le rêve comme une métaphore possible auprès de laquelle veille un récit impossible
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enceinte
je suis peut-être enceinte, comment est-ce possible
je demande à l'accueil de l'hôtel un test de grossesse (et je souris parce que j'ai pris l'accueil de l'hôtel pour un planning familial, et qu'il s'est déployé tel)
une femme me tend une petite boîte, je me rends dans ma chambre, une chambre un peu cachée dans le dédale de l'auberge avec sa petite salle de bain dans le noir, premier test de ma vie, après avoir expliqué tant de fois comment ça fonctionnait, j'ouvre le bidule, il en ressort du sable, plein de sable, je m'accroupis donc dans la baignoire pour faire pipi sur le sable, je ne suis pas sûre de respecter les dix secondes requises, je me relève : le test affiche enceinte, deux barres, puis la deuxième barre disparaît d'un coup, il est écrit en anglais qu'il faut faire un autre test
je trouve un deuxième test dans un tiroir, plus petit, il affiche deux barres bien nettes, merde, merde, merde, merde, merde, oh lala
je ne comprends pas, je me refais le film de ces derniers mois et je ne vois pas quand, avec qui ?
je dois être à un stade bien avancé, sera-t-il toujours temps d'avorter en Espagne, aux Etats-Unis
faire un troisième test peut-être pour être sûre
oh non, je ne veux pas, non, qu'est-ce qu'il m'a pris
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Poucinella
on joue dans une piscine, ça fait des splatchs, on rigole beaucoup, j'entends alors une petite voix aiguë et lointaine qui demande à l'aide, c'est Poucinella, une petite peluche vivante dans sa boîte qui flotte au-dessus de l'eau et se laisse embarquer par l'onde de nos agitations, je la prends, je la dépose délicatement au bord, j'ai si peur de la casser, c'est un bébé, un bébé humain de la taille d'une main qui parle, qui discute, qui sait des choses, je suis troublée comme l'eau
un train à vapeur passe dans la ville sur les rues piétonnes à pavés, on cesse toutes nos activités un instant pour le regarder
je comprends que Poucinella n'est qu'une petite peluche, et en réalité, ce qui parlait, c'était la game boy advance placée là dans la poche arrière du sac oublié par une camarade après une réunion
la camarade revient chercher son sac
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s'arrêter
plein de petits groupes de travail se constituent en mode éduc pop pour analyser différents extraits d'une pièce de théâtre, je me greffe au groupe de meufs studieuses, calmes et méthodologiques, autour d'un monologue du quatrième acte, monologue de dénouement où il est question d'aveux, moment crucial, point d'orgue, il faut y aller par étapes, je me note sur un minuscule bout de papier arraché comment je vois les choses : il faut absolument contextualiser d'abord la pièce, lire peut-être Samuel Guérin, et puis aussi une introduction à l'histoire du théâtre, et ensuite seulement on pourra se pencher sur le texte avec sincérité, je retrouve mon groupe avec cette proposition, cela ne leur plait pas, mais alors pas du tout, elles me disent non, elles me disent : tu es trop impressionnante, arrête
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une boîte à livres dans la rue déborde de jeux improbables et rares, des jeux de cartes un peu mystiques, j'attrape une boîte couleur nuit sur fond de lune, on oscille entre l'oracle et le petit jeu d'ambiance, en somme ce sont autant de petites cartes dressées entre nos solitudes respectives, des passerelles, ô monde moderne
je veux tout récupérer, me relier, j'en ai plein les bras
c'est la fin du voyage, je reviendrai bientôt,
au loin,
depuis la gare routière,
dans l'aube,
j'aperçois le Canigou,
je fonds en larmes,
je ne m'arrête plus de pleurer,
j'irai, oui, au Canigou la prochaine fois, tellement,
oui
et je ne sais pas pourquoi cette pensée me bouleverse tant
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les ambitions
j'arrive au Québec dans la nuit d'un petit appartement, il y a Willia, Agathe, un petit hibou sur le canapé comme une peluche étendu qui ne bouge pas
le petit hibou disparaît
tout le monde fait la liste des grandes ambitions touristiques pour le séjour qui passera si vite, fatalement
et moi, je ne pense qu'à aller manger une poutine à côte-vertu comme dans mon enfance
je ne pense qu'à retourner dans mon enfance
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l'aile de plomb
maintenant que mon piercing a bien cicatrisé, toutes les folies sont permises
j'enlève une petite boule noire et je la remplace par une aile qui pend
mais pas une aile de plume, non
une aile de plomb, lourde
ça tire sur ma joue, me gêne trop
le piercing tombe de jour en jour, la tige sort et s'allonge
j'enlève la plume, je finis par retrouver la petite boule noire
et tout rentre dans l'ordre
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la mort qui vient
je vais mourir
on vient de me diagnostiquer un cancer
je ne ressens rien pour le moment, mais bientôt ma demeure sera l'hôpital, au rythme de la chimio que l'on dit de confort
la fatigue, la douleur qui m'attend, pour être morte au bout du bout
j'appuierai sur le bouton et ils n'auront plus assez de morphine
les cheveux tomberont, peut-être serai-je enterrée butch, souris-je
il fallait au moins ça pour oser couper
je deviens le centre de l'attention, c'est mon moment, c'est ça le privilège de mourir jeune, les gens ralentissent le cours de leurs vies pour me border, me dire des mots doux
je les remercie, si fort, pour tout
je n'aurais jamais pensé mourir jeune, je croyais qu'il me restait encore tant de jours, et de nuits, et de larmes, et de beautés, et d'amour, peut-être
la médecin m'attend sur mon lit d'hôpital pour m'expliquer ce qu'il adviendra de mon corps vivant, peu à peu
c'est ma dernière soirée dans la vie, je vais boire des petits coups au milieu de la foule qui ignore la mort, une soirée presque banale
moi je suis presque morte (où commence la mort)
je vais passer
j'ai peur
je me tiens prête
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déposséder
je me téléporte dans la grande maison d'Hodeng-Hodenger dont je possède la clé sans être propriétaire, j'inviterai les ami-es tantôt, j'ai tellement hâte
il fait encore nuit, ça me rassure et me rend forte d'avoir accès à tant d'immensité de pièces, de couloirs, de secrets
mais la propriétaire est arrivée avec sa famille, je dois lui rendre les clés, je ne pourrai plus revenir, c'est fini
elle veut acheter un terrain alentours pour agrandir son domaine, en riant
la légèreté avec laquelle elle expose son privilège de classe me dégoûte
j'aimais bien posséder la clé de ce qui ne m'appartient pas
je suis assise sur le toit de la maison : c'est le sommet d'un iceberg au milieu de l'océan, la banquise dessine un ovale de bancs en glace bordés de cadres baroques dorés, le soleil se couche partout autour de moi, rouge orangé, je pleure, je suis bouleversée de beauté
est-ce cela ma maison, cette beauté spectaculaire qui sauve pour toujours
non, j'ai rendu la clé, ce n'est pas ma maison
j'ai tant de mélancolie
il reste la beauté de l'horizon qui n'est à personne
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montgolfière
avant de se lancer, je suis affalée contre un mur au soleil avec une personne inconnue, iel verse de l'huile sur mes jambes poilues, le gras collant sur mes poils me fait rire d'un rire léger et joyeux, j'ai l'impression d'être un petit animal, mais on m'attend pour aller conduire la montgolfière, j'ai appris en théorie, jamais pratiqué, je monte dans la chambre et j'installe mon ordinateur, le chef ne veut pas que je conduise seule, il me faut être soutenue pour une première, alors trois personnes arrivent, il y a tant de jour, ça va être bien, on s'envole, je n'aperçois pas le paysage depuis cette chambre, l'écran de mon ordinateur se casse en deux, je tâche de recoller, on sent une grosse secousse, vite, je dois rouvrir le logiciel pour guider la montgolfière, mais je ne connais pas ce logiciel, je devine que je dois cliquer sur la stabilisation, vite, où est la personne censée me seconder, je suis seule, nos vies entre mes mains, je tremble comme une feuille, ça le fait, ça le fait, l'immobilité revenue, tout le monde a eu si peur, même les chats se sont cachés, j'espère qu'elles ne sont pas tombées dans le vide
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survivre au fascisme
c'était le fascisme partout jusque dans les rues, la nuit, nous allions de planque en planque, nos existences ne pouvaient être que souterraines, discrètes, le seul sens de la vie qu'il nous restait était de tenir, l'angoisse nous habitait constamment, la vie pouvait s'arrêter à chaque instant, un coup de feu au bout d'une rue, les copines s'étaient lancées dans une manif nocturne, mais à une petite dizaine, c'était du suicide, un suicide fier et ténébreux, non, je préférais retourner me cacher là, sous un banc, allongée pour la nuit, tétanisée
je préparais à manger pour la communauté, je remuais les pâtes et le poulet bien gras à la main dans un grand coffre
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rechute
j'avais une enfant depuis un an, j'avais complètement, mais alors complètement oublié, c'est l'autre parent qui s'en occupait, je faisais le point intérieurement sur ce que j'avais pu faire pour cette enfant, changer une couche, non, je ne sais même pas comment faire, vraiment rien, aucun geste, avais-je seulement accouché, je me revoyais dans la salle d'accouchement un instant, le petit pan de mur jaune, c'est tout, et les premiers pas si mémorables, non, maintenant que je me souvenais, j'étais condamnée pendant des années à l'amener à l'école le matin et venir la chercher le soir, une immense tristesse m'accablait, ma mère disait se souvenir de mon accouchement, elle avait tapé l'incruste, elle se souvenait de mon test positif aussi, j'étais dépossédée de moi
dans un bus à ciel ouvert, Mimosa lit devant un public queer ses derniers textes, je reconnais Alex devant, plus loin, ses cheveux en bataille ordonnés, Mimosa prend la parole pour dire les textes qu'elle aime, elle dit qu'elle aime les textes d'Alex, et les miens aussi, alors je suis touchée et blessée qu'on nous relie dans un nouvel endroit du monde, j'irai voir Mimosa plus tard pour lui dire alors, tu as lu mes textes, je ne savais pas, ils sont tristes n'est-ce pas, elle répond oui, ils sont tristes, elle avait senti un mieux dernièrement, puis une rechute
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ce qui valait le déplacement
à Mende, dans la nuit, mais comme si Mende était un pays de nuit, un pays sans jour dans l'ombre des montagnes blanches, comme si la nuit aussi tout entière était un pays, un endroit du monde très précis où se rendre (se rendre), je suis couchée nue dans un lit qui m'héberge et je discute avec M. du travail, longuement, elle est rude, elle me toise, elle a confiance en elle d'une confiance écrasante qui me fait douter de tout, trembler, soudain elle soulève ma couverture et je la retiens in extremis, j'ai à peine le temps d'enfiler un boxer, je me lève, je finis la conversation debout dans mon boxer pour cacher ma nudité, ma nullité
j'assiste à une pièce de théâtre, les projecteurs allumés sur les spectateurs, la pièce un peu partout dispersée, pas vraiment de quatrième mur, c'est l'heure de l'entracte, je retrouve A. qui jouait avec sa troupe, nous partons visiter Courbevoie et remonter le temps pour moi, je reconnais tant de lieux, ça me fait comme une boule à la gorge d'être sur les traces du passé, avec la nouveauté de sa présence, je suis assise, elle est debout derrière moi, elle se penche, je renverse la tête en arrière, et elle m'embrasse doucement d'un baiser à l'envers, ça semble si réel, mais nous allons être en retard, la pièce va reprendre, vite, se dépêcher, je vois bien qu'on a déjà cinq minutes de retard, puis dix, la troupe nous attend de pieds fermes alignée dans l'entrée du théâtre, ils explosent de soulagement, et la pièce peut continuer, n'est-ce pas ce vers quoi tend toute représentation : nous déplacer
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les vannes laissées ouvertes
je vis dans cette maison de campagne en Normandie depuis toujours avec ma mère, mon père, ma soeur, et Azilis aussi, et peu à peu, chacune est partie, ma mère, Azilis, et je me suis retrouvée seule dans toute cette beauté, j'ai l'impression d'avoir un peu renvoyé tout le monde, et maintenant que construire, je drague une meuf qui dompte un cheval, je regarde mon ticket de train, et les fleurs magnifiques dans le jardin qui se noient, j'ai laissé si longtemps les vannes ouvertes, le propriétaire se fâche
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deux semaines d'occupation
nous vivons sous l'occupation indéfiniment dans un climat de peur, plusieurs de nous sont appelés à mourir bientôt, dans deux semaines, celui qui semble être mon grand frère grave son testament crypté sur de la pierre blanche en signes comme hiéroglyphiques, je voudrais qu'il cesse, comme si cesser d'écrire pouvait le maintenir en vie au-delà du terme, sa résilience m'effraie, je refuse d'en être, et chaque nuit je sors goûter à un semblant de liberté pendant que l'occupant dort, nous visitons un musée avec mon petit frère, et bientôt s'y tient une réunion des occupants, nous nous éloignons sur la pointe des pieds, une porte, puis le portail est fermé au jardin, ils ont tout verrouillé, tant pis, nous escaladons en riant presque, nous revenons à la maison et rapportons à celle qui semble notre grand-mère deux pommes, deux pommes à partager aujourd'hui pour toute la famille
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le dinosaure de l'enfance et les tentatives d'oublis
je rejoins Alex chez ses ami-es, la petite bande adorable m'accueille joyeusement en ce début d'après-midi, nous allons nous rendre ensemble aux caves de bécon rendre visite à mamie, je leur demande un instant, je vais faire pipi et je vous rejoins, je me retrouve dans les toilettes d'un des colocs, il vit dans une chambre bleue solitaire, il y a une porte vitrée, quand je m'assois on ne peut plus me voir, je n'arrive pas à faire pipi, je n'arrive pas à me détendre, je ne les entends plus, illes sont parti-es sans moi, bon, ça me fend un peu le coeur, il reste peut-être Iris, Alex m'a oubliée, je les retrouve à la cave, il y a mamie, et Papy qui est vivant, qui est si grand, je ne l'avais jamais vu aussi grand, il tient debout, comment les morts tiennent-ils debout, Alex et ses ami-es attendent dans une petite pièce au fond
dans la résidence de mon enfance, sous le préau qui conduit à l'appartement de l'escalier H vit un grand dinosaure rouge, et régulièrement, il se met à courir jusqu'au préau suivant à travers la cours, il ne faut pas le craindre car il ne s'attaque à personne, mais c'est tout de même terrifiant ce dinosaure qui se balade si vite, il me frôle, sa peau est dure, personne ne le connaît
je marche dans la rue en repensant au dinosaure, j'ai tant de fois rêvé de lui, ça me semble évident, et à la fois je ne me souvenais pas jusqu'ici de cette récurrence, c'est un sentiment de familiarité si fort qui m'habite comme j'habitais autrefois la ville et le ciel gris
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le nuage noir
je marche dans la ville parmi les hauts buildings aux fenêtres bleu ciel quand j'aperçois au loin un grand feu et une vague de fumée noire qui s'apprête à déferler, je cours le plus vite que je peux, des humains affolés courent partout autour, nous n'arriverons pas à esquiver la fumée, il faut trouver un abri, je descends les marches d'une esplanade qui conduisent en cercle vers plusieurs portes, je rentre dans une petite pièce avec une femme que je connais à peine, on a à peine le temps de refermer la porte qu'il fait comme nuit, le nuage noir est là partout, habite le ciel, on aperçoit une aération sur la porte alors elle la bouche pendant que je retiens la porte de s'ouvrir de tout mon corps, et bientôt la lumière, le nuage a passé
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la douceur du voyage
Loullig s'est blottie contre mes jambes au moment où je rentrais dans la voiture pour partir travailler, alors je l'ai laissée là, et je l'ai oubliée un peu, j'ai conduit longtemps avec son petit corps en boule au niveau des pédales, si tendre et délicate, petite boule qui ne prend pas de place, parfois sa douceur me faisait monter les larmes, elle se faisait oublier pour ne pas me déranger, l'adorable, et à un moment je ne la voyais plus et soudain retrouvais sa petite tête posée contre mon coude entre mon siège et la portière, elle qui a si peur de la voiture habituellement, mon petit chat d'amour contre moi
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