De l'or c'est ce qu'on cherche quand on part en voyage. Et quand on en trouve, il faut le dire à tout le monde C'est humain. Moi je suis allé en Mongolie et je pense que j'ai trouvé quelques pépites..
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Jour 24- Les dernières paroles du chercheur d’or en Mongolie
La Mongolie est un pays immense qu’on ne peut vraiment comprendre avant d’avoir visité sa capitale. Déjà parce qu’elle regroupe 1,5 million d’habitant, soit la moitié de la population du pays et puis parce qu’il y a tant de choses à voir, de trésors à chercher, que ce serait bête de rater ça. Oulan-Bator a un premier aspect peu accueillant : les 3 cheminées de la centrale à charbon n’aident en rien. Les premiers faubourgs témoignent d’une cité occidentalisée, pleine de fast-food, de gens bien habillés, plein de toute la mode occidentale que l’on espérait fuir ou ne pas fuir en arrivant ici. Certes ce n’est pas très grand, mais que c’est dense ! Il y a tant de choses à voir : des musées, des temples, des buildings, des monuments, des zoos, des rues, des ponts et des points de vue sur les collines alentours. Le temps nous manquera, c’est sûr. Le plus beau dans tout cela c’est l’enchevêtrement de tout ce méli-mélo architectural où le temple centenaire tutoie le gratte-ciel ; où des ruelles donnent sur des cours cachées entourées d’immeubles croulants ; où de vieilles maisons font face à des résidences de luxes à peine séparés par une rue étroite où un homme d’affaire, attaché case au bras, se presse au milieu des touristes, tout en dédaignant d’un regard de cocker malade le type endormi, ivre mort, sur le trottoir. Ce qui est pratique avec O-B c’est qu’il ne faut pas chercher longtemps pour trouver quelque chose de beau, quelque chose d’amusant ou d’intéressant.
Déjà parce que la présence soviétique est partout et que de se moquer des russes est encore à la mode en 2017 : dans les immeubles gigantesque en brique rouge, dans les statues monstrueuses de la grande place en l’honneur de Gengis Khan. Mais la présence asiatique est partout aussi (se moquer des asiatiques est risqué) : dans les voitures d’importation japonaises, dans les inscriptions chinoises sur les produits d’électroménager, dans les traductions en coréen. La présence occidentale aussi est partout, et là se moquer de soi-même c’est trop simple : dans les centres commerciaux effrayants qui pullulent le long de l’avenue de la Paix, dans cette façon idiote d’accueillir le touriste comme un étranger, comme si il était différent ; dans toutes les marques françaises qu’on s’étonne de trouver ici ; dans tout ce qu’il y a de plus occidental à l’occident, Oulan-Bator l’a déjà.
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Si on devait faire un plat avec O-B ce serait un gros paquet de riz gluant, enroulé dans une ignoble côte de bœuf, le tout arrosé de vodka bon marché. Ça a l’air dégueu non ? Pourtant c’est très bon. Et on en redemande même ! Oulan-Bator est incroyable. Incroyable d’une énergie dégagée par une population jeune et dynamique. Incroyable d’un patrimoine sublime incarné dans cet ahurissant Bouddha de Gandan qui nous impose ses 26 mètres de haut. Incroyable de sincérité, de vie, de curiosité, de scènes loufoques, de moments que l’on regarde hébété, de mots que l’on ne comprend pas et auxquels on répond « tsugei » comme pour ne pas vexer. Oulan-Bator est un éveil de chaque instant, un arbre en train de fleurir et que l’on dépose dans un jardin d’hiver en s’imaginant comment il sera beau quand sera venu le printemps.
Si O-B est à la confluence de l’Asie, de la Russie et de l’Europe, elle tend la main, par certain aspects à l’Afrique du Nord. Le premier d’entre eux : Naran Tuul. Littéralement : « Place Noire ». C’est un marché immense qui n’a de noir que son nom : il n’est ni illégal, ni dissimulé, il est juste tellement grand que j’imagine que les autorités mongoles ont du abandonner l’idée de savoir ce qui s’y passe vraiment. A défaut d’ordre publique, il règne entre les étalages un certain calme que l’on ne retrouve jamais dans le souk de Fès. Naran Tuul n’est pas un lieu de non droit, c’est un lieu de commerce, où tout se vend. Où l’on flâne, rêveur, aux milieux de tissu si décoré qu’on en perd la raison, aux milieux de tapis si large qu’il faudrait 10 hommes pour les porter. J’aime Naran Tuul, ici les gens sourient, ils ne cachent pas, au contraire, ils proposent.
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Mais, si jamais quelqu’un de votre entourage caressait le désir fugace de s’évader de son 20 mètres carré en taquinant sottement les pages du guide Michelin sur la Mongolie, dites-lui de s’arrêter un instant sur la page de l’ensemble Tumen Ekh. C’est une surprise que l’on ne peut rater. Ce qui semble de loin pour une nouvelle attraction pour touriste en manque de folklore est en fait un spectacle, d’une très grande qualité qui ferait pâlir de jalousie toute la descendance de Patrick Sébastien et toute la production de France 2 pour leur pseudo-cabaret morbide des samedis soirs tristes d’Octobre, où même le fossoyeur oublie son humour noir et son cynisme en regardant des sois disant artistes s’agiter béatement devant un parterre sois disant célèbre de radis et de radasse en manque de caméra. Au contraire de l’ennui laxatif provoqué par le plus grand cabaret, le plus petit cabaret du monde produit un effet euphorisant très puissant. Tumen Ekh c’est le feu, c’est le tambour du chaman, c’est la grâce des danseuses et de leurs mains de velours. Tumen Ekh c’est des performances humaines ahurissantes et surtout c’est de la culture. Enfin un peu de culture distillée à coup d’instrument rétro futuristes, de cries de joies et de sourires enjôleurs, de mouvement lestes et déposés. Tumen Ekh est un musée où on reste assis et où on applaudit à la fin. Alors que si vous applaudissez devant la Joconde vous allez passer pour un con. C’est le genre de témoignage vivant, heureux et surtout volontaire de la culture mongole qui me donne espoir. N’en déplaise aux violons larmoyants de Voyage en Terre Inconnue qui enterre les cultures comme on plante des navets, la culture nomade n’est pas morte, le chamanisme non plus et tout cela se mêle à la globalisation comme deux flammes qui se rencontre. Pour créer quelque chose de plus grand. La ville des héros rouges a les bras grands ouverts et elle est prête à ce qui l’attend.
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On la quitte en admirant une dernière fois, depuis la baie vitrée du Chinggis Khan International Airport, la steppe d’émeraude, comme un fil de rubis qui s’était rompu et que l’on retisse avec plaisir. A titre personnel, je considère le décollage de ce foutu Boeing 737 comme l’évènement le plus déchirant de ma brève existence. Dans le coucher de soleil qui s’est allumé à l’horizon j’aurais pu pleurer et noyer de larmes les souvenirs colorés de mon passage ici. Alors que la steppe devenait de plus en plus imperceptible dessous les nuages que le zinc maudit transperçaient, je me suis mis à chanter :
« Qui peut faire de la voile sans vent ?
Qui peut ramer sans rame ?
Et qui peut quitter son ami sans verser une larme ?
Je peux faire de la voile sans vent,
Je peux ramer sans ramer sans rame,
Mais ne peux quitter mon ami sans verser une larme. »
Les souvenirs étreignent nos gorges sèches. Tout cela parait si loin désormais. Les enfants, la steppe, Tsertserleg Sum. Et même la France nous parait loin : 20h de transit pour rentrer chez nous ! Alors où sommes-nous ? Nous sommes dans cet état où l’émotion parle à la place de la mémoire. Nous sommes dans ce moment merveilleux où un dernier rayon de soleil flambant vient sécher les larmes qu’on n’arrive pas à pleurer. Ca y est, nous sommes au-dessus des nuages. Il est trop tard désormais. Et même si il est trop tard désormais, j’aimerais dire merci, car il n’y a plus que ça, il me semble, à vous dire. Vous dire la tendresse et l’énergie des enfants : Sarnai, la grande Sarnai, Moogi, la grande Moogi : merci. Vous dire l’amour dans les yeux des gens qui nous ont accueillis: Surdwa, la prof d’anglais, le menuisier, Erdene Baat et sa camionnette, Puje, notre guide et notre maman et bien sûr Gumbayar et Gantselgel : merci. Vous dire une dernière fois que la steppe est jolie, qu’il faut être un chercheur d’or. Vous dire une dernière fois que la Mongolie est le plus beau pays du monde. Vous le dire.
Une toute dernière fois.
Le hurler. L’écrire. Puis le hurler encore ; comme un mensonge.
Et puis vite fermer ce carnet, avant que mes larmes ne coule.
#bonbahc'estladernièrehein#Hérosrouges#ulanbaatar#jehaislesretoursenavion#TumenEkh#Gandan#ThanksMongolia#Diary#Day24#<3
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Jour 22- Sauvages paysages.
La Mongolie c’est rude, ça je vous l’ai déjà dit. Mais vous ais-je dis à quel point c’était sauvage ? Les animaux sauvages sont légions, évidemment, mais à l’inverse de la France, ils sont rares. La tendance locale de mettre des coups de fusil à tout ce qui a 4 pattes a poussé les tendances génétiques des quadrupèdes indigènes à se tenir éloigné des bipèdes des steppes. Ainsi, voir un renard roux, 3 biches et plusieurs vautours est quelque chose d’exceptionnel. Les locaux sont verts quand on leurs racontent notre randonnée dans le massif de Kogno Khan. Ces montagnes sont d’une beauté rocailleuse, minérale et volcanique. D’une beauté claire et pure, qui coule d’une source orangée dont l’eau colore la pierre des falaises. Admirer ces montagnes est déjà une bonne chose. Essayer d’y grimper, c’est autre chose. La montée est abrupte, glissante, dure et risquée. Mais nous sommes en Mongolie, je vous le rappelle. Et à chaque peine suffit son trésor. Dans ces montagnes là il n’y aucun chemin, aucune voie tracée, par d’autres. Or pour monter il faut bien trouver sa voie. La sienne. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : d’une voie et non d’un chemin. Notre voie nous mène jusqu’à une grotte qui ouvre une faille vers les plus hauts rochers du sommet. Plus haut, pas si haut, on entend vrombir les ailes d’un vautour à l’envergure délirante mais déplumée. De notre perchoir, on a l’impression de voir le monde entier. Le soleil brulant, l’azur, la steppe infinie et les montagnes au loin qui se confondent entre elles dans un jeu d’ombre sur l’horizon. Et le gobi. Qui étire une langue jaune pâle comme un ruban de prière. La bande de sable et de dune s’étire jusque par-delà notre vision.
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Ci-dessus, exemple de beau paysage
Je dis Gobi, mais comprenez-moi bien. Gobi veut dire « steppe aride ». C’est juste un coin de steppe avec du sable, comme il y en a pas mal en Mongolie. Ce point de vocabulaire est superflu mais il permettra au commun des mortels de ramener sa science au prochain repas de famille.
« Saviez-vous ce qu’est un gobi, belle-maman ? »
Il est conseillé (en tout cas je vous le conseille) de partir de Kogno Khan en regardant derrière vous. De toute façon les gens qui claironnent « never look back » n’ont rien à faire ici.
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“Always look back”
Autre site à la nature si sauvage : Khustei. Khustei est la preuve que si elle était protégée et valorisée, la Mongolie serait un des exemples mondiaux en termes de lutte pour son environnement et son patrimoine. Khustei renferme à elle seule près de la moitié d’une espèce quasi éteinte : le cheval de Prevalski. C’est pourquoi il me faut absolument parler de cet animal. Hélas il n’y a vraiment rien à dire sur le cheval de Prevalski. Il n’a d’intérêt que sa rareté. Si au même repas de famille, vous voulez en dessiner un, il n’y a rien de plus facile. Prenez un mulet, allongez-lui la queue et rétrécissez les poils à la tondeuse, ensuite dessinez par-dessus un petit cheval gris et faites-le un peu plus gros que dans vos souvenirs. Vous aurez un cheval de Prevalski, plus vrai que nature.

Ci-dessus, exemple d’erreur de l’évolution des espèces: Darwin était un con.
On n’est pas habitué à voir autant de beauté sans en payer le prix. Et le prix c’est l’eau, celle qui tombe du ciel. Comme quoi on peut être mouillé et heureux. Tous ses trésors nous font oublier que dans quelques jours il n’y aura plus de trésors à chercher, plus de coffres à ouvrir, plus de terre à creuser. En France, il y a certes des beautés cachées, mais rarement des beautés aussi exotiques que celles qui peuplent ce pays. Je me demande ce soir, dans ma yourte pour touriste jamais contents, ce que je conserverais de ce voyage et de ma jolie morale toute faite du chercheur d’or. A vrai dire, l’ambiance de la Mongolie m’a tellement imprégné l’esprit que je suis incapable de penser à la France. Profiter devient une urgence. Braver la pluie une exigence. Vivre une évidence.
#wow#lechevalc'esttropgénial#Darwinétaituncon#ilfaitchaudilfaitbeaujeprendsl'airjeprendsl'eau#ilreste3joursputain!!!!#mongoliaiwillneverforget#diary#day22
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Jour 21: Camelus Bactrianus Sovieticus
Ce n’est pas un petit déjeuner qu’on nous a servi ce matin, c’est l’équivalent d’une mission humanitaire en Éthiopie pour 10 ans. Le luxe étouffe un peu, d’autant que la Mongolie le matin ce n’est pas ça. La Mongolie le matin, c’est les bortzik, la brioche frite, la confiture à la rhubarbe et le thé salé. Pas l’ignoble pâte à tartiner, le pain de mie et le café par dizaine de litre. Mais le luxe a du bon : je n’ai jamais aussi bien dormi. Et il faut avouer que j’ai le ventre plein. Erdene Bat démarre la camionnette : « ce n’est pas très loin » dit-il. En vérité ça n’est jamais très loin. Mais c’est souvent très long.
J’oublie ma rage des touristes de la veille et l’opulence des sources chaudes, dans la steppe d’émeraude. Il y a une règle mathématique qui fonctionne bien ici : rien multiplié par ce que tu veux, ça ne fait quand même rien à l’arrivée. Et la steppe ce n’est qu’un grand morceau de rien, couleur vert. On arrive à Caracorum, la première capitale de l’Empire mongol. Un haut lieu d’histoire. Un monastère et un musée plus loin, on ressort bouffi de savoir sur la vie de Gengis Khan et de sa descendance. Le monastère c’est Erdene Zuu : 108 stupa plantées en carré au milieu de la steppe. Erdene Zuu c’était surtout l’un des plus beaux monastères bouddhistes du monde. Je dis c’était, car les communistes ont détruit une bonne partie du site. Tout ça au nom de la laïcité. La laïcité au fond, c’est comme le plutonium, si on lui fout la paix, y’a peu de chance qu’ils se mettent à massacrer des millions de personnes. Je me demande, au fond, ce qu’il peut pousser quelqu’un à détruire quelque chose de beau. Surtout dans un pays où le beau est rare. La beauté est inviolable. La beauté nous dépasse tous et elle dépasse tout. La religion comme la politique. La beauté c’est elle qui nous a engendrés. Et elle s’est incarnée dans Erdene Zuu.
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On repart de Caracorum avec une promesse étrange : on va faire du chameau. Ici mon esprit littéraire et méthodique espère m’obliger à trouver une transition entre le puit d’histoire qu’est Caracorum et une ballade à chameau. En vain, je n’y arriverais pas. Une centaine de kilomètre plus loin, la steppe verdoyante se mue en une longue bande de sable aride, où l’herbe ne pousse plus. Dans cet environnement, le chameau de Bactriane a pris ses aises. Il n’y a rien à dire sur le chameau de Bactriane, c’est un chameau, deux bosses donc, des poils en plus. La ballade d’une heure à dos de chameau ressemble de loin à une simple attraction pour touriste. De près ça l’est encore plus. Ça n’a aucun intérêt, mais faut avouer qu’on n’en a pas l’occasion tous les jours. Le chameau est un animal docile, stupide et absolument inoffensif qui s’immobilise dès qu’on lâche sa bride. D’où ma question : Les chameaux auraient détruit Erdene Zuu si ils avaient étaient au pouvoir à la place des soviétiques ? Bien sûr que non ! Les chameaux sont nuls en dynamite, c’est bien connu.

Ci-dessus, exemple de chameau de Bactriane non soviétique.
Tadaa ! J’ai réussi ma transition. Je vais donc écourter cette chronique en posant une dernière question à laquelle, il me semble, j’ai la réponse.Si l’histoire avait été un brin plus clémente, si la steppe n’était pas jonchée de cadavre de bouteille de vodka et si les mongols valorisaient et protégeaient leur patrimoine, que serait la Mongolie ?
Réponse: sûrement un des plus beau pays du monde.
#unpaquetdecamelàrouler#niqueStaline#lerougec'estmoche#ErdeneZuu#Mongoliabestcountryintheworld#diary#jour21
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Jour 20- Trop de touristes à Tsertserleg.
Ce matin on est parti. Les mongols sont nuls en au revoir. Nuls, nuls, nuls. Enfin, ça tombe bien, moi aussi. Pas d’émotion superflue donc. Pas cette larme de trop qui fait vase communiquant avec celui qui se sent obliger de pleurer pour paraitre plus authentique. Rien de tout cela. Des adieux, plein de sourires. Tant mieux, c’est ce qui compte, n’est-ce pas ? On a quitté ce village comme on quitte une tempête : personne ne se rappelait plus y être entrée un jour. Y’avait eu des éclairs, on avait été bousculé, tordu dans tous les sens ; ça avait était beau, intense. On n’a pas toujours su où on foutait les pieds. Mais on était là, dans cette voiture, on était vivant, et plus grand désormais.
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Don’t cry for me Tsertserleg
Reste une semaine donc. Une semaine à vivre dans la peau du touriste. Ca on l’avait un peu oublié. Et ça nous est revenue en pleine face à midi quand on est arrivé à Tsertserleg. Une ville. Une vraie. Avec de vraies routes, de vrais immeubles, des hôpitaux, des bureaux de poste et tout le tremblement. La civilisation nous disait bonjour d’un grand coup de poing en pleine gueule. Et le pire avec la civilisation c’est les touristes. Et le pire avec les touristes c’est les français. Et le pire avec les français c’est qu’il parle tout le temps, et en français en plus ! Entendre des gens parler notre langue en dehors de nos bouches nous bouleverse. On suit Erdene Baat, le chef du village, jusqu’à un musée ethnographique. A peine le temps de s’émerveiller un peu devant les bâtiments et devant ce qui est exposé que l’on repart déjà. Mais à l’entrée c’est le drame. Nous les reconnaissons de loin. Bermuda beige, tee-shirt respirant quechua bleu turquoise. Et leurs yeux qui s’illuminent quand ils nous voient. On se bouche les oreilles, on se cache les yeux.
« Oh des scouts ! » Gémit l’une d’elle.
On l’ignore et on fonce. Direction un immense monument surplombant la ville. Genre vraiment énorme. Une centaine de marche mènent à un bouddha de plusieurs mètres de haut, une paume ouverte vers le haut, une autre vers le bas. Il y a aussi un moulin à prière et une cloche qui fait un bruit affreux. Et aussi un petit temple, fermé. Au-dessus, dans la falaise des petits malins ont fait des mosaïques représentant des divinités et des protecteurs du bouddhisme. Beaucoup de gens y montent, sauf que c’est dangereux, très dangereux. Puis nous n’avons pas le temps, Erdene Baat s’en va déjà et redescend les marches.

Exemple de “Big Fat Ass Bouddha”
Cette ville c’est Tsertserleg, capitale de l’Arkhangaï. Pas Tsertserleg Sum, ça c’est le village où nous étions, cette ville c’est Tsertserleg tout court et non pas Tsertserleg Khurt qui est plus à l’Est. J’espère que vous suivez, sinon ça risque de devenir compliqué. Nous avons un peu plus le temps de l’observer alors que nous repartons vers le sud. La ville c’est moche, ça a tous les travers de la campagne, les inégalités et la misère en plus, la beauté de la nature et les animaux en moins. Je ne reviendrais pas sur la posture du chercheur d’or. Il y a surement ici de tres belles choses à voir, des trésors à déterrer. Mais manifestement nous n’avons pas le temps. On remonte dans la camionnette. 1h30 de piste escarpée plus tard et on arrive au fond d’une vallée encaissée, presque alpestre. Il parait qu’il y a là des sources chaudes : YES ! Ici c’est le grand luxe et le contraste avec la rudesse du village nous frappe de plein fouet. On se prélasse dans les piscines d’eau chaudes, on nous sert à table, il y a l’électricité et l’eau courante. Ce serait un paradis sans les inévitables touristes qui hantent les lieux. Je ne les supporte pas. Et ils sont, en vérité, insupportables ! Le francais se plaint, l’allemand est aussi expressif qu’une planche, l’italien fait du bruit, l’espagnol ne se couche jamais, y’a même des américains ! Quelle plaie ! En fait, je préfèrerais ne pas les entendre, ne pas les voir. Et la France a vraiment les pires des touristes. Ca me fait mal de le dire : ils se plaignent tout le temps. De tout. Comme moi, qui me plaint des touristes ! Ils se plaignent de la route trop cabossée, des mongols trop introvertis, du personnel du camp qui ne parlent qu’anglais et mongol. Heureusement, ils se tiennent plus ou moins éloignés de nous. Enfin, j’arrive à faire abstraction. Le luxe dont nous jouissons est un délice : les matelas moelleux, les yourtes chauffées, les douches chaudes et les toilettes en dures sont des petits plaisirs qu’on réapprend à aimer. Nous nous endormons tôt, trop heureux de dormir dans de vrais lits. On laisse les autres touristes insipides à la découverte bruyante, suffisante et inutile d’un pays qu’ils ne sont pas prêt de comprendre.
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Jour 19- Considérations Equines
Derrière l’école 7 chevaux. J’ignore ce qu’il fiche ici. 2 noirs et 5 baies. Comment sont-ils arrivés là ? 2 mâles et 5 femelles. Ils semblent agités.
L’une d’entre elle semble être le chef. Elle gravite autour du groupe, elle surveille, elle protège, elle menace. Les 2 étalons suivent le moindre de ses mouvements.
En rut.
Leurs conduites est étrange. Ils restent tout le temps les uns sur les autres. Si le chef bouge, tout le monde bouge, en file indienne, la tête contre la croupe de celui de devant. Quand ils ne se déplacent pas, ils restent immobiles. Ils ne mangent pas l’herbe verte et grasse sous leurs sabots. Ils posent leur tête, avec un je ne sais quoi de mélancolique dans le regard, contre le flanc, la crinière ou le cou de celui d’à côté. On dirait qu’ils ont froid. Ou qu’ils ont peur. Moi qui ne suit pas un amoureux de ces bêtes là, ce comportement m’apparait soudain très humain, on dirait une famille. Oui c’est bien ça. Une famille.
L’arrière de l’école est un espace plutôt fermé mais perclus d’ouverture, d’issue, de sortie. C’est d’ailleurs ce qu’ils semblent chercher. Enfin pas tous. Mais ils en viennent à se battre !
« Je te dis que c’est à gauche !
- Et moi je te dis que c’est à droite !
- Toi et ta manie de ne jamais prendre de GPS
- J’aime pas qu’on me dise ce que j’ai à faire
- Bon ralenti, je vais demander le chemin au mec barbu assis là.
- Non, non. C’est bon on va se débrouiller. »
Et tout cela au milieu des ruades, des morsures et des hennissements. Encore une fois, comportement drôlement humain pour des animaux sauvages.
Les mongols qui passent les regardent de travers et moi, inactif, assis à côté d’eux, encore plus. Ils tentent de les chasser mais le groupe se heurte aux barrières de bois qu’il n’ose sauter. Il y a dans cet enfermement quelque chose de triste. Ces animaux enfermés dans cette prison, retiré à la libre immensité de la steppe, semblent tristes. Certains ont les yeux clos. J’aimerais bien leur montrer le chemin, mais je ne sais pas comment faire. Puis cela voudrait dire que je ne pourrais plus les observer comme je le fais maintenant. En 3 semaine, c’est la première qu’il m’est donné d’en voir de si près et aussi longtemps. Etrange que ce spectacle se déroule, là maintenant, à moins de 12 heures de mon départ. Je reste une heure durant à épier leurs comportements et puis ils finissent par disparaitre par le terrain de basket dans le fond. Ils contournent l’école par la droite. Erreur. C’est un cul de sac. Ils ne sont pas prêts d’en sortir. Peut-être que si ils arrêtaient de se battre et qu’ils cherchaient la sortie tous ensemble ils seraient plus vite dehors ? Je retournerai voir tout à l’heure s’ils sont partis.
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En tout cas je ne pourrais pas les aider éternellement. Demain, à 7 heures pétantes, c’est moi qui pars, c’est moi qui pars. Sauf que je n’en ai pas envie. C’est mal foutu la vie n’est-ce pas ? Parfois y’a pas de panneaux « sortie de secours » et parfois c’est le videur qui te sort. You can’t always get what you want. T’avais tout compris mon vieux Mick. Moi je voudrais être un cheval, pour pouvoir rester ici. Manger, chier, courir, dormir. Tout cela dans la steppe autour du village. Demain les 90 chevaux du break d’Erdene Baat nous emmèneront aux sources chaudes de l’Arkhangaï. D’ici là je me demande combien de cadeau, de surprises et de délices me réservent encore la Mongolie. Quand je rentre dans la chambre, Clément est à deux doigts de rendre ses œufs de la veille dans une bassine. Drôle de cadeau. Dieu merci mes intestins n’ont pas lâchés. A vrai dire, c’est un autre organe qui me fait défaut. Il est comme brisé. C’est le cœur. J’ai le cœur brisé.
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Jour 18- Détresse langagière d’un départ plus dur que prévu
[DISCLAIMER]
Cette chronique est un long tissu de déblatérations sentimentales que le nègre qui écrit cette chronique a préféré gardé. Je ne sait pas pourquoi. Y’a 0 image, pas de vidéo, y’a même un poème à la fin, c’est dire !
Nous ne comptons désormais plus les jours, nous comptons les heures. Avec une nostalgie toujours grandissante. Mais le phénomène le plus étrange est que je ne sais plus quoi écrire. Je n’ai plus envie de parler des oiseaux dans la cour de l’école, de l’ivresse et de la beauté de la steppe d’émeraude. Je suis en Mongolie, entouré des choses les plus belles et exotiques que je n’ai jamais vu et voilà que je n’ai plus envie d’écrire. Mes mots ne suffisent plus. Et cela, ma pauvre dame, c’est insupportable. Voilà que je prends mon stylo, mais « ah quoi bon, après tout… » Ce sentiment me terrifie. Comment dire merci ? Comment dire au revoir ? Pourquoi cette prise de conscience, cet attachement, maintenant, à 48h du départ ? Pourquoi pas avant, pourquoi pas pendant ? Partir pose beaucoup trop de question auxquelles on n’aura jamais de réponse. Quelle trace ais-je laisser ? Ais-je laisser une trace au moins ? Alors on se raccroche à l’idée que l’on se souviendra, de tout. Oui mais combien de temps ? Une question quand on n’y répond pas ça laisse un vide, mélancolique. Et l’impossibilité de mettre des mots sur ces sentiments rend la chose encore plus dure.
Il était exclu que je parle de moi, mais à l’heure actuelle je ne peux parler que de ça, et puis je trouve que mes ressentis trahissent bien l’attachement que nous avons eu avec les enfants du village. Un attachement que je n’aurais jamais cru si fort. Demain nous iront voir le soleil se lever, et puis on partira. Il reste encore une semaine. Ce n’est pas la fin. Mais c’est un départ quand même. Et même si l’humeur du moment est massacrante, je conserve, rescapés de ma mélancolie, le souvenir d’une certaine admiration pour les gens d’ici et une reconnaissance énorme. Une reconnaissance que 1001 « baerkla » ne saurait traduire.
Comme promis, le poème :
Il y a de ces moments où la bouche se coud.
Il n’y a plus rien à dire. Les mots c’est bien mais ça secoue.
On a du mal à réfléchir. On voudrait savoir comment
Dire merci et puis au revoir, joliment.
Est-ce que c’est possible au moins ?
Est-ce que ce je pense est à la hauteur de ce que je dis ?
Je voudrais juste sourire et tendre la main
Pour ne plus avoir à parler. Tout cela me terrifie.
Malgré l’épaisseur du dico, y’a pas un mot, pas un
Pas un assez juste, assez fort, assez puissant
Pour dire que la vie continuera demain
Mais qu’on sera plus là pour la vivre ensemble.
Je suis pas du genre à m’attacher
Mais voilà je serai prêt à m’arracher
Juste pour vous revoir une journée.
Je vous aime,
Et y’aura jamais assez de ligne à ce poème
Pour vous le prouver vraiment.
Alors je garde chacun de vos sourires comme les perles d’un diadème
Et chacune d’elle brille intensément.
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Jour 15- Lumières du soir : espoir
Ça sent la fin ! Plus que 4 jours à Tsertserleg Sum. Il y a dans nos cœurs une certaine nostalgie qui grandit à mesure que les jours s’égrainent. Nous n’avons pas tout vu et partir maintenant semble inconcevable. Parmi les choses que nous n’avons pas vu : un coucher de soleil. Cela fait 2 jours que nous essayons et 2 jours que le ciel mongol nous cache ce trésor derrière d’épais nuages. Nous ne renonçons pas et attendons le moment propice. J’ai déjà parlé il y a deux jours de la mentalité du chercheur d’or, le chercheur d’or doit avoir une patience à toute épreuve. Si nous voulons tant les voir, ces lumières du soir, c’est qu’elles sont magnifiques. Mais hélas ! Je ne saurai vous dire la magnificence du soleil qui se meurt au-dessus des montagnes. Je ne saurai-vous conter les couleurs sublimes qui illuminent des nuages à la blancheur virginale. Je ne saurai vous dire le bleu, à la fois profond et si clair ; je ne saurai vous dire ce violet qui confine au divin ; ce rose si éclatant qu’il éblouit nos âmes ; ce rouge si ardent qu’il brule nos cœurs ; cet orange si puissant qu’il égaye nos esprits. Et puis le jaune de la lune. Et puis le vert de la steppe. Et enfin le noir absolu de la nuit, si calme et silencieuse. Hélas non. Je ne peux encore vous le raconter. La lenteur faste de ces moments éternels, la richesse des couchants de cet orient si étrange. Ce cadeau du ciel, que la Mongolie fait attendre et qui darde sur Herohin, la montagne sacrée, une manne divine qui nous fait succomber.
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Mais nous gardons espoir, nous gardons la foi. Nous voulons revoir, une dernière fois, le Roi du ciel mourir, comme mourut Alexandre, sans un mot dire pour ne laisser que des cendres ; derrière son règne flambant, il laisse en partant, une toute dernière lumière, comme pour guider, comme pour lui tendre la main, comme pour lui dire à demain, il envoie ses émissaires colorés, jusque devant les yeux des hommes, juste pour les faire rêver, avant le grand somme. Dans le ciel de la nuit, il allume une étoile, qui brille à l’infini et tisse sa toile. Elle guidera les troupeaux, en leur montrant le Nord, elle gardera au chaud, tous ceux qui sont dehors. A l’ouest, la caravane magique continue son voyage, vers la Mer Baltique ou vers d’autres rivages. Et dans un dernier cri elle dit, à ceux qui veulent bien l’entendre : « Bonne nuit. Bonne nuit. Le phénix renait toujours de ses cendres, car demain quand vos yeux endormis, vous serez éblouis, vous verrez mon règne et puis ma décadence, vous verrez le ciel qui saigne, dans une dernière danse, vous verrez l’aube et le crépuscule, ces moments si éphémères qui se bousculent. » Au-dessus des sommets, on peut lire ce message et dans le ciel illuminé il luit comme un présage : « Je me couche pour mieux me lever, je ferme les yeux, les lumières du soir ne sont pas un adieu, ce sont l’espoir d’un au revoir. »
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Jour 13- Mongols, Lourdes et yourtes
Ça y est ! Je n’ai plus le temps d’écrire. La routine soutenue m’en empêche. J’ai la chance d’avoir un peu de temps devant moi pour écrire quelques lignes. Je ne suis pas au village, je suis à Murkar Khurjirt (lire Murrar Kurjirt). Ce site a quelque chose de rassurant par son universalité. Un village s’est monté au bord d’une source prétendument magique. Des gens de la Mongolie entière y viennent. Aux alentours les symboles et les édifices religieux pullulent. Vous l’aurez compris : nous sommes à Lourdes. Les bibelots souvenirs et les miracles en moins. Mais tout de même la similitude est géniale. La file des pèlerins attendant l’ablution ou de l’eau à boire. Sauf que là c’est en extérieur et que le débit est très fort. On dit ici qu’elle guérit les maux de tête, le stress et les maladies mentales. Freud n’aurait pas fait mieux, croyez moi. Les gens ici sont plus chaleureux, accueillant, curieux. Nous sympathisons avec la famille de la yourte d’à côté. Ah oui ! Nous avons passé notre première nuit sous une yourte. Une vraie.
Quand on pense à la Mongolie c’est ce qui nous vient en premier. Les croyances populaires autour de la yourte mongole sont souvent dépassées. Je me permets donc une explication un brin encyclopédique de l’habitat traditionnel mongol. La yourte est ronde, ça c’est admis. En forme de demi-boule, aplanie au-dessus pour laisser passer l’air et un tuyau de cheminée. A l’extérieur elle est habillée de peaux pour maintenir la chaleur et d’une bâche blanche ou grise en feutre pour l’imperméabilité. A l’intérieur l’espace est souvent plus grand que ce qu’il n’y parait. J’ai vu une dizaine de yourte dans mon voyage : cette description n’a donc pas valeur de généralisation. Je parlais y’a pas si longtemps que ça des dangers de l’ethnocentrisme : parler d’une chose que l’on connait si peu est aussi un écueil grave. J’aime bien le danger. Je me lance.
Exemple de “vraie” yourte mongole

Au fond de la yourte se trouve souvent un lit ou plusieurs, de chaque côté du lit on retrouve des rangements souvent joliment décorés. Les fines poutrelles qui servent à soutenir le toit sont aussi un espace de rangement très pratique : on coince simplement ce qu’on a à ranger entre la barre de bois et le toit. A gauche l’espace cuisine : une grande table, des rangements en dessous et un frigo dans le fond près du lit. A droite on voit souvent un autre lit, il peut y avoir un petit salon, un canapé, deux trois siège, une petite table peut être. Le centre de la yourte est sans conteste le plus joli. C’est là que les poutres du toit se rejoignent. Elles sont toutes retenues par deux piliers très bien décorés de motifs religieux, floraux ou guerriers. En dessous il y a le poêle à bois. L’élément essentiel de la yourte quand il fait - 40 pendant 4 mois de l’année. Au sol une bâche et des tapis par-dessus. Contrairement à ce qu’on pourrait croire la yourte mongole est non seulement ultrasolide mais elle est aussi un modèle d’isolation météorologique. Ni le vent, ni la pluie, ni la neige, ni le froid, ni le chaud, ni les chinois ne sont venus à bout des yourtes mongoles. Pour ceux qui se poserait la question : il faut une journée pour monter une yourte quand on est plusieurs. Ceux qui s’y connaisse un peu et les autres, ceux qui ont vu au moins une fois Voyage En Terre Inconnue, savent que la tradition veut que l’on se déplace de droite à gauche dans une yourte. Sachez que cette tradition n’est pas respectée. On n’enlève pas ses chaussures en entrant, même quand on vient de laver par terre. On ne rote pas à table. On dit bonjour en rentrant, au revoir en sortant. Et c’est tout. La yourte n’est pas un espace régulée par des règles ancestrales qui mouille le groin de la ménagère qui regarde Fréderic Lopez faire le débile chez les mongoles comme pour se sentir un peu plus mongole elle aussi, ou plus débile. De toute façon le mongols n’aime pas les règles, il n’aime pas non plus la routine, ni les conventions et encore moins les choux de Bruxelles. Il est imprévisible, ne fait jamais deux fois la même chose de la même manière et il suit une logique qui parait absurde même après plusieurs années de vies en leurs compagnies. Tout cela relève vous me direz de l’exception culturelle, du folklore, de leur identité, tout ce que l’on recherche quand on se tape 20 heures de transit aérien. Le problème est pour celui qui tente de s’organiser ici. Établir un planning 24h à l’avance est peine perdue : le mongol aura changé 10 fois d’avis entre temps. Si il était scientifiquement avéré que les provençaux ont toujours un quart d’heure de retard, le mongol lui a un retard qui dépasse les limites du raisonnable. Malgré tout cela, la promesse mongole vaut de l’or et on peut compter sur eux avec une confiance aveugle. Si un mongol vous a sa charge il ne vous laissera pas tomber.
Enfaite c’est comme partout ici, il faut creuser dans les terres les plus arides pour trouver de l’eau, comme il faut creuser dans les visages les plus froids pour trouver la chaleur un sourire. La Mongolie recèle de trésors cachés, il faut alors être un chercheur d’or, fouiller chaque rivière, relever chaque rocher, sourire à chaque visage, et puis ouvrir ses sens. La Mongolie vous apparaitra alors un éden puant, rude et austère ; mais un éden quand même.
Ci dessous, exemple de “vraies” mongoles (et super sympas qui plus est)

NDLR : Le nègre que j’engage pour écrire cette chronique vous recommande de baisser la tête en rentrant dans une yourte, ça vous évitera un bon mal de crane et aussi de passer pour un gros touriste.
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Jour 10 – Sale temps, joli vent ; poil aux dents
L’important retard pris dans le déroulé de cette chronique m’oblige à écrire beaucoup aujourd’hui. Tant pis pour vous. Ça tombe bien. Il pleut aujourd’hui. Voilà trois jours que le ciel sombre et le vent menaçaient, fallait bien que ça tombe. Ce n’est pas si mal, l’aridité de la semaine passée pesait franchement, fallait bien que ça s’arrête. C’est frais, réjouissant, même si on est bloqué à l’intérieur de l’internat. Les mongols n’ont pas l’air spécialement ravi. Ils ont même l’air d’en avoir franchement peur. Et le tonnerre n’en parlons pas ! Ils ont l’air d’enfants apeurés devant le ciel zébré. Pourtant, ils pourraient considérer ça comme quelque chose de positif pour leurs terres sèches où rien ne pousse. Non, au lieu de ça, il la fuie. La logique est un mot que nous remettons en cause à chaque instant.
Hier nous sommes allés pécher. 70 kilomètres au Sud-Ouest d’ici car c’est à peu près la distance minimale à faire pour trouver une rivière digne de ce nom. Sorti de son village, le Mongol a une fascinante tendance à s’ouvrir et à sourire. La rivière nous offre 4 beaux poissons et une belle journée dans une vallée aux falaises rouges et à la végétation plus fournie. Le trajet du retour sous la pluie et dans la nuit s’avéra enfaite l’étape la plus inoubliable de la journée. Le chemin du retour empruntait une voie à l’à-pic d’un précipice. La route est penchée, détrempée, montante. Le moteur est à bout de souffle : 3500 tours-minutes, à peine 5 kilomètres/heures. Les yeux de la prof d’anglais sont voilés par ce filtre gris de l’inquiétude. Son mari se concentre sur le volant. Je ferme les yeux.

Afin de conserver l’effet de suspens encore un instant, voiçi Gunbayar avec un des poissons péchés ce jour là.
On est passé, ne vous inquiétez pas. Aujourd’hui les rues sont vides, les enfants ne sont presque pas venus aux cours ce matin. Les nuages à l’horizon sont toujours aussi gris, le vent toujours aussi fort rend l’atmosphère encore plus glaçante. Si la pluie mongole s’apparente facilement à la pluie française, tchécoslovaque, où à celle qui mouillait Brassens quand il chantait ses chansons ; le vent ici est très taquin, encore plus que dans la chanson du vieux Georges. En 24h, il peut changer 3 à 4 fois de direction. Le vent d’Ouest est le plus dur, il apporte les nuages. Le vent d’Est a tendance à éclaircir le ciel. Le vent de Sud est le plus violent mais aussi le plus rare. Le vent de Nord, qui débaroule tout droit de la Sibérie, est glacial. Enfaite il y a toujours du vent. Même dans les journées les plus calmes, les papiers plastiques balancés par les fenêtres des voitures s’envolent dans le baiser d’une brise. Parfois, il est presque impossible de marcher face à lui.
Malgré tous ces caprices météorologiques de ce pays à la rudesse inimaginable, le mongol, à défaut de sortir de chez lui, garde le sourire. Je ne sais si c’est culturel, traditionnel ou juste génétique, mais le mongol s’y connait en blague. Mais attention ! Pas la blague qui fait rire délicatement dans un salon couvert de velours et des politesses incontrôlées des bourgeois vulgaires. Non, la bonne vieille blague. Celle qui fait rire franchement. Il y a les gaffes d’abord, du gamin qui fait semblant de vous viser avec son lance-pierre. Puis les blagues au téléphone (comptez une blague tous les deux jours), les farces, les pièges, les ragots, les calembours, les plaisanteries. Toujours du plus mauvais goût possible. Toujours avec le même humour gras, aussi gras que la viande qu’ils mangent. En un mot : c’est beauf. Et je n’ai aucun remords, ni aucun scrupule à utiliser un mot aussi peu scientifique et intellectuel pour qualifier l’humour du mongol.

Ci dessus: “exemple d’un mongol riant.”
Je vois venir au loin les humanistes acharnés des combats inutiles, tous ceux-là qui répondent par la relativité culturelle à n’importe quelle forme de jugement, en gros le premier croquant standard qui aura lu « Races et Histoires » de Levi-Strauss, comme on lirait la Bible en se disant « Dis donc ce Jésus a vraiment tout compris ! ». Ces considérations ne sont que celles d’un petit européen élevé avec Desproges, Aragon et Coluche. Quel droit ais-je alors pour juger l’humour d’une civilisation ? De quel droit alors me sentirais-je supérieur juste parce que les blagues de ma civilisation sont meilleures que celle des autres ? Suis-je vraiment ce colonialiste ethno-excentrique qui ne voit que dans ces gens des êtres barbares sans humour ? Ha non ! Je ne m’y risquerais pas.
Mais, entre nous, l’humour mongol est nul. Et je vous parle pas de la météo !
Ci-dessous: “exemple de blague mongole”
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Jour 7- Du bruit, du bruit et du silence
Une semaine. Une semaine qui parait un mois. Le temps ici s’allonge inexorablement au fur et à mesure que le mercure grimpe. La chaleur empêche tout travail avant 19h. Les après-midi se font longues. Très longues. Il ne nous reste plus qu’à jouer avec les enfants du village. Leur énergie nous avait marqué dès le début, à présent c’est le bruit. L’enfant mongol a une prodigieuse capacité à faire du bruit, tout le temps, partout, pour n’importe quelle raison. Un point au volley, une nouvelle à annoncer, avant un jeu, pendant le jeu, après un jeu, l’enfant mongol crie, hurle, gémit, piaille de tout part. Pourtant ils ne pleurent jamais, à part pour attirer l’attention. Le gymnase, lieu infernal de réverbération sonore, peut alors devenir un supplice ; surtout si un des gosses a ramené un sifflet… Il me prend des envies de smash en pleine face que je refrène difficilement. Les cours d’anglais sont aussi un supplice. A chaque question, la trentaine de gamin répondent tous en même temps et le plus fort possible. Peut-être que chez eux ils ne peuvent pas faire de bruit ? J’ai remarqué que les mongols sont plutôt calmes dans leurs propres maisons.
Une fois dehors la cacophonie enfantine laisse place à un tout autre brouhaha : celui des oiseaux. Ils sont légions autour de l’école : moineaux, corneilles, pigeons, corbeaux, canards, oies et le pire de tous : la chouca. Cette espèce de volatile est à mi-chemin entre la mouette, la pie et le gypaète casse-couille. L’ignoble volatile a élu domicile derrière l’école. Elles s’y rassemblent toute la journée pour piaffer, geindre et emmerder celui qui venait là pour avoir un peu de calme. Son vol est hasardeux, limite casse-gueule, son plumage hideux et nauséabond et si l’on se rapporte à son ramage, la chouca est loin d’être le Phoenix des hôtes de ce bois. On notera tout de même l’habileté de la chouca à éviter les pierres qu’on lui lance.

Aux côtés de ces pollueurs sonores évoluant en bande organisé, on retrouve un oiseau bien plus discret et élégant : la huppe. Plus petit que la chouca, son chant est rare et délicat, elle se déplace souvent seule. Son plumage est délicieux et son vol est un régal pour le susnommé ci-avant qui était venu là pour avoir un peu de calme loin des tornades pré-pubères. La huppe est au ciel mongol ce qu’est une potatoes dans une portion de frite, c’est-à-dire une colombe dans un vol de geai. La Mongolie est ainsi faite : au milieu des touffes séchées se trouve de jolies fleurs.
La poésie et la beauté sont partout, à condition de savoir les trouver et d’être suffisamment patient et attentif pour ouïr, dans les lumières splendides du soir, un silence bienvenue qui vous serre le cœur et la poitrine d’une larme de joie discrète qui s’écrase sans fin au-dessus de la steppe d’émeraude, tandis que, là-haut, le soleil éclate des rayons oranges et mauves à faire pâlir les Botticelli de bas-étages. A peine troublé du brame débile d’un yack ruminant sa solitude, le soir mongol est le plus beau. Je parlerais plus tard des couchers de soleil. Le mongol à l’extrême sagesse de conserver à la nuit sa silencieuse chasteté : le royaume de la lune devient alors un moment de grâce et de repos où les 1001 étoiles du mois de Juillet allume des formes magnifiques pour ceux qui ne sont pas trop ivres pour les confondre entre elles. L’arrière de l’école devient un éden reposant et bienfaiteur où nul chiard ne vient hurler son envie maladive de volleyball, où nul piaf honni de la beauté de dame nature ne vient faire entendre son cri désespéré d’être décérébrés. La nuit, la steppe se tait. Si le vent se calme tout à fait, alors apparait un de ces moments de grande beauté dont la Mongolie a le secret, mais qu’elle dissimule souvent derrière sa laideur abrupte, sa puanteur et le bruit incessant de ceux qui vivent là et qui se taisent quand vient le soir pour mieux rêver d’un au-delà moins braillard.

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Jour 6 – Tsertserleg, Alcool et Foi
Je ne vous ai pas encore parlé du village où nous vivons. Tsertserleg Sum, 2000 habitants, est un patelin reculé au nord de la province de l’Arkhangai, à 500 bornes d’O-B. Il est planté au pied de deux montagnes, Herohin et une autre dont le nom m’est si difficilement prononçable que je ne m’hasarderais pas à l’écrire. Herohin est une montagne un peu spéciale : en effet, sur sa face Nord se dessine, en creux, la forme d’une main. C’est la main de Dieu évidemment. Doté d’une bonne quinzaine de Mini Market, sorte d’épicerie locale, le village compte aussi deux banques, un bureau de poste, un poste de police, deux pompes à essence, une école, un petit hôpital et un temple minuscule compte tenu de la foi omniprésente. Il est inhabité. Flanqué de deux moulins à prières, il est juché sur les hauteurs et hormis son côté pittoresque, on comprend qu’il n’a aucune espèce d’importance pour les gens d’ici. Le moulin à prière est une sorte de kiosque : au centre, une colonne de bois à 8 faces tourne sur elle-même quand elle est actionnée par les poignées qui l’accompagnent. Les 8 faces sont décorées du mantra bouddhiste ou des noms des différentes divinités. Il faut en faire 3 fois le tour. Bien moins long qu’un chapelet ou qu’un pater noster donc. Parmi les autres traditions, on citera, en vrac : répandre du lait (ou de la vodka) trois fois dans la steppe, sur un nouveau-né ou sur le bétail ; ne pas prendre de décision le Mardi ; ne pas faire de signe violent comme pointer un couteau sur quelqu’un ou montrer le poing. Cela n’empêche pas le mongol d’être violent, surtout s’il est ivre. Car, visiblement, l’alcool ne fait pas partie des interdictions dogmatiques.

Des gens ivres on en croise pas mal. Je sais que c’est la deuxième fois que j’en parle. Mais pour l’instant c’est bien la chose la plus choquante à laquelle nous sommes confrontés. Et comble de la cerise sur le gâteau à la vodka ce sont les enfants qui ramènent les parents bourrés chez eux. D’habitude c’est la misère qui choque et répugne les petits européens, ici c’est l’alcoolisme qui étreint et révulse nos cœurs naïfs d’occidentaux. Dans les mini markets on comprend les raisons de la décadence : des rayons entiers de vodka bon marché, importé de Russie depuis l’époque de la grande URSS. Hier, c’était jour de fête, Surdva, la prof d’anglais, nous a prévenu : « Les hommes vont boire beaucoup. Ne restez pas dehors. Ça peut être dangereux. » On est rentré, sans rien dire, un peu abasourdi. Tsertserleg Sum, ce village au climat si rude, où la religion ne suffit plus à abreuver les cœurs asséchés des éleveurs, peut devenir triste de temps à autres. Heureusement, il y a la steppe infinie et le sourire des enfants pour abreuver nos cœurs qui pourraient, eux aussi, s’assécher.

Du climat rude de toutes ces vallées endormies
Au regard froid et dur des gens d’ici
Nous voyons tout. Et si pourtant que la montagne est belle
Souvent la laideur la rattrape. Malgré les hirondelles.
Des cadavres : du verre partout dans la steppe turquoise
Des corps errants, presque sans vie, dans la rue.
Pourtant il fait chaud. Mais surement que c’est trop ;
Les gens d’ici sont secs. Et surement que c’est trop ;
Alors ils vont dans la steppe, noyer leurs perditions
Dans les flots translucides des espoirs faux de la boisson.
Qu’il en faut du courage, qu’il en faut de l’ardeur
Pour vivre auprès de ceux qui sont ivres avant l’heure
C’est à coup de rêve et de ténacité qu’ils s’en vont guider
Leurs pères et leurs mères que l’éther fait vaciller.
Et pourtant dans leurs yeux, jamais on ne voit une larme
On ne voit que l’envie, que le feu et leurs armes
On ne voit que le chant des oiseaux et celui de leurs âmes
On ne voit que de l’énergie, de, la joie et même du charme
Surement que demain il faudra à leur tour les guider,
Mais qui leur jettera la pierre, d’où viendra le blâme ?
Quand on écrase leurs rêves à peine imaginés
Du pied horrible de l’ignorance des parents enivrés
En voilà des enfants dont on ferait bien de s’inspirer !
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Jour 3 – Volleyball, Dancefloor et Sexe fort
Alors que le monde entier tremble frénétiquement devant les aventures richissimes de Neymar et consorts, la Mongolie ne vibre réellement que pour un sport, loin d’être le plus populaire : le Volleyball.
Ainsi, tous les soirs, les jeunes se réunissent au gymnase pour y jouer pendant des heures entières. Ils se fatiguent rarement et nous fatigue souvent. Une leçon sur l’utilité comparée de la manchette à une main et de la manchette à deux mains par une gamine de 8 ans est quelque chose qu’on n’oublie pas facilement. Nos poignets brulent. Une enfant peut passer plus de 5h par, jour à jouer au volley. Je dis « une » parceque les filles sont clairement plus forte. En règle générale, notre société patriarcale, mysogine et sexiste est mise à mal par la mentalité mongole. La petite Moogi, par exemple, du haut de ses 12 ans a plus de répondant, d’intelligence et de maturité qu’un garçon de 18 ans. Clairement le sexe fort ici n‘est pas celui que l’on croit. Et les hommes ne font rien pour arranger leurs cas.
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La plupart d’entre eux sont ivres à la tombée de la nuit. Je ne crois pas avoir vu une seule fois le père de Batsaran sobre. Aujourd’hui dans une épicerie on a croisé un jeune homme allongé la tête contre le sol, trop ivre pour esquisser le moindre mouvement, au milieu du rayon vodka. On l’enjambe pour prendre une bouteille. Mais en Mongolie, comme ailleurs, généraliser n’est pas jouer. Gunbayar, par exemple, est plutôt le père idéal. Ici on l’appelle « chef » : un des mongols les plus sympas du patelin. Lui s’occupe de sa fille quand sa mère n’est pas là. Lui s’intéresse à nous, lui n’est pas ivre chaque soir (pas tous les soirs en tout cas). Mais dire que Gunbayar est un bon père n’est pas suffisant. On le connait dans toute la vallée pour sa moto-dancefloor. Qu’est-ce qu’une moto-dancefloor ? C’est très simple en fait. Prenez une Dayun, rajoutez y deux spots en forme de boule à facette, équipez-vous d’un vieux post cassette, faites-vous une seule cassette avec des titres passés de mode depuis les années 90, jouez cette cassette en boucle pendant que vous roulez pendant des heures. Hormis le volleyball et la boisson, il faut avouer que les mongols aiment bien la musique et la danse, même si le style est souvent rudimentaire. Pour la musique, comme je le disais il y a deux jours, on est clairement sur une esthétique digne des années 80-90, tout en mélangeant au milieu de ça des chants traditionnels et des musiques du moment : oui la Mongolie n’a pas échappé à Despacito. Pour la danse aussi on ne va pas chercher bien loin, des pas de valse à 3 ou 4 temps, quelques danses traditionnelles et c’est fini. Tout le monde écoute de la musique ici. Tout le monde a un portable et la 3G. Tout le monde n’a pas d’enceinte pour rendre la K-Pop un peu moins nulle. Mais ça ne devrait plus tarder. La mondialisation va vite par là-bas, très vite. Et elle laisse, derrière elle, ceux qui n’ont pas su suivre, sombrer dans l’alcoolisme. Pour les plus jeunes elle est synonyme d’espoir, dans un pays où l’espérance de vie ne dépasse pas 60 ans, même dans les grandes villes. Mondialisation reste cependant un bien grand mot, pour un village sans route goudronnée ni eau potable.
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Jour 1- Panier à salade, steppe et musique
Comment remplir l’étendue infinie, sauvage et glaciale que nous impose la steppe mongole ?
Avec quoi ? Avec Qui ?
C’est la question un peu absurde que l’on se pose lors que l’on arrive en Mongolie. Comme si on se devait absolument de remplir n’importe quel espace. La steppe on a eu le temps de l’admirer : 14h de piste ! Dans un 9 places des années soviétiques, sans amortisseurs, ni suspensions. Partis des faubourgs d’Oulan-Bator, nous avons tracé à l’Est. Oulan-Bator (que je réduirai en O-B désormais –l’auteur de ces chroniques est un fainéant) est une de ces villes types que l’on voit dans les livres de géo. On double des 4X4 rutilants et ronflants sous leurs V8 et puis des breaks d’un autre âge qui peinent à dépasser les 60 kilomètres à l’heure. Devant nous défile une usine à charbon qui dégage d’épaisse volute grises sombres, des préfabriqués tous neufs et des barres d’immeubles qui menacent de s’effondrer. Le contraste est saisissant, les terrains vagues sont nombreux. Déjà, alors qu’on n’est pas encore sorti de la ville, les vaches, brebis et chevaux traversent la route en se souciant évasivement des coups de klaxon rageurs des conducteurs et de nos sourires amusés. Enfin. On part.
On comprend soudain que non seulement c’est grand, mais que c’est aussi beau. Majestueux même. Et puis vide aussi. Les énormes étendues d’herbe s’escarpent en chaine de montagne pas très hautes avant de s’aplanir en d’interminables plaines qui nous rappellent les vertus du calme et de l’ennui. La route mongole, quand elle est goudronnée, est tout comme la route française, à la différence près que le français bouche les trous tandis que le mongol préfère les éviter. Le chemin est une succession asphaltée de nids de poules, stries, troues, bosses, dos d’ânes, creux, irrégularités, aspérités de bitume qui secouent nos os à chaque instant. Au sortir de 24h de transit aéroportuaire, où nous avions à peine dormi une heure entre un officier de contrôle russe style molosse pré-poutinien et une douanière aussi froide et rigide qu’un Ovo, l’épreuve du panier à salade est difficile.
« Sé koi un ovooo ? »
Un Ovo est un grand mat qui surplombe un tas de pierre. Le but est d’en mettre un peu partout. On accroche un ruban de couleur en formulant une prière et ainsi, à chaque fois que le vent souffle la prière vole au vent. C’est beau non ? De la beauté il en faut pour contenir les cahots de la route. On arrive tant bien que mal à s’endormir, alors qu’à côté de nous des paysages sublimes défilent paisiblement. Au bout de 4h notre chauffeur prend à droite et là on comprend que ce n’était que le début. La piste offre à nos fesses engourdies un enfer de flaques de boues, de trous profonds et de cailloux tranchants. Je ne parle pas du génie de notre guide qui se dirige là-dedans avec une facilité d��concertante.
On a du mal à y croire mais c’est encore plus beau. La steppe mongole répond à tous les clichés télévisuels les plus communs. En plus vallonné peut être. A perte de vue et dans toutes les directions, de l’herbe. Les montagnes qui font à peine 300 mètres de haut, enserrent des vallées larges et descendantes. Il y a des yourtes un peu partout, essaimées çà et là dans la steppe. Très souvent la piste que nous empruntons croise le chemin des troupeaux de brebis, de vaches ou de chevaux, tous dans la liberté la plus totale. La faune en générale est incroyable. Surtout dans les airs : on croise des faucons, des vautours à l’envergure énorme, des hérons, des hirondelles, des milans, des oies et mêmes des grosses mouettes. Les grillons font plus de 10 centimètre de long, on voit des petits écureuils s’enterrer dans des terriers et des yacks imposants. Les 14h de routes éreintantes n’y font rien : la Mongolie c’est beau, tout le long du chemin. Parti à 8h30 du matin d’O-B, nous arrivons au village de Tsertserleg Sum à 22h passé. On nous sert tout de même un bon repas chaud. Puis on s’endort vite.
Au fil de la journée on aura pu admirer le savoir-faire mongol en terme de musique. Dans la radio il y a de tout : du rock, de la pop, du rap, de la musique traditionnelle, du reggae. Le tout en mongol et produit avec des instruments locaux, plutôt bien mixés. Sur l’esthétique on est clairement sur ce qu’on appellerait les années 80 en France. Mais ici les analogies sont vaines on l’aura bien compris. Rien n’est semblable à la France et le dire c’est déjà idiot. On est en Mongolie, c’est beau, et ce n’est que le début.
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Jour 1- Panier à salade, steppe et musique
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