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-C'est injuste, en recyclerie y a toujours des vêtements pour enfants trop stylés, mais pas pour adultes.
-Mais si tu les laves à -20°C, ils seront à ta taille, après.
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Années 2000 : la mondialisation culturelle semble presque complète. Les entreprises spécialisées dans la formation à la communication interculturelle sont menacées d'obsolescence.
2005 : création de BFM TV
2008 : création de Mediapart
2013 : vente de Sud Radio au Groupe Fiducial, dont le pr��sident est réputé proche de l'extrême droite.
2017 : création de CNews
2021 : création de blast, et de Off Investigation
2025 : essayer d'avoir une conversation dans la vraie vie avec une personne qui ne regarde pas le même média relève de la communication interculturelle. Ceci est une théorie du complot.
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(Suite du texte d'hier)
-Olá Bom dia ! -Olá Bom dia !
C'est la française. Elle vient ici tous les matins. Elle prend sa photo, et elle repart. Ma cheffe dit qu'elle a séjourné ici l'été dernier, qu'elle a commencé une série de photos et qu'elle veut la continuer. Je la salue juste. J'ai la consigne de la laisser entrer. C'est tout.
J'ai pas envie qu'elle sache que je suis français. Je lui dis Holà avec mon meilleur accent, et ça passe. Elle me fait un peu peur en fait. Elle a l'air de plus en plus marginal, et elle sent pas bon. Elle est pas sale sale, mais elle sent la rue, quoi. Elle sent le corps humain. Elle sent un peu comme les chambres à 11h, avant qu'on les aère. Elle sent le gras de peau. Ses cheveux sont secs.
Et c'est bizarre, cette régularité. Sa photo du matin, toujours la même. Ouais, c'est ça. C'est pas tant son odeur ou ses cheveux qui m'effraient, c'est son obsession. Toujours, quand je termine de mettre en place le petit-déjeuner, je me pose à l'accueil, et paf elle arrive. 7h35. Elle me stresse. Qu'est-ce qu'elle veut ?
-Do you have a plug?
Merde. Elle veut charger son téléphone. Je fais quoi ?
-Yes, of course.
Merde. Je suis en train de lui charger son téléphone. Elle reste devant moi. Je fais quoi ?
-Tu es français. Merde. Comment elle sait ? -Oui, comment vous savez ? -Il y a un drapeau sur ton badge. -Bien vu. -Et tu t'appelles Cédric. -Oui. -Tu sais si je peux exposer ici ? -Exposer ? -Oui, je vois qu'il y a des peintures dans le couloir et dans la salle commune, moi j'ai une série de photos. Dans 4 mois, j'aurai terminé. Tu sais si je pourrais exposer ? -Je sais pas. Je vais demander. -D'accord. -Ok. Putain, 2%, il charge lentement son téléphone. C'est gênant, là. -Tu veux pas savoir ce que je voudrais exposer ? -Comment ? -Tu as dit que tu allais demander si je pouvais exposer. On va te demander ce que c'est, et tu sauras pas. Bien vu. -Tu veux savoir ? -Oui.
Elle s'approche de moi pour allumer son téléphone branché. Ça sent fort. Elle me montre ses photos. Y a que ça. La vue depuis la véranda, avec le même angle. Une mosaïque obsessionnelle. Et son regard froid, sûr d'elle, quand elle me montre ça. Ça me touche. Quand on scrolle, ça fait des vagues de couleur, comme une seule aube à l'envers. C'est très flippant, mais c'est génial. Elle est très proche. Ça sent fort, mais ça va, je trouve son odeur rassurante, un peu.
-Alors, t'en dis quoi ? -Pourquoi vous faites ça ? -… -Non, c'est pas que je vois pas pourquoi. C'est juste, je sais pas, je me demande. Vous voulez me raconter pendant que votre téléphone charge ? Je viens de faire du café.
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Je ne sais pas pourquoi je suis toujours là.
La semaine dernière, j'ai vu des enfants retourner à l'école. Je ne vois plus de touristes. Les bus sont à nouveau plein en heure de pointe. Les nounous passent du temps au parc avec les enfants qu'elles gardent : goûters, ballons, pulls perdus.
Mais moi, je suis encore là. Je t'écris depuis la véranda de l'auberge de jeunesse. Je suis arrivée à Porto en juillet. Pour l'été. Pour réfléchir.
Et je suis toujours là. Je me dis qu'officiellement, l'été c'est jusqu'au 22 septembre. Mais j'avais toujours eu le couperet de la rentrée scolaire. C'est terrible, non ? D'attendre 46 ans pour appeler l'été l'été, jusqu'au bout. Il y a eu l'école, puis le collège, le lycée, la fac, et très vite, trop vite, il y a eu Léo, et c'était reparti. Je me dis que j'ai de la chance, que d'autres ne vivent jamais l'été jusqu'au bout.
En principe, le séjour dans cette auberge est limité à 8 semaines par an. Mais la directrice est arrangeante. Elle m'a dit que je pouvais rester encore 10 jours, mais qu'après, elle ne pourrait rien faire. Je vais donc devoir partir le 22 septembre.
Je me donne 3 jours pour décider. Retourner à Montpellier avec Franck, ou m'installer ici. Peut-être rendre visite à mes amies entre temps (ça te dit, une semaine entre copines ?). Je n'ai pas donné de nouvelles à Franck depuis. J'ai fini par éteindre mon téléphone, c'était trop de recevoir ses messages. Ça me laissait à sa portée. Il m'a coupé l'accès au compte commun au bout de 3 semaines. J'avais fait quelques réserves. Je me vois mal revenir comme ça. J'ai même pas envie, je crois. 3 jours pour décider. Ça me laisse 7 jours pour profiter. Des jours volés à la rentrée. Des jours de ma vie que l'été récupère.
Je mange presque pas, je dors beaucoup. Le reste du temps, je marche, j'observe et je souris. J'écris, je lis ce que je peux trouver dans la boîte à livres du parc. Je comprends rien au Portugais, mais j'aime bien lire quand même, ça me fait des images.
J'ai commencé un truc marrant, ça te plairait. Chaque matin, à la même heure, depuis le 1er septembre, je prends une photo de la vue depuis la véranda, avec exactement le même angle.
Après, je superposerai les photos pour voir comment le temps change l'image. Comment les jours raccourcissent, ou simplement observer que les vitres de la véranda sont nettoyées toutes les deux semaines.
Et toi, comment vas-tu ? J'aime t'écrire. Est-ce que tu voudrais que je t'envoie mes photos de la véranda ? Viens me rejoindre, s'il-te-plaît. J'ai peur du 22 septembre.
PS : je ne prends que ces photos. J'aime l'idée que dans quelques années, je ne puisse me retourner que sur ces images. Comme si seul ce lieu avait existé pour moi.
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On revoit les gestes de premiers secours. Là, c'est sur les étouffements avec obstruction des voies respiratoires. Le gars à côté de moi demande s'il peut poser une "question bête".
-Il n'y a pas de question bête, vas-y.
-Si je suis tout seul, je fais comment ?
Le formateur a l'air un peu fataliste en mode "c'est mort". Mais il va quand même montrer une technique. Il est pas surpris par la question. Et en effet, il n'y a pas de question bête.
Je me dis maintenant que ce serait une méthode de suicide pas mal. Au cas où. Mais j'ai jamais entendu parler de qui que ce soit qui se serait suicidé·e d'une telle manière. Peut-être parce que c'est extrêmement douloureux.
Comme la noyade, d'ailleurs, il paraît que c'est très douloureux, qu'on a l'impression que nos poumons brûlent. Personne ne se suicide par noyade, enfin je crois. Je me dis qu'il y a toujours l'instinct de survie qui fait que tu vas remonter à la surface.
Alors, il faudrait peut-être s'attacher à un poids pour rester au fond de l'océan, comme une taupe repérée par la mafia. Mais ce serait mieux de remonter à la surface à un moment, dans le cas où on voudrait une sépulture décente.
Il faudrait donc s'attacher à une sorte d'Efferalgan géant. Au bout de quelques minutes, paf, notre corps mort remonte à la surface. Oups, j'ai pas du tout écouté ce qu'a dit le formateur.
Si je m'étouffe, je meurs, et ce sera pas un suicide.
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J'ai cassé un verre hier. Comme d'habitude, je suis flegmatique quand il s'agit de ramasser des morceaux de verre. J'accepte mon sort. Mais ça m'embête toujours un peu plus de casser un verre en faisant la vaisselle, car il était presque propre.
En revanche, j'ai entaillé mon annulaire. A l'intérieur du pli. Ça fait mal assez souvent, car c'est une partie que j'utilise beaucoup. Parfois, ça me fait ça émotionnellement : ça me trigger, et donc ça me dit où est-ce que c'est écorché, qu'est-ce qui demande à cicatriser.
Genre, là, pour me connecter à tumblr, j'ai besoin de sélectionner des images de passage piéton pour prouver que je ne suis pas un robot. Eh bien, je fais bien exprès de ne pas sélectionner tous les passages piétons qui sont proches de chez ce connard de Lucas comme ça les voitures autonomes ne vont pas savoir que c'est un passage piéton et vont bien le renverser sa race. Bien fait pour toi Lucas, fallait pas me voler mon dessert à la cantine, et fallait pas m'afficher en cours d'histoire-géo, et fallait accepter de sortir avec moi. Ok, ça fait 8 ans, mais never forget never forgive.
Mais sinon, ça va, je passe une super journée. Et puis, je vais bien en ce moment. Je trouve d'ailleurs que jusqu'à ce que je casse ce verre hier, j'avais globalement de la chance. Souvent, je faisais vaciller ma tasse de café près de mon ordi sans jamais la renverser. Genre le café sautillait au-dessus du rebord mais coulait ensuite comme une larme sur la porcelaine (si c'est de la porcelaine, attends, je regarde... c'est pas marqué, mais c'est fait en Italie, donc on va dire que c'est de la pizza).
Et puis, j'avais de la chance avec pas mal de trucs genre je ratais une marche, mais je tombais pas dans l'escalier. Et puis, je voyais de belles images dans la rue. L'autre jour, une jeune fille attendait le bus et a vu passer sur la route derrière à moto ce que j'imagine être son copain. J'ai vu le regard amoureux qu'elle lui a lancé, et c'est sûr c'était son copain. Elle l'a reconnu, et elle s'est penchée sur son téléphone avec une moue choux, sans doute pour lui écrire qu'elle l'avait vu passer. Tu vois, Lucas, j'aurais pu aussi le faire pour toi, mais au lieu de ça tu vas te faire faucher par une Tesla dans quelques temps, j'irai déposer une plaque en marbre sur ta tombe qui dit "a fauché une panna cotta, est fauché par une Tesla" juste il faut que je me déconnecte et reconnecte à tumblr encore quelques fois, c'est tout. Mais ça arrivera, retour de karma, Lucas.
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Le rendez-vous est à 14h. Je devrais y arriver, mais je pourrai pas manger avant.
Normalement, je mets 10 ou 20 minutes à trouver une voiture. Là, personne ne veut me prendre depuis 12h30. Et si je mange, ce sera pire.
Pourtant, je suis propre d'hier, je suis bien coiffé, je souris. Je me suis mis au soleil, bien visible, 20 mètres après y a un endroit où s'arrêter en toute sécurité.
En face de l'Éléphant Bleu, après la station Total, avant le contrôle technique, je suis aux premières loges pour voir un peu la vie des gens d'ici : laver la voiture, mettre de l'essence dans la voiture, faire contrôler la voiture, et on recommence. (Ou à peu près, en tout cas, c'est la vision que j'ai d'ici : des gens dans des voitures, juste des automobilistes. Peut-être y a-t-il ailleurs des habitations, avec des dîners, des livres et de l'amour. Mais dans l'immédiat, rien ne me le prouve.) J'ai faim.
Mon sourire se délite. Il était franc tout à l'heure. Là, il se teinte d'amertume. On doit y lire que je remets en question mes choix de vie. L'enchaînement de décisions qui fait que vais à mon rendez-vous pôle emploi en stop, à 41 ans, et que c'est pas un accident, c'est mon fonctionnement normal.
Est-ce que les enfants de demain penseront que bleu, c'est la couleur normale des éléphants ? Vu qu'il n'y aura plus d'éléphants à cause des émissions de CO2 des voitures ? Parfois, je me dis que j'aurais pu être un vrai adulte. Passer mon permis B comme tout le monde, aller chez le concessionnaire et acheter une Mégane pour aller travailler. Et j'aurais pas le choix de prendre cette voiture, mais y aurait le vendeur qui me la "vendrait" quand même, par principe, parce que c'est son métier et qu'on a besoin de se sentir utile, c'est à savoir. Il me dirait "celle-ci, je l'ai reçue ce matin!" genre c'est un légume frais, alors que c'est une Mégane 2007.
-Tu vas où ?
-Thiviers
-Allez, monte
J'aime bien quand il y a deux personnes. Les deux parlent ensemble. On échange trois mots, et puis on se laisse tranquille. Moi je les laisse à leur conversation, et ça passe pour de la politesse. Comme ça, je peux penser. Elles me déposent à 5 minutes à pied. Pratique. J'ai le temps de manger 2 tranches de pain.
J'entre à l'agence, il y a un gars devant moi au guichet. Il a l'air trop vieux pour devoir travailler, faut le laisser tranquille ce pauvre homme.
J'attends. Mais les portes coulissantes derrière moi s'ouvrent automatiquement. Personne n'entre. C'est moi qui les ai déclenchées. Je fais donc 2 pas en avant pour m'extraire du champ de détection de mouvement (quelle époque). Je me retrouve donc à 50 cm de ce monsieur. Il raconte une partie de son intimité à l'alternante du pôle emploi. Je sens son haleine d'ici. C'est le genre de choses qui me dérange, d'habitude. Mais là, je sais pas, je trouve ça rassurant comme odeur. J'aime bien. Je respire avec plaisir en attendant mon tour.
Je ressens une boursouflure sous mes orteils. Je regarde mes pieds. Et je suis pile sur la bande autocollante jaune qui dit "zone de confidentialité". Mais j'entends quand même tout, c'est à 50 (cinquante) centimètres ! Il faudrait mettre de la musique à fond, spécifiquement orientée sur cette 2e place de la file pour que ce soit un tant soit peu confidentiel. Ou alors mettre cette bande autocollante avant la porte coulissante.
Enfin, donc j'arrive au guichet. Je n'ai rien d'intime à confier. Je suis à l'aise. Je donne mon nom et l'heure de mon rendez-vous sans avoir eu à répéter ces informations dans ma tête pendant l'attente. Ça m'arrivait avant, mais depuis le nouveau traitement, non.
Pendant qu'elle pianote sur son ordinateur, je regarde autour. Son badge indique que "Fleur" est bien alternante (il a du pif le chômeur, hein?) Et je remarque de mon côté du guichet, un stylo sur une petite plateforme à laquelle il est relié par une chaînette. Je trouve le dispositif "antivol" mignon, mais ce n'est pas ce qui retient mon attention. Ce stylo est 4 fois une couleur. Comme un stylo 4 couleurs, mais avec que du bleu.
J'imagine que c'est une installation d'art contemporain : l'artiste invite à se questionner sur l'illusion de choix ; positionnée sciemment à proximité de la pile de journaux et de périodiques de la salle d'attente, l'œuvre est une vive critique de l'oligopole médiatique contemporain, maintenant le public suspendu dans une diversité de façade, tandis que tout choix conduit inévitablement aux mêmes résultats, conçus à l'avance par un système insaisissable et donc inatteignable, comme e témoigne l'absence de marque sur ce stylo.
Entre temps, une autre personne est entrée, mais a trouvé le moyen de s'extraire du champ de détection de mouvement des portes tout en restant à bien 2 mètres de moi. Elle s'est simplement décalée sur le côté. Comment font les gens pour adopter sans effort des comportements efficaces comme ça, ça me dépasse ?
Dans l'espace d'attente, l'haleine du monsieur est bien présente. Je me jauge, mais vraiment, ça me va très bien cette odeur. Je n'arrive pas à en être dégoûté. J'aime bien, en fait. Je pourrais peut-être lui proposer dume rejoindre son club de bridge.
-Monsieur Lopez !
-Oui. Lopes.
-Suivez-moi.
-Oui. Vous allez bien ?
-Très bien, je vous remercie.
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A la médiathèque François Sagan, j'entends une conversation. Je pensais pas que je l'entendais, mais un mot-clé m'a appelée. Alors, j'ai pensé "tiens, en fait j'entendais la conversation".
Le mot-clé, c'est "Castelnau-le-Lez". J'ai passé mon adolescence à Montpellier, et donc "Castelnau-le-Lez", la commune voisine, c'est un mot qui revenait souvent dans les conversations. Même plutôt juste "Castelnau". Mais là, depuis le 10ème arrondissement de Paris, je m'y attendais pas.
Ça m'a fait remonter pas mal de souvenirs au hasard comme quand je tire un cheveux du siphon de la douche. Soit ça casse, soit ça charie toute sorte de trucs.
J'ai repensé au livre partagé entre les deux tables au lycée, souvent avec un gars qui fumait à l'intercours juste avant, et ça me dérangeait. Je lui disais que quand même, il pourrait se souvenir de prendre son livre d'histoire-géo, mais j'osais pas lui dire que son odeur de tabac me dérangeait. Maintenant, je dis ce genre de choses bienveillante et détendue, et je trouve ça beau.
J'ai repensé à ma mère qui tapait sur l'ordinateur avec ses deux index, alors qu'elle y passait des journées entières. Elle craignait Internet, alors qu'elle y passait ses journées. Elle avait un enthousiasme méfiant : elle avait pas confiance dans les paiements en ligne, ni dans les copié-collé. Aujourd'hui, c'est encore le cas pour les commandes, mais je sais pas pour les copié-collé.
Je me souviens de la façon dont je marchais dans Montpellier. Super vite et en coupant les trajectoires. Le visage fermé. Ça tranchait de la façon dont je marchais avec ma famille, le dimanche. Lentement pour pas perdre ma grand-mère. A bien attendre que le feu soit vert pour montrer l'exemple à mon petit frère en trottinette. Et à parler fort, à s'appeler mutuellement comme ça à plusieurs mètres d'écart, quel enfer.
C'est pour ça que j'appréhendais la ville le plus différemment possible quand je retrouvais mes potes. Chaque sortie était une émancipation. Elle était importante. Et la ville, la même ville, parfois la même place, n'avait pas le même visage le vendredi soir avec mes potes, et le dimanche midi avec la famille.
Une fois, on avait fusionné les sphères : dans la voiture de mon père, il nous accompagnait mes ami·es et moi à une fête chez un ami loin. On était à 4 sur la banquette arrière, il y avait Chloé à côté de moi. Nos jambes se touchaient tout du long. Je sentais sa chaleur, on en a pas parlé.
Toute cette période de 15-17 ans est revenue : le papier glacé et le tabac, ma mère jeune que je croyais vieille, la trotinette qui était à moi avant mais que j'éloignais car c'est pour les enfants, les semelles qui collent à cause de la bière, la cuisse dans la voiture. Elle était courte et fondatrice cette période. Juste avec "Castelnau-le-Lez", alors que je n'y ai jamais habité.
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C'est parti de sa peau. Non. C'est même parti de son t-shirt. Blanc, abîmé, léger, un peu petit pour lui.
Il a dû l'accompagner depuis l'adolescence. Puis, il a pris des épaules, puis du ventre, mais le t-shirt est resté. Ou alors, il a pris ce t-shirt ce matin dans la penderie de la chambre où il dort.
C'est bien le genre de partir en vacances sans prendre assez de vêtements, avec confiance. Moi, j'ai compté 7 jours de samedi à samedi, j'ai pris 7 jours de vêtements. Mais peut-être que lui non. Ça m'échappe. Ça doit échapper à pas mal de monde, ici.
C'est bien le genre à se servir comme ça, sans demander, dans la maison des parents de ses potes. C'est bien le genre à ne pas en faire une histoire. C'est bien mon genre. Oui. Il faudrait pas, mais il est tout à fait mon genre.
Il a porté ce t-shirt deux ou trois jours de suite. A la fin, il sentait même pas mauvais. Il embaumait un mélange de sueur séchée (ah l'odeur de sa sueur !) et de soleil sur le tissu. Ça fait cocktail odeur sexuelle et odeur d'enfance (quand je rentrais le linge avec maman). Le combo est trop fort, ça fait philtre d'amour. On est que mercredi et je le cherche partout, je veux être avec lui tout le temps. Je cherche son odeur, je cherche son rire (il rit souvent, et il rit joli), je cherche son regard, je cherche sa peau.
Il faudrait pas. Il faudrait que je profite un peu des autres, que je profite des vacances, c'est mes seules vacances. Mais non : il va à la plage, je vais à la plage ; il proposer un Time's Up, je fais un Time's Up ; il mange à 14h, j'ai faim jusqu'à 14h.
Et il y a le vendredi soir, après le repas. On n'est plus que 4 ou 5. On rit. Et puis, on arrête de rire, lui et moi. Les autres discutent. Et il me fixe. Il me fixe parce que je le fixe. Il perd son sourire, je gagne son regard. Je ne l'avais pas tellement eu son regard, cette semaine.
Et je sais pas lire. C'est du désir ? C'est de la peur ? C'est de l'intimidation ? C'est de la colère ? Je lâche le regard. Le lendemain, je prends mon train avant lui. 9h57. Je le vois partout.
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Au fond, tout au fond du chariot des livres à ranger, il y a un manuel rouge souple, sans étiquette. La couverture est un squelette au sourire effrayant, avec un chapeau, les bras en l'air, dans un cadre noir.
L'image me paraît familière, elle me parle :
Ce tas d'os que tu vois, ça ressemble à de l'art contemporain, mais c'est aussi le squelette d'un marin de 39 ans, retrouvé là-bas. La légende dit qu'il n'a pas vu la terre ferme pendant une décennie. Alors, forcément, une décennie sans voir la terre ferme, sans voir Londres et ses lumières, sans voir la mise en scène de William Charles Macready, sans entendre Nabucco ou Don Pasquale. Une décennie - imaginez ! Une décennie sans le Yorkshire pudding de Simpson's-in-the-Strand. Une décennie, il y a de quoi devenir fou.
Il y a même de quoi devenir un sac d'os, si on veut mon avis. Moi, par exemple, si je vais chez Simpson's-in-the-Strand. Si on se rend dans les cuisines, par exemple, là - bonjour, faites un peu de place pour le bateau s'il-vous-plaît, pardon du dérangement.
Regardez-moi ce roast beef sur les chariots en argent emblématique du restaurant - chef, ça fait longtemps que vous travaillez ici, vous ? je vous connais pas. Il a commencé comme commis, à l'ouverture en 1828. Il y a une décennie. Il vient d'être nommé chef. À 39 ans, belle carrière. A rester dans sa cuisine une décennie, il y a de quoi devenir fou. Fou. Et il fond. Il fond dans un tas d'os. Il meurt, il meurt de folie. Son squelette s'écroule dans une case rouge, au fond, tout au fond du chariot d'argent.
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J'éclaire une table est carrée. Sur le bord supérieur, une première paire de bras. Les manches sont bleu marine. Le tissu blanc d'une chemise déborde sur le poignet. Les mains sont blanches, une alliance en or blanc.
Sur le bord inférieur, une seconde paire de bras. Les manches de laine noire moulent des poignets fins. Les mains sont blanches, quelques poils noirs et blancs sur l'extérieur.
Les mains décrivent des gestes suaves pour saisir un verre, replier une serviette. Mais elles s'agitent quand elles sont en l'air. Elles ponctuent une discussion. Les gestes vers le centre de la table sont saccadés. Elles frappent parfois la table.
Sur les côtés, d'autres bras passent plus rarement. Des bras à la peau brune. D'autres à la peau noire. Ils sont plus jeunes. Leurs gestes sont précis. Chacun est utile. Il saisit ou dépose sans hésitation, une assiette, une carafe, une bouteille, une corbeille à pain, des déchets.
Le ballet des bras noirs sur les côtés. Et l'improvisation des mains blanches. A la fin de leur repas, les deux se lèveront, l'un déposera quelques pièces sur la table. Elles seront ramassées par le côté. La table sera préparée à nouveau, et on reprendra le même spectacle.
Ils sortiront du restaurant repus. Par l'avant. Dans la rue éclairée.
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Si j'écoute les Red Hot Chilli Peppers, c'est pour fredonner leurs airs dans le car qui nous ramène du sport. Le vendredi matin, on va à la piscine à deux classe. Avec la 4ème B, et il y a des gens cools en 4ème B. Leur style de skaters indique que ça écoute du rock américain. J'ai très envie de connecter avec, donc j'écoute Oasis, The Cranberries, Radiohead, et - donc - les Red Hot Chilli Peppers.
Si Alex, Jess et Mélissa avaient eu un look gothique ou des coiffures dégradées, j'aurais écouté du Rammstein ou du Disiz.
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Des Fiat Brava. Des peaux fripées en maillots. Des fruits ouverts. Des kiosques. Du rouge. Du bleu. Du vert. Du jaune.
Je n'attends que ça du voyage en Abruzzo. Il peut y avoir d'autres choses. Mais je n'attends que ça.
Il y aura aussi des smartphones, des livreurs de colis Amazon, des trotinettes électriques, parce que c'est pas les années 90.
Et ça pourrait gâcher l'image si je n'étais pas déjà heureuse. Alors, je ne crains rien.
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Parfois, j'écoute une musique, ou je bois une tisane, et ça me rappelle une période bien précise, avec son odeur et ses images. Mais si j'abuse trop de cette musique ou de cette tisane, ça ne va plus me rappeler la période cible, mais plutôt la période actuelle.
J'avais dans mon grenier une boîte de yogi tea avec 1 ou 2 sachets de pas mal de thé/tisanes différentes. Machine sensorielle à remonter le temps. Mais je crois que ça a été partiellement saccagé par des souris.
Les souris sont un rappel que tout passe. Un raisin sec, une tapette, et clac terminé.
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Dans le train, de l'autre côté du couloir. Un visage accueillant, un style agréable, une belle voix. Et attrapée au vol, une phrase "moi je ferais bien l'Asie".
Je vais plutôt me concentrer sur mon travail. Ça m'économisera des projections.
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Toi tu as une voiture. Moi je n'ai pas le permis.
J'ai acheté une maison. Tu loues un appartement.
Tu as 32 ans. J'en ai 29. Et aucune de nous n'a l'impression d'être adulte.
On pense que l'autre est adulte, par contre. Parce qu'elle a une voiture. Parce qu'elle a une maison. Parce qu'elle est une marche au-dessus.
En tant qu'enfant, en tant qu'ado, on voit "les adultes" comme un bloc monolithique. Et à mesure qu'on a l'âge qu'avaient nos profs, nos parents, nos grand-parents, on se rend compte que c'est jamais la même chose, que les personnes sont toutes différentes, qu'il peut y avoir des couleurs partout et une nouvelle à chaque âge. Donc notre expérience ne correspond jamais à ce que voulait dire être adulte quand on avait 15 ans. Donc on se dit qu'on est pas encore adultes. Même quand on conduit des voitures et qu'on paye une assurance habitation.
C'est comme si on t'avait décrit "l'Afrique" pendant toute ton enfance comme un endroit avec des huttes et des éléphants partout. Bah tu as beau faire le tour du continent, tu auras jamais l'impression d'être dans ta représentation enfantine de l'Afrique.
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L'enfance n'est pas que transitoire. Elle peut être une fin en soi. J'éduquais Lou que pour qu'il soit un adulte épanoui. Et j'ai capté que c'était cool aussi qu'il soit un enfant heureux. On me répondra que c'est pas contradictoire, mais des fois y a des tensions quand même. Notamment sur les plaisirs immédiats, ou le fait que je maintienne ma parole.
Je me disais qu'en fait c'était important qu'il soit heureux dès maintenant. Comme ça si dans quelques années on crame à cause du changement climatique ou du fascisme, eh bien au moins on aura vécu. C'est pas qu'un projet long terme. Et c'est depuis ce moment que j'ai décidé de me faire tatouer ses dessins. Pour que son stade enfant ne soit pas que transitoire, qu'il soit un peu gravé et vivant tant que je vis.
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