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Tribune de référence
« Pour une Parentalité Féministe » - Le Monde - 27 mai 2018 
Puisque M. Macron se félicite d’écouter la voix des “mamans”, parlons de celles que nous préférons appeler - dans un langage adulte - les mères, et de la maternité comme expérience face à laquelle toutes les femmes sont sommées de se positionner. Il y a, quand les femmes approchent de la trentaine, cette question posée sans détours dans les cercles familial ou professionnel : « Alors les enfants, c’est pour quand ? » Tout le long de la grossesse, ce regard porté sur ce qu’elles mangent, boivent, font ou ne font pas « pour le bébé ». Cette incroyable solitude du congé maternité, quand l’autre parent travaille et que le nouveau-né ne laisse aucun répit, ni pour se doucher, ni pour déjeuner. Ces collègues qui s’étonnent de les voir demander une promotion alors qu’elles rentrent de congé maternité. A l’inverse, il a ces femmes qui doivent régulièrement se justifier de ne pas avoir eu d’enfant. Depuis l’inscription dans la loi du droit à la contraception et à l’IVG, on pourrait croire que les femmes en France choisissent librement d’être mère ou non, au moment qui leur convient. À ces avancées législatives fondamentales, il manque la mise en œuvre des changements nécessaires pour obtenir l’égalité des sexes : nous vivons dans un monde où la parentalité est toujours considérée comme une histoire de (bonnes) femmes. Et où, en miroir, on ne pourrait atteindre l’essence de la “féminité” (sans qu’on sache exactement ce à quoi ce terme renvoie…) qu’à condition d’avoir mis des enfants au monde. La maternité est pourtant une expérience plurielle que chaque femme devrait pouvoir investir de pratiques et d’affects différents. Elle ne doit pas être un frein à notre émancipation, a fortiori pour celles d’entre nous qui, en plus du sexisme, vivent des injustices liées à d'autres expériences : femmes des classes populaires, racisées, migrantes, à l'orientation sexuelle autre qu'hétéro, et/ou dont les corps et le psychisme n'entrent dans les canons socialement admis. Dès lors, les grossesses ne doivent plus priver les femmes enceintes et les parturientes de leur pouvoir d’agir et de décider quant à leur intégrité physique. Elles doivent pouvoir accoucher dans le respect. Il ne faut plus que, faute d’un congé obligatoire et suffisamment long pour permettre une implication réelle du deuxième parent, les femmes hypothèquent leur santé mentale et physique en accomplissant, seules ou presque, le travail qui consiste à prendre soin d’un petit humain. Avec la directive actuellement en discussion sur l’équilibre vie professionnelle - vie privée des parents et des aidants proches, concédons que l’Union Européenne fait preuve d’un certain progressisme sur le congé parental. Mais ce texte est pour le moment insuffisant. Quant à la position de blocage adoptée par le gouvernement français sur ce point, elle est tout bonnement incompréhensible. Les femmes n’ont pas à être seules après la naissance, en proie au doute et à la culpabilité, intériorisés malgré elles tant on leur laisse croire que le bien-être physique et émotionnel des jeunes enfants – et particulièrement des bébés – dépend tout entier des mères et d’elles seulement. Nous ne voulons plus de cette fausse évidence selon laquelle, la présence des mères (mais seulement une à la fois !) serait naturellement plus nécessaire que celle des pères. D’autant que les études le prouvent : cette prise en charge essentiellement monoparentale du nourrisson fait le lit d’inégalités de genre dans la sphère domestique. Pour quelles raisons logiques, celles qui peuvent porter 9 mois leur enfant devraient-elles prendre en charge matériellement, émotionnellement et mentalement une vie de famille qui dure des années ? Pourquoi devraient-elles assumer le rôle de “manageuses du foyer” ? Les femmes n’ont pas à accomplir la majorité de ces tâches qui les épuisent comme elles ont épuisé leur mère et leurs grands-mères. Ce travail gratuit, peu valorisé car considéré comme « naturel », détermine leur parcours professionnel, et par conséquent, conditionne leur nécessaire autonomie financière. Lorsqu’il est rémunéré, il est encore réalisé par des femmes, sous-payées, peu reconnues, en horaires décalés. Au mépris de leur vie personnelle. Les injonctions qui pèsent sur la maternité sont tellement contradictoires, que toutes les mères finissent par se sentir mauvaises : elles ne font jamais comme il faut, jamais suffisamment ou toujours trop. Elles demandent de l’aide ? C’est un signe qu’elles sont faibles. Elles n’en demandent pas ? C’est qu’elles ne mesurent pas l’ampleur de leur responsabilité. Elles décident se consacrer fortement à leurs enfants ? Quelle marque suprême d’aliénation. Elles réclament du temps pour elles ? Quelle monstrueuse manifestation d’égoïsme. Mauvaises mères, elles sont aussi mauvaises travailleuses : tantôt on leur conteste, au motif de leurs occupations familiales, l’accès aux activités pour lesquelles elles ont les compétences ; tantôt on les suspecte, parce qu’elles ont décidé d’investir fortement la sphère professionnelle, d’être des femmes dénaturées. La vie des femmes ne doit pas être entravée par une parentalité qui ne pèse que sur elles. Les changements à initier sont politiques et sociaux. Il est temps d’ouvrir un large débat pour repenser et refonder les conditions sociales de la maternité. Les mères sont des sujets politiques comme les autres : nous prenons la parole, il est temps de nous entendre.
Cette tribune est le fruit d’un travail collectif. Elle a été proposée par le PAF, qui a ensuite donné naissance à deux collectifs, dont le nôtre : Parents Et Féministes Elle a été publiée sur le site du Monde le dimanche 27 mai 2018.
  Liste des signataires, telle qu’elle a été diffusée sur Le Monde le dimanche 27 mai 2018 :
1.     Camille Andres, journaliste indépendante (femmesleaders.ch)
2.     Hélène Assekour, journaliste
3.     Léa Bages, journaliste
4.     Lauren Bastide, journaliste
5.     Alix Bayle, journaliste, réalisatrice
6.     Corine Berté, orthophoniste
7.     Mathilde Bertrand, enseignante-chercheuse
8.     Hélène Bidard, adjointe à la Maire de Paris
9.     Charlotte Bienaimé, documentariste
10.  Sophie Binet, pilote du collectif confédéral femmes-mixité de la CGT
11.  Chantal Birman, sage-femme
12.  Mathilde Bouychou, psychologue clinicienne-psychothérapeute, référente Île-de-France de l'association Maman Blues
13.  Marie-Georges Buffet, députée PCF
14.  Béatrice Cascales, co-auteure de L’Accouchement est politique
15.  Mathilde Castelli, coordinatrice linguistique
16.  Marie Cervetti, mère, grand-mère, présidente du FIT
17.  Laurence De Cock, historienne
18.  Laurence Cohen, sénatrice PCF
19.  Collectif Maternités
20.  Collectif Maternités féministes
21.  Cécile Croquin, secrétaire et trésorière de l’association Maman Blues
22.  Mélanie Déchalotte, journaliste et documentariste, auteure du Livre noir de la gynécologie
23.  Christine Delphy, sociologue
24.  Iris Deroeux, journaliste
25.  Judicaëlle Dietrich, géographe
26.  Valérie Dokhan, médecin
27.  Emma, auteure de blog et dessinatrice féministe
28.  Camille Emmanuelle, auteure et journaliste
29.  Annie Ernaux, écrivaine
30.  Alexia Eychenne, journaliste
31.  Nina Faure, réalisatrice
32.  Amandine Fouillard, co-animatrice du livret égalité femme-homme de France Insoumise, responsable des Féministes Insoumis.es
33.  Claire Fretel, metteure en scène, cofondatrice de la compagnie Les filles de Simone
34.  Alexandra Garcia-Vilà, réalisatrice
35.  Françoise Gaspard, sociologue
36.  Sidonie Gaucher, journaliste
37.  Tiphaine Gentilleau, comédienne, cofondatrice de la compagnie Les filles de Simone
38.  Oriane Graciano, orthophoniste, membre du bureau de Pour une M.E.U.F.
39.  Alice Guastalla, sage-femme au CALM
40.  Deborah Guy, doctorante en sociologie
41.  Bérénice Hamidi-Kim, maîtresse de conférences en études théâtrales
42.  Amandine Hancewicz, chargée de mission lutte contre les discriminations
43.  Estelle Havard, cadre territoriale
44.   Julie Hebting, coordinatrice de projet, co-fondatrice de Maydée
45.  Sophie Heitz, responsable de projets
46.  Clémence Helfter, coordinatrice de la campagne #VieDeMère de l’Ugict-CGT
47.  Coline Herbomel-Ringa, architecte D.E., membre de la commission politique du CALM
48.  Emmanuelle Josse, free lance en édition et communication
49.  Béatrice Kammerer, journaliste, fondatrice Les Vendredis Intellos
50.  Yvonne Knibiehler, historienne des mères et de la maternité
51.  Catherine Laforest, médecin généraliste
52.  Rose-Marie Lagrave, sociologue, directrice d’études à l’EHESS
53.  Marie-Hélène Lahaye, juriste, auteure du blog Marie accouche là
54.  Mathilde Larrère, historienne
55.  Rozenn Le Saint, journaliste
56.  Les Livres de Mumu
57.  Carole Mettavant, kinésithérapeute sexologue
58.  Danielle Michel-Chich, journaliste, auteure
59.  Pascale Molinier, psychologue sociale
60.  Emilie Moreau, psychologue - sexologue
61.  Mouvement Pour le Planning Familial, Paris
62.  Laëtitia Négrié, co-auteure de L'Accouchement est politique
63.  Marianne Niosi, journaliste, animatrice au MFPF
64.  Chloé Olivères, comédienne, cofondatrice de la compagnie Les filles de Simone
65.  Mathilde Panot, députée France Insoumise
66.  Blandine Pélissier, comédienne, traductrice
67.  Michelle Perrot, historienne, professeure émérite de l’Université Paris Diderot
68.  Claire Piot, féministe
69.  Elsa Pottier Casado, co-auteure du blog Maternités féministes, animatrice au Planning familial 92, membre du CALM
70.  Geneviève Pruvost, sociologue
71.  Sandra Regol, porte-parole EELV
72.  Bérénice Renard, juriste, membre du collectif Maternités
73.  Valérie Rey-Robert, auteure du blog Crêpe Georgette
74.  Annie Richard, universitaire, présidente de Femmes Monde
75.  Virginie Ringa, chercheure en santé publique, Inserm
76.  Alice Rocq-Havard, sage femmes sexologue, présidente de l’ANSFO
77.  Axelle Romby, médecin sexologue
78.  Patrizia Romito, psychosociologue
79.  Anne-Françoise Sachet, sage-femme
80.  Moïra Sauvage, journaliste et auteure
81.  Geneviève Sellier, historienne du cinéma
82.  Rosanna Sestito, sage-femme
83.  Charlotte Soulary, responsable de la commission féminisme d'EELV
84.  Gwenola Sueur, formatrice
85.  Sylvie Tissot, sociologue
86.  Sezin Topçu, sociologue des techniques, Cnrs-Ehess
87.  Marie Toussaint, déléguée à l’Europe et à la jeunesse au bureau exécutif d’EELV
88.  Laura Vallet, bibliothécaire, co-auteure du blog Maternités féministes
89.  Caroline Viau, cadre territoriale, syndicaliste
90.  Anne-Sophie Vozari, doctorante en sociologie
91.  Bozena Wojciechowski, adjointe au maire d’Ivry-sur-Seine
92.  Anne-Sophie Zambeaux, responsable de communication
93.  Juliette Zuber, assistante de service social
Liste des nouve·aux·lles signataires :
1.     Nadia Leïla Aïssaoui, sociologue et militante féministe
2.     Maud Alpi, réalisatrice
3.     Uzan Avi
4.     Marie-Anne Bachelerie, chargée des relations avec le public dans une scène nationale
5.     Ellie Baz
6.     Evelyne Berchtold
7.     Anne Bory, sociologue
8.     Baptiste Boulba-Ghigna, enseignant de philo, scénariste, en disponibilité pour élever un jeune enfant
9.     Zebra Cabanini, autrice d'un guide sur la dépression post-partum
10.  Noémie de Lattre
11.  Marie-Anne Delmoitié, professeure-documentaliste
12.  Zoë Dubus, doctorante en histoire, membre de Demeter-Core
13.  Elodie Gadiollet
14.  Olivia Gazalé, philosophe, auteure de Le Mythe de la virilité
15.  Claire Gillio
16.  Marie Krumpe, militante féministe
17.  Magali Legmar, responsable opérationnelle dans la maintenance informatique
18.  Emilie Maxwell, enseignante de français langue seconde
19.  Salomé Merlo
20.  Florence Montreynaud, historienne
21.  Antonine Nicoglou, chercheuse post-doctorante en philosophie
22.  Lola Ostier
23.  Pandora Reggiani, membre du bureau de la commission féministe, EELV
24.  Vanessa Rizk, réalisatrice
25.  Nathalie Rapoport-Hubschman, médecin psychothérapeute
26.  Soizick Rouger, mère et tout le reste
27.  Elisabeth Salvaresi
28.  Sonia Samet, coordinatrice du CPEF Colliard
29.  Daphné Simo, étudiante en Licence 3 histoire, membre des Jeunes Européens Fédéralistes
30.  Aline Stinus, comédienne et porteuse de projet
31.  Anne Sztejnberg, spécialiste en coopération internationale
32.  Elise Thiébaut, journaliste, autrice
33.  Joséphine Yvernault
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