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acharland · 1 year ago
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Le numérique et nos enfants
L’environnement numérique prend de plus en plus de place dans nos vies. Télévisions et téléphones intelligents, ordinateurs de plus en plus performants, objets connectés, nous sommes de plus en plus dépendants de la technologie qui évolue à une vitesse effarante, voire qui nous dépasse. De cette technologie est né un univers virtuel parallèle au monde réel où se retrouver et échanger est à la portée de tous. Ces réseaux sociaux numériques remplacent tranquillement les réseaux de relations interpersonnelles et réelles que nous nous faisions une fierté de cultiver avant. N’importe qui peut y exprimer son point de vue, argumenter et contre-argumenter sans bouger de chez soi, peut importe les conséquences.
Mais cet univers virtuel n’est pas indépendant du monde réel; il est son reflet, une dimension où chaque pseudonyme, chaque avatar, est l’alter ego d’une personne en chair et en os, qui éprouve des sentiments et qui subis les conséquences des actes irréfléchis d’autres usagers.
Le vendredi 29 mars 2024 paraissait dans Le Journal de Montréal un article mentionnant que l’intimidation sur les réseaux sociaux concernait maintenant des enfants de plus en plus jeunes. Il y est cité des experts constatant que des insultes et des menaces à l’utilisateur et sa famille sont fait à des enfants aussi jeunes que six ans. Le journaliste donne également l’exemple d’une fillette de dix ans dont les camarades ont ouvert un compte Snapchat dans le but avoué de l’insulter, de l’intimider et de lui faire des menaces. Devant ces actes haineux, on est en droit de se demander comment se fait-il que d’aussi jeunes êtres humains en viennent à de tels extrémités dans leurs relations avec les autres.
Patrick Lagacé, dans sa chronique du 17 mars 2024 paru dans La Presse, lance une piste de réflexion très intéressante basée sur un article d’un psychologue social, Jonathan Haidt, paru dans The Atlantic (https://www.theatlantic.com/technology/archive/2024/03/teen-childhood-smartphone-use-mental-health-effects/677722/ ) Il y est dit que le fait de passer tout son temps devant des écrans est malsain pour le développement du cerveau des enfants et des adolescents. Pour bien se développer, un jeune a besoin principalement de deux choses : des contacts réguliers avec des gens réels pour apprendre à interagir sainement avec d’autres individus et à vivre dans le présent, et de jouer dehors pour acquérir de nouvelles compétences en explorant, se tiraillant avec des amis, en utilisant leur imaginaire. Or, l’offre numérique qui croit sans cesse incite les jeunes à rester à l’intérieur et à s’isoler. Et selon Jonathan Haidt : ils « sont plus sujets à la comparaison sociale, à la conscience de soi, à la honte publique et à l’anxiété chronique… » (Lagacé, 17 mars 2024,) Donc, être sur les réseaux sociaux à un si jeune âge empêche les enfants de développer des compétences relationnelles saines et efficaces avec les autres.
En réaction à cette chronique, plusieurs enseignants ont répondu à M. Lagacé en lui racontant des tranches de vie. Une enseignante partage plusieurs constats de parents qui avaient permis à leurs jeunes enfants d’ouvrir un compte sur un réseau social et qui les ont vu devenir tristes et renfermés. C’est en leur retirant ce droit qu’ils sont redevenus enjoués. (Lagacé, 22 mars 2024, paragr. 15-19) D’autres enseignants ont remarqué que les étudiants ne se parle plus aux pauses, ne répondent plus aux questions de l’enseignant et font preuve d’un manque d’imagination qui transparait dans la qualité des débats en classe. Ils émettent l’hypothèse que la peur d’être jugé par leurs pairs les poussent à ne plus s’exprimer. Certains ont même commencé à interdire tout écran en classe et amorcé un retour vers la prise de note avec un papier et un rayon. Leurs constats sont clairs : la concentration des étudiants s’est amélioré et le nombre d’échanges et de questions posées a augmenté. (Lagacé, 30 mars 2024) Ces données ne sont pas probantes. Elles n’émanent pas d’études scientifiques, mais d’enseignants travaillant sur le terrain pouvant observer de visu les effets des écrans sur l’apprentissage de leurs élèves versus « la bonne vieille méthode » du papier et du crayon.
Plusieurs solutions sont envisagées pour protéger nos jeunes des effets néfastes des écrans. De plus en plus, les gouvernements tentent de légiférer sur le temps d’exposition aux écrans des jeunes, surtout en classe, et l’âge minimal pour avoir accès aux réseaux sociaux, mais la manque d’études scientifiques et la difficulté d’application dû à la prolifération des plateformes et à la loi sur la protection de la vie privé rendent leurs efforts louables quasi inutiles.
Certains gestes d’intimidations sont considérés comme des infractions et sont passible de sanctions : harcèlement, diffamation, menaces de mort ou de blessures graves, extorsion (sexuelle ou non), publication d’une image intime, conseil au suicide, etc. Les poursuites peuvent être autant criminelles que civiles et laisser des traces sur le long terme chez les victimes comme chez les agresseurs. (Éducaloi, 2024, 15 avril)
Il existe également un code de conduite en ligne, appelé nétiquette, qui est défini par la banque de dépannage linguistique comme suit : « […] l’ensemble des conventions de bienséance régissant le comportement des internautes, notamment dans les échanges par courrier électronique, et dans les publications et les commentaires sur les réseaux sociaux. » (Banque de dépannage linguistique, 2018)
Mais malgré toutes les bonnes volontés, le climat social sur les réseaux sociaux, et même dans la vie réelle quand les premiers débordent sur la deuxième, ne cesse de se dégrader. La grande question est : pourquoi?
Je ne suis pas une psychologue ni une scientifique. Je n’ai pas d’expertise dans le domaine de l’éducation ou de la sociologie. Il y a certainement d’autres facteurs qui peuvent expliquer cette dérive numérique. Mais à force de lire les journaux, d’écouter les nouvelles, de lire des livres et d’observer le monde qui m’entoure, je me suis forgée une opinion que j’aimerais partagée : nous sommes devenus paresseux. Tant dans nos vies professionnelles que personnelles, sur le plan intellectuel que relationnel, nous sommes devenus des adeptes de la facilité. Il est plus facile de se dire que nous n’avons pas besoin d’agir parce que d’autres agiront à notre place. Il est plus facile d’écouter sa peur (qu’elle provienne de l’ignorance ou de gens avides de contrôle) que d’utiliser notre intelligence pour nous questionner et raisonner de manière logique et objective. Il est plus facile d’exprimer son opinion et ses émotions par écran interposé, plutôt que face à face et de s’exposer directement au jugement des autres.
De plus, en adoptant la facilité, nous avons cesser de fournir des efforts, non seulement dans nos relations interpersonnelles et nos capacités de raisonnement, mais également sur le plan du contrôle de soi. Nous contrôlons de moins en moins nos émotions, nos sentiments et nos envies. Ils deviennent les fondations de nos réflexions et de nos raisonnements, poussant les gens à agir et à parler sans réfléchir aux conséquences pour une imitation éphémère d’un sentiment de bien-être.
Ajoutez à cela la croissance rapide de l’environnement numérique par rapport à notre fâcheuse tendance à refuser de remettre en question nos choix tant qu’on n’a pas frapper un mur et nous obtenons un environnement non encadré et non étudié où des gens déversent leurs ressentis sans filtres sur des personnes qui ne sont pas outillées pour les recevoir.  
À mon humble avis, la solution se trouve dans l’éducation. On ne doit pas se contenter de mettre au programme des connaissances factuelles. On doit également expliquer aux enfants, qui seront les adultes de demain, que le monde virtuel a des conséquences sur des personnes réelles. Leur expliquer également l’importance des connaissances dans le développement d’un individu et de la société pour lutter contre l’ignorance qui entrave l’évolution d’une société. Expliquer aussi que les lois et les règles sont les garants de ladite évolution et que sans encadrement, c’est l’anarchie. Expliquer que les émotions, comme la peur, et les sentiments, comme la haine, sont des fondations bancales pour un raisonnement intellectuel et qu’ils ne peuvent se substituer à la logique et à l’objectivité. Expliquer, parce que contraindre, on le voit dans les dictatures, amènera inévitablement une partie de la population à se soulever et à combattre pour être entendu. Expliquer, parce que l’être humain, enfants compris, n’est pas qu’un animal émotionnel, mais également un être intelligent capable de grandes choses quand il s’en donne la peine.
Bibliographie
Banque de dépannage linguistique. (2018). Nétiquette sur les réseaux sociaux. Nétiquette dans les réseaux sociaux : principes généraux | BDL (gouv.qc.ca)
Éducaloi. (date inconnue ; consulté le 15 avril 2024). Cyberintimidation : les gestes interdits. Cyberintimidation : les gestes interdits | Éducaloi (educaloi.qc.ca)
LAGACÉ, P. (2024, 17 mars). Nos enfants, le téléphone et le virtuel. La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/chroniques/2024-03-17/nos-enfants-le-telephone-et-le-virtuel.php
LAGACÉ, P. (2024, 22 mars). Une autre histoire d’enfants et d’écrans. La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/chroniques/2024-03-22/une-autre-histoire-d-enfants-et-d-ecrans.php
LAGACÉ, P. (2024, 30 mars). Écrans : échos de profs. La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/chroniques/2024-03-30/ecrans-echos-de-profs.php
THERRIAULT, D. (2024, 29 mars). « Grosse truie » : des jeunes harcelés sur les réseaux sociaux dès l’âge de six ans. Journal de Montréal. https://www.journaldemontreal.com/2024/03/29/grosse-truie--des-jeunes-harceles-sur-les-reseaux-sociaux-des-lage-de-six-ans
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