est joué comme une excuse en mousse, comme s’il n’avait vraiment pas fait exprès de poser la main sur le genou d’Elmire, et qu’il tente de rattraper une bourde faite dans l’émotion de l’instant. Tartuffe mis en opposition d’Orgon dans le placement autour de la table le pose en second maître de maison ; sa réponse à son accusation à l’air tellement sincère qu’on y croirait presque. Retournement de comportement à l’acte IV, regard de braise et scène un peu olé-olé (si sage comparée à la mise en scène de Bozonnet où lui et Florence Viala ont failli faire leur affaire sur scène) ; c’est un autre Tartuffe qui retire son masque, celui d’un homme extrêmement froid et calculateur. Bref, pour moi l’interprétation la plus intéressante (sans prendre en compte mon admiration personnelle pour ce comédien). Une pièce que je trouve “redécouverte” par le biais du théâtre à la table qui donne toujours un éclairage autre.
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Alcools — Guillaume Apollinaire
Aujourd’hui c’est un peu la tarte à la crème des programmes scolaires ; c’était l’année dernière ou il y a deux ans, je crois, que ce recueil était au bac de français. Alcools est devenu résolument classique, et tout le monde a déjà entendu au moins une fois entendu « Sous le Pont Mirabeau ». Pourtant, Alcools ne se réduit pas qu’à cela.
On oublie beaucoup qu’Apollinaire, c’est l’avant-garde des surréalistes des années 20-30, et que c’est d’ailleurs lui qui a trouvé l’expression « surréalisme », là où beaucoup d’autres voulaient s’appeler les « surnaturalistes » (plus long et plus chiant…). On oublie ou on ignore également que à rebours des surréalistes qui veulent disloquer complètement le sens des mots (dans l’absolu, finalement même les plus radicaux dans l’onirisme comme Robert Desnos jouaient plus qu’autre chose avec le sens ; les associations seulement sont inédites), Apollinaire allait à la BNF étudier des documents datant du Moyen-Âge pour le fun, et ça s’en ressent dans sa poésie. Les images apollinariennes relèvent souvent d’un mysticisme, d’un hermétisme parfois, mais on est encore un peu loin des associations d’idées de Desnos ou Éluard.
Et Alcools…bah, y’a pas à dire, c’est beau. Apollinaire est le spécialiste de l’amour malheureux, de la perte de repères, du sentiment de vagabondage dans la vie. À lire si on se sent un peu perdu. Il nous donne le sentiment d’avoir un compagnon de voyage, puisque même si beaucoup de poèmes sont dédiés à des amis, Apollinaire semble toujours résolument seul dans sa poésie. Hors du temps, hors de l’espace, et une relation distante et complexe avec le divin, celui que des universitaires ont déjà qualifié « d’éternel voyageur », Guillaume Apollinaire s’adresse à ceux qui se sont perdus, et qui s’attendent aussi, comme lui, à la terrasse d’un café par-delà le Rhin.
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De hiatus rerum
Un hiatus en effet.
Tentons donc de revenir sur les bases les plus élémentaires : je vais reprendre mes lectures depuis que je vous ai parlé de tartuffe (et y’en a plein), et allons moins dans l’universitaire et plus dans le jet de pensées véritable.
Peace ✌🏻
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Une très bonne pote de prépa à moi a rencontré Hervieu-Léger la demaine dernière : il lui a fait une dédicace et a pris une photo avec elle
mais c’est pas bientôt fini que les gens aient une chance de bâtard comme ça là ou bien
#tout ce que je peux dire moi c’est que j’ai vu le misanthrope irl#et que si la sncf fait pas chier 2000 je vais voir trois fois ulysse en avril#l’artiste (c’est moi)
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Sur Le Misanthrope : Adaptations
Une première mise en scène, datant de 1977, par Pierre Dux (classique)
Casting : Alceste - Georges Descrières, Oronte - Bernard Dheran, Philinte - Michel Duchaussoy, Dubois - Gérard Caillaud, Clitandre - Philippe Rondest, Acaste - Guy Michel, Arsinoé - Bérangère Dautun, Eliante - Dominique Constanza, Célimène - Béatrice Agenin
Costume tout noir pour Descrières, quelques rubans verts qui garnissent l’épaule ; il sera intéressant de noter comment chaque metteur en scène habille son Alceste. Chose étrange, la vue donnée par les fenêtres de chez Célimène ressemble à une vue d’un jardin de Versailles (carrément pas fait au hasard, on vous fait confiance m’sieur Dux). Ô diction naturelle d’un texte classique, mon amour ! J’ai l’impression d’entendre une vraie conversation, c’est magnifique. Un Alceste déjà bien énervé, dans les starting blocks dès le début (j’aime beaucoup le jeu de Descrières), mais qui a une certaine noblesse, une certaine majesté. Intéressant de voir que le costume de Philinte est le même que celui d’Alceste, mais son opposé complet en termes de couleur (rouge vif). On dirait que ce Philinte est le psy d’Alceste, c’est marrant. Psy un peu ferme, car le petit côté misanthrope de Philinte semble ici plus utilisé pour souligner les excès d’Alceste. Pour l’instant je vois l’amitié Alceste/Philinte like two old queens, c’est jouissif pour moi. Bon excusez-moi, les costumes masculins sont tous les mêmes, juste de couleur différentes et plus ou moins ornés. Un Oronte précieux et pétasse à souhait (excellent Bernard Dheran). Philinte qui donne des petits coups de tête approbateurs quand Alceste réussit l’interaction sociale, my autistic king. Potescore à la lecture du sonnet, vraiment mon moment préféré, eux qui se prennent le bec à voix basse mais dont la resting bitch face ressurgit immédiatement telles les fleurs au printemps. Philinte a l’air constamment atterré par son pote, je trouve ça hilarant. Une Célimène MAGNIFIQUE (Béatrice Agenin, quelle belle femme mon dieu), tout en noir, absolument charmante (et qui n’hésite pas à embrasser Alceste dans sa première apparition pour lui donner une preuve de son amour), très ironique, et médisante pétillante. Alceste l’aime, bon dieu, au début d’un amour grognon mais qui garde une certaine tendresse ; sa colère dans l’Acte III après la “trahison” de Célimène est bouillante, mais en sous-main, pas vraiment de grands éclats de voix, une rage plutôt contenue (malgré un poing qui aurait pu partir). Mais ils s’aiment quand même. La grande folle tout en rose c’est bien sûr Acaste (Guy Michel qui ne ménage aucun ridicule), et son acolyte en jaune poussin, Clitandre, plus soft (très bon Philippe Rondest). Eliante (jolie Dominique Constanza) semble prendre un peu après sa cousine dans le ton, mais reste mimi (par contre, un peu plus d’émotion que diable, à certains moments j’avais l’impression de voir jouer une carpe. Avec tout le respect que je lui dois.). Bérangère Dautun est une Arsinoé très méprisante, la voix posée, j’adore. All by myself joue bien fort dans ma tête à la dernière sortie de notre asocial préféré. Je retiens de cette pièce un Alceste assez désillusionné pour garder un certain calme, qui lui confère une aura noble, mais pas assez pour ne pas s’énerver de temps à autre.
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Deuxième version, de 1959, mise en scène (bien sûr classique) de Jean Kerchbron
Casting : Alceste - Renaud Mary, Philinte - Bernard Dheran, Oronte - Jean Le Poulain, Célimène - Françoise Christophe, Eliante - Evelyne Dandry, Acaste - Jacques Ciron, Clitandre - Alain Feydeau, Arsinoé - Malka Ribovska
Caméra qui est le point de vue d’Alceste ??? Innovative ! Surprise de retrouver l’Oronte de la version de 77 en Philinte. Diction pas très naturelle, pet peeve. Perruque ridicule pour Renaud Mary, mais c’est pas sa faute. Mise en scène hyper minimaliste, je suis surpris (agréablement je le concède). Turbopétasse de Le Poulain en Oronte, parfait. Je suis furieusement bisexuel pour la Célimène de Françoise Christophe, hautaine et au rire méprisant jouissif. Turbopétasses derechef avec Clitandre et Acaste, les années 60 n’étaient-elles donc faites que de cela ? Je suis également furieusement bisexuel pour l’Eliante d’Evelyne Dandry, Philinte je vais te piquer ta femme. Même Arsinoé (Malka Ribovska) est MAGNIFIQUE, un joli filon pour les fans de Molière lesbiennes. Dheran est super en Philinte tout doux, monsieur flirtez avec moi svp pour le 14 février. Une bonne vieille interprétation tout ce qu’il y a de plus classique.
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Troisième version, de 2000, mise en scène de Jean-Pierre Miquel (classico-moderne ?)
Casting : Arsinoé - Alberte Aveline, Oronte - Michel Favory, Eliante - Isabelle Gardien, Alceste - Denis Podalydès, Clitandre - Laurent d’Olce, Célimène - Clotilde de Bayser, Philinte - Laurent Natrella, Acaste - Christian Gonon, Le Garde / Dubois - Guillaume Gallienne
Wow, Podalydès avec les cheveux encore très très bruns. Un tout tout petit ruban vert en guise de collier, c’est un Alceste bien mélancolique, comme Podalydès sait faire ce genre de personnage. Je compare avec une autre version dont je parlerais après celle-ci, je sais, mais j’ai l’impression de voir la mise en scène d’Hervieu-Léger en moins bien, les personnages sont placés pareils et rient même parfois aux mêmes moments…Mais il manque la petite étincelle que donnent Corbery et Génovèse dans l’autre version. Non vraiment Podalydès est hyper calme en début de pièce, c’est très bizarre. Guys pick up the fucking pace, ça a pas l’air naturel ni dans l’esprit de la pièce, qu’est-ce que vous faites ??? Et bordel, Natrella, un peu d’émotion merde, j’ai l’impression de voir un ragondin à qui on a filé un texte et un costume de dentelle. Favory, pareil, le ridicule d’Oronte est où ??? Clotilde de Bayser à vingt ans MADAME je suis à vos genoux. Elle est belle, pétillante, souriante, drôle, bref, ma femme. Aussi, serait-ce un lieu commun de foutre Acaste et Clitandre en jaune poussin et rose pétant ? Alceste se réveille un peu à l’Acte II, merci, on attendait que ça. Un tout petit pitchoune Gallienne. Est-ce que c’est aussi un lieu commun de foutre Alceste enserrant de ses bras la taille de Célimène et poser la tête sur ses genoux ? (ça ne me dérange pas, les hommes désespérés on aime ça ici). Un Alceste bien cheum aussi, dont la déclaration “je voudrais qu’aucun ne vous trouvasses aimable” est assez creepy. Wow, Philinte qui fume (*transpose immédiatement ça avec Génovèse et décède promptement par excès de horniness*). Les costumes deviennent hyper sombres à la fin, pas mal. Et Célimène qui reste seule sur scène avant le tomber de rideau ? (dieu quelle femme magnifiquement belle.). Je me suis quand même assez emmerdé, la mise en scène aurait tellement pu être mieux mise en valeur, et les comédiens étaient pas trop au rendez-vous…
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Quatrième et dernière version, de 2019, mise en scène de Clément Hervieu-Léger (une moderne, pour changer)
Casting : Alceste - Loïc Corbery, Philinte - Eric Génovèse, Célimène - Adeline d’Hermy, Eliante - Jennifer Decker (mais j’ai aussi vu Claire de La Rue du Caën), Oronte - Serge Bagdassarian, Arsinoé - Florence Viala, Acaste - Christophe Montenez (mais j’ai aussi vu Clément Hervieu-Léger), Clitandre - Pierre Hancisse (mais j’ai aussi vu Birane Ba), Dubois - Gilles David (mais j’ai aussi vu Christian Gonon)
Comme d’hab je vous ai réservé ma version favorite pour la fin et…j’adore cette mise en scène. Depuis je fais totalement confiance à Hervieu-Léger en matière de direction artistique. Transposée dans un salon d’un appartement haussmannien en emménagement, la pièce reprend un peu de vigueur avec une mise en scène plus contemporaine. Des jeux de lumière, de musique de fond contribuent à l’ambiance et surtout rappellent que la pièce se déroule sur une journée. Mais ce sont d’abord les acteurs qui donnent un nouvel éclairage. C’est la seule fois jusqu’ici où j’ai vu la misanthropie d’Alceste traitée comme une véritable maladie, qui lui fait autant de mal qu’il en fait aux autres. C’est Loïc Corbery (pour moi, un des meilleurs acteurs de sa génération) qui porte cet Alceste blessé, à l’aura de chat mouillé, qui alterne périodes de calme ressentiment avec des explosions de colère stupéfiantes. Je compare avec la reprise de la pièce en 2023 (que j’ai vue hihihi), il a rendu son personnage plus calme par endroits, mais cela fait ressortir toute la violence de ses éclats. Philinte est campé par Eric Génovèse qui donne une douceur indicible à ce personnage ; qui garde cependant une bonne couche de rire devant Alceste et son ridicule, sans pour autant cesser d’agir comme un véritable ami (des petites attentions, l’aide à l’interaction sociale, sa présence presque constante auprès de lui, son inqui��tude pour lui, la scène du câlin…LA SCÈNE DU CÂLIN PUTAIN), sans oublier la petite touche de misanthropie inhérente au personnage (et qui le rend complexe). Mention reprise 2023 : il est plus abrasif, plus triste peut-être, plus misanthrope, mais ça relève encore plus les moments de douceur. Célimène (Adeline d’Hermy je vous AIME) est si belle, si pleine de vie, et amoureuse en plus…Le duo qu’elle forme avec Corbery (bouleversants dans l’Acte III) permet de nous rappeler en nous mettant un gros coup de couteau dans le cœur que leur amour restera impossible. Eliante est choupinette outre commune mesure, Philinte sans déconner un jour je vais te piquer ta femme (ou eux deux ? vive la bisexualité). Serge Bagdassarian est un Oronte jouissif par l’interprétation typique et personnelle qu’il donne de ce personnage ; même chose pour Florence Viala en Arsinoé particulièrement âpre ; Acaste et Clitandre, peu importe les interprètes, sont parfaits et confinent aux petits-maîtres quelquefois (même si Hervieu-Léger en Acaste a été la plus pétasse to have ever pétassed). Si les moments de comédie sont là, on oublie surtout pas de nous rappeler que c’est aussi une tragédie, et la fin de la pièce est tellement douce amère…Enfin bref, je pourrais passer des heures à parler de cette mise en scène là, mais mon compte principal est un assez vibrant témoin de mon admiration pour celle-ci.
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Le Misanthrope - Molière
Si j'ai parlé de Tartuffe, il fallait forcément que je parle de mon autre pièce préférée du répertoire de Molière. Peut-être une des pièces les plus complexes de notre dramaturge favori, tous les personnages ici semblent doubles dans leur façon d'être et de paraître.
Alceste, misanthrope plus qu'assumé, qui prend ses racines dans les plus vieux récits (on pourra penser à Timon d'Athènes), semble toujours sur le fil du rasoir de l'interprétation. Détestant les manières du beau monde, la politesse un peu fausse, l'hypocrisie journalière de la société, il enrage à chaque instant que les gens ne disent pas leur stricte vérité. Mais il y a une noblesse, une rectitude d'âme qui se montre dans ses critiques permanentes. Amoureux paradoxal, il aime Célimène, coquette parisienne, médisante, "donnant dans les mœurs du temps" ; son amour est jaloux au possible, parfois violent, possessif même, et il la voudrait pour lui seul, et que sa jeunesse et sa beauté cesse d'attirer tous les beaux gosses du coin.
Philinte, meilleur (seul ?) ami d'Alceste, fait figure de sage auprès de lui : toujours tout en retenue, tout en douceur, il s'accommode de la société dans laquelle il vit et "prend tout doucement les hommes comme ils sont", non sans méconnaître leurs vices. Pourtant, sa figure est elle aussi assez double, puisqu'il semble lui prendre quelques accès de misanthropie quand il concède à Alceste que les hommes sont imparfaits. Lui aime Eliante, cousine de Célimène, "sincère", plus discrète, qui si un temps elle s'intéresse à Alceste, lui préférera Philinte, un amant plus accordé à son caractère et qui surtout l'aime pour elle-même, et non pour tenter de rendre jalouse Célimène comme tentera de le faire plusieurs fois Alceste.
Derrière ce quatuor emblématique, une exposition des caractères ridicules au temps de Molière : Arsinoé, prude, dévote, qui cache le dépit de ne pas plaire aux hommes sous une couche de dévotion, "Tartuffe féminin" comme l'a dit Jacques Chupeau. Oronte, ridicule poète, est le parangon des faux gens d'esprit si souvent raillés par Molière (Les Femmes Savantes, par exemple). Les deux marquis, Acaste et Clitandre, s'ils ne sont pas les petits-maîtres qu'on retrouvera dans le théâtre de Marivaux, sont tout de même eux aussi des médisants, qui viennent chez Célimène (en plus de la draguer) pour cracher sur tout ce beau monde.
Pièce un peu toujours à double sens, personnages tout aussi troubles, la pièce qui au départ était jouée comme une comédie s'est peu à peu transformée en drame, celui d'un homme qui ne peut vivre en société à cause de son caractère, d'une société de faux semblants perpétuels, et d'un amour, s'il reste beau par certains aspects, impossible. Définitivement une de mes pièces préférées de notre cher Jean-Baptiste, dont je vais m'empresser de comparer les mises en scène pour observer l'évolution des rôles.
#évidemment que je vais finir par parler de la MES d'hervieu-léger#pas tous les jours qu'on peut dire qu'on la vue hehehe#le misanthrope#molière
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my French is awful but you reminded me how much Rimbaud means to me so I'll try to keep up
hey there ! i’m sorry, i don’t plan on using english on my posts here, but google translate could be your best friend to read me ramble about books
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Sur Tartuffe : adaptations
Commençons donc avec ce qui a le moins à voir avec la pièce, une version écourtée de la pièce, mise en scène par Maurice Béjart en 1981.
Casting : Cléante - Bernard Dhéran, Mme Pernelle - Catherine Samie, Orgon - Michel Aumont, Elmire - Geneviève Casile, Tartuffe - Michel Duchaussoy, Dorine - Virginie Pradal, Valère - Raymond Acquaviva, Damis - Guy Michel, Mariane - Marcelline Collard
Mise en scène classique, mais saupoudrée de Béjart (donc décors un peu spéciaux, maquillage très marqué pour les personnages doubles comme Tartuffe). Super performance de Michel Aumont, qui donne à voir un Orgon complètement hypnotisé par Tartuffe (et c’est là qu’@aramielles me dit que c’est normal d’être hypnotisé par le talent de Michel Duchaussoy). J’avoue que je n’arrivais pas à déterminer si Elmire était un peu intéressée par lui ou si elle était juste extrêmement saoulée (merci m’dame Casile). Une déclaration d’amour à l’acte III qui est désespérée comme je les aime. Oh nevermind ??? Elmire intéressée ??? OH MY GOD. Orgon qui s’agenouille devant Tartuffe et lui baise la main rien que pour lui dire bonjour. Béjart I love you. Imagerie chrétienne homoérotique, on apprécie. Globalement le Tartuffe de Duchaussoy est un bon petit connard manipulateur, il jette un regard méprisant sur Orgon à ses genoux, franchement une excellente pétasse qui sied bien pour le rôle.
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Deuxième version, celle de 1975, mise en scène de Jacques Charon.
Casting : Orgon - Jacques Charon, Robert Hirsch - Tartuffe, Jacques Toja - Cléante, Michel Duchaussoy - Monsieur Loyal, François Beaulieu - L’Exempt, Jean-Noël Sissia - Damis, Bernard Alane - Valère, Denise Gence - Mme Pernelle, Claude Winter - Elmire, Françoise Seigner - Dorine, Catherine Salviat - Mariane, Denise Pezzani - Flipote
Encore une mise en scène classique, on aime. Cet Orgon a l’air un peu con (spécialité de Charon). Tartuffe, coupe au bol absolument ridicule (la laideur comme laideur de l’âme ? C'est un lieu commun que je repère parfois dans Tartuffe, où un Tartuffe moche est souvent joué comme ridicule, alors qu’un Tartuffe qu’on embellit physiquement est joué comme plutôt charmeur). Légèrement précieux, doucereux, on est carrément dans la première façon de jouer le rôle, c’est-à-dire en gros cliché, et on ne comprend presque pas comment Orgon peut être à ce point aveugle pour ne pas voir qu’il est double. Il est aussi carrément graveleux lors de la déclaration d’amour, et franchement il m’évoque plus une espèce de cancrelat qu’on a envie d’écraser qu’un manipulateur de génie (super performance d’Hirsch cependant). Une Elmire magnifique (merci m’dame Winter) et oh ! Un François Beaulieu sauvage apparaît en fin de pièce pour faire L’Exempt.
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Troisième version, de 1960, mise en scène de Louis Seigner (encore une classique).
Casting : Tartuffe - Louis Seigner, André Falcon - Damis, Paul-Emile Deiber - Orgon, Louis Eymond - L’Exempt, Henri Rollan - Cléante, Jean-Louis Jemma - Valère, René Arrieu - Monsieur Loyal, Berthe Bovy - Mme Pernelle, Andrée de Chauveron - Dorine, Annie Ducaux - Elmire, Nagali de Vendeuil - Mariane, Janine Dehelly - Flipote
L’Orgon de Deiber a l’air un peu neurasthénique, sans avoir l’air con il n’a pas l’air complètement dépendant, ça me donne l’impression bizarre que cet Orgon aurait pu se défendre de tout s’il avait prêté un peu plus attention à ce qu’il se passe chez lui (même si Tartuffe, quand on l’accuse une première fois, use énormément d’ironie pour se qualifier de pécheur, et Orgon prend ça premier degré). Tartuffe-Seigner est parfaitement jouissif à regarder, mais on reste exactement dans le schéma classique d’un personnage ridicule. Succulente Elmire, drôle à souhait (merci Annie Ducaux). Bref, ici la bonne vieille pièce familiale, quoi.
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Quatrième version, de 1971, mise en scène de Marcel Cravenne (une autre mise en scène classique)
Casting : Michel Bouquet - Tartuffe, Delphine Seyrig - Elmire, Jacques Debary - Orgon, Luce Garcia-Ville - Dorine, Madeleine Clervanne - Mme Pernelle, Claude Giraud - Cléante, Edith Garnier - Mariane, Bernard Alane - Valère, Jacques Weber (ô surprise) - Damis, Paul Le Person - Monsieur Loyal, Robert Party - L’Exempt, Christine Chicoine - Flipote
C’est marrant, cet Orgon là a plus l’air amusé en début de pièce de Tartuffe, plutôt que de dépendre de lui. Quand on accuse Tartuffe, il réagit plutôt comme si on avait donné un coup de pied dans son chiot préféré. (grmrgmrmg le Cléante de Giraud. Cet homme me rend fou depuis Les Rois Maudits). Petiot Weber, il est pitchoune. Ah, Delphine Seyrig…La fée des lilas à jamais pour moi, mais quelle bonne Elmire (et quelle belle femme jésus seigneur). Un Tartuffe très intéressant, puisqu’il n’est pas ridicule car il n’a pas l’air faux lors de sa déclaration, il a juste l’air un peu dégueulasse ; mais surtout, il brise l’apparent fil rouge de l’interprétation de ce rôle en étant enlaidi par le costume et les postiches, mais en étant totalement manipulateur.
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Cinquième version, de 1980, mise en scène de Jean Pignol (encore et toujours une mise en scène classique)
Casting : Tartuffe - Michel Galabru, Orgon - Bernard Fresson, Elmire - Yolande Folliot, Dorine - Micheline Dax, Cléante - Pierre Gallon, Mme Pernelle - Germaine Delbat, Mariane - Nathalie Serrault, Valère - Eric Legrand, Damis - Jean-Renaud Garcia, Monsieur Loyal - Georges Montillier, L’Exempt - Pierre Negre, Laurent - Georges Sayad, Flipote - Sonia Laurent
Wow un opening directement sur la petite famille en train de prier avec Tartuffe ? Innovative ! On dirait que Tartuffe est d’abord le dealer d’Orgon parce qu’il est très, très calme au début. Ou alors il est homosexuel, au vu de la façon dont il dit “il venait d’un air doux tout vis-à-vis de moi se mettre à deux genoux”. Le Tartuffe de Galabru est bon mais grâce à l’acteur plutôt qu’au rôle lui-même, parce qu’il lui donne justement ce côté double et ridicule (les cheveux bien gras, on pourrait utiliser la moumoute comme friteuse). Opinion tout à fait personnelle, j’aime pas le jeu de Fresson . Et définitivement, Galabru joue beaucoup sur le côté dégueu et graveleux qu’on peut facilement donner à Tartuffe. Une version, ma foi, pas la meilleure, mais pas un échec non plus.
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Sixième version, de 1997 (retour au Français !), mise en scène de Georges Bensoussan (à quand autre chose qu’une mise en scène classique ?)
Casting : Dorine - Catherine Ferran, Orgon - Jean Dautremay, Mariane - Anne Kessler, Tartuffe - Philippe Torreton, Monsieur Loyal - Igor Tycska, Elmire - Cécile Brune, Mme Pernelle - Nathalie Nerval, Cléante - Christian Blanc, Valère - Olivier Dautrey, Damis - Eric Ruf, L’Exempt - Bruno Raffaelli, Flipote - Stéphanie Labbé, Laurent - Patrick Olivier
Décors blancs, un peu art contemporain, innovative ! Chaque costume est une couleur vive (sauf Tartuffe et Orgon, en noir, et Cléante, en marron), mais qui permet d’identifier immédiatement les personnages et surtout les fait ressortir sur le fond blanc. Jumpscare de Ruf avec une perruque absolument horrible. Aww, mini Anne Kessler, elle est pitchoune. Ô surprise, Ruf a un jeu décent ? (je le respecte en tant que metteur en scène, et je ne m’y connais pas assez en histoire du Français pour dire si c’est un bon administrateur, mais comme comédien…Il m’excusera mais je ne supporte pas son jeu). Je trouve qu’on revient à l’Orgon soit con, soit qui s’en fout un peu en début de pièce. Quoique, on pourrait dire que c’est un Orgon qui commence à développer un autre courant d’interprétation du personnage, celui de la dépendance affective forte (Tartuffe qui lui fait des petites caresses sur l’épaule ???). Dépendance affective de fou ou homosexualité cachée, c’est vous qui voyez. Torreton est jouissif, pétasse à souhait, ironique quand on l’accuse, au physique affreux avec sa perruque graisseuse (leitmotiv chez les costumiers ?). Chose intéressante, la confession de Tartuffe semble désespérée, mais elle est tellement teintée de fausseté qu’on n’y croit pas du tout. Cécile Brune (dieu quelle femme) fait une Elmire hautaine devant Tartuffe que j’A-DORE. Nouveau jumpscare de Ruf qui sort d’une fenêtre cachée haut dans le mur au lieu de sortir d’un cabinet. Bon dieu Cécile Brune, quelle femme, Elmire joue la carte séduction à fond pour l’acte IV. Tartuffe qui commence à se foutre à oilp ??? Ok why not. Costume très très très pailleté pour Tartuffe en fin de pièce. Écoutez, une mise en scène intéressante, des comédiens pas trop tartes, moi je dis que ça fait une bonne pièce.
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Septième version, de 2022, mise en scène Ivo van Hove (youpi ! une mise en scène moderne, histoire de changer un peu)
Casting : Cléante - Loïc Corbery, Orgon - Denis Podalydès, Mme Pernelle - Claude Mathieu, Damis - Julien Frison, Dorine - Dominique Blanc, Tartuffe - Christophe Montenez, Elmire - Marina Hands, Flipote - Héloïse Cholley, et pas de M. Loyal ou d’Exempt ni de Laurent, apparemment ?
Peut-on vraiment dire que je l’ai vue ? Non, je n’ai pas vu cette pièce au cinéma. Mais j’ai des photos et des extraits, de là je pose mon jugement. J’aime beaucoup les mises en scène de van Hove, qui sont souvent minimalistes et font ressortir tout le jeu des comédiens, aussi en posant une sorte de centre de scène où tout se passe. Les costumes noirs tranchent avec la pâleur des comédiens, et le carré blanc en plein milieu de la scène ressemble à un ring où les personnages s’affrontent. Autre lieu commun chez van Hove, on relève la brutalité et la violence et du texte et des personnages en eux-mêmes : tout le monde s’empoigne, se bat, se hurle dessus, c’est une famille complètement disloquée qu’on nous présente. Dominique Blanc en Dorine est parfaite. Corbery est un Cléante désillusionné, à la limite du désespéré de voir son beau-frère comme ça. Julien Frison, lui, campe un Damis qui semble moins furieux, plus un petit garçon qui voit son père s’éloigner de lui. Ma seule question est : comment envisagent-ils la pièce sans Mariane ? Est-elle juste citée ? Le moment très comique entre Orgon et Dorine serait simplement coupé ? Je n’aurais sûrement jamais la réponse, à moins que cette pièce vienne un jour sur le site de l’INA. Marina Hands est une Elmire qui floute complètement la ligne séparant deux interprétations : Elmire qui joue un rôle pour empêcher le mariage entre Tartuffe et Mariane et confondre Tartuffe à l’acte IV, ou une Elmire véritablement intéressée par Tartuffe. Une scène assez éloquente est visible dans la bande-annonce, qu’on peut replacer justement à l’acte IV, et Elmire ne semble pas beaucoup se défendre d’un Tartuffe qui lui embrasse la nuque. Mais les deux personnages les plus intéressants sont ici Orgon et Tartuffe. Pour Orgon, Podalydès joue complètement sur l’ambiguïté constante entre Tartuffe et Orgon : apparemment complètement dépendant affectif, le “il en va de ma vie” semble très vrai ; et certaines images donnent à penser que van Hove introduit dans sa mise en scène un certain homoérotisme malsain entre ces deux personnages (et encore de l’imagerie chrétienne mise au service de l’homoérotisme, merci m’sieur van Hove). Mais pour moi, le personnage le plus fascinant est Tartuffe (Christophe Montenez mon dieu quel talent incroyable). Si il est dans “le modèle Jouvet”, c’est-à-dire un Tartuffe charmant, séduisant même, et surtout très sincère dans sa déclaration à Elmire, et qui pense croire à tout ce qu’il dit sur le Ciel, Montenez a une approche différente du personnage. Il est malsain ; quand il rentre dans une pièce, on a comme un frisson de gêne : le costume (chemise blanche, cravate blanche, mais veste noire à certains moments), la coiffure (des cheveux coupés très ras) et le maquillage (qui lui donne une pâleur mortelle et un visage émacié) n’aident pas à nous le rendre sympathique. Le ton doucereux (méprisant lorsqu’il parle à Dorine) contribue à cette impression. Surtout, c’est un Tartuffe violent, qui arrive à l’Acte III la chemise tachée de sang, due à la mortification qu’il s’est imposé (en début de pièce, apparemment ? la bande-annonce ne permet pas de le situer). Bref, une mise en scène brutale et légèrement subversive, typique du metteur en scène, qui je crois serait très intéressante à voir.
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Je vous ai réservé ma mise en scène préférée pour la fin, huitième version, de 2021, théâtre à la table, direction artistique d’Eric Ruf (qui compte comme une mise en scène moderne ?)
Casting : Mme Pernelle - Claude Mathieu, Tartuffe - Eric Génovèse, Elmire - Clotilde de Bayser, Cléante - Hervé Pierre, Monsieur Loyal, Un Sergent, et L’Exempt - Nicolas Lormeau, Orgon - Didier Sandre, Damis - Laurent Lafitte, Dorine - Anna Cervinka, Mariane - Clémentine Billy, Valère - Antoine de Foucauld
C’est pas ma version préférée pour rien : la proximité de la table permet de transformer la pièce en huis clos, les vêtements des comédiens, sombres pour la plupart, permettent de relever leurs visages, et la caméra capture d’autant mieux leurs visages qu’elle est proche. Anna Cervinka est une Dorine hilarante qui tranche avec le sérieux des autres ; le Damis de Lafitte est très abrasif ; Cléante par Hervé Pierre use toujours d’un ton extrêmement raisonnable ; les deux petits jeunes sont un couple prometteur. Comme d’habitude, je me suis concentré sur les trois personnages centraux : Elmire, Orgon, Tartuffe. Didier Sandre, trônant en bout de table en patriarche, est un Orgon qui joue sur son âge pour apparaître peut-être plus fragile, qui s’il est moins dépendant que l’Orgon de Podalydès, lui semble extrêmement attaché ; sa colère à l’accusation de Tartuffe est assez violente. Elmire, elle, si elle n’est absolument pas intéressée par Tartuffe (madame moi je veux bien prendre votre place si vous ne voulez pas de lui), aime jouer la carte de la séduction pour parvenir à ses fins, et disons-le, Clotilde de Bayser est charmante. Et Tartuffe…Là encore, pas mon Tartuffe préféré pour rien. Eric Génovèse reprend un Tartuffe qu’il avait déjà joué de cette manière (je donnerai TOUT pour voir la mise en scène de 2005 de Marcel Bozonnet). Il est tout en douceur, la déclaration à Elmire est MAGNIFIQUE et DÉSESPÉRÉE comme il sait les faire, et il est totalement dans le modèle Jouvet d’un Tartuffe qui croit à 90% ce qu’il dit. Chose que je n’avais jamais vu faire avant, le “je tâte votre habit” et ce qui s’ensuit est joué comme une excuse en mousse, comme s’il n’avait vraiment pas fait exprès de poser la main sur le genou d’Elmire, et qu’il tente de rattraper une bourde faite dans l’émotion de l’instant. Tartuffe mis en opposition d’Orgon dans le placement autour de la table le pose en second maître de maison ; sa réponse à son accusation à l’air tellement sincère qu’on y croirait presque. Retournement de comportement à l’acte IV, regard de braise et scène un peu olé-olé (si sage comparée à la mise en scène de Bozonnet où lui et Florence Viala ont failli faire leur affaire sur scène) ; c’est un autre Tartuffe qui retire son masque, celui d’un homme extrêmement froid et calculateur. Bref, pour moi l’interprétation la plus intéressante (sans prendre en compte mon admiration personnelle pour ce comédien). Une pièce que je trouve “redécouverte” par le biais du théâtre à la table qui donne toujours un éclairage autre.
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Tartuffe - Molière
Ah là, Tartuffe ! LA pièce la plus controversée de notre cher Molière. L'histoire, subversive pour l'époque, nous semble assez banale aujourd'hui. Nous sommes dans une maison, parisienne sûrement, bourgeoise ; dans cette maison, une famille au bord de l'implosion (mots d'Eric Ruf, que je trouve assez justes).
Une belle-mère pour certains, une mère pour d'autres, une grand-mère pour la plupart, sort, furieuse. La raison de sa colère ? Sa famille n'est pas assez sainte. Madame Pernelle, vénérable ancêtre, trouve sa belle-fille Elmire trop dépensière ; Cléante, le frère d'Elmire, ne devrait pas vivre chez eux ; Damis, le fils d'Elmire, est sot ; Mariane, la fille d'Elmire, pourrait mal tourner ; Dorine, la suivante de Mariane, se mêle de tout. Le fils de Mme Pernelle, Orgon, est le seul qu'elle ne blâme pas, car il a accueilli "un saint homme" dans la maison.
Réunion de famille, plus personne ne supporte "cet odieux personnage" qui semble tout régenter au lieu du patriarche. Valère, un jeune homme, souhaite épouser Mariane, on le lui a promis, ils s'aiment. Seulement, Orgon veut renforcer la place qu'a prise Tartuffe dans la famille, et le marier à sa fille au lieu de Valère. Révolte de toutes parts, Dorine travaille dans leur sens.
Apparaît Tartuffe, qu'on a tant et tant décrit de manière peu flatteuse pour la plupart, qui commence par s'entretenir avec Elmire, qui elle souhaite le convaincre de convaincre Orgon de renoncer à lui donner Mariane. Il lui avoue ici ces sentiments (dans une des plus belles déclarations d'amour que j'ai jamais lues d'accord ?). Damis a tout entendu, essaye de le dénoncer à son père, mais Orgon ne le croit pas, et le ton monte au point que le fils est chassé de la maison et déshérité.
Elmire élabore un plan pour qu'Orgon comprenne enfin la duplicité de son prétendu ami. Caché sous une table, le père va assister à l'étalage du mensonge de Tartuffe : Orgon l'ayant fait son légataire universel, il possède la maison ; il veut Elmire en plus du reste. Le faux dévot révèle alors son vrai visage ; et il aurait presque pu gagner, si l'intervention légèrement deus ex machina du Roi ne l'envoyait pas en prison pour défaire tous les nœuds.
Si les personnages sont globalement fidèles à eux-mêmes, chacun ayant son bon rôle moliérien, la servante maligne, la fille et son amant, la femme inventive, le fils contre son père, le frère raisonnable, deux personnages semblent plus complexes. Orgon peut être représenté de deux façons, soit comme un vieillard qui ne sait plus trop ce qu'il fait et se voue complètement à Tartuffe par stupidité ou énorme manque de jugement ; soit comme un homme dont on complètement retourné le mode de pensée, qui devait avoir une blessure ou une fragilité antérieure dans laquelle Tartuffe s'est engouffrée.
Derrière tout ça, la figure dont on parle tant (et qu'on ne rencontre qu'à l'acte III!), Tartuffe. Menteur, manipulateur, faux dévot utilisant la religion pour servir ses intérêts et justifier tout et n'importe quoi auprès de ceux qui le croient. Figure aujourd'hui proverbiale de l'hypocrisie religieuse, il a fait beaucoup de bruit lors de la sortie de la pièce : le parti dévot, puissant sous Louis XIV, n'a pas supporté qu'on les moque ainsi. Les grenouilles de bénitier n'auraient-elles pas apprécié qu'on jette un pavé de vérité dans leur mare ? Toujours est-il que Tartuffe est ce personnage trouble, toujours dans une double énonciation. On le dit recueilli par Orgon, pauvre enguenillé, sûrement maigre comme un squelette. Fatale ironie du sort, Orgon le premier a fait preuve de charité chrétienne. Aujourd'hui apparemment indéboulonnable de sa chambre à l'étage, il est devenu celui qui murmure à l'oreille d'Orgon, son "maître à penser". Pour le chef de maison, Tartuffe est "son frère", un ami véritable, qui n'a que l'intérêt des autres en tête, c'est cette confiance aveugle qui le poussera à aller à l'encontre de tous les siens jusqu'à ce qu'on lui prouve longuement la duplicité de son protégé.
Mais impossible d'envisager le personnage de Tartuffe sans prendre en compte l'interprétation que le comédien en fait.
Alors bienvenue dans Télé-théâtre, histoire de comparer les différentes versions de ce rôle. (Tumblr étant ce qu'il est, les visionnages de ces différentes versions se feront en posts séparés, et taggés "tartuffe")
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Les élucubrations d'un homme soudain frappé par la grâce - Edouard Baer
On l'a tous aimé en tant qu'acteur, dans ses rôles plus ou moins comiques, mais le connaissez-vous en tant que dramaturge ? Son propre personnage, en tout cas, aurait voulu ne pas l'être. La pièce s'ouvre sur une fuite : Baer s'est enfui du théâtre où il devait jouer son propre spectacle ; mais, pris de panique au moment de monter sur scène, il vient se réfugier sur le plateau d'un spectacle imaginaire, Le Dernier Bar avant la fin du monde. Entrecoupant sa propre histoire d'hommages à Jean Rochefort, Charles Bukowski, André Malraux et autres grands noms, Baer alterne humour et réflexion sur la vie, comment la vit-on, avec quelles attentes, quelles désillusions...Loin d'être cet homme soudain frappé par la grâce, ces élucubrations sont plutôt celles d'un homme happé par la beauté des mots, qui se sent tout petit et presque illégitime de parler à son tour, au point de, dans la mise en scène, laisser place aux véritables voix de ces auteurs disparus.
"C'est le genre de matin où vous vous réveillez seul dans votre lit, vous trouvez qu'il y a une personne de trop..."
"On ne peut pas pousser un caddie à 13 heures et être Malraux à 20h30."
"Je pense qu'il a cherché où je jouais pour venir me signifier le fait qu'il était résolument opposé au principe même de mon existence."
"Oui, mais c'est très vague "moi", parce qu'il y a plein de "moi"."
"Non, je ne t'ai pas prévenu, c'est le principe de la fuite..."
"On ne laisse pas des camarades seuls au front. La vie, c'est le collectif. Y en a marre de cette société outrageusement individualiste. Ce que j'aime, c'est ça, la chaleur humaine, être un maillon de la chaîne. Ceux de l'ombre et ceux de la lumière, aucune différence, le même cœur qui bat, qu'on soit le porteur ou le porté !"
"Mais c'est trop tard, notre corps a décidé pour nous ; et puis un jour on repasse par hasard devant cette fenêtre, cet endroit qu'on a habité, ce qui fut nous. On se dit : "Tiens, j'ai été cette personne-là, j'ai habité là. Est-ce qu'à cette époque j'étais vraiment dans ma vie ? Est-ce que c'est maintenant ? Où est-ce que ça n'a toujours pas commencé?""
"Et puis on a 18 ans c'est un peu austère, on est étudiant, on n'a pas beaucoup de sous mais on tient parce qu'on se dit que grâce à ces sacrifices on va avoir un bon métier et là on va commencer notre vie...Et puis on a un métier, parfois c'est un peu monotone mais on tient parce qu'on a les week-ends, les vacances et on se dit "Un jour je serai toujours en vacances, je serai à la retraite et là je vais commencer ma vie"...Et puis on est à la retraite, on se fait un petit peu chier, mais on se dit "c'est pas grave parce que j'ai repéré une jolie petite place de cimetière et là...""
"Quand est-ce qu'on peut dire "Je suis dans ma vie" ? Quand est-ce qu'on réalise qu'on s'est trompé ? [...] Parfois c'est une sensation physique. Moi, un jour je suis rentré chez moi, et deux ans après, je me suis aperçu que ce n'était pas chez moi."
"Ou les après-midi d'été, vous marchez seul dans une rue silencieuse et brûlante...Toutes les fenêtres sont ouvertes pour laisser passer l'air. Et à un premier étage tout à coup vous entendez des rires, des chants, de la musique. On se dit "Mais moi j'habite là. C'est ma famille, c'est ma vie là", ou alors à la terrasse d'un café : vous êtes seul, vous vous sentez vieux, vous n'espérez plus rien et puis là tout à coup une femme passe...Une illumination...Et vous vous dites "C'est ma vie qui passe là !""
"Là je suis prêt. J'y retourne parce que c'est trop tard...Parce que ça ne sert plus à rien, parce que plus personne ne m'attend. J'y retourne sans espoir de bravos ou peur de crachats, de haie d'honneur ou de garde à vue. J'y retourne parce qu'il faut bien faire quelque chose entre sa naissance et sa mort, sinon c'est long la vie. J'y retourne comme un petit clin d'œil à moi-même, comme un défi perdu d'avance, le plaisir du geste inutile. J'y retourne..."
"Pourquoi t'aveugles-tu dans la certitude de l'instant alors que la vie est éternité ?"
On en retient que cette pièce est une ode à la beauté, à l'art, au pouvoir des mots. A lire absolument.
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Portrait de l'artiste en jeune homme
Tout livre a une introduction, alors il faut bien que ce blog ait un à propos.
Je documente ici mes lectures, mes avis, des extraits qui me touchent...Tout ce qui me vient lorsque je lis.
En soi, on pourrait dire que ce blog peut aussi être une introduction à la littérature, en tout cas à ma littérature, qui va du théâtre antique aux romans plus récents en passant par la poésie.
Mon seul but est d'avoir un petit coin pour blablater, et le voilà !
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