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Boîte à murmures
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Pérégrinations et petites errances
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desmurmures · 6 years ago
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[Séance] Le Rituel
Oui, c’est aussi le titre d’un film. Sur une bande de randonneurs qui se retrouvent piégés en forêt avec des adorateurs d’une divinité païenne.
Bon, nous on n’était pas piégés, ni en forêt, mais c’était quand même très païen (avec un vrai faux rituel, des bougies et tout).
Et c’était surtout ma première collaboration avec Jun Lilith Cosplay (il avait un peu le stress le photographe là).
Bref.
J'avais pour idée de faire plusieurs séances de différents thèmes autour d’Halloween, et avec plusieurs modèles. Et nous sommes partis sur un thème de sorcière. Mais pas une sorcière avec un chapeau pointu et un balai.
Visuellement j’étais plutôt inspiré par le type d’ambiance et de sorcières que l’on pouvait croiser dans les jeux Dark Souls, et spécialement les design du second opus. Ce n’était qu’une idée de départ, non un impératif. Juste l’illustration d’un personnage singulier dans une ambiance lugubre et immersive.
Le fait que cette idée de départ avec ces influences visuelles n’ait pas un caractère impératif est important. Je pense qu’il ne faut pas être esclave d’une idée ; il faut savoir la questionner et la faire évoluer, en interaction avec tous les acteurs de la séance photo (ici uniquement le modèle et sa créativité). D’ailleurs s’il y a un impératif, pour moi ce serait bien celui-ci : laisser de la place aux idées de l’autre, et plus généralement à tout ce qui vient enrichir le propos.
Je me suis ensuite attelé à préparer un dossier. Des notes sur l’ambiance, le costume, les accessoires, les images dans ma tête, des références… Une sorte de cahier des charges suffisamment large pour que le modèle se l’approprie, s’imprègne et puise dans l’intimité des univers qui l’habitent. Et c’est précisément ce que je veux : en s’appropriant et en créant, le modèle individualise à son échelle la séance. C’est peut-être un peu moins évident sur un thème cosplay (mais néanmoins faisable), mais plus flagrant pour tout thème alternatif qui ne cherche pas à suivre un modèle de personnage préétabli.
Jun envisageait un personnage de sorcière avec des influences celtes, sujet qui lui tenait à cœur, ce qui n’était pas incompatible avec l’idée générale de départ. Je l’ai donc laissée accessoiriser sa tenue, préparer son maquillage à sa guise, choisir entre perruque, coiffe, ou cornes… Bref, s'immerger et créer son personnage. Je pense que c'est dans un espace de liberté que l'on s'exprime le mieux.
J'en avais déjà une petite idée, mais j'ai découvert sur place une personne simple, humble, drôle et terriblement créative. Il en est ressorti des photos qui nous ont plu.
Je voulais quelque chose de lugubre et emprunt d'un certain mysticisme. Je ne pouvais pas tout obtenir à la prise de vue, la retouche m'a donc permis d'atteindre le résultat final souhaité, ou du moins d'essayer.
C'est également pendant le traitement des photos que l'idée m'est venue d'ajouter des éléments de narration. Certains sont très visibles, d'autres moins, mais l'exercice est assez plaisant.
Donc, pour illustrer le propos, sur la photo brut ci-dessous, on peut voir des zones trop lumineuses et visibles en haut, le mur effondré donnant une vue sur le ciel, et au niveau de ce qui devait être une entrée, derrière la lanterne.
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Je trouvais donc que ces deux éléments attiraient trop l'œil. Pour l'ouverture du haut c'était assez simple, j'ai bouché les trous et recadré un peu. L'entrée en revanche m'a un peu plus préoccupé, d'autant plus qu'elle se trouve au niveau de la lanterne, sur laquelle j'avais prévu de travailler. Je voulais qu'elle se remarque d'avantage que cette entrée. Diminuer la lumière, ou même l'exposition, ne suffisait pas. Est-ce que je devais mettre autre chose à la place ?
J'ai effectivement diminué l'exposition, ajouté un effet de mouvement pour évoquer l'idée que l'arbre tournoyait, ou était emporté par quelque chose, mais comme l'arbre était déjà flou, il prend du coup une forme un peu étrange. J'ai ensuite ajouté une autre texture par dessus, en jouant avec les modes de fusion de calques, l'opacité et le flou gaussien.
Sur le rendu final de la photo, la lanterne est lumineuse, l'entrée attire moins l'œil, tout en laissant la possibilité de s'interroger si l'on prend le temps de se plonger dans l'univers de la photo : s'agit-il d'un portail ? vers quoi ? comment est le monde en dehors de cette chapelle en ruines ? est-ce que la sorcière garde le passage ? Bien sûr c'est assez discret et il est facile de passer à côté, d'ailleurs l'intention de départ était de réduire la visibilité de ce petit bout d'arrière plan. Mais, en partant de cette idée, j'ai souhaité ajouter une possibilité de narration et influer sur la composition par le post traitement.
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L'ajout d'éléments de narration n'est pas original en fait, beaucoup de photographes le font surtout lorsqu'ils réalisent des photomontages (de façon plus radicale, en recréant un environnement par exemple). Il s'agit juste d'éléments ou d'effets rajoutés et considérés comme des éléments de composition, qui vont influer sur la lecture de la photo.
La nouveauté pour moi était d'arriver à cette conclusion de façon un peu accidentelle, en ne cherchant pas simplement à supprimer quelque chose de gênant, ou à l'atténuer, mais en "recyclant" cet élément et en essayant d'aller plus loin. Ce n'est pas faisable tout le temps et pour tout type de photo mais pour des thèmes alternatif fantastiques ou pour de la photo de cosplay en extérieur cela s'y prête assez.
Ce ne sont que des détails, mais essayer de raconter quelque chose et d'interpeler est une affaire de détails.
Nous avons ensuite quitté cette petite chapelle pour nous rendre aux ruines gallo romaines à quelques minutes en voiture, et travailler un peu sur des scènes de rituel à proprement parler. Cette fois j'étais un peu plus en retrait sur la direction de la séance, et l'ai laissée préparer la scène, installer les accessoires, donner vie à ses idées. Ce qui me permettait de réfléchir un peu sur l'après : quelle ambiance ? que rajouter lors du traitement pour favoriser l'immersion et raconter quelque chose ? J'avais laissé les bougies éteintes pour me laisser une option.
C'est en reprenant ces photos à tête reposée que l'idée m'est venue d'essayer de faire quelque chose qui évoquerait l'aboutissement du rituel, un esprit ou une force qui se servirait du feu comme d'un passage. Oui, c'est ça. Le feu comme un passage.
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J’ai donc choisi de réaliser un effet de flamme surréaliste, et chose rare, je suis assez satisfait de l'idée.
Pour le reste, il en ira de l'interprétation de chacun.
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desmurmures · 7 years ago
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[Discu] Se singulariser en photographie. Partie 3.
Troisième et dernière partie de cette petite série d'articles sur la singularisation en photographie.
Après une entrée en matière sur l'aspect bac à sable de la photo de cosplay, j'ai voulu aborder la question épineuse de ce qui pouvait empêcher de se singulariser en photographie, autrement dit de s'affirmer en développant son identité artistique, son style. Le triptyque Quête de validation - Réseaux sociaux - Preuve sociale étant ce qui me semble le plus présent et le plus significatif pour freiner ce développement.
Cette troisième et dernière partie sera consacrée à des pistes de travail et des moyens d'éviter ce piège tout en cultivant une terre fertile à l'apprentissage et à la progression. L'identité émerge, se construit et s'affirme en chemin. Encore une fois il ne s'agira que de mon point de vue, fruit de mon expérience personnelle. Je n'ai pas la prétention d'aborder la question de façon totalement exhaustive. Libre au lecteur, photographe ou autre, d'y réfléchir à travers le filtre de sa propre expérience.
 Maîtriser techniquement ce que l’on fait.
Je crois que c’est le point de départ, bien avant de chercher à se démarquer : maîtriser les bases de la photographie et plus spécifiquement les bases du portrait. Ce qui implique d’apprendre à cadrer correctement, à comprendre les règles de composition, à gérer la lumière, son matériel, et enfin le post traitement. Pour pouvoir se libérer de la technique il faut commencer par l’apprendre.
J'ai commencé à m'intéresser à la photographie peu de temps avant l'émergence des réseaux sociaux. J'ai appris seul, par les livres, quelques conseils de temps en temps de la part d'amis photographes, par la pratique et beaucoup d'errements. Et je continue à me former.
Avec les années beaucoup de tutoriels ont fleuri sur internet, sur à peu près tous les aspects de la photographie. Il faut trier mais c’est assez pratique, clair, et cela peut faciliter la progression. J'ai moi-même progressé grâce à certaines chaines.
Si les tutoriels vidéo ont des avantages indéniables, je pense qu'il est bon de prendre le temps pour la lecture, de se heurter un peu à la rudesse du livre. D'ailleurs on ne se heurte pas, et ce n'est pas rude... Mais ça l'est tout de même un peu plus que de consommer des vidéos à la chaîne pour satisfaire des besoins instantanés. Lire demande un peu de temps et de discipline et il est assez salvateur de se déconnecter un peu des internets pour prendre ce temps ; lire implique de se dégager du temps pour soi et d'échapper à une logique consumériste.
Cette relative rudesse induite par la discipline dans le cadre d'un apprentissage forge la détermination. La détermination amène, avec le temps, à l'affirmation de soi. L'affirmation de soi à l'évitement de certains pièges (comme la quête de validation), pour enfin se mélanger à d'autres ingrédients qui mèneront à la construction d'une individualité, d'une singularité.
 Se méfier des idées reçues.
Et il y en a plein, mais j'ai choisi de retenir que quelques exemples...
Tout d'abord un beau costume ne suffit pas à faire une belle photo. Un modèle au physique attrayant non plus.
Il est facile de se laisser séduire par l'idée de la photo qu'on aimerait et l'image que le modèle nous renvoie avec sa tenue, ses accessoires, tout son apprêtement. Comme si, entre le passage de ce que l'on voit à ce que l'on obtient en sortie d'appareil, il ne se passait rien.
Je pense que l'on peut éviter ce piège en s'accrochant à l'idée de cohérence et de maîtrise. On peut retrouver cette dualité (maîtrise - cohérence) à travers tous les aspects de la photographie, qu'il s'agisse de la pose, de la lumière, et notamment le post-traitement. Ce qui amène à une seconde idée reçue...
La retouche ne sert pas à rattraper une photo ratée. Celle-ci doit être viable dès la prise de vue. Je pense qu'il est important de se questionner sur le but de la retouche que l'on souhaite faire, d'y trouver une réponse, et de garder cette réponse en tête. Le propos sur la viabilité d'une photo de départ est tout de même à relativiser, il est parfois normal d'avoir certaines contraintes techniques que l'on souhaite dépasser par le traitement.
Si une photo n'est pas moins une photo une fois retouchée, elle ne l'est pas plus non plus lorsqu'elle sort de l'appareil. S'agira-t-il simplement de mettre en valeur un modèle, une tenue, par des retouches simples ? De créer une ambiance particulière et surréaliste impossible à obtenir à la prise de vue ? De changer radicalement la photo de départ en s'orientant vers un photomontage ? Il n'y a pas de mauvaise réponse, juste de l'absence de maîtrise, de cohérence, de propos. Oui, encore un triptyque. Enfin pas tout à fait... La cohérence et la maîtrise sont un seul et même axe, tant l'un est la conséquence de l'autre.
Une idée reçue, cette fois propre au cosplay : vouloir s'inspirer (en recopiant) de positions de personnages de comics et de mangas. C'est un peu l'ultime tentation du photographe fan, le biais qui va s'ancrer notamment dans la direction de modèle.
Une source importante de réflexion dans la photo de cosplay tient dans la représentation du personnage incarné (qui sert de thème à la séance), la façon dont le photographe le perçoit, les choix dans la direction du modèle, et plus globalement dans l'interprétation de ce personnage à travers tout le processus photographique. Et il est facile de tomber dans le piège de vouloir recopier une image ou un visuel d'origine (comics, manga etc). Ce piège vient de la philosophie du cosplay qui consiste à vouloir être le plus proche possible du personnage incarné. Et ce n'est pas toujours pertinent en photo. Ajoutons à cela que le modèle est un être humain avec une physionomie réaliste, et non un personnages aux formes et postures défiant les lois de la physique. Et la réalité nous rattrape... Ce qui passe dans un dessin ne passe pas dans le réel...
Face à la situation je me dis souvent que si je cherche à recopier ce n'est plus moi. Je me retrouve dépossédé de ma photo. C'est une position assez tranchée et qui mériterait quelques nuances, mais je trouve qu'elle aide à éviter ce genre de piège, en poussant à l'interprétation et à l'adaptation.
Pour illustrer le propos voici une photo prise par Warren, inspirée d’un dessin (aux proportions réalistes, une fois n’est pas coutume). On peut jouer aux jeux des sept différences et ce sont autant de points de liberté dans la réalisation de cette photo, qui est d’abord une photo, avec des choix, un traitement personnel, et non un recopiage.
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Crédits : Photographe : Warren Paquet Photographie / Modèle : Reaver Cosplay / Dessin : BossLogic Inc
Je pense qu'en s'inspirant sans chercher à recopier absolument ou à imiter on se laisse une marge de manœuvre ne serait-ce que dans la gestion de la pose du modèle, et globalement dans le traitement de la photo elle-même. Un espace de liberté. Et c'est dans cet espace de liberté que l'on s'exprime pleinement, en laissant une place à notre univers et en développant notre propos.
 Le propos et l'univers.
Le propos est vaste et fluctuant. Il inclut le sujet et les choix dans la façon de le mettre en valeur, l'histoire racontée ou suggérée s'il y en a une, le message s'il y en a un, les émotions suscitées qui varient d'une personne à l'autre, le "simple" exercice de style, et j'en passe...
Le propos a l'apparente ambivalence d'un chaos structuré qui pose également la question de la relation de confiance entre photographe et modèle, du lâcher prise saupoudré de contrôle, du rapport à nous même.
Finalement le propos trouve ses racines dans une liberté inhérente à des choix dégagés des problèmes de maîtrise technique.
Que contiennent ces choix ? Qu'est-ce qui les détermine ? Nos influences, notre façon de retranscrire ce qui a été ingéré, la construction de notre petit monde intérieur.
Et je pense qu'il s'agit de l'élément le plus important de l'individualisation. Celui un peu au centre de tout, et autour duquel gravite le reste : se construire un univers.
Pour ma part j'ai commencé très jeune à m'intéresser au cinéma de genre (horreur/SF/fantastique) et aux films d'action. Puis les films d'arts martiaux. Et en parallèle la bande dessinée, les comics, les mangas (qui commençaient à arriver, à l'époque), ma collection de VHS pirates de films copiés au vidéo club (tu la sens la grosse vieillesse là ?). Et puis la lecture de romans aussi...
Toutes ces mondes imaginaires (qui se fondent sous le vocable de "pop culture") se sont doucement imprégnés en moi à une époque où je n'envisageais même pas de faire de la photographie. Mais c'est ce qui a construit mon univers, l'a cimenté par couches successives. Ce qui nous marque s'imprègne en nous durablement.
Bien sûr il ne s'agit là que de mon parcours personnel, à chacun le sien. Mais je pense qu'il est important de se construire une "culture visuelle", quelle qu'elle soit, et de continuer à la nourrir en s'intéressant à d'autres medium (peinture, illustrations, etc)
Et puisque la photo de cosplay c'est d'abord du portrait, il est bon de s'intéresser aux travaux d'autres photographes, de se laisser transporter par d'autres regards inspirant, de prendre des leçons de lumière, de composition...
Donc si je devais résumer, je dirais que pour se construire un univers photographique, il faut s'intéresser à la photographie et... Ne pas s'y intéresser. Puiser ailleurs. Et vivre.
 Défendre son univers.
La quête de validation induite notamment par les réseaux sociaux parasite les choix évoqués plus hauts et les oriente au point de nous faire perdre une partie de notre identité. Elle puise dans nos lacunes et nos insécurités personnelles et je pense qu'il faut se questionner régulièrement sur nos pratiques. Je l'ai évoqué assez largement dans l'article précédent mais je préfère le répéter : il ne faut jamais laisser les autres nous déterminer. La photographie hors cadre professionnel (et hors prestation de service) se pratique d'abord, et uniquement pour soi, et non pour des réseaux, un semblant de gloire artificielle, une reconnaissance prise dans un consumérisme par le défilement incessant d'images . Une pratique pour soi donc, même si l'issue (la photo finale) est le fruit d'une collaboration, d'un consensus entre modèle et photographe.
je me souviens d'une photo prise en convention il y a environ deux ans. Je m'étais fait la réflexion au moment de la traiter. Il s'agissait d'un cosplay de personnage de jeux vidéo, avec un visuel assez propre, un visage très lisse, des couleurs chatoyantes et lumineuses. D'autres photographes avant moi avaient travaillé sur ce type de personnage en respectant l'ambiance visuelle du support d'origine. Ce n'est pas un mauvais choix, bien au contraire même, mais ce n'était simplement pas le mien.
J'ai préféré me focaliser sur l'histoire du personnage et faire ressortir à travers une posture, une expression et un choix de traitement ce que cette histoire pouvait évoquer. Quelque chose de plus réaliste et peut-être, je l'espère, percutant. Ce qui me mettait en opposition avec l'ambiance colorée de l'univers du personnage en question. Mais j'avais un propos.
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  Savoir s'entourer.
C'est le point sur lequel je souhaite terminer.
La photographie est une pratique solitaire. Nous n’avons, en soi, pas besoin d'autres photographes pour réaliser nos clichés. Mais je reste convaincu que l'on progresse également en fraternisant avec les autres, en organisant des séances avec plusieurs photographes et un modèle par exemple, ou en participant à des rencontres photographiques, comme il en existe dans le milieu de la photographie alternative, regroupant des photographes et des modèles autour d'un même thème.
Fraterniser avec d'autres photographes fait découvrir d'autres approches, d'autres singularités, favorise les échanges (de conseils notamment), et donc la progression. Et moi ça m’a aidé à me sentir à ma place quelque part...
Le développement d'un style singulier est un développement personnel, et si je devais avoir un mot de la fin, jeter une bouteille dans l'océan des réseaux, je me contenterais de dire : donnez un sens à vos pratiques, et soyez bienveillant, vis à vis de vous et des autres.
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desmurmures · 7 years ago
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[Discu]Se singulariser en photographie. Partie 2.
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En tapant cet article je me suis dit que j'avais laissé passer un peu trop de temps après la rédaction du précédent. Le lecteur est invité à le relire s'il le souhaite. Et puis j'ai fait du thé, je ne crains plus rien.
Donc...
Le précédent article visait à démontrer à quel point la photographie de cosplay, par sa nature "bac à sable", pouvait permettre à un photographe de se singulariser. Et pourtant, l'on y trouve un certain nombre de récurrences dans l'approche du portrait. Comme si, face à pléthore de choix, on se bornait à ne suivre qu'une certaine voie.
D'observations en expériences et tâtonnements, j'en viens moi-même à me questionner sur la place de l'artiste en tant qu'individu dans son processus de création. Sur ces courants et tendances qui nous emportent et nous empêchent de nous développer. Parce que oui, le processus créatif est un développement personnel (oui, enfin on va aussi éviter le gloubiboulga de coaching), et cette vague informe de courants et tendances emporte notre individualité si l'on s'y laisse prendre.
Cette vague vous pouvez l'appeler comme bon vous semble, pour ma part j'ai choisi le triptyque Quête de validation - réseaux sociaux - preuve sociale. Et ce questionnement sur la place dans le processus créatif cache à peine celui, plus direct, de la singularisation, de l'affirmation de soi en tant que photographe par un style et une approche personnelle. Oui, tout çà pour çà. J'ai parfois le verbe fastidieux.
Les trois éléments précités ne feront pas l'objet de parties séparées tant ils s'imbriquent les uns dans les autres. Et puis ce triptyque est insidieux, avec ses petites graines qu'il sème un peu partout et laisse germer dans nos aspirations, nos choix et nos attentes.
Par phénomène d'entrainement, ses trois composantes ne sont que très relativement dissociables, et chacune se manifestera avec une intensité différente selon les individus. Nous avons tous un parcours de vie qui nous est propre...
La quête de validation (ou besoin d'approbation) concerne des situations dans lesquelles nous faisons dépendre nos décisions, nos prises d'initiatives, de la validation d'autrui. Cette attitude, qui peut concerner toutes les situations de la vie (famille, couple, amis...), a un impact négatif direct sur le développement de la confiance en soi et, en conséquence, l'affirmation de soi. Nous laissons aux autres le soin de déterminer notre valeur, en leur donnant le pouvoir de nous définir...
Ce besoin (de validation) est bien souvent la conséquence d'un environnement familial et social peu structurant, terreau d'un manque d'estime personnelle que vont entretenir les réseaux sociaux et toutes les tendances qui en découlent. Une brèche de sécurité dans la psychologie de l'utilisateur, du consommateur, de l'artiste, de l'individu... Qui n'est pas passée inaperçue. Sean Parker le dit lui-même :
"Le raisonnement qui est entré dans la construction de ces applications, Facebook étant la première d’entre elles, … se résumait à: « Comment pouvons-nous consommer autant de votre temps et de votre attention consciente que possible? »
Et ça signifie qu’il faut que nous vous donnions un petit shoot de dopamine une fois de temps en temps, parce que quelqu’un a aimé ou commenté une photo ou un post, ou quoi que ce soit. Et ça va vous faire contribuer davantage de contenu, qui va vous apporter … Davantage de « likes » et de commentaires.
C’est une boucle de feedback de validation sociale … exactement le genre de choses qu’inventerait un hacker comme moi, parce que vous exploitez une vulnérabilité de la psychologie humaine."
Alors ? Accro aux "likes" et à la Dopamine ? Oui. Déterminés par la preuve sociale ? Aussi, du coup.
Parlons-en un peu de la preuve sociale, ou preuve par la masse. Il s'agit d'un concept de psychologie sociale théorisé par Robert Cialdini, auteur de "influence et manipulation". Selon lui, un individu reproduit le comportement du plus grand nombre, partant du principe que si ce plus grand nombre (la masse) le valide, alors il emporte toute légitimité et il convient de l'adopter. Autrement dit la conduite des autres détermine la nôtre. Donc nos choix.
Les réseaux sociaux entretiennent donc cette quête de validation et cette preuve sociale, notamment en créant et en favorisant le communautarisme. Nombreuses sont les pages de groupes dédiées à un centre d'intérêt particulier, qu'il soit artistique ou non. Il y a du bon, ce genre de support permet largement d'échanger sur des pratiques, de progresser dans un apprentissage (les pages dédiées à la photo par exemple, quand elles sont bien gérées), d'apprendre les uns des autres. Et puis il y a du moins bon : le fait, dans un processus créatif, de générer des pratiques basées sur des croyances (la diffusion de l'information aidant) et de ne plus se questionner.
Le cas de la photo de cosplay est assez révélateur de ces travers. Par exemple, il est très fréquent d'y voir des portraits avec un cadrage penché. Ce type de cadrage est-il à bannir ? non, dès lors qu'il sert un propos et devient un élément de composition réfléchi et cohérent.
Ce choix est si fréquent qu'un photographe débutant s'y laissera prendre, par manque de recul, de culture photographique, de formation. Il est normal de manquer de tout cela lorsque l'on débute. Et même pour les plus expérimentés, il faut toujours se former, se documenter, s'intéresser au travail des autres.
La quête de validation, la preuve sociale et les réseaux qui leur servent de socle empêchent la prise de recul, freinent l'intérêt pour l'apprentissage et la rigueur nécessaire. Et c'est le cas pour quiconque ne fait pas face, une bonne fois pour toute, à ses propres insécurités.
Donc, schématiquement, que fait le photographe pris au piège dans cette situation ? Ce qui marche (plus ou moins bien d'ailleurs). Qu'est ce qui marche ? Ce qui est validé par la masse, la communauté, le groupe. Comment se fait la validation ? A l'ère des réseaux sociaux, par des "likes". Donc ? Il va chercher à avoir des "likes" comme preuve de validation sociale pour combler artificiellement ses propres insécurités personnelles.
J'ai évoqué le cas du cadrage penché, mais il y en a d'autres : par exemple le fait de croire qu'un beau costume suffit à faire une belle photo, ou encore de compenser une prise de vue bancale par des retouches poussées (et pas toujours bienvenues).
Nuançons maintenant le propos à travers trois situations :
- Tout d'abord il n'y a aucun mal à être apprécié pour son travail sur les réseaux sociaux. C'est agréable, c'est une forme de reconnaissance, mais en dépendre est problématique.
- Un photographe professionnel (ou en devenir) va chercher à optimiser ses publications, avec pour but de communiquer sur son travail et de gagner des clients potentiels.
- Un photographe portraitiste, qu'il soit professionnel ou non, ne peut publier un portrait sans l'accord préalable du modèle. Pour cette raison précisément, il y a un besoin de validation.
Le point commun entre ces trois situations ? Aucune ne repose sur des ressorts émotionnels déformés, sur des besoins affectifs à combler, des angoisses à soulager, des vides intérieurs à remplir.
Alors comment y faire face ? Comment arpenter les chemins clivant de l'individualisation et de l'affirmation de soi ? Y-a-t-il une baguette magique ? Non, juste du travail, de la détermination, et des pistes de réflexion que j'aborderai dans un prochain article. Et en bonus, parce que j’en ai parlé : https://reseauinternational.net/sean-parker-confesse-la-carotte-de-facebook-a-la-dopamine/
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desmurmures · 8 years ago
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[Discu]Se singulariser en photographie. Partie 1.
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L'idée me trottait dans la tête depuis quelques mois déjà, sans trouver le temps d'y mettre un peu d'ordre, ni pouvoir prendre un peu de recul. J'ai donc décidé de me pencher sur la question de la singularité en photographie, autrement dit la question du développement d'un style personnel, de ce qui peut l'entraver, des façons d'y faire face. Ce sera certainement fastidieux, avec d'autres sujets en périphérie, et en plusieurs articles. Ce qui va suivre servira donc d'introduction et se focalisera sur la photo de cosplay. Je ne suis en aucun cas porteur d'une quelconque vérité, et tout ce que j'énoncerai ne sera que mon point de vue, influencé par mon expérience.
J'ai toujours aimé la photo "de costume" en général, qu'il s'agisse d'univers alternatifs ou autre... Tout ce qui me permet de créer, lorsque j'y parviens, une photo immersive, qui fait écho à des univers qui me parlent. Jusqu'ici rien de très original, la plupart des photographes alternatifs, si ce n'est tous, ont la même vision. Idem du côté des modèles.
Depuis quelques temps, un peu plus d'un an il me semble, je m'oriente de plus en plus vers la photo de cosplay. Ce qui semble être une continuité logique dans mon parcours photographique quand on connaît mes goûts. Je me rends donc à un certain nombre de Conventions, prends des photos, sympathise, sociabilise (challenge pour moi), me lie d'amitié même avec quelques personnes, et j'observe. Beaucoup.
Cette petite plongée dans le monde du cosplay, côté photographe, a suscité un certain nombre d'interrogations, et en suscite encore (même si la plupart ont trouvé leur réponse). Des petites questions qui gravitent autour d'une plus grande, plus centrale : la photographie de cosplay est-elle un genre photographique à part entière ? ou un sous genre du portrait ? qu'est ce qui définit un genre photographique ?
Tout d'abord, d'un regard extérieur, ne voit-on qu'une seule façon de photographier le cosplay ? Non. Il y a de la photo de studio, de la mise en scène, du photomontage, du portrait classique, en intérieur, extérieur, couleur ou noir et blanc, du reportage... Aucune de ces approches n'est plus ou moins légitime qu'une autre.
Par conséquent si le genre photographique devait se définir par le choix d’une approche particulière, alors la photo de cosplay n'en serait pas un, comme le serait la photo de mode par exemple.
Peut-on définir un genre photographique par les techniques utilisées, à la prise de vue et en post traitement ? Si oui, que trouve-t-on, alors, dans la photo de cosplay que l'on ne trouve pas ailleurs ? Rien. Les règles de composition, de cadrage, d'exposition, restent les mêmes. Globalement, un portrait reste un portrait, la lumière reste la lumière. D'ailleurs, je connais un photographe de mode qui fait de très belles photos de cosplay alors qu'il est totalement étranger à cet univers. Comme quoi...
Peut-on définir, cette fois, un genre photographique en fonction de la nature du sujet photographié ? (ex : je photographie des animaux, donc je fais de la photographie animalière), reléguant au second plan tous les autres critères ? Eh bien dans le cas de la photo de cosplay, oui. Au vu ce que j'ai évoqué précédemment, il s'agirait d'un genre photographique sans forme particulière, assez hybride, puisant potentiellement dans tous les aspects du portrait. Et ce contrairement à d'autres genres photographiques associant dans leur définition tant la nature du sujet photographié que les techniques utilisées (mode, beauté...).
Est-ce à dire qu'il s'agit d'un genre plus pauvre ? amputé d'un critère essentiel pour le caractériser ?Je ne pense pas. Si la photo de cosplay n'a pas de forme particulière, c'est parce qu'elle les a toutes, et dans des proportions variables selon les photographes. Et c’est finalement ça son critère technique. C'est ce qui en fait sa force : un décloisonnement qui la rend singulière. Un grand bac à sable pour photographe.
Et pourtant à bien y regarder on y voit des façons de cadrer, des façons de traiter une photo qui reviennent souvent d'un photographe à l'autre. Paradoxal, pour un genre qui permet beaucoup de choses...  Effet de mode ? écueil ? zone de confort ? Que faut-il pour se singulariser en tant que photographe ? avoir une patte qui n'appartient qu'à soi ?
Comme je l'ai indiqué, cet article sert d'introduction. Il m'aurait paru lacunaire de ne pas évoquer la particularité de la photo de cosplay en tant que genre photographique au vu des développements qui suivront.
Bientôt.
(J'ai plus de thé. Merde)
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desmurmures · 8 years ago
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[Séance] Gwenom
Une séance photo à la Défense, à Paris. Un endroit vraiment sympa et offrant plein de possibilités en terme d'ambiance urbaine, mais on ne compte plus le nombre de photographes qui s'y sont rendus et le nombre de photos que l'on peut y trouver. A tel point que l'on peut se demander s'il y a encore un intérêt à s'y rendre. Je pense qu'il y en a un, pour tous les lieux d'ailleurs, tout est question de regard, et il y en a un par photographe. Et puis j'avais décidé que ma séance se déroulerait là bas, donc à moi d'essayer de faire la différence.
Donc le thème de la séance : du cosplay, avec le personnage de Gwenom. Une plongée dans l'univers de Spiderman avec une version du personnage de Gwen Stacy possédée par le symbiote de Venom.
Je retrouve Reaver-Cosplay. Enfin un tas de vêtements avec des bras qui s'agitent et des cheveux en bataille. Avec Reaver - Cosplay en dessous. Il faisait froid, y avait beaucoup de vent et un peu de pluie. On s'abrite entre deux immeubles, entourés de verrières. Pratiques les verrières. On va justement s'en servir. J'ai pas du tout calculé mon coup.
L'axe principal : mettre en avant du conflit intérieur du personnage avec son symbiote. J'y voyais une sorte de chaos en retenue, quelque chose qui ne demandait qu'à être libéré. Par conséquent cet aspect devait s'exprimer à travers les postures, le cadrage, la composition, les retouches ensuite.
A partir de cet axe la modèle allait devoir osciller entre plusieurs émotions (négatives, vu le thème), je souhaitais faire ressortir un personnage toujours en mouvement, ou sur le point de bondir. Mais il y a ce à quoi on aspire et ce que l'on obtient : l'aléa, le paramètre humain, les réactions de la modèle, sa façon de s'immerger dans le personnage, dans la séance... Ces petites choses qui peuvent désarçonner quand on a un besoin de contrôle un peu trop important (donc un peu manque de confiance que l'on cherche à compenser, en général).
Je me surprends et retrouve toujours ce même plaisir à trouver un compromis entre planifier pour donner une structure à la séance, et lâcher prise. Il m'a fallu quelques années pour faire la paix avec ce qui ressemble à première vue à des aspirations contradictoires. En même temps, la progression ne passe-t-elle pas par une réconciliation avec nos contradictions ?
Pour cette photo la prise de vue s'est faite au trépied. J'avais pour idée de départ de situer le symbiote prenant le dessus sur le personnage dans le reflet en le symbolisant par la capuche relevée, les yeux dissimulés. La modèle ne devait bien sûr pas bouger, surtout au niveau de la main. On a dû faire une dizaine de prises. Je me déplaçais pour baisser la capuche et recoiffer la perruque pour limiter les épis. Le reste n'est qu'affaire de superposition de photos et de retouches. L'idée est assez simple, mais intéressante.
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J’avais réalisé une première version sans l'effet de fumée noire et tentaculaire. Le décor dans le reflet était un peu moins sombre. Panne d'inspiration. J’ai  laissé la photo "reposer" pour m'occuper d'autres clichés. Puis en discutant avec une amie pour trouver d'autres idées, celle d'un "monde du symbiote" dans le reflet s'est précisée. Je suis arrivé à tâtons à ce qui allait devenir la version finale de ma photo.
 D'une photo à l'autre j'ai voulu représenter le symbiote par un effet de dédoublement sur certaines parties du corps. Quelque chose qui renvoie à un mouvement, un tremblement, qui ne demande qu'à sortir, et qui perturbe un peu la lecture de l'image. Les photos retenues sont assez différentes les unes des autres, mais cet élément de retouche est constant. J'ai trouvé par ailleurs plus intéressant de suggérer que d'essayer de reproduire fidèlement un visuel de Comics.
La photo ci-dessous est celle qui a dû me prendre le plus de temps au niveau des retouches. Le cadrage était raté. La modèle avait la pose idéale, l'expression était là, mais l'arrière plan était complètement décentré et ça m'agaçait. J'ai failli ne pas la retenir, alors que l'idée de départ me plaisait (les bras qui reproduisent le motif de l'araignée sur le costume). Puis m'est venue l'idée d'appliquer le dédoublement non plus seulement sur le personnage mais également sur l'arrière plan. Pour voir. Après un premier essai je tenais quelque chose.
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Finalement ce n'était pas juste un rattrapage de photo mal cadrée, j'ai réussi à en faire quelque chose. Même si le résultat est perfectible, je trouve l'idée intéressante. Rebondir et créer après un échec... Peut-on vraiment parler d'échec, du coup ?
Bon et après direction le Starbuck. Parce que s'empiffrer après une séance photo c'est important. Sa page facebook : Reaver - Cosplay
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desmurmures · 9 years ago
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[DevPerso] Ego
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Au départ j'envisageais d'écrire sur ma dernière séance photo. Une séance émotionnellement éprouvante pour moi, très intime et personnelle pour la modèle, et surtout très différente de mes thèmes habituels. Mais finalement je préfère garder ça dans l'intimité de nos discussions d'avant et d'après séance. Je n'en dirai pas plus à ce sujet si ce n'est qu'encore une fois, et de façon très particulière, l'après séance m'a laissé seul face à moi-même. Je pense que nous avions tous deux des choses à exorciser... Je n'aime pas parler de moi, ou écrire sur moi, même si je le fais sur ce blog, et même si je le fais en me masquant derrière une sorte de carnet de bord de la photo.
Je suis assez content du chemin parcouru, tant sur le plan de la photographie que personnel, mais je crois que je n'en serai jamais totalement satisfait. Trop de temps. Trop de choses. Pas assez vite. Pas assez bon. Pas assez... Il y a beaucoup de choses, beaucoup d'évènements qui m'ont amené à ce que je suis aujourd'hui, comme tout le monde d'ailleurs. Il n'y rien d'exceptionnel en soi. Mais un évènement en particulier a planté les graines du changement.
J'ai commencé à faire un “burn out“ il y a quelques années. En cause un environnement de travail nocif. Cet épisode a révélé pas mal de choses qui n'allaient pas, et qui finalement étaient totalement étrangères à cet environnement professionnel : de fortes angoisses, à la limite de la phobie sociale, un gros problème d'estime personnelle et tout ce qui peut en découler, notamment une incapacité à y faire face, avec des artifices de camouflage et de normalisation qui tenaient peu la route ; Je n'en parle pas ou peu, et à très peu de gens. Et même en l'écrivant, je me trouve d'une impudeur crasse. D'ailleurs à y repenser j'ai envie de me mettre des claques. Mais peu importe. J'ai pris sur moi et me suis battu. Je n'ai pas de mérite particulier, je n'avais simplement pas le choix (parce qu'essayer de vivre en restant comme ça est une très mauvaise option). Il m'a fallu du temps pour le comprendre mais il faut vivre ses peurs pleinement pour les affronter et les dépasser. Poser un genou à terre pour se relever. Fermer les yeux pour les ouvrir. Accepter pour avancer...
J'avais déjà commencé la photographie à l'époque, de façon un peu fébrile, tiraillé par une question un peu inconsciente et à l'issue ambigüe : comment faire du portrait quand on a du mal à aller vers les autres ? réponse d'angoissé : le contrôle (oui, c'est très bête...). On cadre le rapport à l'autre. Et petit à petit on se rapproche, grâce à la distance offerte par l'objectif. Drôle de paradoxe. Petit à petit le cadre que je me suis imposé s'effritait. Évidemment qu'il s'effritait. On ne peut pas tout contrôler, la réalité et son lot de petits imprévus nous entoure et nous rattrape, inutile de lui tourner le dos. Ce qui allait de pair avec le travail que je faisais sur moi. Tout était lié, dans un enchevêtrement curieux de causes et de conséquences.
Bref. Vous voulez savoir ce qui vous empêche d'être heureux ? la seule chose qui peut vous empêcher d'avancer ? vous freiner ? vous pensez que ça vient de votre employeur ? de vos amis ? de votre famille ? de votre petit(e) ami(e)? bien sûr les autres sont un levier, un vecteur d'influence, un renvoi à nous mêmes, mais en réalité... Regardez dans un miroir.
Et lorsque vous êtes heureux, vous savez pourquoi ? vous pensez encore que ça vient des autres ? regardez à nouveau dans ce fichu miroir. Il y a même fort à parier que le reflet vous semble légèrement différent.
Nous sommes caractérisés par cette drôle de dualité: celle d'être à la fois notre meilleur ami et notre pire ennemi.
Et là j'ai l'air d'être un croisement douteux entre un psychologue raté (oui celui qui a fini sa carrière dans le recrutement), et un coach bien-être. Perdu pour perdu...
Je serais bien incapable de donner une méthode miracle pour se forger de la confiance en soi et de l'estime personnelle, et puis il n'y en a pas de toutes façons. Où plutôt il y en a une par personne... Je me contenterais de reprendre dans ses grandes lignes une réflexion de Boris Cyrulnik, tant je la trouve juste : Chaque évènement devient un souvenir, que l'on entretient ou non, et ajoute une brique à notre mémoire, modifiant par petites touches la représentation que l'on se fait de nous-mêmes. Alors je cultive mes petits instants hors du temps.
Tout ça aujourd'hui me paraît lointain ; en quelques années j'ai l'impression de ne plus être la même personne. Récemment encore un petit bout de ce qui me retenait a commencé à s'effriter et tomber. Dernier vestige d'une carapace trop lourde et futile ? Lorsqu'elle aura totalement disparu, restera-t-il une meilleure version de moi-même ? J'ai envie et besoin d'aller au devant des gens, de faire de nouvelles rencontres, de cultiver les liens que j'ai pu tisser.
Je n'envisage plus le déroulement de mes séances photo de la même façon, et ce depuis quelques temps déjà. Bien sûr il y a toujours cette histoire de cadre. Quand on met en scène il faut un cadre. Une certaine narration même. C'est ce que j'aime faire, même si je le fais modestement. Désormais l'imprévu me stimule. Que ce soit les réactions des uns et des autres pendant la séance, la façon dont la modèle prend possession du thème pour donner sa propre couleur au personnage, les idées nouvelles auxquelles je n'avais pas pensé, et les rires. Beaucoup. De plus en plus.
Tout est affaire de contrôle et de "lâcher prise", de dépassement de l'égo, de cette fichue zone de confort, de marcher sur un fil sans tomber, encore...
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Elle aussi elle a lâché prise...
PS : et quand je parle d'imprévu qui stimule, la vieille bourge qui se prend pour un vigile pour nous virer d'une galerie ça ne me stimule pas du tout, sauf à envisager l'idée de l'emplafonner.
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desmurmures · 10 years ago
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[Discu] Réécrire
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En ce moment je travaille sur d'anciennes photos. Je les retravaille, plus exactement. Je n'ai pas de séance prévue. Alors je prends du recul.
Le recul le plus évident est celui acquis avec l'expérience. La façon de gérer les outils du processus créatif est peut être, de prime abord, ce qu'il y a de plus visible. C'est le postulat de départ. Le reste se trouve derrière.
Reprendre une ancienne photo, la retravailler avec le bénéfice du recul... Finalement c'est un peu comme réécrire les souvenirs de la journée qui l'entoure. On revoit des échanges, des rires, des difficultés, des choix... D'une certaine façon on revit ce que l'on revoit. On visite de nouveau un jardin secret d'émotions et de sentiments, ce jardin que l'on a laissé s'altérer puis disparaitre dans un flot d'autres souvenirs.
Les anciennes photos sont comme des ponts entre un passé et un présent qui se mêlent étrangement. Et le temps n'est plus une ligne. Plus vraiment.
Et au delà des photos voir ce que l'on était, celui que l'on devient. Toutes ces petites choses qui façonnent, qui taillent dans la pierre.
Chacune renvoie à des hésitations, des tâtonnements, dans ce rapport particulier (pour ne pas dire intime) à l'autre et finalement à soi-même... Il est plaisant de réécrire ses souvenirs, même si l'on change la forme des lettres. Les souvenirs ne sont pas figés, finalement.
Ce petit voyage intérieur, au delà de considérations esthétiques, suis-je le seul à le faire ? Est-ce que celles que j'entraîne dans mes univers intimes voyagent aussi ? Je vais être prétentieux et y croire.
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desmurmures · 10 years ago
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[Séance] Star Wars, l’après séance.
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Dimanche 4 décembre 2014, 11h30. Rendez-vous avec Marion, la modèle, et Juliette, la maquilleuse, pour une séance au fameux Dernier Bar Avant La Fin Du Monde. Le thème : Star Wars, période Ancienne République, avec Marion dans la peau d'un guerrier Sith. Ce n'est pas un cosplay, le personnage a été totalement créé pour l'occasion.
Ce n'est pas non plus un thème de mon cru, le mérite en revient à Marion pour l’idée. Je me le suis juste approprié. Le mot est un peu barbare d'ailleurs. L’idée de départ reste la sienne ; ce qui m'appartient, c'est ce que j'en fais.
Bref, l'aventure commence à midi au Dernier Bar devant un chocolat chaud. Parce que la préparation c'est important.
La guerrière en devenir s'assoit avec la maquilleuse pendant que je joue à Tetris avec les tables, histoire de nous faire de la place. La salle était réservée pour nous et j'avais déjà repéré le mur lumineux avec ses motifs.
J'ai donc commencé à travailler sur l'exposition, en faisant des tests d'ouverture, de vitesse et de sensibilité avec mon appareil, avec un flash en strobist, en lumière continue, et sans source additionnelle. Le mur était couvert de diodes mais la pièce était au final faiblement éclairée. Avec le flash j'avais une exposition parfaite et je n'avais pas besoin de tirer sur les iso, mais je perdais l'effet du mur (éclairage étouffé par le flash). Tandis qu'avec ma lumière continue additionnelle (une pauvre lampe de merde), c'était l'inverse : bel effet avec le mur, mais éclairage global insuffisant. C'est parti pour les premières complications... 
Bon finalement j'ai eu le temps de faire mes essais et mes réglages. Oui parce que le maquillage a duré deux heures. J'ai fait 4188248961476 essais. Ce sera lumière continue, du coup. Et j'ai aussi fait des tests sur le sabre laser. Pour voir comment les différentes sources lumineuses allaient interagir avec et... Bon ok j'ai fait mumuse avec le sabre. 
D'ailleurs au départ la modèle devait en avoir deux. Du moins je le croyais. Je me suis donc documenté en amont sur les postures avec deux sabres, en cherchant des dessins ou illustrations. Pas très difficile vu le thème. Donc je prends mes petites notes sur les postures, le regard, le cadrage, je fais des tests devant un miroir (oui je teste les postures devant un miroir, moquez-vous...). Bref, autant d'éléments qui allaient m'aider à orienter Marion. Le besoin de me documenter dénote d'un besoin de contrôle, oui. Mais si je ne le faisais pas le résultat me semblerait moins crédible... Sur ce genre de séance je me dis que la technique photo est aussi importante que le sentiment d'immersion. Une séance à thème avec des armes (fréquent dans la photo de cosplay par exemple) perd en crédibilité si la modèle ne sait pas tenir correctement son équipement ou se positionne comme une potiche télé qui tient un aspirateur... 
Et je m'aperçois pendant le maquillage qu'il n'y a qu'un seul sabre. J'avais prévu tout un panel de positions avec deux sabres.
Et il n'y en a qu'un seul.
Je voulais anticiper, je vais devoir improviser. Moi, le névrosé du contrôle. Improviser. Pas de panique !
J'ai donc repris mon carnet, retravaillé les postures en les réadaptant pour la plupart avec un seul sabre, et je ne m'en suis pas trop mal sorti, finalement.
J'avais par exemple dans l'idée de reprendre cette posture, issue de la série Clone Wars :
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Et elle a fini par devenir :
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La séance à proprement parlé a été plus rapide que prévue, J'ai pu faire toutes mes prises de vue en un peu plus d'une demi heure. C'était même étonnamment rapide. Cela dit il n'y avait qu'un décor, on n'avait pas besoin de se déplacer en plusieurs endroits.
Pour les postures j'ai choisi d'osciller entre quelque chose de réaliste d'un point de vue martial et de purement cinématographique. Et je voulais qu'elles induisent un mouvement, qu'elles ne soient pas figées (à part une ou deux dans la série), comme si la guerrière était sur le point de bondir et frapper avec son sabre. Je pense qu'avec deux sabres je serais parvenu à quelque chose de plus dynamique, mais bon, à tenter peut être sur une prochaine séance.
Une fois la séance bouclée, il restait à faire un tri et à retoucher les photos sélectionnées. Pour l'ambiance je voulais quelque chose de désaturé et froid, que j'ai obtenu sans trop de difficulté. J'affectionne particulièrement ce type de traitement. Mais il a fallu reprendre tout le sabre, qui en photo ressemblait à un tube en pvc rose pâle...
J'ai donc recréé le sabre sur Photoshop, avec une couleur rouge. C'est là que ça se complique. Le rouge du sabre finissait rose par endroits à cause des lumières sur le mur... Dans les films les sabres rouges restent rouges en toute circonstance. Là je me suis fait rattraper par une saloperie de réalité colorimétrique...
Du rose... Vous avez déjà vu un guerrier Sith avec du rose ?
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Bon, d'accord. Nos vaines existences sont parfois ponctuées de grands moments d'égarement. Soit.
Bref pour en revenir au sabre, j'ai dû passer des couches de claques supplémentaires en jonglant avec la colorimétrie, la lumière et la saturation pour tirer vers un rouge potable. Je crois que je manque d'expérience dans la retouche de sabre laser en fait...
Au final je retiens autant le déroulement de la séance que l'après séance en quête d'un ramen dans un restaurant japonais. Ce moment de relâchement avec la petite équipe qui continue à me faire sourire. 
Puis le recul sur la séance, pendant laquelle j'ai été particulièrement dirigiste, peut être à cause du stress... Je craignais de ne pas avoir assez de temps, et de ne pas être à la hauteur (je crois que cette dernière peur n'aura de cesse de me poursuivre, et de marcher à mes côtés pour me narguer).
En y repensant j'aurais aimé pouvoir lâcher prise, du moins un peu plus... Même si Marion semblait rassurée par le cadrage. J'ai parfois l'impression que ça peut me rendre étouffant. J'ai vraiment envie que la modèle ne se sente pas bridée par un photographe-marionnettiste... Qu'elle "respire" et s'exprime.
La zone entre le cadre et l'espace de liberté est assez floue, et varie selon la nature de la séance, le contexte, les besoins du modèle, mon humeur... Et pour cette séance j'étais effectivement pris par le temps, le maquillage ayant duré un peu plus longtemps que je ne le pensais. Toujours cette impression de marcher sur un fil... Je crois que je n'ai pas fini de m'en poser des questions...
Mais j'ai déjà quelques pistes de direction pour ma prochaine séance.
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desmurmures · 12 years ago
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Ce jour là
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En pensant écrire sur la photo je pensais n’écrire que sur mes pérégrinations. Des souvenirs de séances, des approches personnelles, des aspirations… Des petites choses que je n’ai pas envie de perdre et parce que j’ai la prétention de croire que l’écriture affranchit de l’oubli (oui c’est certainement prétentieux). Bref, je pensais me limiter à cette façon paradoxale de me rapprocher des gens, des choses, en restant à distance derrière mon objectif.
 Cette fois je laisse l’objectif de côté pour le remplacer par un livre : « Ce jour là », de Willy Ronis. Un peu difficile à étiqueter, et ce n’est pas plus mal. A la fois recueil de photos, journal autobiographique… Willy Ronis nous invite à traverser le 20ème siècle à travers une cinquantaine de photos, et ce qu’elles évoquent pour lui. Le célèbre photographe se fait conteur, avec la sensibilité et la pudeur qui le caractérisent, que l’on peut ressentir à travers ses photos.
 Revenons brièvement sur sa vie. Willy Ronis est né le 14 août 1910 à la Butte Montmartre, à Paris. Il faisait partie, avec Robert Doisneau et Henri Cartier-Bresson notamment, du courant de la « photographie humaniste ». Il a commencé la photographie dans les années 30, avec la montée du Front Populaire. Il s’est d’abord consacré au reportage, en suivant les manifestations ouvrières.
La photographie humaniste a connu un essor important après la seconde guerre mondiale. Les photographes de ce mouvement avaient pour aspiration de photographier les gens dans leur environnement, leur cadre de vie (intime ou en public), toujours en quête de petits instants de grâce qu’ils pouvaient capturer. Les rues pavées, les bistrots, les villes sont des lieux de prédilection. L’humain dans tout ce qu’il incarne est le pilier central de la prise de vue. Willy Ronis est l’une des figures de tête de ce mouvement.
 Dans les années 50, il défend la photographie comme moyen d’expression artistique, et intègre le « groupe des 15 », aux côtés d’autres photographes célèbres. Au cours de sa vie Willy Ronis se consacrera également à l’enseignement, à l’école des Beaux Arts d’Avignon notamment.
 Il décède en 2009, à l’age de 99 ans. Je ne connaissais le photographe que de réputation, et m’y suis réellement intéressé à la lecture de ce livre, « ce jour là ». Ronis nous invite à le suivre pendant ses voyages, ses virées, ses souvenirs, à travers ces moments pris sur le vif, ces photos qui forment le tissu de sa vie, comme il le dit lui même.
Le photographe nous apprend la valeur de l’instant, de ces petites choses précieuses auxquelles on ne prête pas suffisamment attention, et qu’il tente de capturer, au point de se demander parfois si le fait de figer cet instant n’en altère pas la force… Ronis l’évoque avec justesse en parlant d’une photo d’une vielle dame qui semblait méditer en regardant la mer : « il y a parfois des moments qui sont si forts que j’ai peur de les tuer en faisant une photo. »
 Effectivement la force qui se dégage d’un instant n’est pas seulement visuelle, elle est liée à ce que cet instant nous évoque. Une part de cette force est donc purement subjective, pour ne pas dire intime. Et saisir l’instant implique d’être toujours prêt. Juste avant, il n’y rien, et juste après, tout disparaît… Willy Ronis appelle ça « la joie de l’imprévu ».
 Dans son livre il nous parle de ses rencontres, de sa femme, avec laquelle il a vécu pendant 46 ans, de ce qui le touche ou l’interpelle.
Une amie photographe m’a raconté une anecdote, un jour. Peu de temps avant sa mort, elle avait vu son nom dans l’annuaire, avec son adresse et son numéro de téléphone. Ça l’a surpris, et moi aussi d’ailleurs. Quelqu’un de sa renommée est-il si facilement joignable ? Elle a appris après sa mort qu’il avait fait exprès de laisser ses coordonnées dans l’annuaire, car il aimait que les gens l’appellent et viennent lui parler.
 Willy Ronis a arrêté la photographie en 2001, mais il a apprécié les petits instants d’éternité jusqu’à son dernier souffle.
Pour ma part je découvre une source d’inspiration, de réflexion sur mon rapport à la photographie et aux autres.
 « Devant toutes ces photos, je sais que je reste dans le quotidien, dans ma réalité quotidienne, mais c’est ce que je suis. Je ne suis pas un romancier, je ne peux pas inventer, c’est ce qui est là sous mes yeux, qui m’intéresse. Le plus difficile est d’arriver à le saisir. Ces photos ne sont pas si mystérieuses pour moi, mais elles me replongent toutes dans un moment précis, de pure émotion, et c’est ce moment précis que je cherche à retrouver en m’arrêtant sur chacune d’elle. »
  Willy Ronis, Ce jour là.
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desmurmures · 13 years ago
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Une histoire
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Toutes les photos ne racontent pas d’histoire. Certaines sont juste faites pour vendre un produit (photos de mode par exemple). Mais lorsque c’est le cas, et ça l’est chez certains photographes, on peut dire que la photo fait voyager, ou qu’elle est porteuse de message… Tantôt engagée, à travers le reportage notamment, tantôt illustrant la poésie des petites choses du quotidien, grâce aux photographes humanistes, la photographie qui raconte fige un instant dans le temps. Et ces exemples ne sont pas exhaustifs.
Je n’ai pas le talent pour raconter une histoire avec mes photos, mais l’idée que certaines d’entre elles sont empreintes de mon histoire personnelle, du souvenir d’une journée, ou de quelqu’un, me rassure sur le fait qu’il y a certaines choses qui restent, que le temps n’érode pas.
Je me souviens de cette journée, c’était en été 2010. Il faisait beau, ce qui est loin d’être une évidence à Paris, et j’avais rendez-vous dans l’après midi avec une amie, aux Halles, devant la Fontaine des Innocents. Nous étions assis face à face, sur les bancs en pierre entourant la Fontaine, à discuter et à refaire le monde (on n’avait pas de bouteille de vin blanc, pour changer).
J’avais pris mon appareil photo avec moi. Je l’ai sorti pour prendre quelques photos de la Miss, qui s’avérait être une modèle incadrable (lui faire tenir une pose étant une expérience extrême). Peu importe, je n’avais pas envie de faire une séance photo, juste de prendre quelques clichés spontanés d’une amie. A bien y réfléchir je pense que j’avais déjà envie de lâcher prise par rapport à mon « cadrage-contrôle » sécurisant de séance photo, mais je ne m’en rendais pas encore compte.
Au final elle m’a pris l’appareil photo des mains pour s’amuser elle aussi, et prendre des photos de moi. Je me suis retrouvé pris à mon propre jeu. Chacun a fait le photographe et le modèle à tour de rôle, sans se prendre au sérieux. On jouait à se mettre en situation, avec beaucoup de dérision, beaucoup de rires du coup.
Puis vint cette photo. Elle a voulu faire semblant de poser, caricaturer un sourire, faire semblant d’être figée comme sur la plupart des photos de modèles, pendant à peine une seconde. Et j’ai réussi à prendre la photo au vol, à capturer cet instant qui se voulait exagérément figé, cette expression faussement artificielle, pour obtenir contre toute attente quelque chose de libre et de naturel. Je me dis que c’est elle, dans tout ce qu’elle peut dégager, que j’ai réussi à photographier.
Ce n’est sûrement pas flagrant pour un regard extérieur, et il faut certainement la connaître pour s’en rendre compte, mais peu importe après tout. Je me dis que c’est mon histoire de cette journée, et la sienne.
A bien y regarder il y a beaucoup d’asymétrie dans ce portrait : tête pas droite, coiffure en désordre, même le pendentif n’est pas droit. La seule chose de droite dans cette photo reste le cadre… Pourtant j’y vois beaucoup d’harmonie dans ce désordre qui n’en est pas vraiment un, dans la façon dont ce « tout » renforce la douceur et la chaleur de l’expression.
Pour quelqu’un qui n’aime pas poser elle a trouvé le moyen de se révéler totalement, en l’espace d’un mouvement.
Et moi je découvre la photo instantanée, hors cadre, une autre façon de faire des portraits… Non pas en lisant, en m’instruisant, mais en vivant l’instant.
Je crois que c’est en grande partie à elle que je dois cette aspiration au « lâcher prise » en photographie, et aussi à cette soirée chez moi arrosée au vin blanc, quelques mois plus tard, à se prendre en photo à tour de rôle, prolongeant l’exercice de style de ce fameux jour… Mais ça, c’est une autre histoire.
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desmurmures · 13 years ago
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Un mariage
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Retour sur une nouvelle expérience : j’ai photographié mon premier mariage. Ça fait déjà quelques mois, mais maintenant que j’ai terminé de retravailler toutes les photos, que j’ai un peu plus de recul, j’ai envie de revenir sur ce qui est maintenant un beau souvenir.
Donc, retour en arrière : j’ai photographié mon premier mariage. Photographier un mariage requiert des compétence que je n’ai pas. Je ne suis pas photographe de mariage. C’est un métier, ce n’est pas le mien.
Je n’avais pas non plus une très belle vision de la photographie de mariage. Je trouvais ça un peu ringard, kitsch… Bref le capital attractif de ce style de photo n’était pas pour moi quelque chose de très flagrant.
Et un beau jour un couple d’amis me demande d’être leur photographe de mariage. Voilà. Je suis dans la merde.
D’un côté il y a tout ce que j’ai écrit plus haut et de l’autre… Vous refuseriez de photographier les deux personnes les plus gentilles du monde le plus beau jour de leur vie ?
J’ai accepté. Évidemment que j’ai accepté. Sans hésiter (ok peut être un quart de seconde et à cause de l’effet de surprise !). Voilà, balayés tous mes à priori sur la photo de mariage, balayées toutes mes réticences. Ou presque : je ne suis pas photographe de mariage. Je suis dans la merde.
Bon pas de panique, ils m’ont demandé quelques mois à l’avance, j’ai le temps de me préparer. J’ai donc passé du temps à parcourir des sites web de photographes de mariage, à étudier leurs photos, leurs choix en matière de composition, de lumière, de retouche…
Il y a des photographes qui se limitent à faire des portraits des mariés et des invités, ce qui constitue déjà un travail dense au vu de la quantité de photos prises pour un mariage. Je n’adhérais pas trop au style de photos de couples les plus répandues, ce qui m’a orienté vers les travaux de photographes adeptes de mises en scène qui sortent un peu des sentiers battus.
Un bon photographe de mariage me dirait qu’il doit cumuler toutes les approches du portrait (reportage, intérieur, extérieur, contre jour, photos de groupe…), certes. D’ailleurs beaucoup de photographes partagent peut être cette vision. Je ne me suis basé que sur un échantillon de sites…
Quoi qu’il en soit Je commençais à me dire que je pouvais envisager la séance photo de couple un peu comme mes séances habituelles… Intégrer le thème du mariage à ma propre façon de photographier. Et puis laisser venir, lâcher prise… Sur ce point l’exercice ne s’avèrerait peut être pas si déstabilisant et plus attractif que prévu.
Bon, la partie délicate reste celle des photos de groupe. Les mariés avec : les tontons les tatas les parents les beaux parents les cousins les cousines les neveux la mamie le chien (oui il y a toujours un truc à poils de type rongeur névrosé hargneux) bref la panique ! Déjà que je ne suis pas photographe de mariage (oui je sais je me répète c’est lourd mais je m’en fous c’est mon article, j’écris keskejeveux), il faut en plus que je sois animateur.
Ah mais au fait, j’ai pas de liste, je ne sais même pas qui est qui…
AAAAAAAAAAAAAAH !!!
Bon aller on rationalise, on analyse, on organise. Donc je disais qu’il y avait des photographes qui se limitaient à faire des séries de portraits, et ceux qui envisageaient la photographie de mariage sous l’angle du reportage. Du coup mes craintes se sont changées en réelle motivation.
Non pas que j’aie la prétention de faire mieux que ces photographes aguerris (la moitié de leur talent m’irait en fait), mais l’idée d’attraper au vol des moments particuliers m’a franchement attirée. L’enjeu était grand : immortaliser ce qui est sensé être le plus beau jour dans la vie d’un couple.
Je décidais donc d’organiser les photos à la fois sous l’angle du reportage et du portrait. Je n’allais pas y échapper à mes photos de groupe.
Arrive enfin le grand jour. Je débarque la veille chez mes amis. Derniers préparatifs, planification de la journée, et hop par la toute puissance des liens qui unissent deux êtres je me retrouve… Projeté dans un salon de coiffure un samedi matin à 9h entouré de femmes. J’étais une minorité visible.
Du monde, du mouvement, du bruit, des moments de silence… Le salon était plein de vie. La mariée et les demoiselles d’honneur se préparaient, et moi j’observais à travers mon appareil. Les coiffeuses oeuvraient, concentrées… Il y avait presque du recueillement dans toute cette effervescence créatrice.
Mon attention se portait sur des mains, des cheveux, des regards, des rires. La journée démarrait de façon assez sereine.
Etape suivante : la robe. Quelques clichés pendant le laçage de corset. Grand moment d’apnée pour la mariée, plaisir des yeux pour le photographe.
« Heu… On peut refaire le laçage un coup là ? non je plaisante pose cette chaise ! bon ben moi je vais à l’église hein »
Et donc pendant que la mariée finissait de se préparer, je me suis rendu à l’église (comment j’ai foiré ma transition là). Arrivé en avance, j’ai pris le temps de me familiariser avec les lieux … En gros, compter les colonnes, les carreaux sur le sol, les cierges, les vitraux, les assortiments de couleurs sur les vitraux, les croix, bref.
J’avoue ne pas être un fan inconditionnel des messes de mariage. Des messes en général d’ailleurs. Pas mon truc. Je craignais même un manque d’inspiration par rapport à la partie salon de coiffure.
Finalement j’ai été agréablement surpris. Pour la première fois j’assistais à une messe de mariage en passant de l’autre côté de la barrière. J’ai été le témoin d’un festival d’émotions qui traversaient les visages des invités. La messe perdait pratiquement son côté solennel au profit de quelque chose de simple et touchant.
Et puis il était drôle ce curé. Spontané, simple, toujours un mot agréable. D’ailleurs c’est le deuxième curé qui me fait rire (le premier étant Frère Tuck dans Robin Des Bois).
Il y avait bien entendu les mariés, touchant à travers leur complicité, leurs sourires, et les témoins, noyés dans leurs émotions quand ils devaient prendre le micro.
Et puis cette reprise de « chasing stars » de Snow Patrol…
Le temps s’arrêtait sur tout ce que j’essayais d’attraper au vol, sur cette ambiance qui me berçait. Si je n’avais pas été le photographe de ce mariage je me demande si j’aurais été attentif à toutes ces petites choses qui me traversaient alors que j’appuyais sur le déclencheur.
Le reste de la journée était un marathon. Suivre les mariés, faire les photos de couple, de groupe (il y avait même une dame âgée avec un yorkshire), les photos à la demande, le tout dans la bonne humeur. Un joyeux marathon en somme, qui s’est arrêté le soir.
Le lendemain, visionnage des photos brut avec les mariés. Malgré quelques loupés, je m’en suis relativement bien sorti. J’ai mérité ma nuit de sommeil. Et les suivantes.
Je ne suis pas photographe de mariage, mais j’ai apprécié l’expérience humaine.
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desmurmures · 13 years ago
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Symbolisme et composition
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  La composition est la manière d’organiser les éléments dans un cadre afin de créer un tout harmonieux. Les règles de composition en photographie sont pour la plupart dérivées de la peinture. Grosse lacune de ma part que de ne pas m’y être intéressé plus tôt, je pense que j’y gagnerais à y remédier.
  Quoiqu’il en soit ces règles permettent au photographe d’exprimer beaucoup de choses, de dynamiser une photo, de raconter une histoire (pour reprendre une expression souvent utilisée). La composition est au photographe ce que l’encre et la plume sont à l’écrivain.
  A l’instar de l’écrivain qui est libre de ses mots, le photographe est libre d’appliquer de façon stricte ou non les règles de composition, qui ne sont qu’un outil au service de ce qu’il veut exprimer. D’ailleurs en terme d’outil, il y en a trois à utiliser : le cadrage, l’angle, et le choix des éléments. J’y reviendrais peut être dans un prochain article.
  Je l’avais déjà lu dans la plupart des articles qui traitent du sujet, et je le ressens désormais de plus en plus : il n’y a pas de créativité sans liberté.
  La photographe Anne-Laure Jacquart affirme, à juste titre également, que la composition est une mise en scène. On modèle un environnement, on choisit ce que l’on veut mettre en valeur, et comment…
  Au départ je me bornais à essayer d’appliquer la fameuse règle des tiers : diviser le cadre en deux lignes horizontales, deux lignes verticales, et considérer que les points forts de l’image se trouvent sur ces quatre points d’intersection. Cette règle est sensée donnée un certain dynamisme, un sens de lecture à la photo.
  La règle des tiers est un bon exercice de style, mais que se passe-t-il si l’on choisit de ne pas l’appliquer ? Est-ce qu’un portrait centré serait forcément plat ? Non. Il n’y a pas de dogme, juste le choix du photographe. Ce qui compte c’est de connaître les outils à disposition, et d’en disposer librement.
  Etroitement lié à la composition, le symbolisme concerne le choix des éléments eux-mêmes, la façon d’en disposer, et contribue grandement à donner du sens à la photo. Le procédé se fait même de façon inconsciente, puisque nos photos peuvent renvoyer à quelque chose d’abstrait et d’évocateur… Un souvenir, une émotion, dont le sens peut varier en fonction du vécu, de l’ensemble des références de la personne qui regarde…
  Que se passe-t-il si l’on cherche à contrôler ces symboles ? Si le procédé devient conscient ? La photographie ne deviendrait-elle pas un moyen d’expression libre et conscient ?
  Voici une analyse personnelle (que j’espère pas trop pompeuse) d'une photo prise dans le cadre d'une séance.
  La photo présentée avec cet article fait partie d’une séance consacrée aux arcanes du tarot (la lune, en l’occurrence), mais sort un peu du thème et finalement je la vois comme assez indépendante de la série.
  Sur cette photo j’ai souhaité travailler sur la pudeur et la fragilité. Pour y parvenir j’ai utilisé plusieurs éléments.
  Il y a le masque, qui cache le regard, comme si elle refusait d’affronter, de se dévoiler par la même occasion ; également la position des mains, qui renvoie à un besoin de se protéger. Ces éléments alimentent l’idée de fragilité, de vulnérabilité.
  Ses vêtements sont blancs et simples, ce qui renvoie une image de pureté, d’innocence, qui s’accorde assez bien avec l’idée que je me fais de la pudeur.
  Le décor est assez sobre, et simple, de façon à ne pas étouffer la modèle.
  Pour le post traitement, j’ai opté pour un noir et blanc avec des tons assez doux. Je trouve que le noir et blanc donne un côté intimiste qui correspond assez à l’ambiance que je voulais créer avec cette photo.
  La vision de ce que ces différents éléments renvoient est bien entendue très personnelle. Je serais curieux de savoir ce qu’évoquerait cette photo pour d’autres personnes…
     NB : cet article est rédigé sans prétention aucune, et surtout pas celle d'être un cours de photo en ligne. D’autres photographes proposent cette prestation (et c’est une véritable prestation), pas moi. Il ne s’agit ici, encore et toujours, que de ressenti, d’opinions personnelles.
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desmurmures · 13 years ago
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Au Starbuck avec la Comtesse
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C’était un dimanche matin. Après de multiples mails, après l’avoir décalée une première fois, la séance photo allait avoir lieu un dimanche de septembre.
  Revenons en arrière. Juin 2011. Je parcours depuis quelques temps le blog de Louise Ebel (Miss Pandora), célèbre bloggeuse mode. Je ne suis pas particulièrement adepte de ce type d’univers mais ce que dégage Louise me plaît. Il y a quelque chose qui navigue entre la mode, l’histoire de l’art, les époques et certains personnages marquants.
  De façon basique, mes choix commencent par un « j’aime » ou « j’aime pas ». Cette considération peut être simpliste était le postulat de départ pour l’aborder (profitant également d’une annonce sur sa page).
  La suite est assez banale : quelques échanges par mail et elle me propose de travailler sur une séance centrée sur le personnage de la Comtesse de Castiglione.
  Vue comme l’une des plus grandes beautés de son époque, la Comtesse était si narcissique qu’elle ne supportait pas de se voir vieillir, et de voir sa beauté flétrir. Elle ne sortait donc plus que la nuit, et s’adonnait à de longue promenades nocturnes.
  Le thème portant sur une période assez sombre de la vie de la Comtesse, l’idée était de faire la séance sur la place Vendôme, là où elle vivait, au lever du jour, profitant d’une lumière naissante et de tons froids. J’avais ensuite pour idée d’accentuer cette froideur en post-traitement, pour donner aux photos une teinte bleutée.
  Nous nous retrouvons donc en bas de chez elle, puis direction la Place Vendôme, un dimanche de septembre, vers 6h30. Elle préparant ses accessoires et moi terminant les réglages de mon appareil.
  La Comtesse ayant basculé dans la folie à la fin de sa vie, l’état de fatigue avancé de ma modèle allait pour le coup dans le sens de la séance. D’ailleurs par solidarité je n’étais pas très frais moi non plus (oui il est important d’être réellement impliqué dans le thème d’une séance photo).
  La séance se déroule sans encombre, sans que l’on soit dérangé par les passants. L’horaire ça aide… A un détail près toutefois : je me suis trouvé face à un modèle dirigiste. Je suis sensé diriger, et là les rôles sont inversés… Bon, pas de stress inutile, elle s’est beaucoup documentée sur le personnage, elle est très investie et veut que les photos soient réussies. Je m’incline. Elle s’en excuse même à la fin…
  Fin de la séance, direction le Starbuck d’Opéra pour le petit déjeuner (oui j’ai emmené la Comtesse de Castiglione au Starbuck…). Discussion détendue, loin du stress de la séance, je prends le temps de découvrir une personne charmante, passionnée par ce qu’elle fait. J’affectionne particulièrement ces moments d’après séance, qui font ressortir de façon plus évidente l’aspect humain d’une séance photo (un autre aspect du « lacher prise » tiens).
Je m’étais tout de même renseigné sur Louise avant la séance. Je regardais ses photos, afin de m’imprégner de ce qu’elle dégageait, pour ensuite dévier sur les critiques, bonnes et mauvaises. Je suppose qu’une personne qui fait à ce point parler d’elle sur la toile a forcément des détracteurs. Je n’avais pas vraiment d’opinion de départ sur elle, je ne savais pas trop quoi penser à vrai dire. Le milieu de la mode ne m’interpelle pas vraiment. C’est un univers comme un autre, ce n’est juste pas le mien. Quoiqu’il en soit j’avoue avoir du mal à comprendre la véhémence de certaines critiques. Au risque d’avoir un raisonnement simlpliste, quand on n’aime pas un blog, il suffit de ne pas le lire.
Quoiqu’il en soit je garde un bon souvenir de la séance, de ce moment passé avec quelqu’un que beaucoup de gens critiquent. J’espère que j’aurai l’occasion de travailler de nouveau avec elle (un peu plus tard dans la journée par contre ?).
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desmurmures · 14 years ago
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Une affaire d'instant
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Le relâchement a toujours été une épreuve pour moi, du fait de mon besoin d’avoir un contrôle sur les choses. Prévoir, anticiper, organiser, éviter l’imprévu car il angoisse… Ce n’est pas gênant dans le cadre d’une séance photo avec modèle, puisque ça dénote d’une certaine rigueur (cf. « lâcher prise »).
  Je n’avais jamais envisagé la photo de modèle autrement d’ailleurs. Pourtant avec le temps l’imprévu s’y manifestait par petites touches très brèves, ce qui les rendait particulièrement marquantes. Cet imprévu est synonyme de relâchement, de « lâcher prise ». Je me suis donc retrouvé à garder la trace de moments particuliers, uniques. Le sourire d’un modèle qui n’a pas oublié son enfance, un instant de complicité entre deux sœurs…
  Il m’est arrivé de voir que certains photographes travaillant avec des modèles dans le cadre de séances préparées se qualifiaient eux-mêmes de « voleurs d’instants ». Sans médire sur leur travail, je trouve cette appellation très erronée. On ne peut pas se qualifier de voleur lorsque l’on plante soi-même les graines que l’on s’apprête à cueillir.
  Mais revenons sur cet éphémère qui dure. On vole un instant, on l’isole de ce qu’il y avait avant, de ce qu’il y aura ensuite, et le temps s’arrête. Cet instant est là et il ne disparaîtra pas. Il témoigne avec une telle conviction de ce qui a pu nous toucher, ou tout au moins nous interpeller, que l’on en vient à se poser la question :
  Le regard que l’on porte sur ce que l’on photographie n’importe-t-il pas plus que ce qui est photographié ?
  Je n’ai pas beaucoup de photos de ce genre à mon actif, mais lorsque je les regarde, je me souviens de journées, de moments de complicité, de rires, d’ambiances, d’émotions. Ces photos sont ma clé pour y accéder, encore et encore.
  Finalement je n’ai pas besoin de grand chose, mes trésors à moi sont ces instants.
  Je terminerai sur une citation de Jean-Noël Jeanneney qui, parlant de la vision de Cartier-Bresson sur la photographie instantanée, énonce que l’œuvre du célèbre photographe nous définit comme « des êtres de « regard », regard que nous portons, avec les autres, sur le cours des choses, regard que nous portons sur nous-mêmes. »
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desmurmures · 14 years ago
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Univers intime
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J’ai toujours pensé que les gens avaient un univers personnel, intime, qu’ils exprimaient à travers une activité artistique, créatrice. Certains le font avec beaucoup de talent, d’autres moins, d’autres encore y aspirent… Je n’irais pas jusqu’à dire que le talent importe peu, au final, mais le principe même d’un mode d’expression personnelle suffit à donner à celui qui « ose » un gage d’authenticité et, au delà, de respectabilité.
Il y a toujours une certaine mise à nu à dévoiler l’univers qui nous habite. Et pour ma part je trouve souvent périlleux de livrer cet univers à des regards extérieurs. C’est un drôle de jeu dont les règles imposent, tacitement, de faire face tant à l’indifférence qu’aux critiques les plus véhémentes. Et à tout ce qui se trouve entre ces deux extrêmes.
Il y a également le piège, parfois bien dissimulé, de la recherche à tous prix d'une reconnaissance. Je n’en sous-estimerai pas l’importance, la reconnaissance peut être aussi rassurante que flatteuse, mais je préfère m’attacher de façon plus globale au regard extérieur.
La recherche du regard extérieur devient une alternative au piège de la volonté de reconnaissance à tous prix, qui amènerait à créer non plus pour soi mais pour les autres.
Au delà de tout choix de professionnalisme et donc de réponse à des demandes, j’ai du mal à croire que l’on puisse avancer en ne faisant pas les choses pour soi en priorité. Je vois la créativité comme un chemin intérieur, parfois tortueux, qui jalonne notre univers intime.
Par conséquent le regard des autres compte, il permet de mesurer l’impact de ce que l’on exprime. Je m’aperçois que j’ai besoin de ce regard qui me montre ce que je ne vois pas forcément, cette interaction entre ma sensibilité personnelle et celle de celui qui regarde. Ce qui revient presque à dire que la photographie n’est qu’une affaire de regards.
Chaque séance est une parcelle de cet univers intime, qui prend forme grâce à une mise en scène, une certaine scénarisation, une ambiance, et bien sûr grâce au modèle. Le modèle porte le poids de l’univers qu’il contribue à incarner, en modifie les contours par le simple fait qu’il s’exprime. Et c’est aussi ce qui explique que l’on ne peut pas tout contrôler (cf article précédent).
Autrement dit le modèle a également son univers, que je cherche à faire correspondre avec le mien, le temps de la séance.
Il y a quelque chose qui relève de l’intime quand un modèle se dévoile devant l’objectif. A travers les thèmes des séances je vois de la force, de la fragilité, de la détermination, du relâchement… Je vois quelque chose de profondément humain, qui me touche toujours. Je suppose que je dévoile aussi certaines choses dans ma façon de diriger la séance, de prendre mes photos. Il n’y a pas de raison pour que le voile ne tombe que d’un seul côté après tout.
Finalement derrière toute cette préparation on en vient à se découvrir l’un l’autre.
La rencontre des univers intimes ne se limite pas à la photo…
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desmurmures · 14 years ago
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Lâcher prise...
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    J’ai commencé mes séances avec modèles avec le besoin important de tout contrôler. La séance a un thème, une ambiance, renvoie à un certain nombre d’émotions, à un ressenti particulier. Il faut choisir le modèle, prévoir ses postures par rapport à l’environnement, au décor… Tout est paramétré, convenu préalablement avec le modèle.
  Si ce besoin de contrôler couvrait les nécessités d’organisation et de rigueur inhérentes à une séance photo, je me suis aperçu, avec du recul, qu’il servait aussi, de façon plus ou moins dissimulée, à pallier mon manque de confiance, ma peur de l’échec. Rien d’anormal quand on débute finalement.
  Chaque séance était bien plus qu’une série de déclenchements dans l’appareil, bien plus que des consignes de pose. Pour moi il s’agissait à chaque fois d’un projet photo sur lequel je travaillais plusieurs semaines, puisant mon inspiration à travers des images, des illustrations, d’autres photos, la musique.
  Une fois la séance terminée débutait le travail de traitement des photos, plus que léger au début, plus important aujourd’hui et je l’espère, plus fin par la suite. D’ailleurs j’ai souvent été surpris que le résultat final ne corresponde pas toujours à mes attentes. Même si cela peut paraître évident, quand on veut tout contrôler on est déstabilisé quand quelque chose nous échappe.
  J’avais pourtant tout préparé, imaginé les postures du modèle dans ma tête… Et parfois celles qui me demandaient du travail donnaient un résultat très en deçà de mes espérances, et celles plus spontanées, sans une tentative de contrôle et d’anticipation qu’aujourd’hui je trouverais peu utiles, donnaient quelque chose d’inattendu et finalement très plaisant.
  Avec le temps j’ai fini par les attendre ces surprises. Me demandant quelles pépites j’allais récolter après chaque séance. La pression s’est relâchée. Il y a de l’organisation, toujours, et il en faut, mais il faut aussi accepter qu’on ne peut pas tout contrôler, que ce n’est peut être pas plus mal. Apprendre à lâcher prise…
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desmurmures · 14 years ago
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Des statues et des hommes
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Mon intérêt pour la photographie s'est d'abord manifesté à travers la prise de vue de statues, de pierres et de sculptures diverses. Je ne sais pas exactement ce qui m'a poussé à m'y intéresser, un déclic difficilement explicable (comme tous les déclic d'ailleurs).
J'ai déjà entendu dire que mon intérêt pour l'inanimé se manifestait lorsque mon humeur n'était pas au beau fixe. Peut être, et pourquoi pas après tout. La photographie est un moyen d'expression comme un autre, et quelque soit le regard du photographe, cela reste de la photographie. Et avoir un moyen d'expression me semble plus important que ce que l'on va choisir d'exprimer.
Il y a quelque chose de dur, « d'inhumain » et de froid dans la pierre. L'expression figée, souvent austère des statues...
Il y a aussi quelque chose de constant, qui porte l'usure du temps et qui y résiste en même temps. En y réfléchissant le terme « d'usure » me paraît peu approprié. Je pense que l'empreinte du temps n'use pas mais donne un certain relief, de la profondeur, témoigne d'une histoire. Un peu comme les gens qui vieillissent, vivent leurs expériences, et portent leur histoire sur leur visage, leurs mains, leur corps...
Finalement elles sont étrangement humaines ces statues. Elles sont faites par des mains qui vieillissent, résistent à « l'usure » du temps. Peut-on dire que ce que nous faisons avec notre humanité devient humain ? Comme si on y laissait une parcelle d'âme ? Dans ce cas photographier des statues revient indirectement à photographier l'humain, et l'histoire.
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