jeneprendspasletrain
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Issues d'un cahier
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Je suis né avec un problème de taille... Mais j'ai fini par grandir. Enfin, je crois.
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jeneprendspasletrain · 5 years ago
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Il y a des gens qui jouent à cache-cache le décharge. C'est là où ils vivent : se jeter à coté de la poubelle. Alors, ils vivent dans la poubelle. Pique-nique les fossés, boites de raviolis défaussées, j'ai vu des sacs déchiquetés par le vent, faire des guirlandes aux cous des fraises des bois. 
Un jour, j'ai mis le pied dans un engrenage dissimulé, le tambour d'une machine à laver les ronces. C'était pas très loin du sommet d'une montagne, au départ d'un torrent. Je savais pas moi, je l'ai su en le longeant, mais le pneu lisse ça remonte le torrent, ça fraye à la saison des tracteurs abandonnés pour des michelins d'eau douce. J'ai fait propre sans lessive ce jour-là. Pourtant, je me suis senti sale, encore plus sale quand j'ai aperçu les barques de frigo échouées dans l'eau, boites de plantafin périmée par le vide. Les boites, elles me jugeaient l'anthropocène en fixant le vert de mes yeux.
 Le passé répond de ses actes par ses vestiges. Plus bas, le patrimoine du XXème, celui des ravines et des vallées, celui de l'eau; il se lit dans les emballages de mars coincés dans les interstices des rochers-rives, le verre brisé des binouses de l'été bien arrosé qui s'entassent derrière les camping-cars en rade -  loin de Toulon -, les bâches débauchées, les bidons le bidon éventré, les bouteilles polymères de Volvic à la mer, le charnier de bouts d'hommes plastiques, l'enterrement lent du confort des dieux dans de la peau de Terre, le sédiment de honte qui viendra enrager les géologues de l'avenir - si l'avenir ne jette pas l'humain au recyclage.
 Il y a des gens qui jouent à cache-cache la décharge, parce qu'ils ne savent faire que ça de leur humanité : se décharger.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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La nuit n’est pas la nuit, madame. Ce que vous voyez là, ce ne sont que des ombres de voiries. On a pas vu une nuit dans une ville depuis, au moins, 1953. Si vous voulez vraiment en voir une, vous devriez aller voir sous terre. Dessous, la nuit c’est la nuit.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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On pourrait m'adresser des cartes postales de vacances, juste en écrivant le nom de l’enfer sur du papier. L'adresse souterrienne n'est pas facile d'accès aux facteurs jaunes pales, surtout s'ils ont peur des noirs chiens de mes chants. Mais, qu’ils affrontent leur peur des calcaires canines, qu’ils fassent cet effort de distribuer de la vie. J’aimerais tellement que l'on me lettre, qu’on me fasse lire ce qui courrait hier –  même une facture d'électricité statique.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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J'ai tombé la nuit. Pourtant, tout a du arriver à l'heure, comme d'habitude. Les trains du lac qui tirent le ciel dans leurs vagues, les oies sauvages qui remontent la pendule des saisons, les gens du plateau qui portent des cloches. Mais oui, j'ai omis le temps et me voilà à devoir rentrer les pieds noirs, à rentrer avec mes yeux caducs pour la nuitée, mes yeux ajournés, mes yeux qui brailleront sur les troncs. Ce n'est pas grave, je suis chien qui devient loup. Seulement, domestiqué par Diurne, le soir alunaire va se venger de cette fausse transformation, se jouer de mon retard inhumain ! J'ai tombé la nuit mais, désormais, quittant la rive, c'est à elle de me faire tomber. (Aux batteries qui nous quittent dans les bois, ces petits soleils de poche pour mettre nos pieds nocturnes au chaud.)
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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Sous les chapelles monolithiques, les prières ne passent pas à travers l'épaisseur de la roche. Elles rebondissent sur les parois en brèches et sont comme des échos. C'est ainsi que les miracles se jouent : les êtres entrent sous roche comme s'ils montaient sur un manège. Dès lors, ils sont entourés de milliers de pompons invisibles qu'ils n'attrapent que si le hasard les fait tomber sur eux. C'est, en quelque sorte, la fête foraine des contre maux du monde. Et ce ne sont jamais leurs propres prières qui les saisissent, c'en est toujours une autre, une identique à la leur certes, mais venue d'un semblable, d'une même attente, d'une métaphysique aux yeux plus gros que le ciel. Les miraculés, surtout ceux qui se sont faits lourder, ne savent pas que leur miracle est celui d'un autre. Peut-être que certains ont été touchés par des miracles caducs, peut-être qu'ils pourraient savoir marcher deux fois, qu'ils seraient sauvés de ce qu'ils n'ont pas... Moi je n'entre jamais sous ces rochers à ricochets. J'ai beau croire que je ne crois en rien, on prie toujours inconsciemment de n'être qu'un homme parmi les autres, de vouloir être plus. Je ne prends aucun risque. Et puis, je ne voudrais pas que les choses m'obligent à croire au dessus des pierres. Les pierres me suffisent amplement.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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La neige s'en va. Il suffit de voir la brume la voler. Il suffit de voir la nuit commencer à se collapser dans le noir quand le vrai hiver, le blanc, est dénué d'opacité. Tout s'en va dans le printemps, même la montagne, cet animal qui vit pour hiberner. Tout suit le mouvement naturel des saisons. Je n'ose pas monter plus haut de peur d'aggraver le dépeuplement du froid, de faire fondre la neige en eau, en marchant sur elle. Je vais faire demi tour. Je suis un être raisonnable, je m'en vais donc attendre l'hiver prochain.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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Que voyez-vous ? Un étang ? Non, il n'y a pas d'eau. Le blanc ? Quoi le blanc ? Ce n'est ni de la neige ni le nuage qui voudrait en être. Un arbre ? Qu'est-ce qu'un arbre en hiver si ce n'est rien de rien ? Les piquets, qui a été piqué ? Et non, l'herbe n'en est pas ! Il ne faut pas se fier aux apparences trompeuses, sinon elle serait verte et chez le voisin. Un pigeon quoi ? La montagne ? Où une montagne ? Mais non, c'est un effet d'optique ça. Quoi, ce que je vois moi ? Et bien, moi je vois un prisonnier. Vous ne le voyez pas ? Regardez derrière vos yeux, c'est là que je le vois, c'est là que je me vois... Entre les deux murs de ma caboche. Je suis, pris dans cet espace clos qu'on ne voit que derrière les yeux. Si j'en sors, si je regarde dehors, je tombe et je me noie. Vous avez sans doute raison pour le pigeonnier... Il y en a un. Il y'en a un et c'est moi. Je suis le prisonnier et sa cage. Et j'ai cette drôle d'impression, comme si j'étais un oiseau qui ne savait pas voler, s'envoler de lui-même.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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Cela ne s'entend pas mais le vent souffle sur le crépuscule. Il fait se coucher la nuit plus tôt. Ce n'est pas la faute des nuages si le jour tombe plus vite que la neige et si les pins poussent dans le sens de la tramontane. Quand le froid fait foehn de tous bois, que la chaleur des fumées au sortir des cheminées ne peut plus réchauffer l'atmosphère, le ciel rosit et nous hypnotise.  J'ai parfois l'envie de marcher pieds nus dans la neige comme dans le sable, de lâcher ma seconde peau et de me jeter à corps perdu dans ces bassins d'or blanc pour sentir la vigueur de l'hiver me raviver. L'hiver est pour moi paradoxal, j'ai l'impression qu'il a le pouvoir de redonner vie. Que les lumières véritables viennent de lui. Il faut... Il faut que je vous laisse. Je dois aller prendre froid.
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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Les gargouilles n'ont plus de pluies à cracher en haut des tours. Enfin ! le temps s'est arrêté dans le ciel. Nos yeux curieux se lèvent à nouveau, sans craindre le lacrymal nuage, et ils cherchent à être plus grands, plus loin, plus l’œil dans le jour. Sur leur parcours, une horloge semble tourner en rond au dessus d'eux. Mais ce n'est qu'un effet d'optique. Ce temps là, majuscule, lui aussi est aux arrêts. Et puisque les yeux voient encore ce n'est pas la fin du monde, pas la fin des temps, pas la mort de la mort ! Qu'est ce alors ? Cela ressemble à la révolution des Hommes qui courent, le retard qui s'envole, l'oubli du leurre qui nous piège de l'aurore au crépuscule. C'est la nuit qui se dort au soleil, celle qu'on ne voit pas passer les yeux grands fermés. C'est la chute des horloges internes. C'est... Ne plus savoir compter. 
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jeneprendspasletrain · 7 years ago
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La neige fond dans le jour. Les ombres portées tentent, en passant sur elle, de la sauver. Mais c'est en vain. Une ombre n'est pas le nord. Une portée l'est par le vent. La neige fond du soleil et, bientôt, elle ne fera plus qu'un avec la nuit - cette grande nuit dans la terre. 
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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On dit que les châteaux sont hantés. Peut-être, seulement je ne crois pas que ce soit les Hommes qui font les fantômes, du moins pas leur mort. Les esprits ne naissent pas des croyances ou par magie, ils naissent par les mains qui maçonnent et qui taillent. Ils grandissent par le savoir faire des constructeurs et s'arrêtent enfin de croître, d'être monumental. C'est à cet instant là, lorsque que le travail prend fin, que la matière inerte des volcans s'imbibe d'une nouvelle âme. Ce ne sont pas des esprits dans les châteaux que l'on voit, c'est l'âme du château elle-même, celle conférée par des hommes inconnus au minéral - habité par le temps. Des hommes encore vivants par leurs mains sur les murs et dans les lumières aux encadrures des fenêtres. 
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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Il n'y a pas une lumière qui ne marche pas sur l'eau. Et sur les lacs qui s'engraissent des neiges qui décristallisent, le soleil pose son manteau là où il tombe. Cela réchauffe où qu'il reflète. Il suffit d'être derrière le verre d'une fenêtre pour comprendre que le soleil est un manteau et que nos yeux mouillés, par la brise du lac, n'ont plus froid de le porter.
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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A la sortie du tunnel
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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Ne plus balayer devant sa porte
Série I Ne plus balayer devant sa porte - Frapper aux carreaux et passer à travers le passé.
- L'abandon derrière les murs, sur le balcon début de forêt.
Les ombres chinoises des ar-bustes sont des taches diurnes aléatoires sur les vieilles pierres croit-on. Elles sont plus que cela, elles sont des silhouettes, des mimes maladroits du vieux passage des habitants, aujourd'hui déshabités. La peinture qui s'efface, le bois qui pèle,  la maçonnerie qui s'effrite, les pierres qui se desquament; les maisons, parfois, se délavent. Et sur elles, coulent la mélancolie.
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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Perdu sur un pont
La Seine est pleine d'hommes. Pleine de leurs peaux et de leurs poumons turquoises. Il doit y avoir un peu de moi, usé, dans le courant pris par le reflet des lanternes. Doit y avoir.
J'ai le cuir qui rappe le bitume, ça ressemble à un défaut d'éloquence, de la mauvaise musique. C'est désagréable. Mes pas ne laissent rien venir de clair, de courageux, d'imprudence. J'ai peur. Je ne m'approche pas trop du rebord. Je ne veux pas nourrir le fleuve d'y glisser ou d'y être poussé. Tomber dans la grande bouche des eaux et être déchiqueté par les crocs des îles, des poissons ferrailles et du béton désincarné – cachés au fond du lit.
Je suis observé dans la pénombre des globes. Les anges qui n'ont jamais rien traversé, pas plus le ciel qu'un pont, s'échinent à me chercher des noises. Ils se moquent de moi et je ne sais pas si c'est l'effet de serre ou mon crâne seul, je me sens cloche sous cloche. Je dois avoir les joues de tomates. Mon immobilité n'ébrèche pas mon dôme, je transpire de penser.
Les feuilles d'or sur l’art font scintiller la nuit. L'or natif doit être lui aussi Vénus sous terre. Je n'ai jamais trouvé de métal précieux dans l'abandon, même à l'état microscopique. Cela doit être quelque chose de s'adorer, de se dire, fièrement, qu’on a enfin trouvé. Trouver c'est chercher avec abnégation, c'est questionner les non sens pour leur en offrir un. C'est fastidieux et épuisant. Il faut être passionné pour chercher. (Je cherche les réponses comme des pierres, elles sont brutes et ne sont pas l'architecture. Mes questions ne sont pas des modèles de constructions.)
J'ai l'impression de m’agripper à la courbure de la planète, je suis assis-accolé au muré et l’une de mes mains est attachée à mon cahier et le stylo à la pointe de mes autres doigts. Et je tangue sur un pont, sans être certain si c'est le vin ou mes souvenirs qui me tourmentent. J'ai l'équilibre d'une statue en bronze érodée à sa base, mangée par le temps. Je suis noir de monde.
A lever le nez, j'aperçois les coupoles. Elles m'appellent, elles sont, par dérogation mémorielle, des bocaux d'arrières arrières grand-mères remplies de géants biscuits. Il ne me reste plus qu'à trouver un moyen de soulever le couvercle, boite démesurée pour grand pâtissier. J'ai faim d’être tout petit. Je volerais une grue pour me restaurer. Me restaurer. 
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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Librairie
Tout à l'heure, je suis rentré dans une librairie. Il y avait plein de livres – forcément. Ils me regardaient. Ils m'observaient comme une bête curieuse. Par réflexe, j'ai fait de même sur leurs couvertures – immobiles et calligraphiées. J'aurais pu les maltraiter, faire semblant de m’intéresser à eux. Je n'ai pas su quoi faire. Aurais-je du porter mon attention et les feuilleter pour deux lignes ou trois bons mots ? Non, je les ai ignorés pour les laisser à ceux qu'ils pourraient toucher – les vrais lecteurs.
Je ne savais plus bien ce que je faisais là, ma curiosité m'avait poussé vers eux et elle s'estompait devant l'irrattrapable. Toutes ces œuvres que je n'avais pas lu me jugeaient en silence. Et je me sentais lent derrière les feuilleteurs, pour tout dire. Pourtant j'ai l'impression qu'il n y a que là que j'ai envie de lire, dans ces bibliothèques à codes barres. Je voyais les gens qui ne se contentaient pas de palper, qui prenaient les livres comme des étoffes nouvelles, du temps à porter à la tête quand ils seraient seuls avec eux-mêmes. Je les envie de savoir lire. Pas que je ne sache pas littéralement le faire puisque je connais les lettres, les figures de style, la grammaire parfois... Je n'ai pas le pouvoir de la patience. Je ne crois pas à l'intérieur des pages ouvertes. Je suis la lenteur absolue, un mauvais élève. J'ai le rythme cathodique dans mes yeux. J'ai trop l'habitude de ma passivité sur les histoires, de la facilité des images qui se propagent à la seconde. Je ne sais pas lire.
(...)
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jeneprendspasletrain · 8 years ago
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A y réfléchir, je suis tout autant naïf que construit. Je me déconstruis même mais je suis capable de bien mieux faire, d'aller plus vite, d'être un personnage de roman. Et quand bien même il existait ne serait-ce qu'une infime chance que l'on puisse s'être trouvés au plus mauvais moment du monde, qui aurait voulu prendre la responsabilité de ne pas pouvoir faire vieillir les sentiments, de ne pas les goûter dans leur véracité et dans leur force ?
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