collinederigaud
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Le Centimomètre
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collinederigaud · 7 months ago
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L'inventaire amer
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Des journaux, des livres En pile sur la table basse Des cartes postales, des photos Du chocolat Un petit mouchoir en tissu roulé en boule dans le fauteuil Une télécommande à portée de main Un panier en osier en guise de sac à main Une canne Un chapelet une Vierge en ivoire
Menus objets de ma mère Passant dans les mains de sa fille et de sa petite-fille Talismans du quotidien Choisis avec soin Pour l’attendre dans sa nouvelle chambre
“Maison de retraite”… Ne devrait-on pas dire plutôt Maison de retrait ? Retrait de la vie active – celle des courses du matin De la boîte aux lettres, Et des clefs sur la porte.
Une cuillère à riz du Vietnam Des chaussettes rigolotes Une broche libellule en bois laqué Un scarabée de chez Deyrolle Des écharpes colorées Une jolie housse de coussin
Cadeaux soigneusement rangés dans les tiroirs qu’il faut vider Objets retrouvés qui, De retour chez ceux qui les avaient offerts, Se transforment en d’autres talismans – Ce n’est plus “un souvenir de Maman”, C’est “un souvenir d’un cadeau que j’avais fait à Maman”
Et mon inventaire sera Le regret Les remords L’indécision La trahison L’incertitude Le déni Le chagrin Le chagrin Le chagrin Le chagrin
Marie-Pia 25 novembre 2024
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collinederigaud · 1 year ago
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L'ami américain
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Dans quelques années peut-être – le plus tard possible –, nous pourrons visiter la maison de Paul Auster à Brooklyn.
Elle sera indiquée dans les guides, s’il en existe encore, il faudra réserver son créneau horaire, et je me dis Voilà quelque chose que l’on pourrait trouver dans un roman de Paul Auster. Un écrivain imagine ce que deviendra sa maison après sa mort, ce que décideront ses enfants, sa femme, ce que deviendront ses livres – ceux de sa bibliothèque, les livres qu’il aimait et avec lesquels il a vécu. Peut-être est-ce déjà dans 4 3 2 1, d’ailleurs ? Je ne l’ai pas encore lu…
Je pense à la bibliothèque de Paul Auster. Je pense à son bureau, à sa machine à écrire dont il parlait avec affection – sa si précieuse alliée, puisqu’il lui confiait subito les paragraphes terminés, par crainte de ne pouvoir se relire s’il attendait trop.
Bien sûr, Siri Hustvedt restera à Brooklyn avec Paul. Elle ouvrira la porte à leurs amis ; Paul sera là, flottant tel monsieur Vertigo, en lévitation près des siens, tournant les pages de la vie sans lui.
Et nous ? Nous, qu’allons-nous devenir ?
Il me reste tant de livres de Paul Auster à lire, j’ai tant aimé ceux que j’ai lus, je ne devrais pas me sentir seule.
Et pourtant si.
La mort de Paul Auster le 30 avril, c’est l’hiver au printemps – le vent d’hiver souffle en avril dit la chanson. La suite, c’est J’aime le silence inutile d’une rencontre.
Je pense à tous les livres cachés dans sa mémoire, et qu’il aurait écrits jusqu’à la fin de ses très vieux jours. Je me dis Un jour, peut-être, j’aurais lu tous les livres de Paul Auster et je recommencerai. Il n'y en aura pas d'autres. 77 ans ce n’est pas un âge pour mourir, non – pas plus qu’un autre. Il n’y avait pas d’âge pour mourir pour Paul Auster, c’est aussi simple que ça. Paul Auster ne devait pas mourir.
Marie-Pia, 8 mai 2024.
Photo © Spencer Ostrander. "Les Mots bleus", Christophe, paroles Jean-Michel Jarre.
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collinederigaud · 1 year ago
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Champ de blé sous des nuages d'orage
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Le 20 mai 1890, Vincent Van Gogh arrive à Auvers-sur-Oise. Il y restera 71 jours, y peindra 74 toiles pleines de fleurs, de lumière et de couleurs. Des toiles pleines de solitude aussi. Des champs, des jardins, l’église d’Auvers. Parfois une silhouette, quelques portraits – le docteur Gachet, sa fille…
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Le dimanche 27 juillet, il peint un entrelacs de racines d’arbres puis se tire une balle dans la poitrine, en plein champ – ou près d’un arbre, on ne peut pas le savoir, puisque c’est lui qui se traîne, blessé, jusqu’à l’auberge Ravoux. Personne n'a trouvé Vincent. Il s'est rendu de lui-même, déposant sa palette, ses couleurs, son chevalet, sa folie douloureuse aux pieds du monde.
« Van Gogh à Auvers-sur-Oise. Les derniers mois » – c'est je crois la plus belle exposition que j’ai vue consacrée au peintre. On avance vers l’inéluctable en l’oubliant dans la contemplation des œuvres. Un abîme somptueux dans lequel on plonge corps et âme. Dans ce jardin, le silence nous appelle. Le portillon est entr'ouvert, on peut entrer, s'allonger et regarder les ramures, perdre conscience.
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Van Gogh fut heureux à Auvers. Peut-être heureux à en mourir.
Marie-Pia, 4 février 2024.
Champ de blé sous des nuages d'orage, mercredi 9 juillet 1890.
Les Champs, vendredi 11 juillet 1890.
Le Jardin de Daubigny (détail), entre le samedi 19 et le mercredi 23 juillet 1890.
Sous-bois avec deux personnages, vendredi 20-dimanche 22 juin 1890.
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collinederigaud · 2 years ago
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Claude Kahn, La Campanella (un souvenir)
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Photo : Claude Kahn, ©Jean-Michel Joyeau 1990.
Il y a quelque part dans ma vie une cassette audio où l’on entend la voix de mon père. Je l’ai souvent cherchée. Elle doit bien être quelque part. Cela me ferait plaisir de la retrouver tant que j’ai le matériel pour l’écouter.
Je me souviens que ma mère avait voulu l’enregistrer en douce, mais il s’en était aperçu. Il avait dit “Je ne suis pas Maman” (on avait fait le coup à ma grand-mère, déjà). Juste avant de couper, on entend le rire clair de ma mère, prise en flagrant délit de captation. Et juste après cet enregistrement pirate, les premières notes de La Campanella de Liszt arrivent.
La voix de mon père, le rire de ma mère et les notes de Franz Liszt.
Qui était l’interprète ? Pour moi ça ne peut être que lui : Claude Kahn, un pianiste qui tient dans mon cœur une place particulière.
D’abord, c’est mon frère Thierry qui me l’a fait découvrir quand j’étais bien jeune, avec les Rhapsodies hongroises (je vois encore la photo du coffret de disques vinyles). Ensuite pour la voix de mon père. Et enfin pour l’avoir entendu en concert salle Gaveau, “côté mains”, avec Maman et Thierry. Côté mains : assis derrière le pianiste nous voyions ses longues mains sur le clavier. Après avoir salué, quand il s’est rassis pour le rappel, il a dit doucement : “Je vais vous jouer La Campanella”. Murmures dans la salle… Chacun retient son souffle.
Après le concert, nous sommes allés le saluer. Claude Kahn avait un très joli sourire, il dédicaçait ses disques avec la gentillesse et la simplicité des grands artistes.
Samedi 17 novembre, une association d’idées et d’écoutes musicales m’a fait chercher ce disque de Liszt acheté salle Gaveau. “Il ne doit plus être tout jeune… je me demande s’il donne encore des récitals…” J’ai attrapé mon téléphone pour regarder. Il était mort dans la nuit.
Claude Kahn n’est pas le plus connu des pianistes mais il n’est jamais trop tard pour tendre l’oreille.
Marie-Pia, 21 novembre 2023.
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Claude Kahn a reçu le prix pour la meilleure exécution de La Campanella au concours international Franz Liszt de Budapest en 1956, à l'âge de 15 ans.
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collinederigaud · 2 years ago
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Last song
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Lost song À la longue les mots semblent superflus
Jane B. Stephan E. a-t-il pensé à vous ? Pour vous je n'ai pas cherché d'autres mots sa Prisonnière est venue répondre à ceux de Serge Ils peuvent être de vous à lui Ils peuvent être de nous à vous Jane B.
Prenez-moi dans vos bras [ma chère] Et oublions tout… Mettons-nous debout dans la lumière Soyons prêts à tout.
Les semaines ont passé sans bruit L'été n'a pas suffi à effacer Jane B.
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collinederigaud · 2 years ago
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Le nom des rues
C’était la première fois depuis presque 30 ans que je retrouvais cette ville comme je l’avais connue enfant, puis jeune adulte.
Qu’est-ce qui, lors de mes précédents séjours, m’a tenue éloignée de ce passé ? Pourquoi ai-je réduit le périmètre de mes pérégrinations en évitant un dédale de rues intimes ?
Ce jour de mai, je marche avec ma belle-sœur dans le quartier des Carmes, puis nous remontons la rue des Filatiers. Je lève les yeux, je reconnais les lieux, et je redécouvre ces rues dont le nom s’était effacé de ma géographie personnelle – pas les essentielles, bien sûr, celles où j’ai vécu (rue du Languedoc, rue Croix-Baragnon), ni les artères principales (rue d'Alsace-Lorraine, rue de Metz), mais toutes les autres. Celles aux sonorités romanesques : rue des Trois-Banquets, rue des Puits-clos, rue de la Pomme, rue Genty-Magre… Et ailleurs, rue Perchepinte, rue du Coq d’Inde, rue des Paradoux.
C’est étrange cette sensation d’être si loin de moi.
Car c’était moi qui remontais ces rues la nuit, le jour, sans prendre garde à la beauté de la ville. C’est moi faisant demi-tour pour revenir à une soirée, c’est moi assise sur cette fontaine place de la Trinité ; c’est moi sous ce porche avec des garçons de mon âge.
Terre inconnue, terrain connu.
C’est ce que je ressens dans ces venelles au tracé sinueux – tours et détours pour remonter le temps.
Ce soir de mai, je prends un verre avec l’amoureux de mes 18 ans et sa femme, place du Capitole. Au détour d’une phrase, une rue, encore, m'atteint en pleine mémoire.
“Alors lui, aujourd’hui, il habite en plein centre, rue Ninau, tu vois ?”
Je me sens pâlir… j’hésite… rue Ninau… ce nom… et puis ça me revient. Rue Ninau. Thierry. Mon frère. Mon frère aîné de retour à Toulouse dans les années 1980, après avoir perdu son boulot. Mon frère si mal accueilli (pas accueilli, en fait) dans l’appartement des parents. Mon père lui octroyant un lit dans l’entrée pour qu’il n’ait pas l’idée de rester. Et donc mon frère, pour son bien et le nôtre, trouvant une chambre d’étudiant rue Ninau. Oui, notre chance à nous : on allait le voir, Benoit et moi. On s’échappait de l’appart’ rue du Languedoc pour monter le petit escalier et le retrouver dans sa piaule rue Ninau. On était là, tous les trois. Thierry, Benoit et moi.
On me dit que ce qu’il manque à Toulouse, c’est l’eau… mais la Garonne et le canal sont là, et la marée remonte en moi comme en tous les lieux où j’ai vécu, ceux qui portent la trace de l’éternelle jeunesse – et de l’amour.
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collinederigaud · 2 years ago
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Mystère Mystère
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Lui, c’est Mystère Mystère. Il est arrivé il y a quelques jours. J’aime bien sa coiffure, Ses poils hirsutes de chat mouillé Et ses yeux intrigués. Je vois l’oiseau sur la branche comme lui – Il chante que l’hiver est fini.
Tu te trompes, pense Mystère Mystère, Il y aura encore de la neige et du froid Tu vois je n’ai pas encore mes couleurs J’attends que le soleil monte dans le ciel Que les jours soient plus longs Mais j’aimerais bien grimper à l’arbre comme toi Me poser sur la branche Je verrais les jours lointains Je saurais s’ils s’annoncent bons ou mauvais Je t’écouterais chanter En attendant l’été Mais je reste sur Terre Je ne peux pas laisser l’automne tout seul Les feuilles mortes la pluie la nuit J’attends que le ciel m’offre le soleil Je suis Mystère Mystère Personne ne me voit Mais je suis là.
Marie-Pia 12 janvier 2023
Mystère Mystère, gravure sur papier ©Zozopelli/Clara Duponchelle 2023.
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collinederigaud · 2 years ago
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Le haut de la colline
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C’est gentil de m'attendre… Je traîne un peu, Je suis les traces de Jadis et Naguère. J'avais ton âge et un grand frère Qui marchait près de moi Mais ce ciel-là je ne m’en souviens pas. Pourtant il a toujours existé En hiver, en été, Il passait juste au-dessus de moi. Aujourd’hui il est là tout autour C’est la cape de la fin du jour Sa lumière porte les voix éteintes Et ta silhouette les lendemains qui chantent.
Marie-Pia, 11 janvier 2023
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collinederigaud · 3 years ago
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Dix heures et demie du soir en été
Mes doigts parcourent le dos des livres, mal rangés dans cette bibliothèque de fortune. Les étagères courbent sous le poids des romans. Je m’arrête. Un livre de Duras que je ne connais pas, qui ne me dit rien.
C’est l’été, peut-être pas dix heures et demie mais le soir. Je regarde la couverture, j’ouvre à la première page. Un nom est écrit en haut au crayon à papier.
Marthe Verguin
Tiens, maman lisait Duras ? Je cherche les dates – © Éditions Gallimard, 1960 Impression S.E.P.C à Saint-Amand (Cher), le 2 avril 1993 [pour cette édition de poche].
1993, c’est après la mort de mon père. J’avais 23 ans, Maman 62.
Maman ne m’a jamais parlé de Duras.
Tout éloigne ces deux femmes, il est difficile d'imaginer vies plus éloignées que les leurs. Mais leurs visages jeunes sont proches, et leurs pieds d’enfants ont foulé la même terre, Leurs yeux ont vu les eaux de l’Indochine Saïgon et le Mékong pour Marguerite, Hanoï et la baie d’Ha-Long pour Marthe.
Maman lisait Duras…
Cette découverte me laisse perplexe. Mais après tout qu’ai-je échangé de mes lectures avec mes parents ? Rien. J’ai partagé d’autres choses, mais pas cette intimité-là.
Il est dix heures et demie du soir. L’été. Et puis il est un peu davantage. La nuit est enfin là, tout à fait. (…) Demain arrivera dans quelques heures. Il faut attendre.
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Marguerite Duras, Dix heures et demie du soir en été, © Éditions Gallimard 1960.
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collinederigaud · 3 years ago
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La Mémoire vive
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On appelle ça des tâches de naissance Mais comme on voit autre chose dans la forme des nuages On voyait dans celles de Gorbatchev L’archipel des terres promises
Elles descendaient du haut du crâne vers le front Certains y lisaient l'ébauche d'un nouveau continent D’autres les larmes d'une Russie qui pleure ses voisins meurtris
Pourquoi se séparer de ceux que l’on a martyrisés ?
Je me souviens de ce voyage Mai le joli mai dans les rues de Berlin Je marchais sur le Mur sans m'en apercevoir Pourtant au sol on en voyait la trace Ligne de vie et de mort dans une ville qui fut séparée d'elle-même
Je marchais sur le Mur quand d'autres y moururent.
Elle nous revient très vite cette Histoire Berlin Est, Berlin Ouest, le no man's land, Check Point Charlie… C'était encore là il y a 33 ans On pouvait mourir pour ça
Mais en 1989 un homme a laissé le peuple passer Il a donné l'ordre de ne pas tirer.
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Photo 1 : Une de Libération, 1er septembre 2022, Mikhaïl Gorbatchev ©Yousuf Karsh. Photo 2 : Inscription sur le Mur de Berlin, 1990 ©Andreas Altwein.
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collinederigaud · 3 years ago
Photo
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Plongée dans le Romantisme au parc Monceau, 4 septembre 2022. #romantisme #paris #parcmonceau #ruines https://www.instagram.com/p/CiHSytFtHcP/?igshid=NGJjMDIxMWI=
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collinederigaud · 3 years ago
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Dani duo Daho
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Ce soir c'est mon cœur qui tangue Quand j'entends ta voix chanter Dani tu m'as fait rêver Quand Daho t'a retrouvée
Les notes comme des boomerangs Me font encore chavirer Et si ce matin la vie Te flingue sans murmurer Ces mots qu'on a tous chantés Je lui dirai qu'elle est dingue De les avoir Oubliés.
Marie-Pia 19 juillet 2022
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collinederigaud · 3 years ago
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Une terre déserte
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Quand un morceau de moi s’est détaché le 21 décembre 2018, Ce jour où un mur de ma vie s’est écroulé Ce vendredi Le samedi lendemain vous m’avez ouvert les bras Déversé dans le cœur les flots des poètes que vous aimiez Vous parliez de la mort légèrement Vous avez en douceur caressé ma douleur Je n’aurais pu voir personne d’autre ce soir-là. Je pleurais mon frère sur votre épaule Je vous dévorais des yeux et des oreilles Amour de ma vie vous portiez ma tristesse J’aurais voulu vous embrasser vous porter vous dire Votre sourire votre voix votre douleur Marie Je vous ai rencontrés tous deux un jour Votre Lumière et vous son ombre gigantesque Vous m’avez enveloppée Marie m’a embrassée Vous m’avez parlé “Alcool, c’est vraiment très très beau…” Je sais je l’ai déjà écrit ici “Alcool, c’est vraiment très très beau…” Vous êtes mon Apollinaire Où allez-vous demain Protéger mon chagrin ? Je cherche dans les nuages une île où vous trouver Je sais que vous êtes là Juste au-dessus de moi.
Marie-Pia, 21 juin 2022 À Jean-Louis Trintignant. Un homme et une femme, photo de cinéma © Claude Lelouch 1966.
Vous pouvez lire aussi https://collinederigaud.tumblr.com/post/161429040746/avant-que-tu-ne-meures et https://collinederigaud.tumblr.com/post/174599796091/je-marche-à-toi
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collinederigaud · 3 years ago
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Ricochets
Il y a chez Maman toutes ces photos de toi, à tous les âges. Les rayons du soleil de Bretagne dans tes cheveux gris Ton sourire et tes yeux, toi enfant en noir et blanc, Toi à vingt ans.
J’ai besoin de parler et tu n’es plus là J’ai envie d’écrire et tu n’es plus là J’ai besoin de tes souvenirs et tu n’es plus là
Mais en allant à la rencontre de Proust ce jour-là, je t’ai retrouvé au détour d’une phrase : Les vrais paradis sont les paradis qu’on a perdus.
Je m’arrête devant les mots imprimés en grand sur le mur. La phrase est de Proust, la chanson de Christophe, le visage c’est le tien.
Je comprends aussi pourquoi la montre de Marcel m’a happée, je me souviens des choses de toi que Sophie m’avait apportées après ta mort, des cravates, une chemise et des montres. Après son départ, je suis restée longtemps penchée sur les cadrans. J’ai senti une main sur mon épaule.
Elles étaient toutes arrêtées à une heure différente.
8 h 10 9 h 07 10 h 30
Il a fallu une par une changer leur pile, les remettre à l’heure avec regret.
Le temps redémarre La vie reprend Mais il est si long ce temps sans toi. Peut-être est-ce pour cela que Marcel Proust m’appelle, puisque je ne l’ai pas encore lu – j’avais toute la vie, pensais-je.
Et cette phrase des paradis perdus… ? Et bien, elle est dans Le Temps retrouvé.
Paris, le 9 avril 2019 et le 10 mai 2022.
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collinederigaud · 3 years ago
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Le temps retrouvé
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Il est 9 h 17 à la montre de Marcel Proust exposée dans une vitrine au musée Carnavalet. Petit objet témoin des heures d’un homme consumé par la passion de l’écriture… Tous les matins – ou tous les soirs – il remontait cette montre de gousset, compagne des heures mondaines et des nuits solitaires.
Il est 9 h 17 aujourd’hui comme hier, le temps s’est arrêté chez Swann, à Guermantes et à Cabourg – « cette nuit j’ai écrit le mot "fin", maintenant je peux mourir ».
Montre de Marcel Proust, exposition “Marcel Proust, un roman parisien”, Paris, musée Carnavalet, 7 avril 2002. #marcelproust #àlarecherchedutempsperdu #carnavalet #montres
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collinederigaud · 3 years ago
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Méphista
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J’ai oublié les traits Sous les yeux ce ne sont Ni le khôl ni les cernes Qui me dévisagent
Entre les murs des rues Des vies sages Glissent dociles Hémisphériques
Mon Équateur sourit À la banquise Aux parterres fleuris Aux élastiques
Je n’ai pas d’envie sage Ma bouche reste gourmande Et mes yeux fatigués De sourire à sa place
Qui se cache sous le voile Autorisé De la République ?
L’émoi file et le temps presse Les rides n’ont pas de quarantaine Colin-maillard et croque-mitaine Jouent à cache-cache
Année nouvelle Rends-nous notre visage Et le son clair des voix qui portent.
Marie-Pia 19 janvier 2022
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collinederigaud · 4 years ago
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Cœur battu (Le chagrin d’Alain Delon)
Je me fiche de la dualité, du beau ténébreux et de l’acteur solaire. Ce soir je regarde le dernier Visconti, dans l’ombre de Burt Lancaster – celui de Violence et Passion. Son visage est celui du chagrin Il reste debout entre les morts Dans ses yeux bleus passent soixante ans de cinéma Et dans le flot d’images, cette vague éternelle qui me submerge Il y a bien sûr Le visage bleu de Ferdinand
“Après tout, j’suis idiot…”
Ce bleu retrouvé dans les yeux de Delon Ce bleu infini qui nous suit Nous happe et nous plonge Dans la mélancolie
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Dans ce flot de mots il y a aussi Alain Delon le regard dans le vague qui fait répéter la journaliste – Pardon ? Il est très loin – Pardon ? Il dit J’ai joué avec cet homme, j’ai ri avec cet homme, j’ai pleuré avec lui et je ne peux pas…
Il y a Ce petit film de Paris-Match réalisé lors d’une séance photo La gentillesse d’un homme Son affection Sa prévenance
Delon s’accroche à Belmondo Il passe ses bras autour de lui Il pose ses mains sur ses épaules Il le tient mais il s’appuie aussi sur lui Cette scène souriante est soudain d’une grande tristesse
Puis Delon raccompagne son ami à sa voiture Ils s'embrassent Et avant de monter, Belmondo lui dit “On se voit ? Hein ? … Hein ?” Le regard inquiet, Bébel ne sourit plus.
Alors on comprend On comprend pourquoi Delon s’accroche à lui.
Marie-Pia, 21 septembre 2021.
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©Jean-Luc Godard, Pierrot le fou, 1965 ©William Smith, vidéo Paris-Match, juin 2019
(Bonus)
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Marseille, 1969. ©Apis/Sygma/Corbis
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