Atelier : les programmes du mercredi, et quelques supplements ...
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2 JUILLET 2005
Programme pour la lutte finale.

1°) Pistes pour des médailles ? Inventée par Annie Hupé, la forme « médaille » reproduit le format rythmique du haïku, tercet de 5-7-5 syllabes.

Qui dit médaille dit revers :
Les mots à la rime des vers 1 et 3 voient leurs deux syllabes finales inversées, par exemple écrits/crier ; abbé/béat ; bâton/tomba...
Le deuxième vers du poème expose une notion (même étendue, mais explicite) de retournement, détournement, traversée, inversion, échange... Quelques exemples ou possibilités d'exploitation gratuite :
l’abbé // bêla ; Dupont // pondu ; Durand // rendu ; chiffré // fraîchit ; macho // chôma ; répit // Pirée ; vélo // lové ; tuba // battu ; daubé // bédo ; radeau // dora ; Médor // dormez ; radis // dira ; divers // verdi ; débris // bridé ; d’abord // borda ; soda // d’assaut ; bacon // combat ; clébard // Barclay ; sabot // bossa ; bigot // Gobi ; bulot // l’obus ; ému // muet ; Rémi // mirer ; basta // tabasse ; barbot // bobard ; balai // l’ébat ; bat-flanc // flamba ; tarot // rota ; Satan // tança ; lutta // talus ; parents // rampa ; tagué // guetta ; tapin // pinta ; épi // pillé ; teinta // Tatin ; poulet // l’époux ; sirop // Rossi ; sarrau // rossa ; Tréport // portrait ; Bonnard // Narbonne ; Hollande // landau ; cordée // décor ; trimeur // meurtris ; serpent // pensèrent ; infuse // fusain ; mérite // rythmé ; Hegel // gueuler ; perron / rompez ; mâcher // schéma ; facho // chauffa ; choucas // cachou ; Sarko // cossard ; goji // gigot ; dorade // radeau ; trembler // Bletterans ; riant // Henri ; cendré // dressant ; sembler // blessant ; purin // impur ; calmez // mezcal ; amour // mourra ; etc.
Ton discours rythmé Endort au lieu d’éveiller. J’ai bien du mérite ! Tu meurs au poteau, Dans trois jours tu ressuscites, Voilà le topo. Désert de Gobi, Loin des sables du Golan, Réjouis les bigots ! Fuyez le bacon, Ne tuez pas les cochons, C'est un beau combat ! Michaël Palin, Bousculant le scénario, Tua le Lapin. Ce fourbe semblait Parler avec bienveillance Et des mots blessants. Les bébés choucas Attendant que leurs dents poussent Mâchent des cachous. Dimanche, à Bletterans, On va renverser les rôles : Lédoniens, tremblez ! Ce flic, c’est l’époux Qui permute les messages Venus d’un poulet. L’est bon, ton bédo ! Qu’y mets-tu au lieu du shit ? C’est du thé daubé. Trop bon, ton bédo ! Tu y mets des fines herbes ? Non, du foin daubé. La tisane infuse, On ira bientôt pisser, Noyer les fusains. Balade en landau ? C’est bien fini le scooter, Hein, François Hollande ? Quand ils y pensèrent, Adam et Ève eurent peur D’un pauvre serpent ! Promenez Médor, Aller-retour, en vitesse, Ensuite, dormez ! Puni, au perron ! Pas de discussion, Bayrou. Bétharram, rompez ! Charlotte Corday, Assassine innocentée : Le Roi la décore. Fumer au bat-flanc ? Pour un mégot mal éteint La prison flamba. Devant ses parents Redevenu bon enfant, Le voyou rampa. Ce vilain clébard, Devenu chanteur de charme, Publie chez Barclay. Le troupeau bêla, Ouailles devenues moutons : On t’aime, l’abbé. Sur son char d’assaut Quittant le combat terrible, Il prit un soda. Sur le mur tagué, Nul tagueur n'est revenu : Un flic y guetta. Ce breuvage impur Transformé, se purifie, Autrefois purin. Tout breuvage impur, En traversant mes vieux reins, Devient du purin.
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18 JUIN 2025
Programme pour un appel solennel.

Échauffement (5 minutes) : Un appel du dix-huit juin. On écrira un petit texte en n’utilisant que les lettres qui composent ce titre : A D E H I J L N P T U X. Ce sera un appel très court.
Un lapin endeuillé appelle Dieu et un Jedi à l’aide : « Help ! Pitié ! À l’aide ! J’ai entendu un alien piaulant, là, plein d’eau puante ! Et il pleut ! » Adieu, petit lapin… Il t’a un peu taxé, le djinn ! Inutile, ta patte de lapin !
L’appel à l’au-delà. Je déjeune, hippie anxieux, et pan ! Là, pend un alien hideux ! Aïe ! Je plaide un appel à l’aide des dieux. En un, j’appelle déjà Attila le Hun, en deux j’appelle Lénine, un allié athée inattendu, et un petit dieu plein d’appétit, Allah ! Alléluia ! Et un Jedi ? Le Jedi le tient ! Au pied, l’alien ! Halte-là ! Il lui tient tête ? Nenni ! Le Jedi a tué l’alien !
Je déjeune et je t’appelle : Tut ! Tut ! Tut ! « Peux-tu le dix-huit juin ? » « Euh… » Dépité : « Et le deux ? Le huit juillet ? » « Je peux ! »
J’appelle le peuple, le dix-huit juin, à l’idée d’un élan et à la lutte !
Pile le jeudi dix-huit juillet, je lutte déjà au texte, dit le juteux.
J’ai dîné d’une dinde, d’un lapin, et d’une pintade. Un plat idéal ! Et j’ai la patate !
1°) Compléter un fragment (10 minutes) : Bouturage de Clotilde. Voici un morceau du poème d’Apollinaire de joyeuse mémoire. On le complètera à gauche et à droite, de manière à former un petit texte qui signifie quelque chose d’assez cohérent…

Navires menacés des eaux vertes furieuses, Marins qui font couler leurs larmes de terreur, Mon dieu, c’est trop ! Il faut que tu prêtes ton aide Dans la cruelle ombre qui veut nous engloutir.

2°) Logorallye (10 minutes) : 10 mots pour une histoire. On écrira une petite histoire en utilisant obligatoirement les dix mots suivants, dans n’importe quel ordre. On a la possibilité de les conjuguer et de les passer au pluriel : envoyer, complément, cuisine, tatouage, minuit, terrain, poule, inattendu, bleu, discret.
Au restaurant, Clotilde se prépare à une soirée difficile. Quarante couverts sont annoncés, et il y a souvent un groupe inattendu qui arrive tard, et si des tables ont été libérées, le patron les accepte, jusqu’à minuit. Elle travaille en cuisine, au dressage final des assiettes. Activité discrète mais indispensable. Pour elle, c’est un revenu de complément, après ses journées sur le terrain aride de la ferme familiale. Elle élève une volée de poules, qui ne finiront jamais sur les assiettes qu’elle envoie : ce ne sont que des pondeuses, elle les nourrit du bon grain qu’elle moissonne elle-même. Et ce soir, le chef est grognon, comme trop souvent. Elle le supporte tant bien que mal, avec ses tatouages de macho, ou de gros beauf, sur ses biceps poilus. Clotilde, elle, est plutôt délicate et n’aime pas ce genre artistique. Et la soirée est bien parti. Elle réceptionne un risotto, essuie le bord de l’assiette en gourmandant le marmiton, et la dépose sur le plateau d’un serveur impatient. Et un steak pour le dix-huit, un ! Stop ! Il est trop cuit. Retour aux fourneaux : le client le veut bleu, pas noir ! C’est un métier difficile, mais Clotilde tient bon. Elle économise, sous par sou, pour s’acheter des livres. En ce moment, elle a envie de poésie. Apollinaire, ce serait bien, se dit-elle. Allez, envoyez ! Et deux truites aux amandes. … Vivement demain !
3°) Écriture longue (10-15 minutes) : Célébration. Faire l’éloge, pompeux ou ironique, sérieux ou légèrement amusé, d’un objet ou d’une notion très ordinaire, usuellement considérée comme sans intérêt, triviale, etc. Aujourd’hui, le lèche-vitrines.
Le lèche-vitrines, activité de gourmand oisif ou de gourmet chic ? On ne saurait trop le recommander, car il est l’indice que le promeneur, et en même temps le commerçant, ont du goût. Le promeneur, seul ou en petit groupe, c’est un flâneur, un oisif, direz-vous. Non. C’est un esthète, un curieux de sa ville et des nouveautés. Son but n’est pas nécessairement d’acheter, mais de comparer, de se faire des idées, de projeter dans son chez-soi mental une nouvelle décoration, un vêtement qui s’assortirait bien avec tel autre, et ainsi de suite. Cette activité l’oblige à mémoriser, à faire fonctionner son esprit critique. Qui plus est, c’est sportif. Faire toute une rue, côté pair puis impair, revenir sur ses pas, parfois même entrer dans un magasin, et finir la journée avec des paquets énormes au bout des bras, c’est mieux que la marche nordique. Quant au commerçant, ou son étalagiste, voir des passants ralentir et se plaquer à la devanture, montrer du doigt, c’est la preuve que la composition de sa vitrine est alléchante, donc réussie. Car c’est bien le but qu’il poursuit ; attirer, donner envie, captiver, faire revenir. Une fois le client potentiel sur place, c’est une autre qualité que doit déployer le commerçant, la persuasion. Mais quand l’œil a déjà été attiré, allumé, il a presque gagné, même si certains badauds ne font que passer le temps. Ceux-là, ce ne sont pas de vrais lécheurs, il faut les mépriser.
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4 JUIN 2025
Programme pour la sainte Clotilde

Sainte Clotilde, vitrail de l’église saint Maurice à Chinon.
1°) Clotilde pour une aventure dangereuse (10-15 minutes) : l’amourette et l’amulette. Forme empruntée par Annie Hupé au poème éponyme d’Apollinaire, la clotilde se définit par 3 quatrains chacun formé de 3 vers de 7 syllabes suivis d’un vers de 8 syllabes. Le premier vers est composé de 2 substantifs qui commencent par -a- suivi d’une même lettre, et sont reliés par -et- et précédés d’un -l’- : ce sera « L’amourette et l’amulette » (ou l’ordre inverse). Le premier mot est de 4 syllabes, mais avec un -e muet- au bout, donc il compte pour 3 en faisant la liaison avec le -et-, le second est de 3 syllabes qui comptent toutes. Rimes croisées avec alternance de rimes féminines et masculines.
Et pour que la consigne soit absolument respectée, je propose aussi "L'andouillette et l'anisette", pour que les deux lettres initiales des deux mots clefs soient AN. Rimes croisées avec alternance de rimes féminines et masculines.
L’andouillette et l’anisette Font un accord hasardeux : Ça monte vite à la tête, Pour l’estomac c’est dangereux. J’aime mieux goûter Lucette, Car elle a de jolis yeux, Une paire de gambettes Pour qui se déhanchent les vieux. Elle gère la buvette Où l’on boit comme des bœufs Et amasse la galette : Elle économise pour deux.
1° bis) Échauffement très rapide et à retardement : Haïku sur le thème du Vatican.
Léon Quatorzième Ne portera pas malheur Comme Léon Treize ! La Place Saint Pierre Se remplit de bonnes sœurs Qui kiffent le Pape.
2°) Autoportrait partiel (10 minutes)��: Comment je m’assois ? On décrira, on expliquera, comment on a l’habitude de s’assoir, chez soi, chez les autres, et pourquoi, etc.

J’ai deux manières de m’assoir, que je sois chez moi ou chez les autres. La variation dépend de la circonstance précise : devant table ou bureau, ou sur une chaise, un fauteuil, un tabouret, et cetera. Devant une table, je ne croise pas les jambes, et j’essaie de maintenir le dos droit, genoux joints ou légèrement écartés, et je n’en bouge pas avant de quitter la table. En revanche, devant la télévision, sur une chaise ou un fauteuil, peu importe, je croise les jambes, et je balance le pied libre, régulièrement, puis au bout d’un certain temps je décroise et change d’(appui, et je recommence, et ainsi de suite. Il suffit qu’il y ait assez d’espace libre devant moi pour ce jeu de balançoire et pour déplier la jambe. Le balancement change de rythme, s’accélère ou se suspend, selon que la discussion se tend, ou que l’action du spectacle télévisuel devient plus inquiétante, ou fascinante. Si je suis sur un fauteuil, j’ai toujours un des deux bras accoudé, le bras opposé à la jambe croisée sur l’autre. Et quand je décroise et permute les appuis, je le fais aussi pour le coude. Je suis donc toujours un peu tordu, bien enfoncé contre le dossier, c’est l’inconvénient qui me rendra bossu…
3°) Caviardage (10 minutes maximum) : Madelaine avant l’aube. On caviardera cette page d’un roman récent de Sandrine Collette, paru en 2024, de façon à n’en laisser qu’une quinzaine ou une vingtaine de mots formant une petite description, un micro poème, ou un mini récit.

Avant l’aube, le premier qui s’éveille traîne Madelaine vers la forêt. Inconscience ou toute-puissance, Madelaine rappelle le chevreuil dans les bois. Cheminées toujours froides, univers immense, spasmes sauvages, nous sommes des guerriers invincibles, tous les deux. À une enjambée des flammes, oublier nos estomacs, comme si nous étions juste tous les deux, tranquilles sous le ciel gorgé de pluie.
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21 MAI 2025
Programme mémoriel

Échauffement sous forme de liste : « J’ai oublié… ». On fera une liste, pas tragique, de quelques oublis qui nous affectent, et une deuxième, d’autres oublis qui nous indiffèrent.
J’ai oublié à qui j’ai prêté un gros bouquin sur Flaubert et Madame Bovary, et je ne le retrouverai sans doute jamais. J’ai oublié de dire au revoir à mon père à ma dernière visite et je ne sais pas s’il en a été affecté ou non. J’ai oublié pourquoi j’avais un jour, il y a longtemps, commencé à fumer des cigarettes. J’ai oublié mes notes de philo au bac et je m’en fiche complètement. J’ai oublié des vêtements usagés quelque part, mais où ? Quelqu’un les trouvera bien et en fera ce qu’il voudra. J’ai oublié ce qu’on m’a offert à mon départ en retraite. J’attendrai la prochaine retraite et je ferai un effort !
1°) Amorce pour une histoire en 6 lignes et 6 minutes. « On doit prendre des tas de décisions au cours de l’existence. »
On doit prendre des tas de décisions au cours de l’existence. C’est la dure loi de l’existence humaine. Les animaux, on ne sait pas, ils ne nous le diront pas. Les arbres, les cailloux, les nuages, je suppose qu’ils n’ont pas à réfléchir ! Ils poussent là où ils ont été semés, ils roulent quand il y a de la pente, ils se déplacent au gré des vents. Conclusion ? C’est vraiment embêtant d’être un humain, non ?
2°) États d’âme des choses inanimées (10-15 minutes) : Nos objets ont le blues. Prendre le point de vue d’un objet ou d’un animal familier et raconter ou décrire (à la première personne, ou en s’adressant à un autre objet ou animal) des moments de vie quotidienne, l’environnement, les états d’âme, etc. On prendra le point de vue d’un jeu de 32 (ou 52) cartes, ou d’une seule de ses cartes si l’on préfère.

On m’appelle le Croupion… Ils croient que je ne le sais pas, mais ça me fâche tout de même. Je suis l’As de Pique, c’est pourtant moi le plus puissant à la belote, non ? Les cœurs, je les mets sur le carreau, je leur fais bouffer du trèfle par la racine, moi. Je ramasse les rois, les dames, je ne peux pas être battu (si j’ose dire !). Et sous prétexte que des mauvais plaisantins, en cuisine, ont décrit le cul des volailles rôties comme ça, c’est sur moi que ça retombe et je suis le Croupion. Ça fait rire les petits, quand ils jouent à la bataille ou au mistigri. Il y en a toujours un qui crie « Croupion ! » en m’abattant violemment sur le tapis vert pour couper une autre couleur, ou pour montrer sa victoire. Résultat : je suis tout corné à force d’être appuyé sur la table. Les autres As, eux, ils me battent froid. Quand le père brasse le paquet avant de distribuer, je les entends qui complotent, qui rigolent en me frôlant, qui se moquent de mes petits plis, de ma couleur, même. Je les soupçonne franchement d’être racistes. Un jour, pendant une partie où s’était invité un snob, un qui a des lettres, j’ai entendu un des enfants dire que je portais malheur. Et le snob a répliqué, ce pédant, que non, c’est la Dame de Pique qui annonce la mort, pas l’As. Voyez Pouchequine, qu’il a dit, ou un nom comme ça. Mais tout le monde a ri, et le reste du paquet a fait comme si c’était une blague. Puisque c’est ainsi, je prends mon mal en patience. Au fond de moi-même, je sais ce que je vaux, et je ne crois pas ce qu’on en dit. Je suis l’As, l’As des as, même, n’en déplaise aux rouleurs de mécaniques des films populaires. Et quand on me remballe dans l’étui froissé avec mes 31 camarades – je devrais dire mes sujets – je ne m’endors pas tout de suite. Je rumine ma disgrâce et ma fierté cumulées. Je suis l’As ! Voilà ! Le Croupion noir vous salue bien, Messieurs.
3°) Un fragment bizarre (10 minutes) : Qu’est-ce que c’est que ça ? On développera en cinq ou six lignes, à partir de n’importe quel groupe de mots, cette phrase vaguement poétique qui peut tourner en boucle : « aux buissons croulants, lenteurs sucrées suscitant le souvenir des maraudes, fragments d’automne… »
Chaque fois que je prépare les tartines du petit déjeuner pour mes petites-filles, avec de la gelée de mûres, ce geste évoque pour moi quantité de remontées mémorielles, presque sensuelles, et je fais revivre, silencieusement, le souvenir des maraudes, fragments d’automne aux buissons croulants, lenteurs sucrées suscitant l’envie de s’écorcher les doigts aux petites épines afin de pouvoir les lécher empreints du jus des fruits écrasés, et je me remémore les trajets de mes diverses cueillettes, les traversées de telle ou telle pâture, les rencontres avec des marcheurs ignorant tout de la flore locale et s’étonnant qu’on puisse cueillir pour confiturer au lieu d’aller se fournir simplement au supermarché. Ces séances de petit déjeuner, avec leur train de souvenirs, ne sont jamais aussi riches avec d’autres confitures : une cagette d’abricots, une brassée de tiges de rhubarbe, ce ne sont pas des aventures. Les mûres, oui, ce sont des heures de marche, de fatigue, et de plaisir inépuisable, jusqu’à la dernière petite cuiller de chaque verrine.
L’hiver arrivait chargé de glaces et de nuages froids, et chacun se réfugiait dans les petits plaisirs qui réchauffent le cœur et le corps, les cafés brûlants accompagnés de petits gâteaux, et l’on suçait lentement, pour les garder plus longtemps en bouche et en mémoire gustative, les pâtes de fruits que les indélicats disaient bonnes pour les croulants, lenteurs sucrées suscitant le souvenir des maraudes, fragments d’automne aux buissons encore un peu verts mais tirant déjà sur le rouge, belles couleurs de la patience avant le gel des émotions et des sentiments. C’était là un des moments magiques qui faisaient revivre l’époque où l’on pouvait encore bouger, sortir dans la campagne, et qui permettaient d’attendre pendant trois ou quatre longs mois le retour hypothétique du soleil et de la douceur.
4°) Le courrier des lecteurs (10 minutes) : Exercice sur article réel. Une fois distribuée la photocopie d’un article récent de journal régional, chacun fera son « courrier » adressé à l’auteur de l’article, ou au rédacteur en chef, ou carrément à la direction du journal.

Monsieur le Rédacteur en chef du Progrès, Croyez-vous vraiment judicieux et pertinent d’interviewer une sociologue aussi titrée, une dame du CNRS, pour lui faire analyser à toute vitesse des pitreries dégénérées commises par des troupeaux d’excentriques qui se déguisent et hurlent des insanités dans les rues avant d’aller se pinter des dans restaurants hors de prix ou de se faire ramasser par la patrouille pour ivresse et désordre sur la voie publique ? Les EVJF ou EVG, comme vous l’écrivez, sont des âneries. J’attends mieux de votre journal. Vous pourriez parler de vie pratique, de cuisine, de confitures, de la beauté des maraudes d’automne, non ? Avec mes regrets de vous annoncer mon désabonnement, veuillez agréer, Monsieur, mes meilleurs sentiments. Un lecteur naguère fidèle mais découragé.
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7 MAI 2025
Programme qui peut plaire ?

Échauffement sans elle et sans ailes (5 minutes) : Lipogramme. On écrira un court texte, d’au moins deux ou trois lignes, sans utiliser la lettre L. Contrainte : il faut que le texte produit ait du sens, et qu’il parle du mois de mai.
Beau muguet de Mai Parfum grisant qui entête, Petits brins qu’on offre Aux dames qu’on aime bien Quand on veut s’en faire aimer.

1°) Écriture brève mais savante (10 minutes) : Définition. Définir un mot imposé peu connu, (source : Le Grand Robert), à la manière d’une brève entrée de dictionnaire. Consigne : indiquer le genre, l’étymologie, le ou les sens du mot, une citation d’auteur, des synonymes, des antonymes, etc. Trois mots imposés : burgau, motelle, ononis.

Burgau. N. m. Étymologie : « burg » (de l’allemand, ville, village fortifié). Mot populaire du grand Est de la France (Moselle, Bas-Rhin), désignant par plaisanterie une grosse maison individuelle jugée prétentieuse. « Ce diable-là, dans son burgau, il veut tout dominer : mais quand il a mangé trop de choucroute, il rote comme tout le monde. » Marcel Schneider, Les gros Cochons de Riquewihr, 1960. Motelle. N. f. Étymologie incertaine : mot, ou motif. XIXème siècle, régionalisme. Petit billet doux, accompagnant l’envoi de fleurs de cartes illustrées, généralement d’une ou deux lignes, en très peu de mots. « Marianne collectionnait précieusement les motelles de tous ses soupirants, les empilant dans un carton à chaussures qu’elle maintenait fermé par un ruban rose. » Colette, Brouillons inédits, CNRS, 1990 (posthume). Ononis. N. f. Du grec « onos », l’âne. Sc. Vét. Maladie bénigne affectant cette catégorie d’équidés, consistant à ne pas pouvoir hennir complètement. L’âne malade pousse son « Hi ! » sans arriver à produire le « Han ! ». Cette affection se traite avec des gargarismes à la sauge.
2°) Discours de circonstance (10 minutes) : On expliquera à un groupe de travail interministériel l’intérêt qu’il y aurait à supprimer l’heure d’hiver.

Mesdames et Messieurs les ministres et Secrétaires d’État, vous voici devant l’obstacle législatif, et vous devrez trancher. Conserver, ou supprimer, l’heure d’hiver, cette anomalie que l’Europe entière pratique depuis des décennies, depuis trop longtemps déjà, provoquant moult détresses psychiques et désordres technologiques, sans parler des pertes économiques énormes, mais pas incalculables. Madame le Ministre des Comptes Publics, sachez qu’à chaque fin d’octobre, dans trente-six mille communes et pas moins de cinquante mille services publics variés, un agent passe entre un quart d’heure et une heure à régler toutes les horloges, pendules, carillons, tous les systèmes électromécaniques de sonneries de cloches ou de sirènes. Quatre-vingt-dix mille fois un quart d’heure, Mesdames et Messieurs, ce sont plus de vingt mille heures payées sans aucune utilité. Monsieur le Secrétaire d’État à la Petite Enfance, sous la tutelle de Madame la Ministre de l’Éducation, vous n’ignorez pas ce que les décalages horaires, au début de l’automne, génèrent en termes de crises de panique, chez des mères de famille, des nounous, chez les personnels des crèches publiques ou privées, et ce que cela entraîne concrètement : des milliers d’heures de travail perdues à consoler des enfants, à les réveiller, à attraper le métro suivant, et cetera. Monsieur le Ministre de la Défense, savez-vous réellement si nos forces armées, au recrutement que je qualifierais volontiers de « bas de gamme », maîtrisent toutes le principe théorique de ce changement d’heure ? Vous n’êtes pas sans savoir, bien que cela ne soit jamais ébruité longtemps, que des accidents regrettables – heureusement peu nombreux pour l’instant – ont affecté plusieurs casernes, depuis une dizaine d’années, occasionnant des pannes mécaniques dans nos systèmes de défense, et parfois même augmentant le quota officieux des pertes en vies humaines auxquelles nous avons droit. Enfin, Monsieur le Premier Ministre, comprenez bien que ce terme « heure d’hiver », du point de vue communicationnel que vous affectionnez tant et dans lequel vous excellez, est chargé d’une connotation péjorative, voire négative. L’heure d’été, devenue permanente et inamovible, mettra, dans l’esprit des Français que vous dirigez, la joie, l’ensoleillement et l’émerveillement dont ils ont bien besoin. Quel meilleur moyen de bien les gouverner, et de rester à l’abri des turbulences politicardes qui vous menacent ? L’heure d’hiver, à terre ! L’heure d’été, santé !
3°) Logorallye et poésie (10-15 minutes) : 10 mots pour un poème de 10 vers. Brisé, Demander, Étoile, Imaginer, Minuit, Muet, Rêve, Simple, Vin, Vitre.

Il est bientôt minuit, Un rêve me réveille. Je croyais la vie simple : Je pouvais demander Du vin et de l’amour, Ou même imaginer Que derrière la vitre Ton cœur n’est pas muet. Le mien, tu l’as brisé, Mes nuits n’ont plus d’étoile.
Solutions lexicographiques.
(n. m.) Coquillage univalve nacré ; nacre de ce coquillage.
(n. f.) Poisson osseux (Gadidés) de forme allongée, qui fréquente les fonds rocheux (une espèce est aussi appelée mustèle, loche franche).
(n. m.) Plante dicotylédone (Légumineuses, Papilionacées) herbacée, annuelle ou vivace, dont les variétés sont appelées coquecigrue, bugrane jaune et bugrane arrête-bœuf.
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23 AVRIL 2025
Programme de la Saint Georges.

À vos feutres (5-10 minutes) : Caviardage pour poème express ! Voici la page du jour (le 23/4), de Boris Vian, L’Automne à Pékin. On la caviardera de manière à produire un poème express de 25 à 30 mots, pas davantage.

Il regardait la tôle sur le tas de déblais : « Je suis payé pour faire respecter cette règle ! » Cette quoi ? Cette règle. Salaud !
Il regardait par terre et continuait à déblayer. Travail. Travail forcé. Contrat. Travail. Travailler comme des brutes. Respirer. Règle irréfragable. Règle irréfragable. Suer. ... Nous faisons notre boulot.
Ses cheveux luisaient de sueur. Il continuait le travail. Je suis fatigué. Je reprends le souffle. Je suis fatigué. On ne peut pas travailler sans respirer. Nous faisons notre boulot.
La poussière faisait, à droite et à gauche, un tas de déblais. Monsieur Amadis, vous avez votre travail, dit-il, pour faire respecter ce salaud d'Arland ? Ça nous regarde, Marcel.
Poussière collée, pantalon accroché, genoux par terre, Marin continuait à déblayer la tôle, d'un coup de reins fatigué, forcé. Marin s'arrêta, sans respirer.
Échauffement sanctifiant (5 minutes) : Proverbes nouveaux. On inventera un proverbe sur la fête du jour, la Saint Georges, et on en donnera une explication brève et d’apparence assez vraisemblable et logique.
« À la saint Georges il faut rendre gorge. » Ce proverbe plutôt moderne vient de l’époque de Pompidou, prénommé Georges, lorsqu’il était directeur général de la banque Rothschild. Son intransigeance vis-à-vis des mauvais clients l’avait fait surnommer « le dragon de saint Georges », et peu à peu les cadres de cette banque, en cachette, répandaient ce qui a fini par devenir un proverbe. Comme tous ceux qui s’appuient sur le nom d’un prétendu saint de l’Église, il n’a pas plus de valeur que ceux qui parlent d’hirondelles ou de printemps. « À la saint Georges, trop tard pour semer l’orge. » Proverbe irlandais. Généralement, on sème l’orge de printemps entre février et la mi-avril. Et s’il n’y a pas d’orge, pas de whisky !
1°) Logorallye (10 minutes) : 10 mots pour une histoire. On écrira une petite histoire en utilisant obligatoirement les dix mots suivants, dans n’importe quel ordre. On a la possibilité de les conjuguer et de les passer au pluriel : stupeur, silence, pouvoir, lézard, prison, renseignement, dernier, possible, s’inquiéter, discussion.
Après un moment de stupeur, il se fit un grand silence dans la salle sécurisée du Ministère de l’Intérieur. La révolution était-elle en marche ? Les informations qui venaient d’arriver pouvaient-elles être inexactes ? La bombe qui – paraît-il – allait exploser dans la plus intéressante des trois cent soixante salles du Palais de l’Élysée allait-elle exploser ? C’était possible, dit le Ministre. Et dans ce cas, la République décapitée reposerait sur mes épaules, et sur mes fidèles sections de maintien de l’ordre et de sécurité. Si mes renseignements sont exacts, d’ailleurs, nous serons fixés d’ici cinq minutes. Ne vous inquiétez pas : notre salle de réunion est à l’abri des retombées. Nous serons le dernier rempart contre les révolutionnaires. Les prisons les attendent, toutes ces nouvelles prisons Que l’État a bien voulu construire, sur ma demande. Et ensuite nous ferons régner un ordre terrible et irréfragable sur le pays entier.il n’y aura pas un canard, pas un lézard, pas un cafard qui s’avisera de nous désobéir. Et je serai Président à la place du Président. Et ce n’est pas Madame Macron qui le regrettera, je vous l’assure. Elle est d’ailleurs en lieu sûr, à cette heure. Fin de la discussion. La séance est levée. Il reste cinq secondes avant la nouvelle ère : cinq, quatre, trois, deux, un…
3°) Écriture brève (5 minutes) : Homophonie. Écrire quelques homophonies approximatives à partir d’une phrase simple, tirée d’une page de littérature, ou d’un titre d’œuvre. Titre imposé : Les filles qui mentent, roman de Eva Björg Ægisdottir.

Les billes cimentent. Le défi qui me tente. Des filles qui sentent. Les filles qui me tentent. Défibrille les amantes !
4°) Écriture mi-longue (10-15 minutes) : Changement de point de vue. Souvenirs d’un drap de bain, à la première personne, sur un ton alternativement désabusé et joyeux.

Ma vie est un supplice. Je suis né dans une filature des Vosges, où on m’a proprement tissé, on y a cousu mes ourlets, et on m’a expédié par Chronopost. Je ne vous dis pas le carton d’emballage : c’était sombre, ça sentait la colle, j’ai été secoué, et puis on m’a laissé voir la jour. J’ai découvert où j’allais finir ma vie. Une famille nombreuse. Des prolos ! Vous imaginez ? Des marmots qui ne respectent rien, des ados boutonneux, et des parents… Chez ces gens-là, monsieur… Dès le début, c’était mal parti : ils m’ont utilisé sans faire un premier lavage, pour ôter l’apprêt. Et ils m’ont pris pour un torchon de toilette ! j’étais encore raide et on m’a plié violemment pour me déraidir, et j’ai entendu la bonne femme : « Qu’est-ce qu’ils sont rêches, leurs torchons ! Pour le prix… J’en achèterai plus chez eux ! » Ils m’ont gardé un mois avant de me laver, les crados. Enfin, après quelques lavages, je m’étais assoupli : j’avais compris qu’il fallait être doux, obéissant, et peu à peu j’ai pris goût à certains moments de mon existence. Quand c’était Lolita, je l’enveloppais bien, je frottais plusieurs fois aux mêmes endroits, et je passais de belles nuits à rêver… Je ne vous dirai pas tout. Mais quand c’était Pierrot, qui passait en dernier, ce n’était pas la fête. D’abord, il ne se savonnait pas, et je récoltais toutes ses saletés, notamment entre ses orteils… Et il me laissait en boule, toute la nuit, humide au point que certains jours j’ai attrapé des moisissures. Heureusement le lendemain la mère me ramassait et me mettait sur le séchoir avec mes collègues, mais ceux-ci me faisaient la gueule. « Tu pues, disaient-ils. Tire-toi de là ! » Vous savez bien qu’un drap de bain, ça n’a pas de pieds. Alors j’essayais de sécher. Et peu à peu, je me suis effiloché. À cause du chien, surtout. Jeannot, le petit salopiau, et le plus bête et méchant, jouait avec le doberman à savoir qui tirerait le plus fort, et qui lâcherait le dernier. Les dents d’un doberman, je ne vous les conseille pas. Ça fait des trous, même dans du coton de haute qualité environnementale. Donc un jour, on ne m’a plus lavé. Je suis devenu tapis de sol devant la baignoire, la décadence ! Et pour finir, je suis serpillière, maintenant. Mes amis, choisissez bien votre famille d’accueil, si vous pouvez.
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9 AVRIL 2025
Programme d’Avril et de proverbes.
Échauffement (6 minutes) : Un petit poisson ? Un texte amusant, de forme libre, avec un poisson.

Un petit pêcheur, Très attentif à sa ligne, Guette son flotteur. Voici la maligne Qui lui colle dans le dos Un beau maquereau. Le pêcheur, badaud, Croit qu’il a fait une touche. Mais la fine mouche Le pousse dans l’eau Et tous les poissons frétillent. Qui rit bien ? La fille !
Un vieux pêcheur, Au bord de l'eau, S'ennuie. Depuis trois heures, Ses asticots Sont cuits. Il voit dans l'eau Tous les poissons Danser, Et dans son dos Un beau carton S'affiche. C'est une farce De ses enfants, Mais il s'en fiche. Rentré, ce soir, Il fera cuire Ce beau poisson, À la bougie. Et son vieux cœur Sera réjoui.
1°) Cinq verbes pour un compliment de cinq phrases (5-10 minutes) : Suivez le fil ! Voici cinq verbes, qu’on devra utiliser en cinq phrases, dans l’ordre où ils sont donnés, à l’exclusion de tout autre verbe, dans une déclaration élogieuse mais brève faite à quelqu’un qui sera progressivement identifié par le texte produit : Fourguer, vider, entêter, maîtriser, trembler.
Ma chère Catherine, tu m’avais fourgué en douce le plus beau des cadeaux, le lingot d’or du coffre de ton papa. Ensuite, tu avais vidé rien que pour moi sa cave de toute sa collection de crus millésimés et cotés, de vieilles eaux-de-vie sans âge, et quelques pots de conserves de foie gras. Avec ces offrandes, pleines d’amour et de désintéressement, et avec quelques petites attentions supplémentaires, tu m’as entêté à un degré inimaginable ! Désormais, je ne maîtrise plus ma passion pour toi, pour ta générosité et ton grand cœur, et pour la délicatesse de tes choix. Voilà pourquoi aujourd’hui, devant toutes tes qualités de fille unique à héritage, je ne tremble plus à l’idée d’un refus de ce compliment et de cette demande en mariage, ma chérie.
2°) Je me souviens du mur… (10-15 minutes) : Nostalgie réelle ou inventée. On se souviendra d’un mur particulier de l’enfance ou de l’adolescence : description, anecdotes, sentiments, etc.

Je me souviens du mur du pensionnat qui m’a éduqué pendant sept ans. Pensionnat de centre-ville, vieux bâtiments reliés au fil des siècles, peut-être, avec des cours dans de nombreux recoins. Un mur particulier me revient en mémoire, parce que c’était la cour des grands, ceux d’après la classe de Seconde. Il avait un côté très haut, au sommet inaccessible, et un autre plus bas, sur lequel il était possible de se jucher, avec un peu d’élan et une bonne détente. On se trouvait alors sur un faîte de béton, en surplomb de la Rue Samaritaine, et en se tordant le cou, on apercevait le carrefour et la Place des Bons-Enfants. Aux récréations, c’était au plus rapide pour avoir la meilleure place, la moins inconfortable parce qu’on pouvait appuyer le dos et de tenir à califourchon. Les guetteurs, ceux des classes inférieures, étaient chargés de surveiller l’arrivée des pions, et on avait le temps de jeter dans la rue les cigarettes, en cas d’urgence. L’autre partie du mur, dans cette cour carrée, c’était le lieu des défis et des records. Dix pas d’élan, pas plus, une marque au sol, et on courait se jeter les pieds en avant, comme pour y marcher, à la verticale, et le but du jeu était de faire au moins trois pas, et de jeter la jambe le plus haut possible avant de retomber, si possible sur ses pieds. Il fallait repousser la muraille, en quelque sorte, et se retourner. Seuls les meilleurs acrobates y arrivaient, et tentaient de battre leur record. Pour mieux marquer leur exploit, certains se poudraient les semelles à la craie afin de pouvoir tracer un trait sur le crépi gris. Personnellement, je n’ai jamais tenté de faire un exploit à ce jeu, je me contentais du petit mur et de regarder la rue. On jouait, avec les copains, à être comme des prisonniers qui observaient la vie des individus libres. Certains grands, paraît-il, des Terminales, ; faisaient le mur par là, pour de bon, mais on ne savait pas comment ils revenaient : par le chemin inverse, c’était beaucoup plus haut, et plus risqué, de s’élancer du trottoir. Là non plus, je ne faisais pas partie des audacieux…
3°) Babebine en F-R (5 minutes) : On écrira une petite comptine en forme de babebine sur les sonorités suivantes à la rime : FAR-FER-FIR-FOR-FUR.
Chérie, promenons-nous au phare, Passons la vieille porte en fer. Le vent est doux, un vrai zéphyr. Viens près de moi, serre-moi fort, Je te protège des griffures.
Mange donc du far, Et file en enfer ! Avec du kéfir Tu deviendras fort. Change de coiffure !
Écrasez vos cafards Avec du fil de fer, Ça devrait suffire. Si ça sent trop fort, Ça vient du sulfure !
4°) Amorce pour une histoire en 6 lignes et 6 minutes. « Qu’est-ce qu’elle m’a donné comme fil à retordre, celle-là ! »

Qu’est-ce qu’elle m’a donné comme fil à retordre, celle-là ! Cette apprentie désobéissait tout le temps, cassait les aiguilles de la machine Singer, dévidait les bobinos et les emmêlait. Elle avait toujours perdu ses ciseaux et piquait ceux des copines, et il était impossible d’obtenir d’elle un ourlet droit. Et elle se piquait les doigts, exprès, pour pouvoir faire tomber une goutte de sang sur le mouchoir blanc qu’on lui apprenait à broder. Elle a fini repasseuse…
5°) Conclure en vitesse (5 minutes maximum) : Homophonie. On écrira quelques homophonies approximatives sur cette expression : « C’est cousu de fil blanc »
Ses cousins défilent, au blanc. Des coups sur des filles blanches ? Ce cou nu me refile un plan. Ses cousins défient le gland. C’est cossu, chez Phil Blanc. Ces cousins soudés qu’il planque.
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26 MARS 2025
Programme reconstituant, volcanique et printanier.
La poésie. Volcanique est précisément le thème que nous nous proposons d’explorer en votre compagnie tout le long du printemps. Pour dire les volcans en ébullition et les matières rocheuses en fusion, bien entendu. Mais, surtout, l’énergie créative à l’état pur, l’éruption de l’imaginaire, ses coulées de lave, qui changent le mot en vision. Pour dire que la poésie, quand elle jaillit afin de fendre l’horizon et montrer le monde autrement, est effervescence, débordement et, avant tout, force du vivant. Pour dire enfin que l’éruption poétique ne connaît pas de limites. Pensez à tous ces vers qui se sont, lecture après lecture, déposés en vous, une couche après une autre, comme des strates de lave, pensez à la persistance de la vision qu’ils recèlent. Elle rejaillira aussitôt. Puisque la poésie est ainsi. Volcanique.
Échauffement (6 minutes) : Amorce pour une histoire en 6 lignes. Cette histoire sera triste et commencera par ces mots : « Ça va péter ! »

Ça va péter ! C’était la dernière sommation et le petit cambrioleur avait oublié ses prothèses auditives. Comme de surcroît il avait la vue basse, il ne vit ni les deux dobermans qui accouraient du fond du terrain vague, ni la patrouille de la BAC qui avait pris position, bras tendu et doigt sur la détente. Ce fut presque le point de départ d’une bavure policière, que le ministre de l’Intérieur sut étouffer avec tout l’art qu’on lui connaissait.
1°) Printemps des poètes 2025 (10-15 minutes) : Volcans de tous les pays, unissez-vous et pétez ! On écrira un texte poétique, de forme libre, sur le thème de cette année, la vingt-septième édition : la poésie volcanique.
Sous les apparences Sous le Fuji-Yama dort la lave discrète. Les cerisiers en fleurs miment l’éternité Du renouvellement de leur beauté fragile. Sur le Fuji-Yama, le manteau de la neige Respire l’innocence et la tranquillité. Demain viendra le feu, demain viendra la suie, La force souterraine aura démantelé Le paysage calme et la carte postale. La terre s’ouvrira et tout y tombera, Le ciel en rougira jusqu’à la lune pâle, Le bruit retentira dans toutes les oreilles Et le monde assourdi, anéanti, brisé, Se recomposera quelques siècles plus tard. Dans le fond de mon cœur, et sous mon air paisible, Je cache mon volcan. N’ayez pas peur de moi.
2°) À compléter (10 minutes) : Texte amputé. Voici un texte poétique (une Fable) qui a été saccagé : il n’en reste que quelques mots du début de chaque vers. On le reconstituera comme on pourra.

Chacun se … On voit courir … Tant de … La plupart … Au Chien … Ce … La quitta … La rivière … À toute … Et n’eut ni …
Chacun se dit près d’exploser. On voit courir vers les volcans Tant de touristes excités ! La plupart de ceux-là ressemblent Au Chien bêta devant des étincelles. Ce chien, voyant sa niche en feu, La quitta : il croyait être déjà rôti. La rivière était là pour noyer ses brûlures. À toute la famille, il aboya pour rien, Et n’eut ni récompense, ni le poil roussi.
3°) En voiture ! (10 minutes) : Une petite écriture presque libre. Commencez ou terminez votre histoire avec quelqu’un qui regarde par la fenêtre d’une voiture ou d’un train.

Dans le TGV qui les conduisait à la Gare du Nord, les Dupont se chamaillaient déjà, un quart d’heure après le départ de Lille. Le mari avait toujours eu un faible pour Madame Aubry, et voté pour elle, mais Madame trouvait qu’il en faisait trop à son sujet. « Parce que son père était ministre et avait failli devenir Président, il faudrait tout lui passer, à ta Martine ! C’est rien qu’une socialiste en peau de lapin, une dominatrice qui ne veut pas laisser sa place, une capitaliste ! » Madame venait des corons communistes, alors, la social-démocratie, il ne fallait pas lui en parler. Monsieur, lui, essayait de la convaincre, lui parlait du succès annuel de la Grande Braderie, de la culture et des arts dans leur bonne ville. Madame n’en démordait pas : « Faudra bien qu’elle quitte, un jour, et ça ira bien mieux à la mairie sans elle qu’avec ! » Dialogue de sourds, disputes ressassées, voilà ce qui fait tout le sel et la solidité des vieux couples, jusqu’aux bouderies partagées. « Allez, zou ! » dit le mari. « Pousse-toi, laisse-moi ta place près de la fenêtre. Je vais regarder le paysage, ce sera moins déprimant que de t’écouter. » Collé à la vitre, il regarda défiler le plat pays, puis les petites ondulations des champs de patates, et se réveilla quand sa femme le secoua et lui dit de se presser d’attraper les valises. On était enfin à Paris, chez Madame Hidalgo, pensa-t-il, serein.
4°) Acrostiche obsessionnel (5 minutes) : Un peu de méchanceté gratuite. On écrira quelques phrases dont les mots devront commencer successivement, de façon récurrente et systématique, par les initiales suivantes : T.R.U.M.P., plusieurs fois de suite. On fera obligatoirement des séries complètes, et les phrases peuvent enjamber cette série de cinq lettres.

Terrible Russie : Une Médaille Peut Te Rendre Universel, Mon Pote ! – Ton Rêve Ukrainien Me Perturbe, Trop Risqué. – Un Malaise Persistant Te Ramènera Un Moment Pacifique : Tu Rencontreras Une Mort Prématurée !
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12 MARS 2025
Programme mémoriel.
Échauffement (5 minutes) : Haïku de mémoire. On écrira un haïku qui résumera l’exercice que l’on se souvient avoir apprécié lors du précédent atelier. Il faudra que cet exercice soit nommé…
Gonfler la Genèse ? Exercice sacrilège. Bernard en enfer ! Quand un ironème Vient s’imposer au programme, On maudit Candel. Écrire des brèves, Un peu comme Fénéon, Prend beaucoup de temps. Faire la gonflette, Quand on a le cerveau vide, Ça essouffle vite !
1°) Juste un commentaire (5 minutes) : Une phrase provocatrice. « Peut-être est-il plus important d’oublier que de se souvenir ? » Lucien Suel, Rivière, 2024.

Je croyais avoir oublié Suzette et ma mésaventure. Mais rien qu’à m’entendre poser la question du choix entre l’oubli et la mémoire, mon cerveau malade a réactivé ce que j’avais soigneusement enfoui, depuis au moins… très longtemps. C’est le mot « oublier » qui a tout déclenché. Cette Suzette-là, en me quittant et en me trahissant honteusement à la face du monde – à savoir la classe de 4ème B – m’avait balancé cette phrase définitive : « Mon petit Bernard, j’aurai vite fait de t’oublier. Mais toi, tu te souviendras de moi ! L’important, c’est la mémoire ! Tiens ! Tu t’en souviendras, de celle-ci ! » Et j’avais reçu en pleine figure une double gifle. Et voilà… Maintenant je vais me remettre à penser à elle, et à tout ce qui aurait pu changer dans ma vie, si… C’est fichu. Je ne pourrai plus l’oublier.
2°) Retour chez soi (15 minutes) : À la manière de Mazarine ? On imaginera, comme la fille de François Mitterrand l’a fait dans 11 Quai Branly, qu’on est invité à revenir pendant une journée dans les lieux où l’on a vécu enfant, et qu’on a quittés voilà longtemps. Quels sentiments ? Quelles émotions ? Quels changements ? Un peu de description ne peut pas faire de mal…

Je ne suis jamais retourné vivre dans ma maison natale depuis que mes parents l’ont quittée pour aller s’installer cinquante kilomètres plus loin. Je suis assez souvent repassé, mais toujours brièvement, sur le chemin qui y conduit, mais pas une fois je n’y ai redormi, ni pénétré dans une des pièces ou des dépendances. Je saurais pourtant décrire par cœur l’escalier en bois, le grand seuil en pierre, la porte sur l’arrière et son verrou en fer, qu’il fallait pousser, le soir. Je saurais, les yeux fermés, au bout de combien de pas il faut tendre la main pour tourner la poignée de telle ou telle porte. J’avais environ vingt ans quand cette maison est devenue celle de quelqu’un d’autre. Je sais que des modifications ont été faites, que beaucoup d’éléments de confort ont été ajoutés ou réinstallés, mais je sais aussi que, vue de l’extérieur, cela reste impossible à concevoir : elle est toujours pareille, aux yeux. Même pour une demi-journée, aujourd’hui, je ne voudrais pas savoir qu’un plancher a changé de couleur, où je jouais à faire rouler mes petits jouets. Je ne voudrais pas savoir que tel ou tel canapé moderniste, ou rococo, a remplacé la cuisinière ou l’évier. Je ne veux pas savoir si les poutres apparentes du plafond ont disparu sous des panneaux de Placoplâtre, ou si des spots éclairent les recoins de la trop grande pièce où s’entassaient des armoires et des lits d’ancêtres. Et même dans les dépendances, nos salles de jeux d’autrefois, je n’irais pas : à quoi me servirait-il d’y entrer, si elles sont devenues des chambres d’amis ou des chambres d’hôtes, ou des garages à vélos ? Je crois qu’une remontée des souvenirs serait alors un choc trop violent. Je préfère revivre mentalement des souvenirs, même en voie d’effacement, incertains ou incomplets, voire refabriqués, plutôt que d’être contraint à voir qu’ils n’ont plus d’existence matérielle.
3°) Expérimental (10 minutes) : Le gestomètre. Le gestomètre est une forme fixe de poésie imaginée par Robert Rapilly. Il s’agit de choisir une action simple et quotidienne que l’on divise en un certain nombre de sous-actions successives décrites avec froideur, les verbes étant conjugués à l’infinitif.

Actions proposées, au choix, à cet exercice : le petit déjeuner, la boulangerie, la relève du courrier, etc.
Vérifier le niveau d’eau dans la bouilloire Appuyer sur le bouton de mise en route Ouvrir la porte de droite du placard suspendu Prendre deux grandes tasses Poser l’une des deux près de la cafetière Aller poser l’autre sur la table Ouvrir le tiroir à couverts Prendre deux cuillers à café et quelques cuillers à confiture, un couteau d’office et un éplucheur économe. Déposer ces couverts à la bonne place sur la table Ouvrir le grand placard mural et prendre des dessous de plat et les serviettes Déposer cela sur la table Choisir une boîte de thé en poudre Retourner au petit placard et prendre la cuiller à thé oubliée et revenir la poser sur la table Ouvrir le vaisselier et prendre la théière, ôter son couvercle Poser la théière sur un dessous de plat Retourner au placard et prendre le filtre à thé oublié Revenir vers la table et placer le filtre dans la théière Ouvrir la boîte de thé Prélever une quantité avec la cuiller spéciale Verser le thé dans le filtre Retourner à la cafetière, remplir la première tasse avec le café de la veille Ouvrir la porte du micro-ondes et y placer la tasse Arrêter la bouilloire quand l’eau bout Aller vers la table et remplir la théière Rouvrir la porte du vaisselier et prendre le sablier oublié Le poser sur la table après l’avoir retourné Ouvrir le tiroir à pain Sortir le pain, la planche à découper, et poser le tout sur la table Retourner près du placard et prendre le couteau à pain oublié Revenir à la table et couper six à huit tranches de pain Aller au réfrigérateur Ouvrir la porte Prendre quelques pots de confiture et aller les poser sur la table Refermer le réfrigérateur Mettre en route le micro-ondes pour réchauffer le café Revenir surveiller l’écoulement du sable Retourner chercher dans le placard deux verres à eau Les rapporter sur la table Aller chercher la carafe et la remplir complètement Revenir vers la table et remplir les deux verres d’eau Attendre que le sable ait fini de s’écouler Ôter le filtre à thé L’emporter dans l’évier Attendre que le micro-ondes sonne et l’ouvrir, prendre la tasse de café réchauffé et l’apporter sur la table Verser le thé dans la deuxième tasse Fermer la porte du micro-ondes Ouvrir les couvercles des pots de confiture S’asseoir Appeler l’épouse pour lui dire que c’est prêt Attendre Déjeuner.
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19 FEVRIER 2025
Programme de variétés simplettes.
1°) La gonflette (5-10 minutes) : Des mots nouveaux sur de vieilles paroles. On gonflera cette phrase de l’intérieur en y insérant le plus de mots possibles, à n’importe quel endroit. « La terre était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux. » Genèse, 2. Il faut qu'à la fin il n'y ait plus aucun rapport avec cette histoire de Big Bang ou de création du monde.

La cagette de pommes de terre était vraiment informe et dégueulasse d’aspect, mais il y restait quelques tubercules en bon état apparent. J’avais le ventre vide, un petit couteau, et puisque tout le reste de l’équipe avait abandonné l’expérience, il fallait bien que je me débrouille. Je mis un moment à en nettoyer une dizaine, mais je conservai les épluchures, on ne sait jamais, si je ne trouve rien d’autre je les ferai bouillir, ce sera une soupe légère, voilà. La nuit approchait, les ténèbres ne me faisaient plus peur, et je plaçai mon repas dans la casserole posée sur les braises. Heureusement que j’avais encore de quoi faire du feu. Je finirais bien par brûler les murs de la baraque, et si je pouvais capturer un ou deux rats j’aurais de la viande fraîche. J’en avais tout de même un peu marre, de ces expériences d’une semaine de survie imposée par l’entreprise, soi-disant pour prouver nos capacités cachées et souder les employés. Souder ! Tu parles : on était arrivés à dix, et d’un jour à l’autre il y en avait un qui avait des ampoules, un autre une gastro, certains s’étaient blessés au saut à l’élastique, et les autres avaient renoncé, trop démoralisés. Les cadres étaient au-dessus de ça, eux, ils organisaient, et nous, on trinquait. Ce n’est pas ça qui allait réduire l’abîme entre les deux extrémités sociales, hein ? Maintenant l’eau bouillait, et les patates commençaient à frémir, même sans sel, et le petit souffle de chaleur qui s’en dégageait commençait à me faire du bien, nom de Dieu ! Mon esprit libéré planait, je dégustais par avance ce dîner en solitaire, et demain, retour à la boîte pour le débriefing, comme ils disent. J’allais être un héros… Ensuite, la vie continuerait, et avec le souvenir de ces dernières Mona Lisa mal bouillies, je me remettrais à regarder la belle Lisa en jetant des coups d’œil au-dessus de mon bureau. Et je pourrais enfin terminer ce dossier de réassurance sur ce foutu dégât des eaux !
La classe de sixième étudiait la géologie, la terre, les roches, les montagnes, et leur professeur, qui était vêtu comme souvent d’un pardessus informe de couleur indéterminable, ne recevait pas beaucoup d’attention. Et la tête vide, le jeune Nicolas repensait à ses cauchemars de la nuit dernière, dans les ténèbres de sa chambre. Il y avait des monstres, ressemblant à des chauves-souris, qui étaient accrochées au-dessus de son lit, puis il s’élevait vers elles, très haut, puis tombait de nuage en nuage dans l’abîme situé sous son lit, les animaux devenaient des dragons fumants et le souffle de leurs naseaux emplissait la pièce d’une fumée étouffante. Et il se réveillait en sueur, comme chaque nuit. Il se réveilla aussi lorsque le professeur cria et jura : « Nom de Dieu, Durand, vous rêvez encore ? » Ses camarades se mirent à rire. « Ah ! Nicolas… il planait, comme toujours ! », disaient-ils. Mais lui, il était au-dessus des moqueries des autres. Il se savait différent, supérieur, et un jour il leur échapperait. Il n'allait pas passer le reste de sa vie dans ce patelin pourri de Challes-les-Eaux !
La partie de pêche commençait obligatoirement par la recherche des vers de terre. C’était une activité salissante, ces animaux ont une nature informe qui leur permet de se faufiler dans le sol, et ils profitent du moindre espace vide pour s’y précipiter si l’on veut les saisir. Ils vivent dans les ténèbres, mais on les en sortait et on les enfermait dans une boîte au couvercle percé de trous. Ensuite on préparait les amorces : les pauvres bêtes étaient enfilées sur les hameçons, on les balançait dans la rivière, et on attendait. Le petit flotteur rouge et blanc se dandinait au-dessus de l’eau, et on attendait qu’il plonge pour tirer toute la ligne d’un coup sec, en espérant avoir ferré un vairon, ou un goujon, ou un autre monstre vivant dans l’abîme du ruisseau qui coulait en bas du pré. On n’attrapait pas grand-chose, en vérité, et c’était un passe-temps, le moyen de prendre l’air avec un bon prétexte : manger le produit de notre pêche. Parfois un souffle brusque de vent emportait la ligne dans un arbre au moment du ferrage, et on jurait des « Nom de dieu » furtifs, histoire de montrer qu’on connaissait des gros mots, comme les adultes, mais sans risquer de s’en faire entendre : la menace d’une remontrance ou d’une gifle planait toujours au-dessus de nos têtes enfantines. Pendant des heures, on restait là, tranquilles, en écoutant le murmure apaisant des eaux.
2°) Écriture mi-longue (10-15 minutes) : Nouveaux fabulistes. Écrire une fable, en vers ou en prose, avec une moralité, à partir d’un ou deux objets imposés qui en seront les personnages (pas forcément exclusifs). Titre de la fable à écrire : La star et son caprice.
Une midinette sortant d’un studio voulut que son producteur lui offrît à déjeuner. « Du poisson, cher Monsieur, c’est ce qui m’irait bien. Vous qui nagez en eaux troubles, savez que je m’y plais aussi. Je le vaux bien, dit-elle, puisque vous vous faites beaucoup d’argent sur mon dos. » Le producteur voulut lui donner une leçon. Dans un deux étoiles près des Halles, il lui proposa un dos de cabillaud à l’unilatérale. « Cela conviendra à merveille à votre statut de vedette. Cela vous plaît-il ? » « J’eusse préféré des gambas, minauda l’artiste, c’est plus adapté à la ligne de mes gambettes. » « Pourtant, ma chère, le cabillaud, ce n’est que de la morue pas sèche, non ? » L’ignorante, blessée, n’osa pas répliquer. Moralité : On ne provoque pas un puissant sans maîtriser sa langue.
3°) Amorce pour une histoire en 6 lignes et 6 minutes. « Il lui donna un grand coup de pied… »

Il lui donna un grand coup de pied, de tout son élan, et le ballon fila vers l’en-but des parisiens. Les deux défenseurs, médusés, se demandaient pourquoi leur coéquipier prenait ce risque d’une passe à l’arrière : on était à la dernière minute des prolongations, à égalité, et le gardien s’était avancé d’une dizaine de mètres pour encourager les avants à attaquer. Cet imbécile de centre gauche venait de marquer son premier, et dernier, but contre son camp.
4°) Brèves de faits divers (5-10 minutes) : À la manière de Félix (Fénéon). On écrira, en deux à trois lignes au maximum à chaque fois, de façon très condensée et avec une pointe humoristique, au moins trois des articles de journal proposés : une opération de police ; un jugement porté contre un chauffard ; un jugement pour escroquerie ; un accident de la route ; des incendies de voitures ; le braquage d’un bureau de Poste.

(Félix Fénéon par Paul Signac, New York, Museum of Modern Art, 1890.)
Habitants et curieux ont assisté au spectacle des forces de police, en grand nombre, qui ont temporairement démantelé un point de deal aux Mesnils-Pasteur, interpellé quelques individus, et au soir le calme apparent et habituel est revenu. Deux cents militaires de toute espèce ont été mobilisés à Dole pour démanteler un point de deal, pour un nombre indéterminé d’arrestations. Les affaires reprendront demain.
La pétanque ou le volant, il faut choisir. Le tribunal a estimé peu probable que le radar ait flashé un cochonnet à 123 km/h, et a décidé de condamner le père de famille, malgré ses explications. Un prétendu bouliste, flashé à 123 km/h vers Baudrières après avoir causé la chute d’un motard, a été condamné. « Il était avec ses filles lors de ces deux infractions », dit-il. Il a les boules, maintenant. Un conducteur de Saint-Germain-du-Plain aurait sans doute préféré se faire flasher au volant de son cochonnet, puisque, paraît-il, il faisait une partie de pétanque, surtout à 123 km/h, mais le radar des gendarmes ne s’y est pas prêté, le tribunal non plus.
La prétendue agente Belfortaine relevait le nombre de cartes bancaires disponibles dans les logements des personnes âgées, et partait quelquefois avec leur smartphone ou des billets mal rangés, tout en faisant signer un faux bulletin de recensement. À Belfort une fausse agente recensait les téléphones portables, les portefeuilles et les cartes bancaires des retraités. Ses statistiques la conduisent en prison. Recenser les cartes bleues et les billets de banque, mais ne pas faire signer le formulaire officiel : c’est ce qui a trahi cette Belfortaine et lui vaudra un an de prison.
Un poteau électrique a perturbé la vie des Charentais-Limousins dimanche matin, en blessant dans sa chute un automobiliste à la trajectoire hasardeuse, puis en coupant le courant qu’un camion EDF tombé en panne a vainement tenté de rétablir. Mais une seconde équipe veillait ! Un poteau EDF a causé bien du malheur sur le RN 141 : un conducteur inattentif, des câbles variés rompus, et un camion de dépannage en panne. Mais la lumière est revenue. Le manque de résistance d’un poteau électrique charentais a entraîné des perturbations en chaîne très variées, et la voiture qui s’y était heurtée a fini en mauvais état, comme son conducteur.
À Moûtiers, les voitures sont aussi inflammables que les esprits des taxis et des chauffeurs Uber lorsqu’il s’agit de capter les clients ; six d’entre elles ont brûlé dans la nuit de lundi à mardi, sans réchauffer l’atmosphère entre les deux clans fâchés depuis plusieurs semaines. La neige est en feu à Moûtiers, et les chauffeurs de taxi et d’Uber font la chasse aux clients et se bagarrent. Les six voitures brûlées, en tout cas, ne conduiront personne en station !
Récoltant 800 euros, trois porteurs d’armes variées ont braqué un bureau de Poste à Rouen. Un des employés a été blessé au visage, pour prix de son courage, en tentant de s’interposer. L’enquête est ouverte, l’agence est fermée. Postier, métier dangereux, mais pas trop ruineux pour l’institution : trois malfrats ont attaqué une agence rouennaise, blessé deux employés, mais n’ont empoché que 800 euros, le prix approximatif d’un pistolet, d’une batte de baseball et d’un couteau. À Rouen une batte de baseball a blessé au visage un employé de La Poste, qui a remis au bandit sportif la somme de 800 euros. Il n’était pas tout à fait 10 heures. Employés de la Poste trop courageux mais inefficaces, deux rouennais de la rue César-Franck ont abandonné 800 euros aux mains armées de trois malfrats, au prix de légères blessures.
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5 FEVRIER 2025
Programme littéraire.

1°) Amorce pour une histoire en 6 lignes et 6 minutes. « Les lampes s’éteignaient peu à peu. »
Les lampes s’éteignaient peu à peu. Les timides commençaient à faire le tour de la salle, là où faisaient tapisserie toutes celles qui ne savaient ni valser ni danser le rock, et celles qui n’avaient pas encore eu le bonheur d’attirer l’œil. C’était le moment des tangos, et juste après viendraient les slows, le moment idéal pour ne plus se faire chambrer par les copains, les durs, ceux qui profitaient de l’occasion pour s’enfiler un ou deux blancs cassés. Le bal était vraiment en route, désormais. La nuit était à nous.
2°) Mystère animal (10 minutes) : La chèvre. Petite narration explicative, ou portrait d’une chèvre, au choix.

On dit qu’elle pue, mais c’est faux. Pas plus qu’un chien mouillé ou un lapin nain qui a pissé. La chèvre, c’est la fantaisie et l’élégance réunies, même quand elle traîne son gros ventre et ses tétines qui débordent, même quand elle refuse d’avancer, plus têtue qu’un âne. La chèvre, c’est le regard insolent, bien en face, comme celui des enfants : elle attend pour voir si vous allez vraiment vous fâcher, avant de faire un demi-tour en cabriolant ou de vous donner un coup de tête. Tête qu’elle a dure, au physique comme au mental, et les grands coups qu’elle donne à ses copines ou à ses cabris résonnent moins dans sa caboche que dans l’espace où elle joue. Mais elle sait aussi être douce et câline, se frotter contre vous pour abandonner un peu d’odeur et quelques poils, quémander une caresse ou une friandise, sans vous remercier pour autant : tout lui est dû. Avec des sabots si fins et agiles qu’elle peut les faire tenir tous les quatre sur un caillou pas plus grand qu’une brique, sans trembler, elle peut aussi attraper les basses branches pour les mettre à portée de dents, et alors elle grignote comme un lapin. Et si l’arbre est penché, elle y grimpe comme un chat. La chèvre, que son œil fendu fait qualifier de diabolique, est en réalité l’un des animaux les plus tendres et affectueux. Capricieux, certes, et imprévisible : ne la laisser pas brouter n’importe quoi, elle digère aussi bien le coton de vos vêtements que le foin sec, et c’est ce qui rend son lait si délicieux ? Quand je me réincarnerai, si possible, j’aimerais bien devenir chèvre.
3°) Intégration forcée (15 minutes) : Trois citations pour un récit autobiographique. Voici trois citations assez disparates, qu’il faudra intégrer, dans l’ordre où elles se trouvent, au cœur d’un récit d’apparence autobiographique. Ce récit devra commencer par la citation numéro 1, et se terminer par la citation numéro 3. La citation numéro 2 devra être complétée à ses deux extrémités, la citation numéro 3 devra avoir un début cohérent.
1 - « Nous sommes des enfants qui avons besoin d’un tuteur sévère, la difficulté ou la crainte. » Bossuet, Sermon sur l’ambition, Prêche du Quatrième dimanche du Carême du Louvre, 10 mars 1662. 2 - « … partout circulait, dominant tous les parfums, une odeur de friture qui était comme … » Baudelaire, Petits Poèmes en Prose, XIV, posthume, 1869. 3 - « … des tas de copeaux énormes, amusants tout plein, dans lesquels on se roulait en montrant son derrière. » Zola, L’Assommoir, chapitre V, 1877.

« Nous sommes des enfants qui avons besoin d’un tuteur sévère, la difficulté ou la crainte. » Voilà bien le style pédant et coincé d’un curé, ou d’un évêque. C’est ce qu’on se disait, dans notre classe de Seconde 3, en découvrant le début du thème latin que ce salopard d’Abbé Gautier venait de distribuer. Toujours des textes moralisateurs, du Bossuet, du Racine ou du Fénelon ! Jamais de modernes, du Victor Hugo, par exemple ! Traduire un passage des Misérables, ça aurait de l’allure. Tiens, Cosette et son petit seau d’eau. Cosetta portabat aquam apud Thenardios. Mais non ! C’était encore un choix exprès pour le premier de classe, le chouchou, l’Arthur, le premier en latin, le premier en français, en tout, et en sagesse apparente. Et pourtant un sacré farceur dès qu’on quittait le Collège. Des bringues pas possibles, qu’il faisait, le Rimbaud. Et de retour en classe, la Sainte Nitouche, sage comme une image, un vrai fayot. Sa mère ne pourrait pas le punir… Une des meilleures bringues qu’on avait faites avec lui, c’était à la kermesse de Charleville. Des vendeurs de pain d’épices et de vin chaud, une fanfare pleine de cuivres et d’uniformes qui se déplaçait autour de la grand’ place, un boucan de tous les diables, et des filles du pensionnat qui venaient guetter discrètement les gars. Et ça sentait fort partout, le pain chaud, la saucisse, le patchouli, et partout circulait, dominant tous les parfums, une odeur de friture qui était comme un nuage, qui se collait à nos frusques et nos narines. On avait dévalisé le marchand de bières, et Arthur rotait le plus fort qu’il pouvait pour choquer les bourgeois, braillait des insanités païennes aux oreilles des femmes chargées d’enfants, faisait des grimaces dans le dos des gendarmes. Le clou de cette soirée, ce qui nous avait le plus réjoui, c’était la découverte, dans une petite rue, de l’appentis d’un menuisier, ou d’un scieur. Ah ! On était loin des Bossuet bien-pensants et des déclinaisons latines ! Deux ou trois gamines délurées nous avaient rejoints, de celles de l’école publique, celles qui n’ont pas froid aux yeux. On leur avait proposé, puisqu’il n’y avait pas de grange ou de foin pour y faire nos petites cochonneries, de venir avec nous dans la sciure. On s’était cachés derrière des empilements de planches qui sentaient bon le sapin, il faisait chaud, et une fois les présentations faites, on s’était précipités, tous ensemble et un peu pompettes, dans des tas de copeaux énormes, amusants tout plein, dans lesquels on se roulait en montrant son derrière.
4°) Déployer un ironème d’Étienne Candel (10-15 minutes) : Un ironème à étoiler dans tous les sens. On partira de cet ironème daté de 2018 : « Des tourments de mineur. » et on cherchera à obtenir un texte complexe où les mots-clefs se retrouveront développés, par association d’idées, par rapprochements sonores, par connotations de sens, par synonymes ou antonymes, et où peu à peu se constituera un texte complexe, soit narratif, soit descriptif, duquel l’idée même de « détournement de mineur » aura totalement disparu.
Au charbon ! Quand faut y aller, faut y aller. Ça fait mal, parfois, l’idée de s’enfoncer si loin, au point qu’on peut s’y perdre, mais la solidarité entre nous, les gueules noires contre les petits chefs, ça efface les crampes et la douleur dans les oreilles quand on descend de dix ou vingt mètres par seconde. Et on prend les lampes, on empoigne les marteaux-piqueurs. Les ampoules aux mains, on ne les sent plus. C’est nos femmes qui portent l’inquiétude, le souci des fins de mois, c’est elles qui pensent à l’avenir, et qui pleurent quand arrive l’accident. Soumises, infériorisées jusque dans le deuil. Nous, en bas, on y pense toujours, à l’accident. Mais le danger finit par devenir un compagnon si habituel qu’on vit avec, comme un vieux couple. Et on a les yeux tellement pleins de poussière noire que les larmes n’y passent plus. La claustrophobie est interdite, chez nous : on n’y va pas pour épater les galeries, mais pour les creuser, pour en vivre. Au charbon ! Descente dans cinq minutes. N’oubliez pas vos casse-croûtes, c’est parti pour dix heures…
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8 JANVIER 2025
Programme royal.

Échauffement (5 minutes) : Le galet des reines. Écriture rapide et libre.
Au bord de l’étang, la petite Princesse joue avec sa maman la Reine. Elles s’entraînent à faire des ricochets sur l’eau lisse comme un miroir. La petite fille n’y arrive pas et appelle à l’aide son papa le Roi. Celui-ci, galamment, prend des mains de son épouse le galet plat qu’elle s’apprêtait à lancer, puis prend la pose élégante du discobole antique, projette de toutes ses forces la pierre à la surface de l’eau où elle s’enfonce lamentablement avec un « flop » roturier. La Princesse cesse de pleurer, renifle dans ses dentelles puis sourit : « Père, dit-elle, savez-vous qu’avec un tel jet vous risquiez de vous faire un tour de reins ? Soyez prudent ! Demandons plutôt à Tonton Maximilien, qui arrive derrière vous, comment on doit procéder pour assurer son cou… ». L’espiègle, ensuite, balance toute sa provision de cailloux sur ses royaux parents, et part à cloche-pied, en chantant la Carmagnole.
1°) Écriture mi-longue (10-15 minutes) : Lettre de motivation. On écrira la lettre que le Président de la République pourrait envoyer à Michel Barnier pour l’encourager à redevenir Premier Ministre à la place de François Bayrou.
Cher Michel, Sachez tout d’abord que je regrette profondément que vous n’ayez pas pu aller au bout de votre expérimentation. Certes, cela vous a valu de battre un record, celui du PM le plus rapide à quitter ses fonctions. Mais vous le savez, mon ambition est plus grande, et vous êtes l’homme qu’il me faut. Vous avez vu qui j’ai dû choisir pour vous succéder… et dans l’urgence. J’avais pris, l’été dernier, le long temps de la réflexion complexe, presque trois mois, pour bien vous choisir. Vous avez su tenir deux mois, et le gros François, ce mollasson à l’accent improbable, m’a forcé la main pour le poste. Un caprice de littéraire auquel j’ai fait semblant de céder, provisoirement. Vous voyez ce que je veux dire ! Bref, j’ai dû simuler la faiblesse, mais vous êtes mon sauveur. Le Bayrou ne tiendra même pas aussi longtemps que vous. J’ai prévu de le faire exploser en vol avec l’aide de vos prédécesseurs : Attal va le carboniser, Borne va l’écrabouiller. Et vous, Michel, serez le Sauveur majuscule de la République. Promis juré : deux jours après la motion de censure, je vous renomme à Matignon, Ministre d’État Plénipotentiaire, et je vous donne la liste de vos subordonnés, pour que vous ne donniez pas la fâcheuse impression d’hésiter dans vos choix. Ce serait désastreux. Il y aura du renouvellement, je vous le garantis. En voulez-vous un aperçu ? Rien que pour vous convaincre… Je verrais bien Sarkozy à la Justice, il m’aime bien. Marine à l’Intérieur, elle aime les flics et la matraque. Vous mettrez le Jean-Luc à l’Éducation, et quelques communistes par-ci par-là, comme au bon temps du Grand Charles, l’idole de votre jeunesse, que je n’ai pas connu, hélas. Croyez-moi, c’est du tout cuit mon vieux. Ils passeront leur temps à se bouffer le nez derrière votre dos, et nous mènerons ensemble la seule bonne politique, celle des Finances et de la Banque. Mon cher Michel, je vous en prie, acceptez. Sinon… Avec mes vœux de bonne santé pour 2025, je vous propose cet arrangement : vous retrouverez la même voiture et le même chauffeur, c’est une promesse ferme que je tiendrai, celle-là ! Cordialement, Manu Premier
2°) Dissertation (10 minutes) : Écrire, c’est dissimuler. Voici ce que disait Lucien Suel en 1992 à ce sujet : « J’écris parce que je n’ai rien trouvé de mieux que l’écriture pour dissimuler ce que je pense vraiment. Je lis pour essayer de comprendre entre les lignes ce que d’autres comprennent du monde. » On développera librement cette réflexion sur le thème de l’écriture mensongère, du « mentir-vrai » comme disait Aragon.

Écrire, ou ne rien dire ? Parler des autres au lieu de soi, c’est l’idéal. On fait de la description, on change les identités. Dans mon prochain roman, je ferai un héros dissimulé sous le costume d’un pauvre mais gentil garçon de la campagne, et j’en ferai une sorte de Robin des bois qui casse les agences du Crédit Agricole pour donner des sacs de billets aux membres de la Confédération Paysanne. Aucun lecteur n’ira imaginer que c’est le Crédit Lyonnais qui me sponsorise… Le personnage principal, en outre, sera jeune et beau, calme et réfléchi, une sorte d’ange laïc qui vénère sa famille et respecte les traditions locales, et obéit à ses maîtres. À la première personne, ça aura l’air d’une autobiographie déguisée, ou d’un roman à clef, et les journalistes littéraires chercheront à deviner de qui je parle. Pas un d’entre eux, je parie, n’aura compris que je déteste la campagne et les bouseux et les chemins mal goudronnés ; certains y verront même du pittoresque naturaliste, du vécu, qui farfouilleront dans ma généalogie pour y repérer un laboureur ou un berger. Si l’éditeur me demande quelques mots pour la quatrième de couverture, j’inventerai peut-être une confidence d’un lointain cousin (qui ne me démentira pas), ou un cahier trouvé dans une brocante. Et je pourrais même – pour bien me moquer de tous ceux qui prétendent savoir qui écrit – prétexter, comme pour faire une blague, que j’ai soumis quelques lignes à CHAT GPT pour en tirer l’esquisse d’un scénario. Ce serait le chic du chic. Et pas un seul lecteur ne saurait que derrière la blague se cache l’exacte vérité !
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18 DECEMBRE 2024
Programme de Noël.

1°) Un haïku pour Noël.
Dans ma cheminée Flambe le papa Noël. J’avais froid aux mains ! La cheminée fume : Papa Noël est coincé. Sa culotte brûle ! Les rennes sont saouls Et zigzaguent dans la neige. Cadeaux ? C’est foutu ! Un sapin bien vert, Des guirlandes de couleur Et quelques bougies. Les enfants attendent Que la magie de Noël Les fasse rêver.
2°) Bouturage (5 minutes) : un petit texte tout en hauteur. Voici un bouturage que Lucien Suel a fait en 2008. À votre tour d’en tirer quelque chose.

Ayant trop forniqué avec ses trois amantes il ressentit son han- dicap et se mit à se lamenter en vers et en élégies. Il était bien morti- fié et ses douleurs continuèrent. Plus il perdait du tonus et plus il lui fallait pis- ser, vider son verre et faire la sieste. De lassitude, il mourut.
Camarade syndiqué c’est la fin des rentes et le capital chan- celle, renonce à se liguer contre nous et abandonne ! Il faudra nous forti- fier, attaquer leurs coffres-forts ! Plus nous en tuerons et plus ces sales pis- tonnés iront à terre définitivement ! De nous dépend l’avenir !
Tu es trop friqué et comptes tes rentes et l’argent te han- te et arrive à se barrer, mon gars et tu paniques ! Tous les sorti- lèges trompeurs te guettent. Plus tu les crains et plus tu iras pis- se de peur par terre et pleurnicher. De ce jour, tu es mort.
On l’a domestiqué et il est empli de craintes ce malheureux éléphan- teau qui cherche à se libérer de ses conducteurs et tire sur sa chaîne. C’est un maudit sorti- lège et les méchants chasseurs sont bien cruels. Plus il tire sur ses liens et plus il souffre, glapis- sant de douleur. Le tonnerre gronde dans sa gorge. De gré ou de force, il se libérera.
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11 DECEMBRE 2024
Programme de douceurs salées et sucrées.

1°) Moulinette sonore (5-10 minutes) : Tout le monde dans le bain ! On va jouer à la moulinette assonante : la première contrainte est l’obligation de trouver des mots d’une ou deux syllabes au maximum, l’autre contrainte est que ces mots contiennent un son imposé. Ce soir c’est la sonorité « in », sous toutes ses formes possibles. À tour de rôle, tous les membres du groupe diront un mot, qui sera noté, et chacun racontera une histoire de baignade, puisque la sonorité s’y prête, en utilisant tous les mots trouvés. Il sera possible d’en trouver d’autres, et chacun essaiera d’en employer le plus grand nombre possible.
Les mots trouvés : parfum, grain, malin, poupin, boudin, vin, pain, crin, câlin, chagrin, pantin, faim, massepain, vain, regain, embruns, lapin, nain.
Pas bien malin, hier matin, un lapin nain très poupin vint pleurer son chagrin auprès d’un vilain renard qui avait encore très faim. Fallait-il qu’il ait un grain, pour lui demander un petit câlin ? Le renard, à jeun, se sentit un regain d’appétit, et le démembra en un tour de rein. Le lapin, c’est très sain, même sans pain ni vin. Et ce parfum de civet cru réjouit notre renard, qui s’embarqua aussitôt pour une croisière dans les embruns de l’île de Sein. Le cadavre désarticulé et de bon teint, un pantin d’os et de poils mal mâchés, fit le bonheur d’une pâtissière qui ratait tous ses massepains : une patte porte-bonheur, en principe, devait lui redonner la réussite. Mais en vain : loin de tout ça, ce boudin aux gros seins avait définitivement perdu la main, hein ! De son côté, l’aigrefin aux crins hérissés, trempé d’eau de mer, prit son dernier bain, et une grosse vague lui fit une belle fin. Moralités : ne faites jamais confiance à un rouquin, ni à un marin crétin. Le lapin porte malheur sur tous les bateaux, même encore dans un intestin !
2°) Poème express par caviardage (5 minutes) : On noircit ! On caviardera cette petite page de manière à ne laisser qu’un tout petit nombre de mots (maximum 20) qui constitueront une sorte de poème, incongru, saugrenu, comique, tragique, comme on pourra. Elle est extraite d’un petit recueil de poésie contemporaine, Filles bouchères & Garçons bouchers, 2024, aux éditions La Boucherie littéraire.

Quelques caviardages amusants !
La bouchère rose, main bleue, cuisse blanche, tête vide, yeux de chat, se ressource dans les paupiettes rouges et les épinards du congélo, toute nue. Je prends un livre immaculé, saut dans le vide, caprice de chat. Désirs, silence, lèvres rouges, visions d’amourette, histoire de cœur, lumière céleste, diable sans défense contre le ciel. La fille de la bouchère est rose avant de fermer les yeux sur le billot. Tous mes désirs, qu’elle a ficelés du bout des lèvres, font des visions qui me transpercent l’amourette. Je me réfugie à portée de son cœur. La bouchère et ses seins sourient bêtement à tous mes désirs. Dans le silence, j’ai des visions. De temps en temps, sous les jupes de la marchande, un peu de lumière réveille le diable qui dort en moi. Sourire de bouchère, oreilles de poulet, graisse de bœuf, flanchet d’agneau, yeux de chat, désir affamé, bouche au beurre doux, lèvres grassouillettes, fesses persillées aux épinards : attirances carnivores ! Agneau rose, poulet fermier, graisse de bœuf, flanchet, langue à point et au beurre, paupiettes,n tournedos, attirances carnivores, cailles sans défense. Agneau couronné de rose et de bleu, poulet blanc immaculé, agneau sur le billot. Moi, affamé, je saisis du bout des lèvres, histoire de me racheter, la marchande de légumes, jurant de devenir vegan, dévoué à ses épinards. Bouchère empaquetée avec une poignée de langues de chats, désirs, silences et attirances carnivores : Don Quichotte desserre son poing sur le cercueil. La bouchère tend la graisse blanche de ses seins, bêtement, avant de fermer les yeux sur mes désirs dans les visions de luxure, lumière du diable.









3°) Photographie et autobiographie (10-15 minutes) : Un mensonge sur une image. Voici une photo sur laquelle vous figurez. Vous écrirez la partie de votre autobiographie qui correspond à la période où le cliché fut fait (1940).

Juste avant ce maudit jour (mais Johnny ne le savait pas encore) il m’avait emmenée à une fête près de San Francisco, pour me donner la bague de fiançailles promise. Il avait une permission de trois semaines, et voulait me présenter à ses parents. Le mariage était programmé avant la date de son départ, nous devions faire vite. On avait bu des bières, il m’avait montré son adresse au tir à la carabine dans un stand où il avait décroché une peluche, un lapin rose, celui que je n’ai jamais pu jeter. Et puis, il y avait eu ce photographe ambulant, qui interpellait tous les amoureux : « Un dollar pour l’éternité ! Votre portrait pour vos petits-enfants ! » Johnny avait sorti un billet de la poche de son beau costume, et l’homme nous avait fait poser, devant le grillage de la fête foraine. « Souris, ma belle ! On dirait que tu as peur de lui ! Rapprochez-vous ! » Alors on s’était rapprochés, et il nous avait remis un ticket : « La photo dans une heure ! Ne perdez pas le coupon ! » On était retournés danser, reboire des bières, et on avait récupéré les photos. Une série de quatre petites, et la grande, celle qui est toujours encadrée dans mon petit appartement de misère, mon appartement de veuve de guerre. Et puis, trois semaines après, Johnny a repris la mer, la bague au doigt, comme moi. Et son bateau a été torpillé. Pas de survivants, sauf moi. Mais je ne m’en suis jamais remise.
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27 NOVEMBRE 2024
Programme qui saigne sévère.
1°) Échauffement en 5 minutes et 5 lignes maxi : le labyrinthe.
J’ai commencé ma phrase en espérant arriver au bout, mais rien que de penser à un bout m’a rappelé la mauvaise blague du bâton qui a deux bouts, et qu’on coupe en deux, mais il a toujours deux bouts, alors j’ai pensé que ma phrase pourrait mal finir si je l’allongeais trop parce que la consigne c’est cinq lignes, et si j’écris dix lignes il faudra la couper. Mais pourquoi ai-je écrit tout ça ? Il faut que j’en sorte. Où est l’autre bout du labyrinthe ?
2°) Un peu de haine gratuite (10 minutes) : Les banquets. On expliquera de manière raisonnée, calmement, pourquoi l’on déteste les banquets, de quelque nature qu’ils soient (de conscrits, de société, de militaires, de famille, etc.).
Je hais les banquets et les banqueteurs. Ce genre de cérémonie maniaquement organisée me glace déjà rien qu’à l’idée de devoir chercher l’étiquette qui indique ma place. Et à côté de qui serai-je ? Une rombière à collier de perles et décorations multiples ? Un P.D.G. cravaté et noyé d’eau de toilette ? Un sourd à qui je devrai faire la conversation en lui criant dans l’oreille ? Les banquets sont détestables parce qu’il faut endurer l’attente du début, l’attente des plats, l’obséquiosité des larbins qui veulent à toute force remplir mon verre, les serveurs empotés qui tremblent au-dessus de mon épaule en apportant les plats en sauce. Il faut endurer la crainte d’un impair, de faire des miettes inconvenantes, de répondre au voisin d’en face avec du persil sur les dents. Les banquets sont détestables parce qu’il s’y trouve toujours un président de quelque chose, qui tape sur son verre en cristal pour demander la parole, et qu’on doit écouter poliment, ou religieusement, au garde-à-vous mental, sans bouger, pendant trop longtemps et que le café refroidit dans les tasses. Les banquets sont haïssables parce que, parfois, il faut se lever et rester en point de mire de dizaines d’inconnus, quand encore il ne faut pas pousser la chansonnette… Les banquets, c’est toujours un assemblage, ou un ramassis, d’individus qui font semblant d’avoir un esprit collectif pendant quelques heures, et qui se séparent en ayant oublié le nom de presque tout le monde, excepté peut-être la brunette en face, qui peut être une bonne affaire, ou le député dans le coin, qui peut procurer une bonne affaire.
3°) 10 mots pour une histoire de hasard (10 minutes). On tire au sort dix mots dans une liste qui en contient vingt-cinq, et on écrira une histoire où ils seront tous employés.

Les mots tombés d’une main innocente sont les suivants : injecter, mystère, autobus, main, automobile, hasard, plume, délire, personne, lueur.
Personne ne l’avait vu ni entendue venir. Une espèce de brouillard envahissait la rue, et le bitume donnait l’impression de disparaître au bout de vingt mètres. Une automobile apparut, silencieuse, silhouette trouble, au ralenti, puis s’arrêta devant notre petit groupe. Nous ne disions plus rien, attendant que quelqu’un en sorte, mais nous ne vîmes, pour la plupart, qu’une main qui passait par la vitre abaissée, et à la lueur du plafonnier nous comprîmes que quelque chose n’allait pas. Une main, et pas de corps, pas de tête. Le mystère devenait palpable et angoissant. « C’est du délire, dit Élisabeth, c’est l’homme invisible qui a mis des gants ? ! » La voiture se remit lentement en marche, repartit sans bruit, et il n’y eut plus rien, qu’une brume qui s’épaississait. Et puis une plume tomba du ciel, en voletant, et se posa à mes pieds, comme par hasard, me désignant pour être le responsable de ce qui devrait advenir désormais. L’autobus scolaire arriva enfin, klaxonnant à tue-tête, et nous pûmes enfin nous y injecter tout le reste de la dope qui nous ferait patienter jusqu’à l’entrée du lycée.
4°) Intégration forcée (10 minutes) : Un fragment d’Étienne Candel. On l’intègrera tel quel, sans le modifier même d’une virgule, dans un texte libre : « le mouvement paresseux des carpes au matin, plus paresseux dans leur sommeil, mais moins dans… »
Ses souvenirs défilaient comme des silhouettes floues, se confondant parfois les uns avec les autres, et sa pensée, molle, essayait de se développer dans un labyrinthe de mots incomplets, de phrases fragmentaires, comme on voit sous la surface d’une eau trouble le mouvement paresseux des carpes au matin, plus paresseux dans leur sommeil, mais moins dans leur légère agitation lorsqu’elles se croisent entre deux tiges de nénuphars, et il espérait que ce cycle anesthésiant cesserait d’un coup, qu’il trouverait le mot qu’il cherchait vainement, qu’il le verrait surgir de ce magma mouvant de syllabes et de pensées inabouties, comme lorsque les carpes de Villandry se jettent vers la surface pour gober les miettes de pain que leur jettent les touristes.
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13 NOVEMBRE 2024
Programme de brumaire poétique, brumeux et redondant.

1°) Bouts-rimés sans échauffement (10 minutes pour un dizain) : Un petit poème ? Il n’y a plus qu’à l’écrire, voici les rimes, dans l’ordre, ou le désordre, peu importe : accroupis/tapis ; brume/plume ; dédaigne/saigne ; étranger/danger ; souplesse/diablesse. Il sera préférable d’écrire des vers mesurés, c’est-à-dire de longueur régulière.
Vois-tu ces vieillards accroupis En prière sur leurs tapis ? Pour les dépeindre, prends ta plume, Vide ton esprit de sa brume, Laisse parler ton cœur qui saigne, Bien loin du fou qui les dédaigne. Crois-tu vraiment que l’Étranger Pour ton pays soit un danger ? Laisse aller ta main en souplesse, Et que ton encre soit diablesse !
2°) Quelques haïkus pour changer (5 minutes) : La courge. Contrainte : obligation d’utiliser une fois le mot « courge ».
Quel drôle de nom, Cette courge du Japon, Le potimarron. On creuse la courge, On y place une bougie, On y met le feu. Les enfants ont peur Qu’on les oblige à manger La soupe de courge. La soupe de courge ? Velouté de potiron, C’est mieux pour les bourges. Courge rubiconde, Tu mûris dans mon jardin. Gare à Halloween !
3°) Écriture mi-longue (10 minutes) : Critique littéraire. Rédiger un article de critique littéraire d’un ouvrage, avec une identification du genre, de l’auteur, et/ou un bref résumé et un commentaire sur le style, et/ou le contenu, l’intérêt de l’œuvre dans la production de l’auteur, etc. Au programme : La chanson du maître, Karl-Jonas Böhm, traduction Antonio Aldas, Éditions irrégulières, 2024.

Karl-Jonas Böhm n’en est pas à son premier polar, et La chanson du maître enrichit davantage la saga norvégienne commencée voilà dix ans. Après Le Tableau vert et La salle des profs, c’est une nouvelle enquête de l’inspecteur Langström qui se situe dans le monde scolaire. Le sujet est à la mode, le harcèlement, mais Böhm l’a subtilement renouvelé en le renversant. La proviseure est dominatrice, les conseils de classe sont olé-olé, et trois meurtres consécutifs dans le gymnase, en un mois, c’est un peu trop. Écriture suggestive, rebondissements scabreux et critique sociale font le sel de ce dernier roman. La classe politique provinciale de Bergen en prend pour son grade : municipalité corrompue, dessous de table, chantage et conséquences psychologiques désastreuses, les portraits ne sont guère flatteurs. Mais l’humour, bien que noir, y est très présent. Un des conseils de discipline, notamment, est désopilant. Et les aventures des surveillants d’internat sont pittoresques. Que l’on se rassure : Langström finit toujours pas arrêter le – ou les – coupables, et ses frasques sentimentales en font quelqu’un de très humain. Lecture recommandée, mais pas pour les collégiens : ils y puiseraient de mauvaises idées.
4°) Amorce pour une histoire en 6 lignes et 6 minutes. « Il est vieux et ressemble à un chien. »
Il est vieux et ressemble à un chien, son caractère grognon et sa façon d’aboyer ses reproches à son entourage ont fini par éloigner même ses plus anciens amis. Solitaire et agressif, il est redouté même du facteur qui lui apporte sa pension, et les enfants du quartier se tiennent à une distance respectueuse et craintive. Mon père, décidément, commence à me poser problème.
5°) Une image pour une histoire (10 minutes) : La brume et son mystère. Voici une photo de paysage suisse et brumeux (© Futura Sciences). On inscrira un petit mystère au sein de cette image, en une dizaine de lignes, soit narration, soit description.

C’est juste avant le bouquet d’arbres que je l’ai perdue. Elle allait bon train, emmitouflée dans sa doudoune gris clair, et chantonnait comme pour me narguer. « Attrape-moi si tu peux, attrape-moi si tu veux… » La prairie s’étendait devant nous, et peu à peu la brume était montée des herbes humides où je suivais la trace de ses bottines, trop loin derrière mais plein d’espoir après les promesses qu’elle m’avait faites l’après-midi à la récréation. Moi, j’y croyais sincèrement, naïvement. Mais arrivé au pied du bosquet de chênes, face à ce mur impénétrable et opaque, je me suis arrêté. J’ai appelé, appelé, j’ai attendu que le vent dissipe cette brume qui m’avait fait perdre Maryline. Je n’ai jamais su comment elle avait disparu. J’attends encore…
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30 OCTOBRE 2024
Programme pour Halloween.

Échauffement en 5 minutes : (#octobrèves) : une micro histoire sur le mot « violon ».
Le violon, c’est toujours long, se disait Verlaine en sortant de la prison de Mons. Il sauta dans le premier train à destination de Charleville, dans l’espoir de se réconcilier avec Arthur après ce séjour ombragé. Pas de chance : Arthur envisageait déjà de partir pour l’Abyssinie, ou l’Éthiopie, il n'avait plus la tête à leur aventure, et le contrôleur à casquette le fit descendre manu militari à la première station, tout sanglotant, parce qu’il n’avait pas pris de billet. Alors, il se résolut à pondre un nouveau recueil de poèmes, pour se remettre à flot financièrement en attendant le débarquement.
1°) Écriture longue (15 minutes) : Souvenirs. Retrouver (ou inventer) des lieux, des rencontres, des voix, des moments privilégiés, pour élaborer des bribes d’histoires issues du passé. Point de départ imposé de cette remontée des souvenirs : une barrière (de la sorte qu’on voudra). Forme littéraire : le morcellement, l’hésitation, l’approche par petits détails qui s’additionnent pour former un tout.

Il y avait une barrière, quelque part au bout d’un petit chemin creux. Un chemin empierré, sûrement, et puis des buissons. En été on y était bien parce qu’il y avait de l’ombre, et c’était à l’écart de la petite route goudronnée où passaient les autres gosses au retour de l’école. La barrière, c’était du rustique. De l’agricole. Quatre ou cinq gros bâtons et du barbelé sur trois rangs, juste pour décourager les vaches de sortir trop facilement. On savait tous qu’il fallait bien la refermer, après avoir passé la sangle sous le gros clou cavalier, et pas dessus. C’est près de cette barrière que deux samedis de suite on s’est rencontrés de près, Claudette et moi. Deux samedis, pas plus. Elle a un peu pleuré la deuxième fois, à cause de la barrière. Ces histoires d’amour là, ça ne prend pas, c’est fugace, mais ça brûle autant que les longues. Il était nécessaire, pour entrer en sixième, de passer un examen. Elle, elle habitait « de l’autre côté de l’eau », comme on disait. Un hameau éloigné du bourg, et elle venait à l’école pour la journée entière. Et à cette époque, on avait école le samedi matin. Les leçons spéciales pour préparer l’examen, c’était le samedi après-midi. Elle emportait son casse-croûte parce que la cantine, ça s’arrêtait le vendredi. Moi je venais juste avec mon cartable. J’ai oublié le nom de la maîtresse, d’ailleurs. Claudette, je sais encore qu’elle avait les cheveux longs et bouclés, ni bruns ni blonds. Mais ses yeux ? Je n’ai sans doute jamais bien su dire leur couleur. Faute de l’avoir regardé assez longtemps de près ? Mais du caractère, elle en avait, et je m’en souviens. Du tempérament, même. On était les deux meilleurs de la classe, et il fallait absolument qu’on réussisse cet examen : on serait les premiers du village à entrer au collège depuis cinq ou six ans. Des pâturages longeaient une rivière, ou un ruisseau, sans nom : on disait « la rivière » mais c’était bien prétentieux comme appellation. On s’était installés dans l’herbe, tout près de la barrière, après les révisions avec la maîtresse. Pour réviser encore un peu ensemble, parce que plus loin nos chemins se séparaient. Les cartables au sol, les cahiers rouverts, on examinait les problèmes de surface, on faisait du calcul mental, et on discutait. Qu’est-ce que tu feras après ? Quel métier tu voudrais ? Ça durait, on n’avait pas de montre à l’époque. On regardait le soleil de cette fin juin, et l’ombre au sol, et on se disait qu’il fallait rentrer. On se regardait beaucoup l’un l’autre. Dans les yeux ou presque. À 11 ans, on improvise. Le deuxième samedi tout s’est accéléré. À cause de la barrière. Et ça s’est arrêté, bien sûr. On est allé en sixième, chacun dans son collège. La mixité, ça ne se faisait pas. Pourtant ça aurait pu continuer, à cause de cette barrière. Je ne sais plus pourquoi ni comment ses cheveux se sont accrochés dans le barbelé. Il fallait les désemberlificoter. J’y ai mis tout le temps nécessaire. Et je l’ai consolée. Et on s’est promis plein d’avenirs communs, là, dans l’herbe et sous le soleil. J’y suis retourné plusieurs fois, beaucoup plus tard, à l’emplacement de cette barrière. Pas de vaches, chemin goudronné et élargi, buissons rasés, et pas de Claudette. Mais c’était une belle aventure, même sans lendemain.
2°) Décryptage d’expressions imaginaires (10-15 minutes) : ChatGPT a encore frappé ! Voici trois expressions pour le moins imagées : « Attraper des papillons de grimouste » ; « Tomber dans le trou du morklon » ; « Attendre la lune d’Octavore ». Ces expressions ont été générées par ChatGPT, à la demande d’Hortense Merisier (née en 1988). Leur sens et leur explication sont de votre ressort, en une dizaine de lignes maximum à chaque fois. Éventuellement, on pourra n’en expliquer qu’une ou deux, si c’est trop difficile. Voulez-vous l’explication d’Hortense ? Elle est ici : https://hortensemerisier.com/2024/09/20/717-trois-expressions-imaginaires-expliquees/
Attraper des papillons de grimouste est une expression imagée du pourtour méditerranéen, du Roussillon jusqu’à Menton. La grimouste, c’est le buis, qu’une invasion de pyrales risque de détruire si l’on n’arrive pas à éradiquer cet insecte, qui résiste à tous les pesticides connus. Ça signifie qu’on perd bien son temps, ou qu’on n’est pas très malin, parce que ce n’est pas le papillon qui grignote les feuilles, mais sa chenille. Tomber dans le trou du morklon, sur la planète natale de Superman, c’est prendre une grosse cuite, car le morklon, cet alcool tiré d’une roche abondante dans le sous-sol, est puisé dans des récipients très larges, à la louche, ou bien bu avec une paille. Et si on tombe dedans, on est bon pour boire la tasse, et en ressortir bien saoul. Attendre la lune d’Octavore, c’est une vieille blague pour dire que rien ne presse. On explique qu’Octavore, c’est le mois d’août mais pas chaque année, seulement lors du retour de la comète de Halley. Autrement dit, tous les 76 ans. On dit ça aux enfants impatients.
3°) Écriture brève (10 minutes) : Homophonies. Écrire des homophonies très approximatives à partir d’une phrase simple, tirée d’une page de littérature, ou d’un titre d’œuvre. Titre imposé : À prendre ou à laisser (roman de Lionel Shriver). On commencera le texte par une première homophonie, on continuera l’histoire en y insérant le titre du roman, et on terminera l’histoire par une deuxième homophonie. Le texte ne fera pas plus d’une dizaine de lignes.

La pendule a cassé, on va être en retard si on n’a plus l’heure. Voilà l’explication qu’on nous racontait pour expliquer la naissance de notre cousin Octave, enfant tardif. Paraît-il que ses parents n’entendaient plus sonner les heures, qu’ils s’étaient laissé aller trop longtemps sous l’édredon. Et voilà le petit Octave en chemin. Mon histoire vous choque ? Elle est à prendre ou à laisser, pourtant. Et avouez qu’une panne horlogère est un beau prétexte pour rester au chaud plus longtemps, non ? Et enfin, c’est bien vrai qu’il faut du temps libre pour apprendre à caresser.
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