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#BKO Quintet  “Mali Foli Coura”
rollingstonemag · 6 years
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La scène rock du Mali, du Niger et de l'Algérie est plus vivante que jamais
Sidi Touré, BKO, Tal National et Imarhan sont les fers de lance d’une évolution survitaminée des rythmes et des sons ethniques
Alors que des groupes de rock américains se tournent vers l’EDM avant-gardiste pour rajeunir le genre, les guitares électriques africaines et les instruments traditionnels grincent avec une intensité toute nouvelle après des années trop silencieuses. Là-bas, le scénario romantique du carrefour à la croisée des chemins a été remplacé par un vigoureux commerce culturel international et interethnique au Mali, au Niger et en Algérie. Au milieu de la myriade de variations de la musique africaine, le rock est de nouveau à la hausse.
L’auteur-compositeur et guitariste Sidi Touré vit à Bamako, la capitale du Mali, mais il a grandi à Gao, situé entre le fleuve Niger et le désert du Sahara, à quelques centaines de kilomètres à l’est de Tombouctou. Né d’une noble lignée Songhaï, Touré a vécu parmi les Bozos, les Bambaras, les Fulanis et les membres des Touaregs dans le « désert du blues« . Ce dernier a peut-être inspiré son nouveau Toubalbero, flashy et urgent, un électrochoc avec les sons folkloriques acoustiques qui dominent ses quatre précédents albums. Djadjé Traoré a ajouté une guitare électrique saturée aux côtés du ngoni amplifié d’Ourmane « Papou » Dagnon (un luth recouvert de peau de chèvre) ) et du batteur Mamadou « Mandou » Kone. Sidi Touré avait défié sa famille pour devenir une sorte de griot sans véritable bonne foi. Maintenant, il est encore pire: un griot rocker. Et la distorsion fait office d’une authenticité nouvelle.
Le groupe Tal National se déclare lui-même « Rock and roll puissant d’Afrique de l’Ouest »
Toubalbero est un terme de Goa pour définir un grand tambour traditionnel qui rassemble une communauté. Touré étend ce sentiment d’enchantement communautaire surdimensionné dans des chansons comme Heyyeya, qui reflète un jour de mariage – « rien que le bonheur, rien que la joie » – dans un micmac polyrythmique de plus en plus frénétique. Guitares et ngonis dévoilent des solos et des cris de Touré extasiés pendant Tchirey, une explosion d’urgence de sept minutes au tempérament de tonnerre. Le vaudou fait partie de la tradition spirituelle Songhaï et le groupe de Touré résonne quelque part à la périphérie de l’envoutement.
BKO, d’un autre côté, nécessite une oreille attentive. Le quintet innovant et bruyant sonne comme un Congotronics assourdissant avec des ngonis amplifiés. On trouve aussi des jeli ngonis ou des plus gros donso ngonis (aussi appelés « harpe de chasseur ») aux côtés des percussionnistes sur djembe et tambours dum-dum, ainsi qu’un tube en métal dentelés appelé karagnan. BKO (du nom du code de l’aéroport de Bamako) a donné suite à leur premier album Bamako Today sorti en 2014 avec Mali Foli Coura, traduit par « le nouveau son du Mali« .
Mali Foli Coura est effectivement très innovant, synthétisant des éléments griots et donso dans des morceaux comme le très afrobeat Mali Liberela, un avertissement à la population de ne pas devenir complaisante maintenant que les djihadistes ne terrorisent plus le nord du Mali de façon régulière. Des rythmes simples de danse polyrythmiques accompagnent les paroles chargées spirituellement de Dirty Donso sur le masque komo, tandis qu’un ngoni noyé dans la pédale wha-wha conduit Strange Koreduga, une danse traditionnelle interprétée par des bouffons et des clowns. Pourquoi Mali Foli Coura se conclut avec la très fleur bleue Mon Amour est un mystère. Chaque bataille mérite une ballade, bien sûr, et BKO gagne la sienne en transcendant l’afro par l’afro-punk.
Le groupe Tal National originaire du Niger ne cache pas ses allégeances, se déclarant lui-même « Rock and roll puissant d’Afrique de l’Ouest » sur sa page web. Formé en 2000 par le guitariste et (au moins à temps partiel) le juge municipal Hamadal « Almeida » Moumine, le groupe le plus populaire du pays concocte un tourbillon sonore de divers ingrédients culturels. À 380 km à l’est de Gao, la capitale du Niger est également polyglotte, et ses communautés Fulani, Hausa, Songhaï et Touareg se reflètent dans les 13 membres du Tal National. (L’approche collective est particulièrement utile lorsque le groupe de six membres doit jouer deux concerts en même temps.)
Les membres du groupe touareg Imarhan ressemblent à des rockeurs
Tal National sont les stars du math-rock de l’Afrique de l’Ouest. Le rappeur-chanteur nigérian Zara Moussa donne le premier couplet sur le titre d’ouverture de Tantabara, leur quatrième album depuis 2009, avant que tout le groupe ne saute dans la jubilation et décolle au galop sans relâche à travers un groove 12/8 complexe en langue hausa. Enregistré dans un studio improvisé de Niamey par Jamie Carter, un producteur de Chicago plus connu pour avoir travaillé avec Joan of Arc et Chance the Rapper, Tantabara a une ambiance minimaliste et indie-rock qui rappelle le punk afrojazz de Brooklyn Sunwatchers ou Yonatan Gat, guitariste de Tel Aviv.
« Nous sommes un peuple qui vit dans les montagnes sans eau« , entonne l’un des sept chanteurs présents sur les huit morceaux de Tantabara, cette fois dans la langue Tamashek du peuple Touareg. « Nous sommes un peuple qui vit dans ces lieux non pas parce qu’il y a de l’or ou des dollars. » Probablement le titre le plus rapide et le plus grondant enregistré à ce jour, Akokas offre tout sauf une pause. Dans leurs vestes de cuir noir et leurs Levis déchirés, les membres du groupe touareg Imarhan ressemblent à des rockeurs. Imarhan (qui signifie « ceux qui se soucient de moi« ) sont la deuxième génération de guitaristes « assouf« , comme on nomme le style profondément groovie des soi-disant « enfants de Tinariwen« . La connexion est forte. Le chanteur et guitariste d’Imarhan, Iyad Moussa Ben Abderahmane, a suppléé Ibrahim Ag Alhabib pendant quelques années alors que le fondateur de Tinariwen avait besoin de temps en famille. Le bassiste de Tinariwen, Eyadou Ag Leche, a aussi produit son deuxième album, Temet.
Robuste mais chaud, Temet contient des claquements de main, des répondeurs vocaux féminins, et les percussions granuleuses tindé symboles de la musique touareg, mais avec des guitares entremêlées et sans exclamations hurlantes. « Tout le plaisir se termine dans la mort, vous devez le savoir« , Ibrahim chante avec vivacité dans Tamudre (« vivant« ), un rock-noir qui se prépare à un sombre solo façon Keith Richards avant de disparaître avec quelques secondes de larsens. Basés à Tamarasset, en Algérie, Imarhan sont des citadins qui pimentent incessamment les grooves d’assouf avec du disco, du funk et du reggae selon les besoins. « Vous devez fonctionner dans le monde d’aujourd’hui et utiliser Internet et tout le reste« , a déclaré Ibrahim à Andy Morgan du Guardian, « mais vous ne devez pas lâcher les bases de votre ashak [langue Tamasheq pour dire la dignité et l’hospitalité] – C’est essentiel.  » Ils sont plus proche de John Lee Hooker que d’Hendrix, mais vous pouvez les sentir élever leur inspiration toujours plus haut, dans l’obscurité, à la lisière de la ville, dans le désert, n’importe où.
Écrit par Richard Gehr, traduit par Baptiste Manzinali
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