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Les écumeurs
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lesecumeurs · 4 years ago
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Après un vide aberrant depuis plus d'un an, ne va-t-il pas y avoir un trop-plein par la suite ?
En réponse à la question “Et toi, comment ça va ?” qui sert de fil rouge à cette série de billets, Benoit m’a invité à déjeuner chez lui. Dans l’appartement même où, en 2014, j’avais recueilli ses propos. On a parlé d’une collection en 30 volumes de chants d’oiseaux, de rééditions de disques obscurs en série ultra-limitée et des effets du confinement sur la base de données de Discogs (qui a augmenté de 30% suite au dépoussiérage de bibliothèques privées). On a écouté un trésor perdu de la pop brésilienne, une reprise improbable de “Mad World” de Tears for Fears et une adaptation anglaise d’un succès de Jean-Jacques Goldman. Une semaine plus tard, Benoit rendait sa copie.
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Ah... Comment ça va ? En voilà une question... En fait, en voilà une réponse difficile à donner... Comment compenser le manque flagrant d'activités de toutes sortes et la pensée récurrente que beaucoup de personnes (beaucoup que l'on côtoie) ont connu des moments difficiles liés à cette situation hors norme... Y répondre du haut de mon nombril, moi qui ne suis pas le plus à plaindre - mon activité professionnelle n'ayant jamais stoppée nette, seulement ralentie quelque peu, avec une sorte de chômage partiel de temps en temps... Juste dire que depuis plus d'un an maintenant il a fallu trouver de quoi s'occuper... et c'était tout trouvé : m'atteler à des tâches pour lesquelles je n'avais (et n'aurai) jamais (eu) de temps à consacrer : rébarbatifs tris et rangements de toutes sortes, y compris sur l'ordi... Beaucoup de tâches liées à mes vidéos de concerts... Me rendre compte du coup que cette inactivité filmique va me faire économiser un peu, y compris physiquement (Tant d'un point de vue musculaire que du côté fatigue, puisque le boulot m'appelle vers 5h40/6h le matin)... Me rendre compte hélas que je ne parviens pas à trouver un autre cadre filmique, plus documentaire (et les quelques prises de vues de nature et autres oiseaux n'y suffiront pas)... Alors oui, plus de lectures, toujours autant de découvertes musicales, toujours plus d'achats frénétiques de vinyles (Aider les disquaires à se maintenir à flot, allons-y !), une période de redécouverte de ma propre “collection” de vinyles et CDs, des essais artistiques de toutes sortes pour bien me rendre compte de façon définitive que non ça n'est pas pour moi et tirer un trait dessus ! Un mal pour un bien, s'il fallait résumer... Ces dernières semaines c'est aussi la Louve, ce supermarché coopératif dans le XVIIIème, hors du commun, qui accapare volontairement beaucoup de mon temps, dès 6h30 le matin, pour aider une équipe salariée restreinte et submergée par les tâches... Activité physique (Ah, c'est quand qu'on nage à nouveau ? C'est quand qu'on randonne à nouveau? Bon, ok, ça y est, ça se rapproche) qui compense mon côté speed hyperactif... Une autre question se pose malgré tout : et la reprise ? Ca sera quoi, et comment ? Après un vide aberrant depuis plus d'un an (si on ne compte pas la légère reprise de fin d'année avant un nouveau gel des activités), ne va-t-il pas y avoir un trop-plein par la suite ? Et je ne parle pas que des concerts : cinéma, expositions, etc...  A nouveau se retrouver dans une spirale débordante ? Après ce sevrage forcé ? J'ai l'impression déjà que je vais avoir du mal à faire face... ce qui n'est pas très rassurant. Le monde d'après qui ne viendra pas, le retour à une normale quasi identique à quelques détails près.... pas très encourageant tout cela... Mais à suivre, donc.  Avant de voir tout cela se profiler, une chose est sûre : la nature à fond ! De la verdure, de la mer, de la montagne, de la campagne !!! Changer d'air !
Photo : Benoit Grimalt, 2014.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“J'ai fréquenté encore plus régulièrement les ressourceries et autres magasins d'occasion quand ils ont rouvert, et j'ai acheté plus de disques d'occasion en ligne.”
En 2014, j’avais profité d’un passage de Jean-Christophe à Paris à l’occasion du concert de M.Ward pour l’interroger : à l’heure où je passais de la lecture de Pif Gadget à celle de Starfix, Jean-Christophe écumait déjà les concerts londoniens, prêtait main forte à Alan McGee pour assembler les premiers 45 tours de The Jesus & Mary Chain et organisait la première tournée Creation en France. En panne de concerts et en panne de vide-greniers, Jean-Christophe boucle actuellement un ouvrage consacré à Jonathan Richman qui viendra compléter une série de livres-hommages autoédités. 
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Salut Philippe,
Mon premier concert de l'année 2020, c'était grâce à et avec toi, au Théâtre Thénardier de Montreuil, pour l'une des prestations hebdomadaires de David Lafore tout le mois de janvier. J'ai passé une excellente soirée et cette découverte m'a accompagné pendant toute l'année, puisque j'ai entrepris d'explorer à rebours sa discographie. Le fait que je n'ai assisté à aucun autre concert avant la pandémie et le confinement montre bien que, de nos jours, je suis tout sauf un véritable écumeur !
De ce point de vue, mon année a été en partie sauvée parce que le meilleur festival du monde, qui se trouve avoir lieu près de chez moi, a pu être maintenu. En mode dégradé, certes, mais il n'a pas été complètement annulé. Ce festival, c'est Musiques d'Ici et d'Ailleurs, organisé depuis bientôt 30 ans par l'association Musiques sur la Ville à Châlons-en-Champagne et dans d'autres villes et villages de la Marne. L'idée est de proposer des concerts-découvertes en plein air et gratuits, dans des styles musicaux variés, par des formations venues du monde entier, comme le nom du festival l'indique. Ce principe de concerts gratuits l'été attire un public très familial. Au fil des ans, mes goûts se sont rapprochés de la programmation et je fréquente de plus en plus assidûment le festival, au point que je suis devenu membre de l'association.
L'édition 2020 a bien sûr été très particulière, si bien qu'elle a été numérotée 28 1/2 plutôt que 29. Le seul moment qui ressemble à un festival "classique", les trois jours de concerts au féminin MIA3J, dans un parc, avec deux scènes, bar et restauration, a dû être annulé. Seuls ont pu avoir lieu des concerts en ville, sur scène fixe dans le centre ou au pied d'immeubles avec une scène mobile. Et la programmation a bien sûr été complètement bouleversée, puisque qu'aucun groupe international n'a pu venir, et puisque la plupart des tournées ont été annulées. Il n'empêche, plus d'une quarantaine de concerts ont eu lieu et j'ai assisté avec grand plaisir à ceux de Ni Vu Ni Connu, Radio Kaizman et Ensemble National de Reggae.
Et ce fut tout pour cette année de concerts. Le prochain risque de devoir attendre la 30e édition du festival, avec le maintien coûte que coûte de MIA3J, dans des conditions adaptées.
Je suis plus un écumeur de disques que de concerts, et là aussi il a bien fallu s'adapter. J'ai fréquenté encore plus régulièrement les ressourceries et autres magasins d'occasion quand ils ont rouvert, et j'ai acheté plus de disques d'occasion en ligne. Mais acheter un disque de façon ciblée ça ne procure pas du tout la même excitation que, par exemple, lorsqu'on tombe au détour d'un vide-grenier, comme ça m'est arrivé la seule fois où on en a fait un ensemble, sur deux 45 tours de 1969 de Brigitte Fontaine littéralement posés sur le trottoir d'une banlieue parisienne !
Photo : Benoit Grimalt, 2014. 
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Actuellement, je ne pense plus aux concerts, cela ne me manque même pas.”
Luc est la première personne à avoir envoyé une lettre de candidature pour figurer parmi les Ecumeurs. Avec un argument massue : un document Excel sur lequel ce complétiste averti a répertorié depuis 1999 tous les concerts auxquels il a assisté. Mélange parfait de folie et de rigueur : il était digne de figurer parmi ses pairs. Quand j’ai recontacté Luc il y a quelques semaines pour lui proposer d’apporter son grain de sel à cette nouvelle série de billets, je ne pensais pas que l’expression serait aussi bien adaptée. 
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Salut Philippe,
Superbe initiative que cette réanimation des Ecumeurs à la lecture des évènements récents. Nous avions tous besoin d’en parler en vrai. Déjà, le pitch est parfait : et toi, comment ça va ? Cela me rappelle celui de ce film de Rouch/Morin, 1961 : c’est quoi le bonheur ? Longtemps pour moi, tout s’est confondu. Les concerts rythmaient ma vie, constituaient ma passion principale, ma raison d’être (écouter de la musique, voir les copains, boire des coups), le squelette de mon existence. De mon emploi du temps en tout cas, c’est certain. Et 2020 a tout bouleversé. Ces douze derniers mois, j’ai beaucoup changé et relativisé plein de choses.
La première période de ma vie de concerts s’est achevée le 11 mars 2020, à FGO Barbara, avec Jawhar, dans une ambiance de fin du monde. Cette impression étrange d’être présentement et possiblement en train de déconner grave. Qu’il ne faudrait pas être là, que c’est à la limite du sérieux : sans masque, un verre à la main, au milieu d’inconnus, dans une période où tout commence à devenir hors de contrôle. Et ce sentiment aussi désagréable que persistant qu’il s’agissait là du dernier évènement du genre avant très longtemps.
J’ai revu cinq concerts depuis juin dernier. Deux devant le théâtre de Montreuil dont surtout le premier, sorte de pseudo revisitation de Las Ondas Marteles pour lequel j’ai assisté aux balances au hasard d’une balade. Une relecture de « Gambling Bar Room Blues » de Jimmy Rodgers a accroché mon oreille au loin. J’ai tout de suite voulu connaître la suite et suis revenu quelques heures plus tard voir le concert. Et de me retrouver dans le même état, de me revoir à 20 ans à mon arrivée à Paris : cette fascination du live, cette liberté absolue de voir la musique jouée devant moi. Une expérience formidable, comme une révélation – une renaissance serait plus exacte pour le coup –. 
Autre ambiance quelques semaines plus tard, dans un terrain vague du côté des Murs à Pêches, toujours à domicile. La soirée de clôture de la brasserie La Montreuilloise avait été le prétexte d’une série de concerts suivie d’un DJ set reggae/ska, sorte de reconnexion insouciante, sans masques, sous les étoiles dans la chaleur suffocante de l’été. Pour le quatrième, l’occasion m’a été donnée de voir mes favoris de Arlt pour la quinzième fois, sur le rooftop de Petit Bain, en septembre, version duo. Comme une impression de retrouver des membres de sa famille proche, perdus de vue après une séparation impromptue. Assez amusant de voir que le confinement (enfin le premier maintenant) avait largement été mis à profit par Sing Sing pour écrire ce cinquième album, que l’on a maintenant plus que jamais hâte de découvrir. Enfin en octobre, j’ai assisté à la présentation du nouveau projet de la Novia (Au Seuil Du Vent) avec l’immense Jacques Puech en ouverture. On aurait presque pu se croire dans le monde d’avant : la Marbrerie configurée assise, tables rondes et chaises autour, en mode distancié, ni plus ni moins que comme les soirs de faible affluence. Bref, de ce 8 octobre dernier 2020 date la dernière mise à jour de mon fichier Excel. Je vais d’ailleurs être dans l’obligation de neutraliser l’année 2020 – voire davantage d’ailleurs – pour ne pas altérer mes précieuses statistiques.
Retour dans le rétroviseur maintenant, voilà un an. L’éloignement de Paris durant deux mois m’a permis d’effectuer un sevrage en douceur. Où j’étais, même en temps normal, ma frénésie de concerts n’aurait jamais pu être assouvie, la question ne se posait de toute façon pas. Comme mis devant le fait accompli. Pourtant la musique était, durant cette période trouble, omniprésente. Entêtante même, en boucle. Elle n’avait pas quitté ma vie, juste sa transposition scénique mise entre parenthèses. Et puis il n’a fini par rester que les émotions. Lesquelles ont fini par prendre le dessus. Débordantes.
J’ai finalement mis à profit cette période pour me reconnecter à moi-même. Et arrêter de me nourrir de la créativité des autres pour me forcer à développer la mienne, de façon bien involontaire mais comme si un espace s’était libéré. Evidemment pas une créativité musicale – j’en serais bien incapable – mais dans un tout autre domaine : la cuisine. Et ce n’est pas les stories de Jason Williamson de Sleaford Mods sur Instagram qui me contrediront ! Ce que je retiens aussi, c’est que ces circonstances m’ont laissé du temps. Du temps pour prendre du recul sur plein de choses. Sur ce que je voulais vraiment. Sur une vie sentimentale en plein chamboulement et renouvellement. Sur le fait de réfléchir à ce dont j’avais envie : maintenant et dans l’absolu.
Alors oui, cela paraît étrange à avouer, mais cette pause a été salvatrice. Il y aura un avant et un après cette crise sanitaire. Actuellement, je ne pense plus aux concerts, cela ne me manque même pas. J’irais même jusqu’à dire que je me sens plus libre sans. Mais bien-sûr, quand tout ce bordel sera derrière nous, je retournerai voir des concerts. Probablement, très au-delà de la norme communément répandue. Mais pas avec la même intensité qu’auparavant. Encore une fois, j���ai changé. La paternité avait déjà modifié mon investissement mais c’est désormais un profond changement de paradigme auquel je fais face. Que j’ai accepté et maintenant dépassé.
Pour revenir au questionnement de départ : oui ça va bien. Vraiment très bien en fait bizarrement.
Mais j’ai aussi immensément hâte que les concerts reprennent, on ne va pas se mentir.
Photo : Benoit Grimalt, 2014.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Le secteur culturel semble avoir été sacrifié, réduit à néant au profit des longues files d’attente qui se formaient devant les étals des grandes marques décoratives et vestimentaires.”
Cyril est très certainement l’écumeur que j’ai le plus souvent l’occasion de croiser sans lui avoir donné rendez-vous : quand ce n’est pas dans la file d’attente d’une salle de cinéma, c’est au sous-sol de Beaubourg ou sur le seuil d’une galerie photo. Cyril a longtemps tenu sur son temps libre une mailing-list dédiée à l’actualité des concerts parisiens : son exhaustivité et sa régularité en faisait un modèle à côté duquel la concurrence rasait les murs. J’ai toujours été étonné qu’il ne soit pas débauché par un média d’actualité : Cyril, c’est Lylo à lui tout seul. Même s’il n’exerce plus cette activité de salubrité publique, il continue discrètement à faire du prosélytisme : il est toujours le premier à me signaler la rétrospective d’une réalisatrice tchèque ou un festival de documentaires en ligne. 
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Salut Philippe,
en temps normal, la politesse voudrait que je te réponde « tout va bien, merci, j’espère que toi aussi » mais ce n’est pas vraiment le cas.
Quand tu fais partie de la catégorie de gens hyper actifs qui ne rentrent chez eux que pour y dormir (ou presque), après un début d’année bien rempli en concerts, expositions et cinémas, le premier confinement a été un véritable coup de massue. Je n’avais absolument plus goût à rien, impossible d’allumer la platine vinyle ou d’écouter un CD. Les seuls instants que j’ai appréciés ont été de découvrir les rues de Paris désertées et de capturer ces instants en photographies ainsi que la vision de quelques livestreams proposés sur instagram chaque semaine par les impeccables Low ou par l’espiègle Fyfe Dangerfield ou encore chaque jour par La Blogothèque, dont le climax a été le très bel hommage à Elliott Smith fin juin. J’ai également profité de la mise en ligne de films proposés (souvent gratuitement) par des festivals comme Cinéma Du Réel, le Champs-Elysées Film Festival, Traces de Vie et également par le Centre Pompidou, mk2 et la Cinémathèque.
Depuis plus de dix ans, je passe du temps à dénicher et à répertorier les concerts à ne pas manquer à Paris et dans sa région. Tu te rends d’autant plus compte, suite à leur arrêt brutal, du rôle de sociabilisation que ces moments de partage peuvent représenter. La joie d’y croiser les connaissances que tu peux t’y faire au fil du temps, de saluer l’agent de sécurité, le personnel de la billetterie, les serveuses et serveurs de bar, de discuter avec les personnalités de la scène musicale locale ou encore avec les organisateurs de concerts qui te confient autour d’un verre des informations sur leur programmation à venir a fait place à un gros vide. Certaines personnes m’ont suggéré d’annoncer les dates des concerts en ligne, je n’ai pas senti l’envie de m’y mettre, je préfère attendre le retour des concerts en salles pour redémarrer Open Up Your Ears.
Le second confinement a été un peu plus positif. J’ai renoué avec la télévision que je n’avais plus allumée depuis plus de dix ans et dont j’ai changé de modèle. Je suis passé d’un coup de l’écran cathodique au streaming connecté ! J’ai attaqué la vision intégrale (pas encore achevée pour certaines) de séries comme Six Feet Under, The X-files, South Park, The League Of Gentlemen, Dark... J’ai aussi pu découvrir trois ans après l'extraordinaire troisième saison de Twin Peaks dont tous les épisodes sont réalisés par un David Lynch en grande forme qui se fait plaisir en invitant des artistes comme Nine Inch Nails, Chromatics, Sharon Van Etten ou encore Au Revoir Simone à jouer un titre lors d’une scène. Un pur délice.
Il faut saluer une parenthèse enchantée qui a pu prendre place cet été grâce aux concerts en extérieur des équipes du Supersonic sur la terrasse du Trabendo, ceux sur les quais et la terrasse de Petit Bain, ceux sur la nouvelle air de jeux de La Station ou bien même ceux assis en intérieur dans le cadre de Jazz à la Villette ainsi que le très bon concert inattendu et inespéré de Fontaines DC à la Maison de la Radio. Ces moments de retrouvailles et de délectations ont été de trop rares instants exutoires en 2020.
L’année a également été marquée par l’annulation des festivals auxquels je me fais une joie de me rendre chaque année (ou presque) comme The Great Escape à Brighton, Primavera Sound Festival à Barcelone, La Route du Rock à Saint-Malo ou encore l’Iceland Airwaves à Reykjavik. C’est l’occasion idéale de profiter en même temps d’une ville et d’artistes que tu affectionnes, de mêler tourisme et musique.
Même si personne ne pouvait s’attendre à vivre cette pandémie, la communication gouvernementale a été une véritable catastrophe. A grands renforts de positivisme, on a laissé espérer aux acteurs de secteurs à l’arrêt qu’ils pourraient reprendre leurs activités pour finalement revenir sur cette décision. C’est dire la méconnaissance de ceux qui gouvernent sur l’organisation ou la tenue d’événements tels que des concerts ou des festivals (savent-ils d’ailleurs ce qu’est un festival ? Si l’on s’en tient aux déclarations des différents ministres successifs au poste de la culture, la réponse semble être encore et toujours non). Le secteur navigue à vue depuis plus d’un an. Les programmateurs en sont parfois au 4 ou au 5ème report de date, certains artistes préfèrent tout annuler en attendant que ça se tasse, le public se lasse et n’achète plus de place. Il est compliqué dans ces conditions de rester positif. Quand tu vois qu’un an après le premier confinement on en débute un troisième ou encore que les concerts assis de The Divine Comedy prévus en septembre 2021 à La Cité de la Musique sont déjà reportés à septembre 2022, tu te dis que les belles paroles de la ministre de la culture sur la tenue de festivals assis en plein air et limités à 5.000 personnes ne sont encore qu’un coup d’épée dans l’eau. Du blabla pour brasser du vent, faire patienter les gens en attendant que ça s’arrange parce qu’il ne faut pas faire perdre espoir. Au bout de quatre mois et demi de fermeture des établissements culturels, c’est un nouveau confinement qui nous est proposé, tu parles d’un espoir.
En l’absence de concerts, je me suis surpris à reprendre mes activités adolescentes en reprenant une carte de cinéma illimité. J’ai dévoré le cycle d’une cinquantaine de films japonais de la Filmothèque, la rétrospective Christopher Nolan, l’Etrange Festival du Forum des Images, les films documentaires chiliens proposés par la Bpi du Centre Pompidou ... Soit plus de 200 films avalés en quatre mois et demi, sans jamais avoir l’impression d’être en danger et sans tomber malade. D’où une grande incompréhension lorsque le gouvernement a pris la décision de maintenir les lieux culturels fermés tout en reconnaissant qu’ils ne représentaient pas un risque de contamination. Aucun souci mais on va éviter quand même. Si l’on commençait à appliquer ce principe de précaution pour tout ce qui nous entoure, on finirait par rester allongé à attendre que la mort vienne nous cueillir. La veille de la présumée réouverture, je me suis promené dans le quartier latin et je voyais les employés des cinémas s’activer en placardant les affiches des films et les programmes. Tout ça pour rien, pour annoncer de prochaines séances fantômes. Le gouvernement allait envoyer promener leur travail impliqué d’un revers de main. Pareil pour les musées, de nombreuses expositions ont été accrochées puis décrochées sans accueillir de public. L’exposition photographique Noir et blanc au Grand Palais a nécessité trois ans de travail pour terminer en exposition virtuelle payante sur un ordinateur. La grande exposition Matisse du Centre Pompidou n’aura accueilli du public que pendant 9 jours avant d’être démontée et j’en passe. J’ai eu l’impression d’assister à d’énormes gâchis. Le secteur culturel semble avoir été sacrifié, réduit à néant au profit des longues files d’attente qui se formaient devant les étals des grandes marques décoratives et vestimentaires. Je vous fais le pari que vous tirerez plus profit d’une exposition ou d’un film que d’un pull ou d’une table basse mais ce n’est visiblement pas l’avis de tout le monde.
Le temps où l’on se retrouvait dans la moiteur des salles un verre à la main semble bien loin, espérons qu’il revienne vite.
Prends soin de toi A bientôt, Cyril
Photo : Benoit Grimalt, 2013.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Il faudra prendre notre mal en patience pendant encore un certain temps.”
Philippe fait partie de la fraction la plus radicale des écumeurs : ceux qui se battent bec et ongles pour être au premier rang. Dans l’interview que j’avais réalisé de lui en 2013, il m’avait expliqué qu’il avait besoin d’être en immersion totale, exactement comme quand il va au cinéma. Depuis cette interview, Philippe a pris sa retraite. Mais il ne s’attendait pas, au niveau de ses loisirs, à se retrouver au chômage technique.
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Bonjour Philippe,
depuis le 1er janvier je suis en retraite donc comme tu peux le penser ma vie a bien changé....après plus de 32 ans à l'APHP.
Sinon pour ce qui est des concerts, ma dernière grande salle remonte au 26 février 2020 avec Tenacious D, avec une jauge encore autorisée à plus de 5.000 spectateurs. Quelques jours plus tard, il fallait descendre en dessous de  5.000, avant de plus drastiques restrictions... Après, deux événements en mars : le 10 Kim Gordon et le 11, dans un autre registre, la "journée nationale en hommage aux victimes du terrorisme" en présence du Président de la République et du Roi d'Espagne, avec distanciation mais pas encore de port du masque (ne pas avoir de fièvre non plus...) 
Après, un été avec quelques expos : Turner au Musée Jacquemart-André, le Musée Rodin, la Fondation Giacometti, en octobre le Musée Guimet pour l'expo "Fuji pays de neige", beaucoup de cinéma avec, la dernière semaine d'ouverture des salles, "Garçon Chiffon", "Drunk" et "Adieu les Cons". Et la dernière pièce de théâtre à laquelle j'ai pu assister : "Le dernier jour du jeûne" au Théâtre de Paris le samedi 24 octobre à 16h30.
Mon dernier concert après deux reports : Brigitte Fontaine à L'Olympia le 06 septembre avec masque, un fauteuil de libre de chaque côté de ta place, pas de spectateurs debout etc.
Voilà un petit témoignage de cette époque pas si lointaine....
Il faudra prendre notre mal en patience pendant encore un certain temps pour retrouver des sorties au cinéma, théâtre, et en concert.
j'espère que pour toi tout va bien,
Philippe
Photo : Benoit Grimalt, 2013.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Ma seule carte d'abonnement à une salle de concert a pris la poussière toute l'année dans mon portefeuille.”
C’est par l’interview de Jean-Marie et de son frère François que j’avais, en juin 2017, clôturé cette série de portraits. La rencontre n’avait pas manqué de sel puisque les deux frères, que trois ans séparent, n’avaient pas du tout le même rapport à la scène. Jean-Marie a été très actif depuis puisqu’on lui doit, aux éditions Le mot et le reste, plusieurs ouvrages de référence dont “Smile, la symphonie inachevée des Beach Boys” et “Ground Zero, une histoire musicale du 11 septembre”.
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Hello Philippe, j'espère que tu va bien. Désolé, j'ai un peu traîné à te répondre. C'est sympa de prendre des nouvelles de "tes" écumeurs” en tout cas.
Ça me fait penser avec amusement (il en faut bien un peu en ce moment) que dans ta série j'étais l'exception, le non-écumeur, celui qui avait une consommation de concerts horriblement raisonnée mettant en relief celle des autres. Cela ne m'empêche pas, comme tous ces autres j'imagine, de conserver un souvenir précis de mon dernier concert, très bon d'ailleurs : Sleater-Kinney, que je voyais pour la première fois, au Trianon, le 24 février 2020. En compagnie de mon frère, le vrai écumeur de la fratrie, dont tu avais aussi tiré le portrait. Après l'annulation des festivals d'été, dont le seul auquel je vais très régulièrement car c'est ma région (la Route du rock), je n'ai pas voulu retourner en concert l'automne dernier avec la contrainte des masques et de la distanciation sociale à respecter : autant j'étais prêt à faire des concessions pour retourner dans les salles de cinéma (l'expérience artistique collective la plus importante pour moi, bien plus que le concert), autant pour les concerts j'ai envie d'y regoûter "comme avant", dans des petites salles ou des bars. À part ça, ma seule carte d'abonnement à une salle de concert a pris la poussière toute l'année dans mon portefeuille : c'est d'autant plus dommage que cela m'aurait fourni une expérience nouvelle puisque c'était celle de l'Opéra de Paris, où je n'ai jamais mis les pieds en quinze ans à (pas plus qu'à l'opéra tout court d'ailleurs avant d'aller voir "Les Noces de Figaro" mis en scène par James Gray fin 2019, œuvre pour laquelle mon amour de néophyte avait suscité l'étonnement amusé de camarades popeux).
J'ai longtemps considéré le concert comme une expérience de second rang vis-à-vis du disque studio : je trouvais que les morceaux étaient forcément moins bien, il fallait piétiner pendant des plombes plutôt que rêvasser dans son fauteuil puis enchaîner tous les passages obligés ("Bonsoir Paris!" ou le petit jeu du rappel systématique), et pour les grands masos, il était possible ensuite de se farcir un "live report" dans la presse voire un disque live. La pandémie n'a pas totalement inversé ma perspective mais m'a permis de prendre conscience du sentiment de manque que je ressen(tirai)s à ne plus aller en concert. Et de l'importance que j'y accorde, si ce n'est dans la découverte de nouveaux groupes, du moins dans l'affection accrue que je peux porter à ceux dont je viens de découvrir les disques et que je "rencontre" sur scène. Écrivant assez peu sur la musique dans la presse en ce moment, et mes projets d'écriture au plus long cours tournant plutôt autour de "vieux" groupes, j'écoute quasi-exclusivement des oldies ces temps-ci. Pas de concerts en 2021, peu de nouveautés de 2021. Et pas une envie folle d'en écouter plus, même si c'est sans doute injuste, car le cycle teasing-single-clip-deuxième-single-album paraît bien étrange en ces temps confinés et reconfinés, qui nous privent du plaisir de la discussion en chair et en os autour des groupes, en concert ou en ailleurs. Je le sais, cette envie reviendra en même temps que les concerts, même si j'attends encore de voir si et quand ils redeviendront comme avant. D'autant que s'ajoute l'écueil du Brexit : début 2019, alors que l'idée d'une pandémie mondiale nous paraissait bien lointaine, j'étais allé à Londres interviewer des musiciens britanniques pour un dossier de "Magic" sur le sujet, et je me souviens notamment de Luke Haines me racontant les astuces que les groupes utilisaient dans les années 1980 pour voyager sans encombres, avant Schengen...
Une phrase de "Sur le rock" de François Gorin sur l'écoute et l'écriture comme activités solitaires, confinées, m'avait marqué quand j'ai lu le livre, et je l'ai interrogé dessus quand j'ai eu la chance de l'interviewer en juin dernier: "La chambre devient aussi un refuge : le critique absolu ne la quitterait pas. Il serait invivable, et il n'existe pas". Je pense qu'après y avoir "goûté", on peut tous le confirmer aujourd'hui : oui, il serait bien invivable !
Photo : Benoit Grimalt, 2017.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Quarante ans à parler et à boire sans interruption, mon corps demandait un break.”
Didier est paradoxalement le seul écumeur que je n’ai jamais rencontré : c’est Benoit Grimalt, le photographe qui a accompagné cette série, qui a pris l’initiative de réaliser son portrait. Musicien, DJ, chineur, Didier ne manquait pas de titres de gloire pour figurer dans cette rubrique : il est aussi l’éditeur du fanzine “ZÉRO, la revue internationale”, dont les chroniques ont fait l’objet d’une compilation en trois volumes. Comme il le prouve dans le texte qu’il m’a fait parvenir, le confinement n’a pas asséché sa plume. 
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Eh bien ça va, ça va très bien même. Ca irait encore mieux si Pôle Emploi n’avait pas profité de la situation actuelle pour me virer de chez lui, après pourtant des années de cohabitation pacifique, sinon de grand amour. Le RSA m’a heureusement, dans sa grande mansuétude, ouvert grand les bras, donc je ne me plains pas trop de ma situation, côté cœur. Ça va. Ça va d’autant plus que j’ai la chance d’être niçois, plutôt une malédiction en temps normal mais une véritable bénédiction en ces temps de Covid, confinement et couvre-feu. Pour d’autres, habitués à une vie culturelle intense, des concerts tous les weekends et même en semaine, des programmations pointues dans des cinés d’Art et Essai, une vie artistique bouillonnante dans des friches culturelles ou dans des lieux associatifs, pour eux, donc, le passage, du jour au lendemain, sans transition, à une activité nulle, à un encéphalogramme plat, à des rideaux baissés et une ville morte, a dû être terrible, un véritable choc, un traumatisme. Ici, à Nice et sur la Côte d’Azur, cet encéphalogramme plat est notre quotidien. Depuis des années. Depuis toujours, doit-il même sembler aux plus jeunes et aux plus amnésiques d’entre nous. Du coup là, honnêtement, au niveau culturel, si je n’étais pas au courant de cette mise en sommeil de toute activité depuis un an, je ne me serais même pas aperçu du changement. Zéro concerts de groupes venus d’ailleurs en 2020 ? Combien y en avait-il eu en 2019 ? Un ? Ah, j’avais dû cligner des yeux et le rater… Et la cinémathèque ? Toujours prompte à réagir pour nous proposer un cycle Gérard Oury ou Claude Zidi à la mort de ceux-ci, elle ne passe sinon que des films de patrimoine que j’avais déjà vus dix fois au ciné-club de FR3 avant l’âge de douze ans, et semble n’avoir pour finalité réelle que d’abriter les seniors qui viennent y sommeiller l’après-midi, les bans niçois étant peu confortables (pour que les SDF ne les squattent pas). Ceux qui font mine de se désespérer de sa fermeture actuelle n’y ont probablement jamais mis les pieds. Les cinémas ? Avec le choix entre le Pathé 1, le Pathé 2 et le Pathé Lingostière, mieux vaut aimer le pop corn… Le MAMAC ? Avec une bonne expo tous les dix ans, encore huit années de confinement avant que l’on s’aperçoive qu’il avait fermé… Au niveau culturel, donc, je dirais que ça va. Bien sûr, en tant que DJ, les soirées mix me manquent - un peu -, mais je peux toujours écouter mes disques chez moi, ce qui ne change pas tant les choses que ça vu que j’ai souvent cette impression quelque peu embarrassante que, à part une – petite - poignée d’amateurs et d’amatrices, la plupart de ceux qui fréquentent ces bars de nuit danseraient tout aussi bien sur France-Info passé à fort volume tant que le mauvais rhum et la coke frelatée coulent à flots. Et plus globalement d’ailleurs, au niveau des bars – car soyons honnête, on parle culture, fermeture des librairies, mort du théâtre ou de la danse, malaise étudiant et compagnie mais la seule chose qui manque vraiment à la plupart des gens (dans mes connaissances en tous cas), ce sont les bars -, je m’accommode très bien de ces fermetures obligatoires. J’irais même jusqu’à dire qu’elles tombent bien – pour moi. J’ai éprouvé il y a un peu plus d’un an, alors que je discutais, comme à mon habitude, debout, un verre à la main, dans un bar,  une sensation soudaine, un peu vertigineuse, de déjà vu. Plus que ça même, beaucoup plus, carrément une impression troublante d’avoir été exactement au même endroit, dans la même situation, un verre à la main, avec de la musique à fort volume, entouré plus ou moins des mêmes personnes, à l’âge de seize ans, et de n’avoir depuis jamais cessé de discuter tout en buvant, pendant quarante ans, continuellement, inlassablement, trinquer, discuter. Quarante ans à parler et à boire sans interruption, mon corps demandait un break. Mes cordes vocales aussi. Sans parler de mon foie. Après quatre décennies de fréquentation quotidienne, comme dans un vieux couple, comme Pôle Emploi dut l’éprouver envers moi, je commençais à ressentir une légère lassitude. Cette trêve providentiellement arrivée en mars dernier fut donc la bienvenue, et si cet entracte est appelé à durer, parfait. J’arrive de toute façon à un âge où le tilleul menthe est plus conseillé que le TGV (Tequila/Gin/Vodka) et où, même si j’adore les discussions sans fin, le débat « Stones ou Beatles ? » commence à légèrement me lasser (d’autant plus que je connais la réponse 1). La fermeture des bars, mesure la plus difficile qu’un gouvernement français ait eu à prendre depuis la décision de collaborer - ou pas - avec les Allemands, cette fermeture donc, j’irais presque jusqu’à dire – très égoïstement - qu’elle m’arrange. Mon chat est content que je reste à la maison, ma copine aussi, je lis trois ou quatre livres par semaine, j’en ai écrit un et bien commencé un autre, j’ai même rangé mes 45 tours et il me reste encore à faire ce portrait en canevas d’Elvis Presley et à trouver un emplacement idoine pour ma petite collection d’assiettes représentant des personnalités (Staline, Mao, Nixon, De Gaulle et sa femme Yvonne, le Pape Jean XXIII et Elvis, bien sûr), c’est bien simple, je n’ai pas une seconde à moi. L’avenir s’annonce donc radieux, et si le Minimum Vieillesse continue à augmenter je ne serais peut-être même pas obligé de vendre un rein ou mes disques des Troggs pour assurer mes dernières années. Bref, pour répondre à ta question en deux mots, ça va, ça va même très bien.
1. Stones
Photo : Benoit Grimalt, 2017.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Tous ces concerts annulés en sont maintenant à leur deuxième voire troisième report…”
Au mois de mai l’an dernier, Paul m’avait envoyé une photo des billets des concerts auxquels il avait prévu d’assister et qui se sont retrouvés annulés : Morrissey à la salle Pleyel (mars), Joe Satriani à l’Olympia (juin), Iron Maiden à l’Arena de Nanterre (juillet) et Hollywood Vampires à l’Olympia (août). Est-ce qu’un souvenir annulé, c’est un souvenir quand même ? J’avais fait la rencontre de Paul en 2015 : nous sortions de deux concerts différents, mais nos pas s’étaient tous les deux tournés en direction du PMU situé à l’angle du boulevard de Rochechouart de la rue des Martyrs, étape incontournable des écumeurs qui ont soif.
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Et bien CA VA BIEN !
Je n’ai pour ainsi dire jamais aussi peu travaillé depuis vingt-quatre ans ! Je suis un privilégié. Mon secteur bien que très touché par cette crise est fortement aidé. Première conséquence, le télétravail. Télétravail = maison = musique ! Pas de problème ici pour écouter de la musique toute la journée, en particulier cette délicieuse compagne qu’est le heavy metal (difficilement écoutable au bureau vous en conviendrez). Donc, blague à part, c’est un plaisir que de pouvoir écouter autant de musique, d’explorer des styles jusque là inconnus, le cool Jazz West Coast des années 60 par exemple. L’époque aussi permet un accès incomparable à la musique et à la découverte. Merci les plateformes de streaming, il faut bien le dire. Un plaisir de redécouvrir des disques peu écoutés depuis l’adolescence aussi. Mais, comme je le disais, le travail manque (un peu), alors la lecture et les films, ça y va. Lecture en musique bien sûr.
Et bien CA VA (TRES) MAL) ! Evidemment tous les concerts auxquels je devais me rendre sont annulés. Avec eux disparaissent les sorties entre amis déjà bien réprimées par ailleurs, l’esprit de fête, l’excitation du levé de rideau, les restos-débriefs d’après concert etc. Bref, les concerts, ce n’est pas juste des concerts point-barre, c’est un tout. Pour employer une expression galvaudée, une “expérience totale”. Tous ces concerts annulés en sont maintenant à leur deuxième voire troisième report… Bien m’a pris de doubler mes deux derniers concerts. En octobre 2019 j’allais à Londres voir The Cult dans une salle de taille moyenne. Quelques jours avant ce concert, une date supplémentaire a été annoncée pour la veille dans un club. J’ai eu la chance d’avoir des places et donc d’assister à deux concerts à la suite de ce groupe chéri. En décembre 2019, j’ai assisté au concert de The Darkness à Paris. Comme toujours génial. J’ai donc doublé avec leur concert de février 2020 à Lyon. Et là, c’était bel et bien le dernier. Alors oui, j’ai vu ensuite The Darkness (respect) en concert en streaming ainsi que The Hives qui proposait à cette occasion un vrai ticket à l’ancienne en PDF à imprimer (respect pour ma collec !).
Voilà, je ne pensais pas que ça me manquerait autant et de plus en plus. Et j’ai peur que certains groupes/artistes ne se produisent plus en live. Ils vont avoir pris deux ou trois ans dans la face. Et pour Steven Tyler, c’est pas rien quand même !
Photo : Benoit Grimalt, 2015.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“La seule chose qui ne manque pas, c'est la musique.”
Un an après avoir interviewé Manu pour cette série de portraits, j’ai eu la chance de me retrouver face à lui près de huit heures par jour, cinq jours sur sept, et ce pendant près de deux ans. Autant dire que j’ai eu l’occasion d’approfondir les sillons qui s’étaient dessinés lors de notre rencontre. Régulièrement, je l’ai vu partir tel un missionnaire sac sur le dos avec la satisfaction de celui qui sait qu’un pass photo l’attend à l’entrée. Car Manu fait partie d’une société secrète au sein des Ecumeurs : les photographes de concerts. 
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Mon cher Philippe, Merci de prendre de mes nouvelles. Quand on a la chance d'avoir la santé, un travail, de la famille et des amis, ça ne peut qu'aller "bien" si on doit répondre en une phrase. Si je devais développer, je dirais que ça va "plutôt bien", en expliquant qu'une partie importante de mon équilibre me manque...(suspense) ...les concerts et la photo ! Mais aussi la vie sociale qui en découle, mes potes de concerts et mes potes photographes...Certaines sensations physiques me font défaut aussi :  l'attente, parfois dans le froid, l'odeur des salles, la chaleur qui revient petit à petit, parfois trop, le contact physique, le bruit des gens... Ne serait-ce que le "check-check-1-2"  lors d’une balance, un coup de batterie inattendu qui surprend, la lumière qui s'éteint, le bruit, l'acclamation, les 10-15 minutes pour shooter, la transpiration, le gars de la sécu qui ne sait pas compter jusqu'à trois, mais qui est super sympa quand on lui explique, les attachés de presse, les gens de la salle... Bref, tout ce qui faisait cette vie du soir. Vivement qu'on la retrouve, ça finira bien par revenir. Au final, la seule chose qui ne manque pas, c'est la musique. Par chance elle est partout avec moi quand j'en ai envie.   Soyons patients.
Photo : Benoit Grimalt, 2016.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“L’idée de prendre un billet d’Eurostar pour aller voir un de mes groupes préférés à Londres m’apparaît aujourd’hui comme de la science-fiction.”
En retrouvant cette photo inédite de Benoit Grimalt pour illustrer le texte que Vincent m’a envoyé, je me suis interrogé sur ce paradoxe : en Ile-de-France, les brocantes sont autorisées, mais pas les vide-greniers. En quoi ces derniers sont-ils moins essentiels que les premiers ? Comment Vincent va t-il faire désormais pour être à l’heure à ses rendez-vous ? J’avais rencontré l’intéressé en 2013.
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Salut Philippe, c’est gentil de prendre des nouvelles. Ça va comme ça peut, disons. Se lever chaque matin de semaine en se disant que la seule sortie sera pour aller chez Picard ou à la boulangerie (je télétravaille la journée) n’est pas très réjouissant. Reste le week-end pour prendre l’air, à défaut d’activités culturelles… J’ai quand même conscience d’être beaucoup moins à plaindre qu’un restaurateur, patron de bar ou de club qui a ouvert son établissement début 2020. Qu’un étudiant. Ou qu’un de mes amis qui travaille dans le secteur de la musique, artiste, programmateur, technicien, etc., contraint à l’inactivité forcée et sans grande visibilité sur les mois qui viennent. Mon quotidien a radicalement changé, bien sûr. Moi qui allais à des concerts ou au cinéma plusieurs soirs de la semaine, je me retrouve seul chez moi. J’ai heureusement un logement nettement plus spacieux que celui que j’occupais à l’époque où tu m’avais interviewé. J’ai enfin le temps de regarder des films et des émissions à la télé, des séries sur mon ordinateur, d’écouter mes disques… Je passe un peu plus de temps dans ma cuisine. Je suis plus disponible pour le site POPnews où je continue d’écrire, en plus de quelques interviews pour la revue “Persona”. J’espère quand même ne pas trop prendre goût à cette existence casanière (qui a ses bons côtés) et retrouver l’envie de sortir quand ce sera de nouveau possible. Je reste en contact via les réseaux sociaux, ou le téléphone pour quelques-uns, avec les « écumeurs » que je croisais pour la plupart au moins une fois par semaine, il y en a même que je vois en vrai de temps en temps, mais cette camaraderie et l’ambiance des petites salles me manquent, évidemment. Un ami me disait d’ailleurs que ce qu’il regrettait le plus, c’était les concerts en appartement ou en maison (avec de toutes petites jauges, mais beaucoup de sociabilité, ce qui les rend donc totalement inenvisageables pour le moment), et je crois que c’est la même chose pour moi. J’ai pu retourner à Petit Bain et au Trabendo cet été puisqu’ils avaient la possibilité de faire du live en plein air mais cela fait un an, ou presque, que je n’ai pas mis les pieds au Café de la danse, à la Maroquinerie ou au Pop-Up du Label (il m’a même fallu plusieurs minutes pour retrouver le nom de cette salle). L’idée de prendre un billet d’Eurostar pour aller voir un de mes groupes préférés à Londres, quelque chose qui me semblait presque banal il y a encore deux ans, m’apparaît aujourd’hui comme de la science-fiction. Tout cela me semble irréel… L’été 2020 sans mes repères (Beauregard, Route du rock, Rock en Seine) m’a paru bien long. J'ai juste fait une journée du presque intimiste Rock in the Barn, dans l'Eure. Par curiosité et parce qu’il y avait quelques artistes que je voulais voir, je suis aussi allé à la soirée de France Télé au domaine de Saint-Cloud, qui « remplaçait » Rock en Seine : c’était quand même tristouille, une sorte de “Taratata” outdoor. Vu les restrictions, ça me semble malheureusement bien parti pour que l'été 2021 soit à peu près pareil. Même avec de la bonne musique, difficile d'imaginer un festival avec 5000 personnes assises, sans ambiance, sans liberté d’action et de mouvement. Après, si cette situation oblige à abandonner le modèle du méga-rassemblement avec des dizaines de milliers de spectateurs et des billets hors de prix, ça ne sera pas forcément une mauvaise chose. Mais bon, personne n’a non plus envie d’aller voir uniquement des petits groupes, aussi doués soient-ils, qui joueront en acoustique devant 50 personnes assises… Qui sait, Philippe, on pourra peut-être se croiser à un concert (ou une « expérimentation dans le respect des gestes barrières ») dans les mois qui viennent. N’oublie pas ton billet (qui sera de toute façon stocké dans ton téléphone) et surtout, ton certificat de vaccination. Bises avec le coude.
PS – Depuis la parution de l’interview, il y a plus de sept ans, j’ai vu sur scène les Feelies (trois fois), Kraftwerk (deux fois), The House of Love (une fois), The Chills (deux fois) dont j’ai d’ailleurs reçu le nouvel album aujourd’hui, et Certain General (une fois). Mais toujours pas Tom Waits, les Pogues, les Stones, Macca et Dylan, malheureusement.
Photo : Benoit Grimalt, 2013.
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Cette année 2020 fut surtout pour moi une grande période de découvertes - sous un autre angle”.
La dernière fois que j’ai eu la chance de croiser Vincent Moon, c’était il y a un peu plus d’un an - il présentait, en compagnie de Priscilla Telmon, une série de films autour de la transe et du chamanisme dans le cadre d’une carte blanche à Ground Zéro. Depuis, comme vous allez le découvrir, ce couple de globe-trotteurs n’a pas chômé. Ils sont notamment les auteurs d’une série de films réalisés dans le cadre du printemps des Poètes et à découvrir sur le site internet de Télérama.
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Cette année 2020 fut surtout pour moi une grande période de découvertes - sous un autre angle. L'angle mort, celui où la zone de contrôle ne s'étend pas, l'angle furtif où la techno-sauce ne prend plus, l'angle en nature en lequel bourgeonne des aspirations soniques radicales associées à des pensées cosmiques et libres. D'un morceau de Bégayer au sommet d'une montagne au piano d'Olafur Arnalds dans un champ islandais, de San Salvador au cœur d'un château bourguignon entouré d'une ronde déchainée à l'Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp dans une zone autonome bordant Genève, des rythmiques sacrées de Stella Chiweshe en une forêt allemande à la voix de Hatis Noit emplissant une chapelle autrichienne, cette année fut parmi les plus belles de ma vie d'amoureux de musiques. Il est vrai que j'ai eu la chance de les mettre en scène, souvent, ces moments de musiques, avec l'aide d'amis joyeux. Mais est-ce que la vie elle-même n'est pas mise en scène permanente et discrète de nos éclats poétiques, au-delà des demandes bruyantes de l'office des peurs ?
Photo : Benoit Grimalt, 2014. 
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lesecumeurs · 4 years ago
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“Paris sans la culture, sans ses terrasses de café, sans ses vide-greniers a très peu d’intérêt et surtout beaucoup de défauts”.
Pascal est le premier écumeur à avoir répondu à mon appel. Grand amateur de pulsations métronomiques, danseur infatigable et chineur impénitent, Pascal est un garçon que je croise d’ordinaire au moins une fois par semaine. Je l’ai interviewé en mars 2013. 
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Ça ne va pas fort. Une des raisons qui me rattachent à Paris est la possibilité de voir pleins de concerts. A cause de la pandémie mondiale, depuis le 15 mars 2020, il n’y a plus rien. Pendant l’éclaircie de septembre, je n’ai pas pu en profiter, car j’étais à l’hôpital (Attention, ma maladie n’est pas liée au Covid-19). Ainsi j’ai raté le groupe Wax Machine (dont l’album Earthsong of Silence est à écouter au plus vite pour les retardataires) le 4 septembre à la terrasse du Trabendo. Paris sans la culture, sans ses terrasses de café, sans ses vide-greniers a très peu d’intérêt et surtout beaucoup de défauts. Le nombre d’habitant est trop dense, la ville est trop crade (il y a des masques qui traînent par terre), il faut faire la queue pour tout. Là pour le coup, le terme du vieux con « c’était mieux avant » est vrai et pas galvaudé. Heureusement qu’avant le 15 mars 2020, j’ai fait le plein de concerts : En janvier j’ai vu Le Villejuif Underground à La Maroquinerie, Ed Dowie au Café de Paris, TAU au Petit Bain, Hand and Leg à l’Espace B, The Spyrals, Big Joanie, U-Bahn au Supersonic, Jowe Head de TVP au Motel, Proper Ornament au Comets Café, Théo Hakola à Walrus, KVB et Rendez-Vous à La Cigale. En février j’ai vu Mick Harvey, Polica, The Mystery Lights, Turnover à La Maroquinerie, The Murder Capital au Café de la Danse, The Raincoats à Beaubourg, Black Doldrums à L’International, Doxa Esta au Zorba. Et en mars j’ai vu The Thurd Sound, Nylex au Zorba  Modern Nature à L’International, Tempers au Supersonic, Julien Gasc et Superbravo au Café de la Danse et pour finir le 12 mars avec The Courettes au Supersonic. Ce duo de rock garage avait tous les ingrédients post-Covid : pas de gestes barrières, slam, transpiration, postillons. Sur mon blog, j’ai écrit une chronique du concert. Grâce à l’ami Cyril, j’ai vu un autre concert en 2020. Il m’appelle le matin du 5 octobre pour me parler d’une flûtiste que je ne connais pas, elle a pour nom Ludivine Issambourg. J’écoute l’album Outlaws avec une magnifique pochette sur Bandcamp et c’est le coup de cœur. Elle a réalisé un album étonnant de jazz groove à la Herbie Hancock/Quincy Jones qui reprend des morceaux du flûtiste américain Hubert Laws. Le concert était le soir même au Pan Piper, du coup je retrouve Cyril devant la salle. On était assis, l’espace est grand, la scène spacieuse et le son magnifique. Soit le confort idéal pour assister à un concert de jazz 70 qui groove entre les oreilles. Depuis cette date je n’ai pas vu d’autres concerts. A l’heure où j’écris ces lignes, j’ai bien peur de ne pas voir le prochain concert d’ici un bout de temps, notamment pour les groupes anglais qui doivent obtenir un visa s’ils jouent dans plus de trois pays européens et si la tournée dépasse trois mois. Et oui, le Brexit a oublié ses artistes anglais ! Vous comprenez maintenant pourquoi ça ne va pas fort. Heureusement, j’ai mon blog et du côté disques, il y a des nouveautés et des belles rééditions pour s’occuper à la maison. Mais rien ne peux remplacer les sorties culturelles, et rock en particulier. Amen. 
Photo : Benoit Grimalt, 2013. 
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lesecumeurs · 4 years ago
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Le mercredi 11 mars 2020, j'ai eu la chance d’être invité au concert de Superbravo au Café de la Danse, et c’est à ce jour le dernier concert où j’ai pu impunément postillonner dans la bière de mon voisin. J’ai profité depuis des rares occasions qui m’ont été offertes d’applaudir des groupes dans leur élément naturel, mais ce n’était plus pareil. C’était comme faire l’amour avec un préservatif : ça protège du danger, mais les sensations ne sont pas les mêmes.  Le mercredi 07 octobre 2020, grâce à la prévoyance d’Yvan, j’ai pu assister au show privé de Fontaines D.C. à la Maison de Radio et j’ai eu la joie de reconnaître derrière leurs masques des visages que je n’avais pas eu l’occasion de croiser depuis plus de six mois : celui des écumeurs de concerts parisiens auxquels j’avais dédié ce blog entre 2013 et 2017. 
Je pense souvent à eux. Comment vivent-ils d’être privés de leur passion ? L’aspect social du concert a régulièrement été souligné dans les entretiens que j’ai pu mener. Je me souviens aussi que la musique amplifiée est un des meilleurs remèdes contre la mélancolie. A l’occasion du premier anniversaire du concert de Superbravo au Café de la Danse, j’ai décidé de retourner vers eux. Je leur ai tous envoyé un mail, en leur proposant de répondre à une seule question : “Comment ça va ?”
Je publierai à partir de la semaine prochaine leurs témoignages. 
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lesecumeurs · 8 years ago
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Écumeurs #33 et #34 : François et Jean-Marie
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Je termine aujourd’hui ma série “Les Écumeurs”. Sur le modèle de mes groupes préférés, j’ai décidé de me séparer. Pour me reformer dans une dizaine d’années, avec pour objectif de jouer en tête d’affiche à Rock en Seine. Si possible le samedi soir. 
Jean-Marie m’a dit un jour : “ Tu devrais interroger mon frère, c’est un véritable écumeur”. Et si je les interrogeais tous les deux ? Je n’avais jamais rencontré de fratrie jusqu’ici. “Ah non, moi les concerts, je déteste ça”. Jean-Marie venait de m'offrir l’angle de l’interview : “L’un écume, l’autre pas” 
Jean-Marie : Nos parents sont tous les deux profs. Ils nous ont plus orientés vers les livres que vers les disques. La musique, on n’en écoutait qu’en voiture. François : C’est tardivement que j’ai eu l’occasion d’aller fouiller parmi leur collection de vinyles : Brassens, Brel, Piaf, Montand, Mouloudji mais aussi la bande originale de Saturday Night Fever ou “Born To Be Alive”... Je me souviens qu’ils avaient aussi le 45 tours original de “Michelle” des Beatles, avec les crédits en français au dos. Une de mes grandes frustrations, c’est de ne jamais pu avoir toucher la guitare de mon père, un Fender qu’il s’était faite prêter. Il possédait aussi une vieille classique achetée pendant sa jeunesse, qu'il ne voulait déjà pas que je touche, et que j’ai fini par récupérer à son décès. Elle était malheureusement inutilisable. JM : J’ai eu une révélation tardive pour la musique, autour de dix-huit ans. J’ai fait mon éducation essentiellement par le biais de la presse : c’est grâce à elle que je suis remonté aux sources de la musique que j’écoutais et j’ai découvert les fondamentaux comme The Queen Is Dead, Closer... Par exemple avec une liste qu'avaient dressés les lecteurs des Inrocks, en 1999, de vingt-cinq classiques à posséder absolument. Je passais mon temps à graver des Cd.  F : J’ai trois ans de différence par rapport à Jean-Marie. Je dois reconnaître qu’adolescent, j’ai traversé une période eurodance (rires). Les premiers groupes qui m’ont marqué, ce sont ceux que j’ai connus en faisant des échanges : Jeff Buckley, Grant Lee Buffalo, Radiohead, Noir Désir, U2. Le tout premier disque que j'ai vraiment acheté avec mon argent, c'était Americana de Offspring JM : J’ai eu accès à internet à l’âge de 18 ans. Napster, Audiogalaxy, Soulseek... Ça a changé ma vie. Quand j’ai commencé à bosser, je vivais encore chez mes parents. Je n’avais aucun complexe à passer la plus grande partie de mon argent de poche en achat de disques. Le téléchargement illégal a vraiment stimulé chez moi l’achat de disques, là où aujourd'hui j'en achète un peu moins avec le streaming payant, et essentiellement des vinyles. F : Je dois beaucoup à Jean-Marie : Pulp, Pavement... A partir du moment où j’ai eu internet, j’ai beaucoup traîné sur les forums : la Lenoir Liste, Sound of Violence... J’avais 15 ans en 2000. Je me suis pris le deuxième album de White Stripes en plein dans la figure. C’est un groupe qui demeure très important pour moi car il m’a ouvert énormément de portes : du blues du delta aux Rolling Stones, en passant par Led Zeppelin... C’est aussi un groupe qui correspond à la période où j’ai commencé à apprendre la guitare. Je téléchargeais des partitions, j’ai rapidement été capable de jouer leurs morceaux.  JM : Notre oncle a aussi eu un rôle dans mon éducation musicale puisqu’il a joué un rôle de passeur entre sa génération et la mienne. Je ne serai peut-être pas le même fan de musique s’il ne m’avait pas prêté un jour son exemplaire de London Calling. 
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Jean-Marie, tu as publié il y a deux ans au Mot et le Reste un ouvrage consacré au rock indépendant britannique, Indie Pop 1979-1997. Comment expliques-tu ta passion pour cette scène ?  JM : Je suis inapte techniquement parlant à jouer de la musique. La virtuosité ne m’a jamais bouleversé, ce qui explique sans doute que je me sois spontanément tourné vers la scène indépendante. J’ai beaucoup lu Les Inrockuptibles entre 1999 et 2004, c’était une période faste pour le rock anglais : The Libertines, The Coral... L’après-brit pop.  F : J’étais trop jeune pour que la brit pop me parle. JM avait acheté le troisième album d’Oasis, mais ça n’avait pas éveillé de vocation chez moi. Paradoxalement, je suis devenu très fan de Supergrass par la suite, alors que le groupe était sur sa fin.  JM : Ma seule concession à la virtuosité, c’est Radiohead - parce que ce n’est jamais tape à l’oeil. C’est un groupe pour lequel je me suis vraiment passionné avec la sortie de Kid A,même si je m'en suis éloigné depuis une petite dizaine d'années
Quels sont les premiers concerts à vous avoir marqués ?  François : Le tout premier, ça a été Noir Désir, fin 2002, à la sortie de ce qui allait devenir leur dernier album. J’y étais allé avec des camarades de lycée. J’avais vraiment fait du prosélytisme pour qu’on soit nombreux. Et pendant le premier pogo sur “Tostaky”, j’ai cru que j’allais mourir (rires). Noir Désir, c’est un groupe qui restera associé à ma sortie de l’adolescence. Il résume bien l’état d’esprit dans lequel j’étais. C’est peut-être le premier groupe pour lequel je me suis pris de passion au point d’échanger des bootlegs. J’avais celui du concert auquel j’avais assisté à Rennes, un double CD-R (rires)  Jean-Marie : Mon premier concert, c’était un festival. L’édition 2001 des Vieilles Charrues. Ben Harper, Manu Chao, Les Têtes Raides et bien sûr Noir Désir. Un cru alter-mondialiste (rires). J’en garde plus le souvenir d’une expérience sociale que musicale : dormir au camping, vivre au milieu de 70.000 personnes... 
Jean-Marie, à quel époque as-tu commencé à écrire sur la musique ?  Jean-Marie : En 2005, j’étais dans la même promotion que Vincent Glad à l’École de journalisme de Lille. On a démarré un blog à deux - un “mp3 blog” comme on disait à l’époque - “Interprétations diverses”. On essayait de dénicher de nouveaux groupes indé. Je sortais de Sciences-Po Rennes et j’avais déjà publié quelques chroniques dans des canards étudiants, comme celle de Sad Songs for Dirty Lovers de The National, que j'avais découvert grâce à une chronique parue dans Chronic’art. Mais je n’ai jamais eu la vocation de devenir un journaliste musical. Je savais que la condition de journaliste était déjà précaire, alors journaliste musical… Et j'aime écrire sur plusieurs sujets à la fois ou sur plusieurs sujets en même temps, et pas seulement sur la musique. Aujourd’hui, j’ai parfois l’occasion d’écrire sur la musique dans le cadre de mon activité salariée à Slate.fr, c’est déjà une chance. J’essaie de trouver des angles qui peuvent intéresser les lecteurs de Slate.fr, comme quand j’ai rencontré, juste avant la présidentielle américaine, Kurt Wagner de Lambchop, dont l’épouse est présidente du parti démocrate dans le Tennessee. François : Jean-Marie m’avait pistonné à Ouest-France. J’ai écrit pendant six ans dans les pages “sports”, tout en continuant en parallèle mes études d’informatique. J’ai vécu un peu plus de six mois à Montréal, et j’avais l’intention d’y retourner bosser, mais le plan est tombé à l’eau. Aujourd’hui, je collabore à Slate.fr et à La Blogothèque. Mais j’ai du mal à dégager du temps pour écrire. Je prépare beaucoup. J’ai du peaufiner mon interview de Joanna Newsom pendant trois semaines, tout ça pour au final passer quinze minutes avec elle (rires). 
Vos premiers concerts ensemble ?  Jean-Marie : Franz Ferdinand à l’Ubu, à Rennes, avec The Fiery Furnaces en première partie. The Coral, avec The Zutons en première partie.  François : Supergrass et R.E.M. aux Vieilles Charrues. La Route du rock en 2004, avec cet inoubliable concert de Blonde Redhead sous la pluie. 
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François, si ce n’est pas par le biais de ton frère, comment as-tu attrapé le virus des concerts ?  François : Quand j’étais à Rennes, mon meilleur ami était un dingue de concerts. On se motivait mutuellement pour sortir. A force de traîner à l’Ubu, on s’st retrouvé dans d’interminables discussions d’après-concert avec Jean-Louis Brossard des Transmusicales. C’est lui qui nous inoculé le virus. Peu après, je me suis retrouvé à faire du bénévolat pour les Trans.  Jean-Marie : J’adore aller à des concerts, mais je suis difficile capable comme François d'en voir trois par semaine. L’aspect social est pour moi aussi important que l’aspect musical : contrairement à François, je serai incapable d’y aller seul. Et je dois reconnaître que l’expérience ne m’a jamais laissé sur un sentiment de plénitude comparable à celui que m’apporte l’écoute du disque à domicile. Je suis vraiment admiratif du travail que les musiciens peuvent effectuer en studio. Et je ne crois pas être jamais sorti d’un concert en me disant que c’était encore mieux sur le disque. J’ai aussi un côté mauvais coucheur : je déteste les spectateurs qui tapent dans leurs mains. Les rappels me gonflent... Et je suis très cinéma. J’accorde une importance primordiale à l’expérience du films en salle, le noir, le silence... Je suis sorti par exemple les jambes coupées du dernier Miyasaki, Le vent se lève. Un concert ne m’avait jamais fait ça. J’ai aussi du mal avec les grosses salles. La proximité, c’est primordial. La durée du concert, ça peut vite devenir un problème aussi. Je déteste les groupes qui font durer. Au delà d’une heure vingt, c’est un supplice. Cinquante minutes, c’est largement suffisant. Je déteste les festivals aussi, tu sens le set répété et resservi à l’identique tous les soirs.   François : J’adore le live. J’aime bien regarder le matériel, les mains des musiciens... J’ai tellement vu The National que je peux dire quel morceau le groupe va interpréter rien qu’aux guitares que les musiciens choisissent. C’est à Montréal que j’ai pris l’habitude de sortir seul, vu que je ne connaissais personne quand je suis arrivé. Les deux derniers concerts que j’avais vu avant de quitter Paris, c’était les Fleet Foxes et M.Ward. Le premier artiste que j’ai vu à Montréal était... M.Ward. Et le dernier, les Fleet Foxes. Avec au milieu des expériences très fortes, comme celle d’assister au déclin de Vic Chesnutt en première partie de Jonathan Richman, quelques mois avant sa disparition. Il n’était pas dans un bon jour, le public n’était pas réceptif... J’en garde un souvenir très éprouvant. Comme celui du concert de Daniel Johnston au Bataclan, ou celui de Sixto Rodriguez à la Cigale.  JM : J’ai un vrai problème avec les reformations. J’ai toujours été déçu par des groupes dont je vénérais les disques.  F : Avec une exception : le concert de reformation des Breeders à la Cigale. Je garde aussi un bon souvenir du concert de Pavement au Zenith  - le soir de mes 25 ans, avec The National en première partie - ou de celui de Slowdive à la Route du Rock. JM : Les reformations, quand il n’y a pas de nouveau disque derrière, ça tourne à vide. J’ai eu la chance de voir les Go-Betweens à Tourcoing, à la sortie d’un nouvel album. Ils étaient très dignes parce que l’album était aussi très bon. 
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Des concerts qui manquent à votre palmarès ?  Jean-Marie : Je regrette d'avoir raté Leonard Cohen, Songs : Ohia et Elliott Smith.    François : Gravenhurst. Swans, alors qu’ils ont souvent joué à Paris ces dernières années. Jean-Marie : J’ai le chic pour rater des groupes qui ne sont absolument pas rares, comme Wire. J’ai aussi voulu voir R.E.M. dans un autre cadre qu’un festival.  François : J’ai vu tous les groupes dans lesquels a joué Jack White sauf The White Stripes. J’ai raté David Bowie, Nirvana et Jeff Buckley : j’étais trop jeune à l’époque.  Jean-Marie : J’avais acheté une place pour Brian Wilson mais je n’ai pas pu assister au concert. Ensuite, je n’ai pas de fantasme particulier. Les groupes actuels, j’ai toujours moyen de les voir. Et les groupes sur le retour, j’en ai vu pas mal, mais je ne suis jamais sorti du concert en ayant l’impression d’avoir assisté à un moment historique. 
Mis à part les concerts, des divergences entre vous ?  Jean-Marie : Mon amour de la pop italienne suscite beaucoup d’incompréhension autour de moi. Dans le même registre, j’ai aussi écrit une fois un papier sur Slate.fr pour défendre Duran Duran... François : Joanna Newsom ?  JM : J’y suis revenu, ça va mieux. Par contre, par rapport à François, je ne suis vraiment pas fan de blues. Ce n’est pas mon truc. Sur la nouvelle vague française, il peut nous arriver de diverger. Par contre, on adore tous les deux Alain Souchon.  F : J’ai un plus gros faible que Jean-Marie pour Polnareff et Balavoine. J’ai aussi un amour profond pour Tiersen. Par contre Slate.fr nous avait proposé de couvrir les neuf concerts d’adieu de Fauve et j'ai baissé les bras au bout du premier (rires). 
Des concerts que vous regrettez d’avoir vu ?  JM : Comme je sélectionne énormément, je n’ai pas souvent de mauvaise surprise. The Stoneroses à la Cigale, c’était décevant, mais en grande partie à cause du public.  F : J’aurai préféré voir Vic Chesnutt dans un bon soir.  JM : Pete Doherty à la Cigale. Non seulement le concert n’était pas bon, mais le comédien de stand up en première partie était totalement incongru. Stars à la Flèche d’Or. J’avais détesté ce concert.
Vous êtes vous influencés l’un l’autre ?  JM : J’écoute trop de choses, et pourtant, chaque fin d’année, il y a toujours cinquante disques que je regrette de ne pas avoir pris le temps d’écouter. J’écoute trop vite pour essayer de rattraper cette boulimie de disques en retard. Si mes goûts se sont américanisés, ce n’est pas à cause de mon frère : c’est simplement parce qu’à un moment, les groupes américains m’ont semblé meilleurs. La littérature américaine m’a sorti de mon anglophilie. (A François) C’est par contre toi qui m’a fait découvrir Courtney Barnett. F : Plutôt qu’influencer ses goûts, c’est plutôt à aller voir des concerts que je l’inciterai. Je tiens un Google Agenda avec les concerts à venir. Ça remonte à l’époque où je vivais en colocation et où on me demandait ce qu’il fallait aller voir. J’ai souvent acheté des places de concert pour des copains et j’ai été parfois amené à en revendre - sur Twitter, j’ai la réputation d’être un revendeur de places (rires). L’achat de places de concert reste à ce jour ma principale source de dépenses. 
Quelle est ta fréquence de sorties ?  François : En moyenne, de deux à trois fois par semaine. Parfois plus. Il m’est arrivé de monter jusqu’à quinze concerts en dix-neuf jours.
Vos salles de prédilection ?  Jean-Marie : La Café de la Danse. L’Espace B. La Maroquinerie.  F : Ma grande taille pose problème. Quand je me colle à la scène, je me fais crier dessus. JM : J’aime bien découvrir des salles dans lesquelles je n’ai jamais mis les pieds. Je n’étais jamais allé au New Morning avant le concert de Julia Holter. F : Je ne suis jamais au Flow ni aux trois Baudets. Ce sont les seules parisiennes que je ne connais pas. JM : Une salle peut être aussi liée à un souvenir en particulier, comme celui de Sufjan Stevens à l’Olympia. 
Des salles que vous détestez ? JM : La Grande Halle de la Villette, Le Zenith. F : Le Pop Up du Label, le son est horrible et la scène est trop basse. Je m’y sens physiquement mal. 
François, n’eprouves-tu jamais une lassitude à force d’aller au concert aussi souvent ?  F : Non, l’offre est telle que j’éprouve à chaque fois l’excitation de sortir. Ensuite, la lassitude se situe plus au niveau des groupes que j’ai trop vus. Comme Hot Chip par exemple. J’aurai dû m’arrêter après leur prestation au Pitchfork Festival, dont je garde un grand souvenir. The National est devenu trop gros. Je les ai vus cinq fois sur la dernière tournée. Et que ce soit à Point FMR que comme sur une immense scène, c’est à chaque fois le même set et les mêmes gimmicks. Leurs albums sont moins intéressants, alors réciproquement leurs concerts sont moins intéressants. Mais c’est aussi ma faute : je les ai trop vus.
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Quels sont ceux que tu as vu le plus souvent ?  F : Mis à part The National ? Arcade Fire, Fleet Foxes, Kevin Morby, Angel Olsen. Mais Angel Olsen, je pourrais tout lui pardonner. Je l’ai vue dans un petit bar à Nashville, on devait être une centaine, je suis devenu fan à la vie à la mort ce soir là. Mes amis ont organisé une cagnotte à l’occasion de mes 30 ans pour que j’aille voir Bon Iver à Eaux Claires, sur ses terres. L’ambiance de ce festival est tellement conviviale que les artistes donnent l’impression d’être en vacances - même Sufjan Stevens y participe, lui qui boudait les festivals. J’ai eu l’occasion de revoir Bon Iver depuis mais la magie s’était évanouie. 
Des concerts qui vous ont marqué de manière indélébile ?  F : Le deuxième concert de The National auquel j’ai assisté, à l’Ubu, à Rennes. Le premier, c’était à la Route du rock, quelques mois avant. Un autre grand moment .  JM : Of Montreal à La Cigale, à la sortie de False Priest. The Walkmen à la Route du Rock. Ils fermaient le festival et ils tout donné ce soir-là.  F : J'ai aussi adoré ce concert, mais en tant que fan invétéré du groupe, j'ai préféré leur dernier passage à la Maroquinerie, surtout que je savais qu'ils étaient sur la fin, c'était vraiment intense. JM : The Go-Betweens à Tourcoing, et pas uniquement parce qu’ils n’ont pas fait de rappel (rires).  F : Arcade Fire et Radiohead à Nimes. Bon Iver à Eaux Claires.  JM: Wu Lyf à San Francisco, pour la primeur et la nouveauté. The Coral à Glasgow.  F : Of Montreal à l’Ubu. Je ne les vois qu’une seule fois par album pour ne pas m’en lasser.  JM : On a rédigé un long article avec François sur la dernière tournée en France de The Apartments. Leur concert à la Gaîté Lyrique était très beau. F : Supergrass à la Cigale en 2006, leur concert d’adieu, lors duquel ils ont joué quatre morceaux par album - et six pour le dernier - , dans l’ordre antechronologique. 
Vous conservez vos billets ?  F : Pour toute la période où j’étais à Rennes et à Montréal, j’ai tenu un fichier Excel des concerts que je voyais. Sinon je garde tous les billets dans une boite à chaussures, même les Digitick. Je retombe parfois sur des contre-marques de concerts auxquels je ne me souviens absolument pas être allé. 
Comment consommez-vous la musique aujourd’hui ?  Jean-Marie : Sur vinyle chez moi, sur Spotify à l'extérieur... et aussi parfois chez moi. Je me constitue une énorme playlist d’albums que j’ai envie d’écouter et je range à part ceux qui me plaisent pour me faire une playlist annuelle. Je lis encore un peu la presse musicale, et j'utilise pas mal Twitter ou le blog culturel Largehearted Boy pour me tenir au courant des sorties ou des morceaux que les groupes mettent en téléchargement. François : Je suis les recommandations d’amis sur Twitter. J’écoute des vinyles à domicile. Je dois avoir laissé 400 CD à Rennes. Sinon Spotify, Soundclound, les playlists des copains, le Muzikistan...  Jean-Marie : J’écoute l’émission de Michka Assayas. François :... et je traîne encore parfois sur le forum de Sound of Violence. 
Photos : Benoit “Genoa” Grimalt.
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lesecumeurs · 8 years ago
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Ecumeur #32 : Didier
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Après un long hiatus, je publie les deux derniers portraits de cette série. Le premier a la particularité d’avoir été intégralement réalisé par Benoit Grimalt, qui est mon compère depuis le début dans cette aventure. Benoit a réalisé un de mes projets inassouvis puisqu’il est parti à la rencontre d’un écumeur vivant bien au-delà du périphérique parisien. Il s’appelle Didier, comme l’écumeur avec lequel j’avais commencé cette série en février 2013.
Peut-on être écumeur si l'on n'habite pas Paris ? A son propre rythme, oui. Comme Didier qui habite Nice et que j’ai rencontré par l'intermédiaire de Zéro dont il est l’un des rédacteurs. J'apprends plus tard qu'il est membre des Dum Dum Boys (groupe niçois) et de XYZ (avec Ian Svenonious de The Make-Up / Chain & The Gang) et qu'il faisait partie du duo NON! Didier écume les concerts dans lesquels il joue, mixe ou tient le bar. Il est également écumeur de disques vinyles, directeur et seul employé du label MONO-TONE RECORDS et dj sous le nom de Memphis Mao.
Ton premier concert ? (Didier) J'aimerais répondre les Cramps ou Damo Suzuki mais en vrai c'était AC/DC avec Judas Priest en première partie. Un concert mémorable quand même : c'était avant les normes de sécurité donc vingt personnes au mètre carré, 150 décibels environ, etc... J'en ai gardé un goût pour le volume sonore ultra-fort et les tenues outrageuses. Le chanteur de Judas Priest avait quand même un sacré look (rires). 
Quel age avais-tu ? J'avais quinze ou seize ans. A cet âge aussi bien qu’à cette époque, j’allais tout voir tant que c'était du rock et si possible bruyant, de Ted Nugent aux B-52's en passant par Cheap Trick ou The Stranglers. Assez vite, j'ai laissé tomber le hard rock et le punk bourrin mais ce n’était pas une mauvaise école. Qui d'ailleurs peut se targuer d’avoir commencé à écouter de la musique avec Scott Walker, Lee Hazlewood ou Pharoah Sanders ? 
Ton premier concert marquant ? Dans les premiers très bons concerts vus vers 16 ans, je dirais Motörhead et The Clash puis un peu après, un cran au-dessus, The Cramps, Gun Glub et surtout Alan Vega.
Tu as commencé la musique assez tôt ou est-ce un concert en particulier qui t'as donné envie d'en faire ? Non, avant 18 ans je n'avais jamais touché un instrument de musique. C’est à la fac que j’ai rencontré ceux qui allaient faire partie des Dum Dum Boys. On glandait tellement qu'on s'est dit qu'on devrait faire un groupe et trouver des concerts. On a répété dans une chambre, appris - plus ou moins - les accords de base et on a donné notre premier concert deux ou trois mois après. Ce sont des disques comme ceux des Stooges, du Velvet ou des Seeds et le fait de réaliser que ces chansons que j'adorais étaient très faciles à massacrer qui m'ont donné envie de faire de la musique. Car contrairement à des articles qui décrivaient le punk comme une musique simpliste, les disques des Damned, Pistols ou Buzzcocks me semblaient - et étaient - assez techniques. La chance de voir Tav Falco, Alan Vega, ou Kid Congo - quand il était guitariste de Gun Club - a également joué pour beaucoup. Réaliser qu'ils n'avaient à peu près aucune technique m’a donné confiance. 
Sors-tu des Alpes-Maritimes pour assister à des concerts ? Oui et heureusement, sinon  - sans vouloir être méchant avec la scène locale  - je n'aurais pas vu grand chose de bon (rires). Le hic, c'est qu'à l'est, il y a la Ligurie, pauvre en concerts, et à l'ouest le Var (rires). Du coup il faut aller loin. Mais ça permet aussi de jouer au flipper à des arrêts d'autoroute.
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Grâce au Volume à Nice (Salle que l'on peut comparer à l'Olympic Café, à Paris) j'imagine que tu as vu beaucoup de concerts ? Oui, j'y ai travaillé pas mal d'années : au bar, pour faire les affiches et un peu de programmation, aux entrées... Un peu partout, en fait. Mais comme il y a essentiellement des groupes locaux - encore une fois, je n'ai rien contre les groupes locaux étant donné que je joue moi-même dans un groupe local - et dans tous les styles - ska festif, électro, métal, punk à chiens, etc - au total, ça ne fait pas tant de bons concerts que ça...
As-tu été fan d'un groupe au point de le de suivre sur toutes ses dates? J'ai été fan de groupes au point d'acheter tous leurs disques même quand ils devenaient pas terribles mais ça m'a passé… Et je n'ai jamais suivi un groupe sur de nombreuses dates successives. J’avais eu l’occasion de voir les Cramps à Montpellier le lendemain du concert de Nice et ça m'avait déçu vu que c'était exactement pareil. La seule exception, c’est Chain & the Gang pour une tournée italienne où ils avaient de la place dans le camion. Mais ce n'est pas pareil.
Tu préfères le live ou le disque ? Les deux évidemment. Par contre, je n'aime guère les disques live à part les faux live (celui des Seeds, des John's Children, des Stones époque “Got Live If You Want It !”).
Des faux live ? Des disques enregistrés en studio ou en concert mais sur lesquels toutes les pistes ou presque ont été refaites en studio et auxquels on rajoute ensuite (en général grossièrement) des applaudissements pour les faire passer pour des "vrais" disques live. Dans le John's Children (Le premier groupe de Marc Bolan), ils ont collé les cris de “Hard Day's Night” des Beatles pour faire croire que c'était l'hystérie, alors qu'ils devaient jouer dans de tous petits clubs et que c'était un groupe de série Z. Idem pour le live des Seeds où on dirait qu'il y a un public énorme et délirant alors qu'ils étaient totalement has been à l'époque et que c'est tout enregistré en studio. Ils l'ont même ressorti récemment sans les cris mais c'est moins bien (rires). Même les disques live présentés partout comme des "grands classiques" (Je pense à ”Alive” de Kiss, “Live at Leeds” des Who, “Kick Out The Jams” du MC5...) sont en général très peu live 
Je crois savoir que tu es un fan d'Elvis Presley. J'imagine que ton regret est de ne pas l'avoir vu en concert ? Bien sûr, mais j'ai quand même vu son sosie varois Eryl Prayer à l'Arénas, à Nice, il y a deux ans. Et surtout la tournée virtuelle de 2001 avec des images d'Elvis en concert en 71 sur écran géant, accompagnées par ses musiciens et choristes d'époque qui, eux, jouaient live. Plus post-moderne que Kraftwerk (rires). Un souvenir fabuleux. Et j'ai, en plus, croisé Dick Rivers à cette occasion.
Tu lui as parlé ? Non, malheureusement.
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As-tu d'autres regrets ? J'aurais aimé jouer dans un girls band et revoir un concert d’Alan Vega aussi fabuleux que celui donné dans une salle sordide de Vitrolles dans les années 80. De très loin le spectacle le plus incroyable de ma vie ! Il était seul avec un guitariste - qui faisait en gros le même accord du début à la fin, à des vitesses différentes - et une boite à rythmes primitive, il pleurait et tombait à genoux quand il chantait des ballades, se frappait avec le micro et tapait les spectateurs du premier rang avec le pied quand le rythme s’accélérait. Il semblait totalement possédé, entre Antonin Artaud et Vince Taylor, le public - 80 personnes à tout casser - l'insultait ou était en extase…J'imagine que les premiers concerts des Stooges devaient ressembler à ça. Du coup, en ayant vu ça et d'autres super concerts à la même époque, j'imaginais - et j'avais raison, dans l'absolu -  qu'un concert de rock, c'était ça. Un truc insensé qui se produisait sur scène, un show différent tous les soirs. Du spectacle, quoi ! Et pas des mecs juste plantés sur scène qui se regardent les pompes et essaient avec un rack d'effets de quinze pédales de vaguement recréer leur - mauvais - disque. Depuis, je vais évidemment de déception en déception…
Pour revenir à Elvis, comptes-tu fêter les quarante ans de sa mort ? On est une petite bande, dans laquelle on retrouve des membres des Dum Dum Boys, à le commémorer. On fête uniquement son anniversaire en janvier mais cet été, on fera une exception. Je ne sais pas encore quoi mais ça devrait inclure de la musique ET de la nourriture... Une fois on l'a fêté en organisant un concert hommage en privé : chacun, qu'il soit musicien ou non, devait faire une reprise d'Elvis. Certains ont chanté a cappella. Dommage qu’il n’existe pas d'enregistrement de cette soirée.
Ton dernier coup de cœur en live ? Chain & The Gang à Modène, les Subsonics à Lyon et Quintron & Miss Pussycat à Nice au Dojo.
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Comment es-tu venu à enregistrer avec le débonnaire Ian Svenonius (The Make-Up, Chain & The Gang...) ? Les Dum Dum Boys ont fait les premières parties des deux tournées françaises de The Make-Up. NON! a tourné en Italie en première partie de Chain & The Gang et comme Ian aimait beaucoup la formule guitare fuzz/synthé basse/boite à rythmes qu'on avait, il m'a suggéré qu'on fasse un disque ensemble un peu dans ce style. Le résultat est paru sur mon label Mono-Tone Records en 2014 sous le nom de XYZ. Sinon, vu que je suis trop timide et trop feignant pour proposer quoi que ce soit à qui que ce soit, je n'ai pas fait tellement de collaborations ou groupes parallèles : Die Idiots avec Karim, le chanteur des Dum Dum Boys, et un autre guitariste (un album et une quinzaine de concerts), Nick Prizu, un groupe de rock'n'roll/girl band déjanté à la Panther Burns/Del Monas dans lequel je jouais avec Bratch (Le guitariste des Dum Dum Boys) qui s'est arrêté à la mort du chanteur - on avait commencé à enregistrer un album qui finira peut-être par sortir à titre posthume… J’ai joué également au sein de The Love Machine, un trio space punk qui a connu une existence assez brève, puis au sein de NON!, un duo de rock'n'roll électronique, le temps de trois albums, également parus sur Mono-Tone.
Beatles ou Stones ? Comme pour le live ou les disques, j'aime évidemment les deux mais avec une préférence pour les Stones et les faux Beatles (Big Star, Nerves, Spongetones, Yoko Ono...)
Zenith ou MJC ? Plutôt MJC s'il faut vraiment choisir. Je ne suis allé que deux fois dans des Zéniths : pour voir Iggy Pop il y a longtemps à Paris et quand on a fait la première partie de Simple Minds (!) à Toulon (!!). On a été sifflé au bout de dix minutes par un tiers de la salle, et le Zénith contenait 6000 personnes (rires). On nous a aussi virés du Bataclan, en première partie de Calvin Russell. Le public nous jetait des gobelets et des pièces de monnaie. Ce que je préfère, ce sont les clubs de 100 ou 200 personnes. Ça tombe bien, les groupes que j'aime attirent en général ce genre de public. Jusqu'à 400 personnes, je supporte. Au delà, ça a plus à voir avec du camping (rires). 
Nice ou Memphis ? Il y a pas mal de point en commun entre les deux, ce sont toutes deux des villes mortes, vivant sur leurs souvenirs, ceux de Memphis étant, bien évidemment, beaucoup plus exaltants. Les originaires du Tennessee ont même eu un maire un peu équivalent à Jacques Médecin... Idéalement j'aimerais partager mon temps entre les deux et en tous cas, si je touchais une retraite, j'aimerai la passer à Memphis, dans un motel cheap sur Elvis Presley Boulevard.
Interview & photos : L’impeccable Benoit Grimalt
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lesecumeurs · 9 years ago
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Ecumeuse #31 : Agnès
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Le jour où j’interroge Agnès, elle vient d’acheter une paire de bottes en caoutchouc pour aller à We Love Green le lendemain - le mauvais temps est annoncé. Agnès a fait une entorse à sa hantise des festivals pour aller applaudir PJ Harvey. Mais elle vient de découvrir que PJ Harvey ne joue pas avant 22h30, et elle doute de sa capacité à patienter jusque-là... Agnès, après Cathy et Juliette, est la troisième écumeuse dont je publie les souvenirs. (Agnès) Des stratégies très différents m’attirent au concert. Aujourd’hui, j’y vais plus dans une optique de découverte. J’ai envie qu’on me donne envie d’y aller. Parfois, il suffit juste d’un tweet enthousiaste pour que j’achète une place. Je cherche à combattre deux tendances : le fait de baisser les bras parce qu’il y a trop de choix, et celui de m’enfermer dans des choses que je connais déjà. J’ai tendance à ne plus aller voir des groupes que j’ai pourtant chéris - comme c’est le cas pour The Dandy Warhols. D’abord parce qu’il faut faire des arbitrages : je ne peux peux plus sortir tous les soirs comme quand j’avais 25 ans. Ensuite parce que financièrement il faut aussi faire des choix. Mais aller au concert reste très important, ne serait-ce que parce que ça fait vivre une économie. Quand je repars d’un concert, c’est souvent avec le vinyle. J’ai besoin d’expier la période où je téléchargeais tout illégalement (rires). 
Te souviens-tu de ton premier concert ?  Oui, parce que je n’ai pas pu y assister. C’était Bashung à la MJC de La Source, une ville nouvelle dans la banlieue d’Orléans. J’avais 13 ans. Mon frère était allé balancer à ma mère qu’il y aurait sûrement plein de drogués, et du coup je n’ai pas eu le droit d’y aller. Paradoxalement, c’est aussi grâce à mon frère que j’ai pu assister à mon premier vrai concert : Frankie Goes to Hollywood, avec Berlin en première partie. Pas un événement inoubliable malheureusement vu que le groupe se produisait à moitié en playback...  et aujourd'hui encore je me demande bien pourquoi on y était allé étant donné que ce n'était pas du tout ce qu’écoutaient mon frère et sa bande de copains à l'époque ! Entre le non-concert de Bashung et celui de FGTH, mes parents ont déménagé pour le Maroc, et l’occasion de voir des concerts ne s’est plus représentée avant 1986. Mon père voyageait beaucoup - il travaillait pour les Nations Unies. Il avait fait son service militaire au Sénégal et il a conservé son statut d’expatrié jusqu’à la retraite. Sa discothèque était très variée  - on y trouvait aussi bien Jean Ferrat que des enregistrements russes de musique classique, de la musique des Antilles... mais pas de rock. L'artiste le plus rock qu’il a écouté, ça doit être Yves Simon (rires). 
Comment se fait ton apprentissage alors ? Je dois beaucoup à mon frère indirectement. On n'a jamais écouté de la musique ensemble mais j'entendais celle venant de sa chambre. Il avait des goûts assez éclectiques, ça allait de AC/DC à Queen en passant par Fleetwood Mac et Devo. Et puis la radio. J’écoutais Loup Garou avec Patrice Blanc Francard suivi de Feedback avec Bernard Lenoir, et plus tard Intersidéral, avec Manoeuvre et Dionnet. Je regardais Chorus avec mon frère. A partir de 1982, mon éducation va se faire par la presse musicale, que je commandais depuis le Maroc. Best et Rock & Folk n’arrivaient pas tous les mois. Curieusement, Rock en stock était mieux distribué. C’est grâce à ce magazine que je vais découvrir Taxi Girl et fantasmer sur le Paris underground. J’ai beaucoup lu sur la musique avant de pouvoir l’écouter - il n’y avait pas de magasin de disques à Rabat, et je n’avais l’occasion d’acheter des disques que deux fois par an - chaque fois que mes parents rentraient en France. Je vivais sur le stock de cassettes audio que mon frère avait enregistré et sur les VHS des Enfants du Rock qu’il me faisait passer. 
Qu’écoutes-tu dans les années 80 ?  The Cure. Sex Pistols. The Rolling Stones. Police. David Bowie - pas ses meilleurs albums malheureusement. Des trucs que mon frère me transmet : OMD, Blancmange... Les garçons que je fréquentais écoutaient pour la plupart du funk, alors je n’avais pas l’occasion d’échanger souvent avec eux. Je me souviens d’un Noël où j’avais commandé deux disques : Pornography de The Cure et The Message de Grandmaster Flash. Le grand écart (rires).  En 1986, mes parents déménagent au Vietnam et j’intègre un foyer de bonnes sœurs à Montparnasse, en face du collège Stanislas. J’arrive à Paris le lendemain de l’attentat rue de Rennes. Des militaires partout dans les rues - ça ne me change pas du Maroc. Le vrai choc, c’est la température. L’hiver 86-87 a été un des plus froids. Et je suis arrivée avec juste une paire de Converse et un jean... C’est l'explosion des radios libres : NRJ, Skyrock, La Voix du Lézard... Je rencontre un batcave. Je découvre Wolfgang Press, Death In June, Front 242... Je vais aller voir des concerts avec lui pendant un an et demi. Deux grands souvenirs : Die Form, un groupe de rock industriel français, à l’Elysée Montmartre. Une nana est accrochée à une corde derrière une bâche transparente, et le leader du groupe, après avoir lacéré la bâche et coupé la corde, la traîne par les pieds jusque dans les coulisses. Ambiance bondage (rires). Et Siglo XX, un groupe de cold-wave belge dont le leader avait un bras mort, mais dont l’intensité scénique était impressionnante.  J’écoutais ce que mon copain écoutait. Lui était tout de cuir et de noir harnaché, avec une crête iroquoise blonde. Quand mes parents l’ont rencontré, ma mère m’a juste dit  : “Ce n’est pas vraiment notre style.” J’ai deux grandes passions dans la vie : la musique et la mode. Le rock batcave représentait un mariage des deux. J’étais sensible à l’effort vestimentaire associé à la musique. 
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Tu étais lookée aussi ?  J’étais plutôt néo-romantique que batcave. Il faut remettre les choses dans leur contexte : j’étais en prépa science-po à la Catho (rires). J’avais une paire de sorcières noires. J’avais acheté une veste d’homme aux Puces, doublée cachemire moutarde, sur laquelle j’avais accroché une broche en forme de B-52. Je m’habillais uniquement en noir et en blanc. Quand j’allais rendre visite à mes parents au Vietnam, il y avait une escale obligatoire à Bangkok. Je passais la nuit sur place, et j’en profitais pour faire les boutiques. Je trouvais beaucoup de vêtements “tombés du camion” : du JP Gaultier, du Comme des garçons, vendus au dixième de leur prix. Je dessinais mes vêtements : je m’étais fait faire une redingote au Vietnam que j’ai portée longtemps.
Comment se fait le passage de la new-wave au rock indépendant ?  Je rate Science Po Paris mais je réussis à intégrer Science Po Bordeaux. Et là, après fait le tour du centre-ville en une demi-heure, je commence à déprimer (rires). Le Bordeaux d’alors n’a rien à voir avec le Bordeaux d’aujourd’hui. C’était une ville bourgeoise qui drainait beaucoup d’étudiants du Sud-Ouest qui rentraient chez leurs parents le week-end. Résultat : le centre-ville était mort. Il n’y avait pas d’alternative entre le bar louche en face de la gare et les salons de thé place Gambetta. C’était d’une tristesse sans fin. L’ouverture du Virgin Megastore a été un événement incomparable (rires).  Heureusement, à Bordeaux, je fais la connaissance de passionnés de musique. C’est le début de mes années Bernard Lenoir. A Paris j’achetais un fanzine parisien qui s'appelait L’Equerre. A Bordeaux je me suis abonnée aux Inrockuptibles. J’ai été l’abonnée #34. Je traînais au Chat Bleu, LE club rue Saint-Vincent - j'y ai vu That Petrol Emotion - et au BlueBerry, un caf'conc du centre ville où se produisaient les groupes locaux. Il y avait pas mal de groupes de rock à Bordeaux. J’étais tombée amoureuse de l’harmoniciste d'un groupe du cru qui s’y produisait souvent. Sans jamais oser l’aborder. La copine avec je vivais en colocation avec moi l’a fait… et a fini par emballer le chanteur. Que j’ai eu la surprise de retrouver en caleçon le lendemain à la table du petit déjeuner. Toute ma vie sentimentale résumée en une seule anecdote (rires). C’est une période pendant laquelle je vais compléter ma culture musicale en ce qui concerne les années 60 et les années 70. Notamment Bowie, que je redécouvre totalement. A partir de la deuxième année, je traîne avec un groupe d’amis qui ont une vie nocturne assez intense. J’ai des souvenirs assez épars des concerts que j’ai pu voir (rires). Je me souviens de Kat Onoma à Barbey. J'ai aussi le souvenir assez surréaliste d'un concert en plein air de Pierre Vassiliu place St Michel. Lors de la dernière année à Bordeaux, je résilie mon abonnement aux Inrocks et j’arrête Lenoir. Je n’arrivais plus à suivre. Et puis j'étais tombée amoureuse d'un musicien, j'étais saturée de musique ! Je passe ensuite un an à Nantes. Où je n’ai pas beaucoup dormi (rires). Et où je n’ai pas beaucoup écouté de musique - j’ai surtout vécu sur mes acquis. Enfin, à l'exception de la déferlante Nirvana.
Est-ce que la musique, c’est un moyen pour toi d’aller vers les garçons ?  Non. Ce n'est pas une recherche consciente. Ce sont des rencontres, des accointances. Et puis il s'avère aussi que je n'ai jamais vraiment rencontré de filles de ma génération qui s'intéressaient autant à la musique que moi. C'étaient plutôt des garçons. Avec un regard très étonné sur la fille un peu érudite que j'étais. Et puis mon moteur en tout, c'est l'apprentissage, j'aime beaucoup qu'on me fasse découvrir des choses que je ne connais pas. J'ai eu une fois une expérience inverse. J’ai vécu à un moment avec un garçon qui n’écoutait que du jazz, et dont j’ai fait la culture rock. Il était musicien. Il m'a initiée au jazz des années plus tard. A Coltrane surtout. Quand je rentre à Paris, je fréquente une personne qui n’écoutait pas du tout de musique - mais nous étions tous les deux passionnés de photo - notamment du Lubitel, un moyen format russe. A Paris encore, je partage pour la première fois un appartement avec mon frère, qui lui achète un disque par semaine depuis l’âge de 14 ans. Il écoute Echobelly, Elastica, Blur et toujours beaucoup de rock américain comme John Cougar Mellencamp... Un jour, nous nous faisons cambrioler. Les CD étaient rangés par ordre alphabétique. Ils nous sont tous dérobés. Sauf la lettre Z. C'est à ce moment là que j'ai découvert Zappa (rires). Je suis revenue à la musique au moment où, dans mon milieu professionnel, je me suis retrouvée avec un entourage plus jeune. Je venais d’avoir 30 ans, et la moyenne autour de moi se situait plutôt autour de 25. Je retourne voir des concerts : Blur, Chemical Brothers, The The au New Morning... mais aussi -M- et Indochine (rires). Les Vieilles Charrues en 2001 - je me jure de ne plus jamais mettre les pieds dans un festival. Christophe à L’Olympia. Noir Désir au Zénith. J’ai pleuré en voyant Daniel Darc en 2004. C’était la première fois que je pleurais pendant un concert. J’étais tellement émue : je rêvais de le voir depuis que j'avais 14 ans, c'était mon amour de jeunesse. Lui et Johnny Thunders. J’aurais aussi pleuré à un concert de Johnny Thunders si j'avais pu le voir avant sa mort. J'ai vu je ne sais combien de fois Mona et moi, le film de Patrick Grandperret. J’adorais son coté dandy - dans Mona et moi, il débarque à l’aéroport dans un costard framboise écrasée sur le riff d'intro de "Two Times Loser", c'est d'un romantisme échevelé (rires).  A partir de 2005, je commence à écouter beaucoup d’électro. Alors je préfère danser sur de la musique qu’aller au concert. C’est la grande époque du Rex : Garnier, De Crécy, Ivan Smagghe... Le clubbing, ça a été une vraie révélation. Car en club, contrairement aux boites de nuit, on te fout la paix quand tu es une fille. J'écoutais beaucoup Nova a l'époque, il y avait vraiment des émissions géniales. J’ai un regret, c’est de n’avoir jamais poussé la porte du Pulp.  Un peu plus tard je suis revenue au rock indé via les blogs. J’ouvre le mien, largement autobiographique. Je corresponds avec d’autres blogueurs - notamment KMS. Je retrouve des partenaires de concert…
Qu’est-ce que tu attends d’un concert ?  Quelque chose qui n’a rien à voir avec la musique : une connexion avec le moment présent. J’ai du mal à vivre dans l’instant. Si je suis chez moi, soit je procrastine, soit je suis sur trois écrans à la fois. Le concert, c’est un moment synchrone. Je ne peux pas faire autre chose en même temps. C’est ça que j’aime. Un concert qui n’est pas réussi, c’est celui pendant lequel je pense à ma liste de courses pour le lendemain (rires). Si j’arrête de penser pour ressentir, alors la soirée est réussie. 
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A quelle fréquence sors-tu aujourd’hui ?  En moyenne, deux fois par semaine. En ce moment, mon agenda est particulièrement chargé. J’essaie de ne pas céder à toutes mes envies, sinon je sais que je vais finir sur les rotules et ce n’est pas le but du jeu. J’ai pourtant la chance d’habiter près des salles dans lesquelles je vais régulièrement - c’est je pense ce qui me retient de déménager.  La fréquence de mes sorties s'est accélérée quand j'ai passé le pas d'aller seule en concert. Je ne suis pas un animal social donc ça a été une vraie violence que je me suis faite. Bien plus il n'y a pas beaucoup de filles seules dans les salles mais je ne regrette vraiment pas, j'aurais raté énormément de super concerts si j'avais dû trouver quelqu'un pour m'accompagner à chaque fois (rires).
Qu’est-ce que tu vas voir aujourd’hui ?  Ça a changé. Quand je suis retourné dans les salles à partir de 2005, j’allais voir des gens que j’écoutais et que je n’avais jamais vus en concert. Aujourd’hui, je vais essentiellement voir des groupes que je n’ai jamais écoutés. Je suis sortie de ma période monomaniaque où je ne ratais sous aucun prétexte une date d’Au Revoir Simone, Beach House ou Baxter Dury - Je crois que j’ai fait absolument toutes les dates parisiennes des Allah Las aussi (rires). J’ai une copine qui a des goûts différents des miens et qui m’emmène voir des choses plus confidentielles pour moi comme Thee Oh Sees. Je me laisse guider. Et je lui fais découvrir des groupes qu’elle est trop jeune pour connaître, comme Paul Collins (The Beat), cette incroyable machine à tubes de la fin des années 70. Je suis très influençable. Je prends des idées de partout. J’ai la chance d’être bien entourée. Il suffit qu'on me parle d'un groupe pour que j'aille le voir. J’ai pris goût à fréquenter des salles de petite capacité comme La Mécanique Ondulatoire, l’Espace B, le Petit Bain… Des concerts moins chers. Et sans la pression de la foule.
Des artistes que tu n’as jamais eu l’occasion d’applaudir ?  Costello. J’avais acheté une place pour sa tournée solo, mais il a annulé, le chameau ! Neil Young, j’aimerai bien. Springsteen aussi, mais je sais que je n’irai pas : soit la salle est trop grande, soit le concert est trop cher. Je me maudis de n’être jamais allé voir les Stones. Mais tu ne m’emmèneras pas dans un stade. J’ai besoin de voir, d’avoir l’impression d’être dans la même pièce que le groupe. Il y a deux concerts que je me mords les doigts d’avoir ratés : Kraftwerk à la Fondation Vuitton et Kate Bush à Londres. Oh et puis je suis très triste de n'avoir pas vu Mötorhead avant la mort de Lemmy.
Des souvenirs forts ?  Les Buzzcocks à la Cité de la Musique. Ils étaient fantastiques. Il te font oublier le fait que tu étais trop jeune pour les voir au sommet de leur gloire. J’ai eu la même impression en allant voir The Undertones, qui m’ont aussi fait oublier l’absence de Fergal Sharkey. Paul Collins c'était assez fou aussi, tous ces tubes qui s'enchaînaient les uns après les autres... Il était accompagné par une formation de vingtenaires qui étaient à fond. J’ai eu la chance de voir Bashung peu de temps avant sa mort. C'était très émouvant. J’ai un super souvenir de The Cult au Bataclan quand ils ont joué Love en entier et dans l’ordre des morceaux sur l’album. J’en oublie forcément, j'ai une mémoire de poisson rouge (rires).
Des concerts que tu as regretté d’être allée voir ?  Le dernier c’est Elefant . Je ne me rappelle même plus pourquoi j’y suis allée. Je ne reste plus aux mauvais concerts. C’est comme les mauvais livres que je ne m’oblige pas à finir. Sitôt que j’ai fini ma bière - je commande toujours une bière quand je pénètre dans la salle - je tourne les talons. Un concert raté pour moi c'est surtout une erreur de casting - c'est rarement parce que le groupe joue mal, mais c'est plus souvent une musique qui ne résonne pas en moi, comme quand tu es devant un tableau et que rien ne se passe. Je peux partir au bout de deux chansons, comme je peux m’éclipser si le son est très mauvais - comme lors du concert des Kills au Bataclan, une vraie torture. Ensuite il y a aussi le cas du mauvais groupe avec le mauvais son : Crystal Castles - la chanteuse hurlait comme un cochon qu’on égorge, j'ai trouvé ça insupportable. Ça m'avait un peu traumatisée, c’était la première fois que je quittais un concert avant la fin. Je repense souvent à la pub Marshall avec Lemmy qui dit "If you think you're too old to rock'n'roll then you probable are”… Je m’étais demandé si je n’étais pas devenue trop vieille pour ce genre musique. Mais j’ai fait des concerts de groupe qui jouaient beaucoup plus fort depuis, ce n’était donc pas une question de décibels (rires).
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Sur quel support écoutes-tu de la musique aujourd’hui ?  J’écoute peu de musique paradoxalement. J’écoute surtout quand je voyage, quand je peux m’isoler. Le train ou les transports en commun. J’ai du mal à faire autre chose quand j’écoute de la musique. Quand je me déplace, j’écoute mon iPhone ou Deezer. J’ai bazardé tous mes CD il y a longtemps. J’ai toujours trouvé le format très laid. J’ai recommencé à acheter des vinyles il y a deux ans, quand j’ai récupéré la platine et les enceintes de mes parents en même temps qu’une partie de vinyles de mon frère.  Je n’ai jamais été une fétichiste de la pochette. Le format m’importe peu. Je vais sur Mixcloud, Soundcloud... J’ai surtout une écoute rétrospective : c’est après le concert que je vais retourner approfondir les disques. J’ai totalement redécouvert Echo & The Bunnymen après les avoir vus en concert.  J’écoute beaucoup de podcasts aussi. J’ai passé un merveilleux été l’an dernier avec les émissions d’André Manoukian et de Michka Assayas. Je suis vraiment triste que Label Pop de Vincent Théval s’arrête, c’est vraiment une très grande perte.C’est incompréhensible que Radio France laisse partir quelqu’un comme lui.
Un souvenir récent ?  The Computers à Petit Bain. C’était juste après les attentats. Un exutoire. Un besoin de se défouler énorme. Ils ont électrisé la foule. Un véritable rapport physique à la scène. Fat White Family aussi, j’ai beaucoup aimé. Ça faisait longtemps que je n’avais pas vu un groupe aussi punk. C’était assez jouissif.
Photos : L’incorrigible Benoit Grimalt
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lesecumeurs · 9 years ago
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Ecumeur #30 : Jacques-Etienne
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C’était en juin dernier, au bord d’une piscine, au sud de la Loire. Sébastien m’a dit que je devrais aller aborder Jacques-Etienne. Sans que nous ayons été présentés, je suis allé m'asseoir à côté de lui et j’ai commencé à l’asticoter. Il n’a pas opposé de résistance. Nous nous sommes donnés rendez-vous plus tard à Paris pour l’interview que vous allez découvrir. Quelques heures avant notre rendez-vous, Jacques-Etienne m’a envoyé l’avertissement suivant : Ne t’attends pas à grand chose, je suis un piètre spectateur de concert et connaisseur de musique. Autant de réserves qu’il allait balayer lui-même sans doute sans s’en apercevoir. (Jacques-Etienne) Un des grandes désespoirs de ma vie, c’est d’avoir toujours été en décalage par rapport à mon époque. La musique était importante pour mes parents, mais pas dans le partage. Pour mon père, il n’y avait que le classique qui comptait. Le reste, c’était du bruit. Dans notre maison, il n’y avait pas de salon : pas de pièce pour nous retrouver autour d’un disque. Le virus, je vais l’attraper grâce à un voisin dont le beau-père travaillait chez un des premiers tourneurs français, KCP. C’est grâce à lui que je vais avoir la chance de voir mon premier concert : Bob Marley, en 1977, tournée “Babylon By Bus”. J’avais dix ans. Mon voisin, qui était un des premiers du quartier à posséder un magnétoscope, venait de recevoir le test-pressing et la VHS de la tournée “Love You Live” des Rolling Stones - c’était le concert tourné aux Abattoirs de Pantin. Cette VHS, on va la regarder ensemble toutes les semaines. C’était une véritable obsession. J’avais le même le t-shirt que les mecs de sécu sur cette tournée. 
Quel souvenir te gardes-tu du concert de Bob Marley ? C’est surtout un souvenir rétrospectif en écoutant par la suite l’album qui a été tiré du concert. Grâce au beau-père de mon copain, on avait eu des sésames pour aller backstage. Dans les coulisses de Pantin, il y avait encore des éléments du décor de la tournée “Love You Live”. On avait l’impression d’avancer dans un décor de cinéma. Un autre concert, qui m’a marqué, c’est Lou Reed. Les gens se sont mis à siffler quand il a sorti sa flûte traversière, et il s’est cassé. Le concert a duré en tout et pour tout vingt minutes. Les spectateurs étaient tellement furieux qu’ils arrachaient les sièges (rires). Ensuite, Kiss. Et Earth, Wind & Fire : une des guitaristes descendait sur scène le long d’un câble. 
Tu me disais tout à l’heure que tu avais l’impression d’avoir toujours été en décalage par rapport à ton époque. Pourquoi ?  Entre 17 et 23 ans, je passais mon temps dans les magasins d’occasion : chez Gibert, chez Crocodisc et aux Puces de Clignancourt. J’achetais Ten Years After, Hendrix... des disques qu’on avait du mal à trouver en plein époque new-wave. J’étais totalement à contre courant. J’avais des potes qui écoutaient The The. L’horreur (rires) ! Moi, je ne jurais que par la sainte trinité : le blues, le rock et le folk. Avec la bande de copains que j’avais connus au lycée, on passait des week-ends entiers à écouter Pink Floyd, Cat Stevens, Dylan, Bowie. Dans ma chambre d’adolescent, il y avait un lit double, une table de nuit avec une platine disque et deux enceintes Bose 501. La première chose que je faisais en me levant, c’était mettre un disque. C’était aussi la dernière chose que je faisais avant de me coucher.
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Le soir, mes deux albums de chevet étaient la face B de Ziggy Stardust & The Spiders From Mars de David Bowie et la face B de Black & Blue des Rolling Stones - avec “Memory Motel” en pièce maîtresse. Le matin, c’était plutôt le maxi de “Rapper’s Delight” de Sugarhill Gang. Partir en vacances nécessitait trois mois de préparation, le temps d’enregistrer les cassettes que j’allais emmener avec moi. Passer un temps infini à trouver la chanson qui allait finir chaque face... 
Te souviens-tu de tes premiers disques ? “Rock Collection” de Laurent Voulzy. Puis “Crache ton venin” de Téléphone. J’écoutais un peu la radio. Dans les magasins, les vendeurs me conseillaient. J’ai un demi-frère qui a quinze ans de plus que moi. A défaut de rock, il m’a initié aux vins de Bourgogne (rires). Il m’a emmené au cinéma voir Let’s Get Lost, le documentaire de Bruce Weber sur Chet Baker. Un choc. Il m’a aussi traîné voir le trompettiste Wynton Marsalis à la Villette. Les vingt premières minutes, ennui. Et puis tout à coup, l’étincelle. C’est aussi grâce à ce demi-frère que j’ai eu la chance de voir Miles Davis avant qu’il ne disparaisse. Mes parents, ça allait de Reggiani à Montand - parce que c’était des chanteurs engagés. J’ai la chance d’avoir eu des parents très libéraux : j’avais les cheveux longs jusqu’aux épaules, mes potes étaient en permanence fourrés à la maison... Je suis totalement passé à côté de la new-wave. Je me suis sauvé en courant du concert des Talking Heads à l’époque de Stop Making Sense. Pire que ça : j’ai découvert Joy Division il y a cinq ans. La honte absolue (rires).
Comment as-tu accueilli l’arrivée du CD ? Je n’ai jamais aimé. Quand j’ai eu 20 ans, je me suis offert ma première platine CD, et dix enregistrements que je possédais déjà en vinyle.Je n’ai jamais aimé le rock en CD. J’ai acheté un peu de jazz, sur les conseils d’un vendeur de la FNAC. Du blues et de la world music. Je dois posséder 800 CD. J’ai viré les boitier pour les ranger dans des classeurs. J’ai demandé à mon fils de les numériser... mais je crois que je n’ai jamais écouté les mp3. Aujourd’hui, j’écoute essentiellement sur Deezer et Spotify, avec un son en haute définition. C’est vraiment grâce au streaming que j’ai redécouvert le plaisir d’écouter des albums. J’ai commencé par un compte Spotify, mais je l’ai laissé à ma fille - je ne voulais pas qu’elle télécharge illégalement. J’ai racheté une bonne chaîne hi-fi. J’ai choisi Sonos pour que la musique passe de l’ordinateur aux enceintes. Je me fais des soirées seul, où j’écoute juste de la musique non compressée. C’est un professionnel qui est venu installer la chaîne à la maison. J’étais surpris qu’il y ait du souffle. Le technicien m’a expliqué que c’était absolument normal. Avec une mauvaise chaîne, tu écoutes des chansons. Avec une bonne, tu entends les instruments. Quand tu écoutes Les Variations Goldberg en haute définition, tu entends Glenn Gould respirer. C’est une émotion de dingue. Aujourd’hui, je partage beaucoup avec ma fille, qui écoute autant de musique que moi quand j’avais son âge. Quand on fait un trajet en voiture, on choisit une chanson sur deux. Elle aime les concerts autant que moi. Quand elle était petite, je lui avais recopié ma sonothèque sur son baladeur. Avec mon fils, c’est différent. Lui avait besoin de se démarquer des goûts de son père. Ses goûts vont plus vers des artistes électro comme Amon Tobin. 
Aujourd’hui, qu’écoutes-tu ?  De tout. Du classique à l’électro en passant par le jazz, le blues... ou France Gall. C’est quand même terrifiant d’écouter France Gall à 50 ans (rires). J’ai même réécouté Renaud l’autre jour.
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Et tes vinyles, tu les écoutes encore ?  J’avais 800 vinyles, que j’avais stockés à la cave. Juste au-dessus de la pièce où se situait la machine à laver. Tu me vois venir... La machine a fui. Et 400 vinyles se sont retrouvés collés les uns aux autres. C’était il y a douze ans, mais j’en suis encore triste aujourd’hui... Heureusement, la plupart des disques sont encore écoutables. Les pochettes, par contre, c’est un vrai carnage.
Tu n’avais pas plus de 800 vinyles ?  Je n’ai jamais été collectionneur. Je n’ai jamais donné dans l’accumulation. Je n’ai jamais eu plus de 800 CD et 800 vinyles. J’ai un copain qui vient d’acheter le coffret 18 CD de sessions enregistrées par Bob Dylan. Non merci ! Je ne suis pas une groupie. Je suis incapable de disserter sur la musique. Par contre, je ne peux pas vivre sans elle. La musique m’accompagne à la fois dans mes moments de doute et de joie. Bob Dylan a chaque fois un effet réparateur. Il me redonne de l’espoir. Chaque fois que je suis au fond du trou, je reviens à “Desolation Row”. Mon premier réflexe, quand je loue une voiture, c’est toujours de brancher mon iPhone, sur lequel j’ai près de 5000 morceaux. Je n’ai jamais fait de playlists. J’ai Deezer sur mon téléphone, avec à peu près 2000 morceaux disponibles hors connexion. J’ai un seul regret c’est que je n’écoute plus Radio Nova. Je l’écoutais en voiture, mais j’ai déménagé et j’ai arrêté de l’utiliser - je l’ai donnée à mon fils. Depuis je roule en vélo. 
L’iPod, est-ce quelque chose auquel tu as adhéré spontanément ?  L’iPod, c’était l’équivalent de 800 cassettes. C’était comme un rêve. J’ai encore mon premier iPod. Il devait faire 10 Go. Par contre j’ai toujours détesté iTunes, qui signifie la fin de l’album en tant que tel. Ça faisait deux décennies que des artistes concevaient des albums en tant que tel, avec un début, un milieu et une fin. iTunes, en donnant la possibilité d’acheter les chansons à l’unité, a foutu tout ça en l’air. Et je ne parle pas de la possibilité de filmer avec un téléphone portable... L’autre jour, j’avais une femme à côté de moi, la petite soixantaine, qui filmait tout le concert avec le flash allumé. Je lui ai demandé au moins de couper le flash. Et je me suis fait insulter ! Le mec derrière moi a aussi passé toute la soirée à filmer, alors qu’il avait l’air super fan. Payer deux places de concert 340 euros pour passer la soirée à tenir son téléphone à bout de bras, je ne comprends pas. 
N’as-tu jamais été tenté de faire de ta passion un métier ?  J’ai été stagiaire à l’époque de Rapido, l’émission d’Antoine de Caunes sur Canal +. Et j’ai détesté ça. Il fallait avaler de la nouveauté en permanence, et je n’ai jamais eu le snobisme de me prétendre découvreur de talents. J’ai toujours eu des goûts beaucoup plus mainstream.
Comment t’étais tu retrouvé à Rapido ? Par un coup de chance. Grâce à ma sœur et des copains de ma sœur. J’étais l’assistant d’Yves Bigot, que j’adorais : il adorait le rock, il était de gauche, il aimait le foot, il ne crachait pas sur les anciens... En face, on avait les gens des maisons de disques, très blasés. L’inverse de l’amour de la musique. Ça ne m’a pas fasciné. 
Y a t-il des artistes que tu ne raterais pour rien au monde ?  U2, même si c’est purement affectif. J’ai commencé à m’y intéresser à partir du Live Aid, en 1985. Un souvenir parmi tant d’autres, lors de la tournée Elevation : Bercy entièrement dans l’obscurité, avec juste les lumières de service allumées, et le groupe qui entonne a cappella “Elevation”. Est-ce que j’y retournerai pour autant ? J’ai eu la chance d’assister à deux concerts de dingue, dont le dernier qui était un spectacle total. Je crois que je préfère rester sur ce souvenir.
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Dylan, que je retourne voir tous les ans. Et que je trouve de mieux en mieux. Je sais que 80% des gens qui vont le voir sont déçus. Mais plutôt que de faire un tour de chant avec ses chansons les plus connues, il a choisi de faire vivre son spectacle avec lui. Comme il souffre d’arthrite, il ne peut plus jouer de guitare. Alors il s’est remis au piano. C’est émouvant. Il ne cherche pas à pallier ses défauts - pas comme Véronique Sanson qui croit qu’il suffit de rajouter des musiciens supplémentaires pour masquer ses insuffisances vocales. Le jour où Dylan va disparaître, je serai très triste. Je suis retourné pour la énième fois écouter Patti Smith chanter Horses. C’était toujours dément. Elle est restée punk. J’ai dû au moins la voir dix fois à Paris ces dernières années. J’ai emmené ma fille à son concert à l‘Olympia. C’était comme écouter le disque à la maison, mais en mieux.  Lou Reed, j’étais fan de sa musique mais je n’ai jamais pu le blairer. Je suis quand même allé le voir la dernière fois qu’il est passé. Et c’était fabuleux. Je pense qu’il se savait condamné. Et que ce serait la dernière fois. Il dirigeait ses musiciens avec une précision inédite. Et ce n’était pas triste - contrairement aux derniers concerts de Bashung qui étaient d’un spleen absolu. J’en parle avec d’autant plus de regrets que Bleu Pétrole est un de mes albums favoris.
Tu vas voir aussi du classique ?  Oui, car c’est une musique dans laquelle j’ai baigné pendant mon enfance. Purcell, Le Messie de Haydn... Quand j’ai découvert Klaus Nomi, ça m’a tout de suite renvoyé au chant grégorien que mon père écoutait et qui me transportait. En temps qu’assistant réalisateur, j’ai eu la chance de travailler sur une cérémonie des Victoires de la Musique Classique. J’étais au milieu de l’orchestre pendant Le Boléro de Ravel. Une puissance incroyable ! Je suis allé revoir Le Messie au Théâtre des Champs-Elysées, mais j’étais un peu déçu. C’était moins fort que quand je l’écoute dans mon salon (rires).
Es-tu un écumeur fidèle ?  Je continue à aller voir les vieux - mais il n’y en a plus tant que ça. J’ai repris des places pour aller voir Wynton Marsalis. Eric Clapton, j’ai dû le voir au moins vingt fois - y compris lors d’une série de concerts à Londres, avec Buddy Guy comme invité. Il me fascine. Il se tient à la croisée de toutes les musiques que j’aime, depuis le blues jusqu’au rock. Et comme tous les bluesmen, l’âge lui va bien. J’ai eu la chance de voir Screamin’ Jay Hawkins à la fin de sa vie. Il jouait au bar de l’hôtel Méridien, porte Maillot. Fidèle à sa réputation, il arrivait avec sa cape sur scène. Il faisait toujours son petit effet. Quand j’ai vu Miles Davis, il n’a joué que vingt minutes, en tournant le dos au public. L’illustration parfaite de l’adage qui veut qu’il n’est pas nécessaire de jouer toutes les notes, mais juste celles qui sont essentielles. 
Des regrets ? Être passé à coté de l’électro, qui est pour moi la vague la plus proche du folk de par son coté envoûtant et par le sentiment de communion qui relie ses fidèles. J’ai aimé l’énergie de Birdy Nam Nam ou d’Etienne de Crecy. D’une manière générale, je regrette de ne pas plus aller voir ce que je ne connais pas. J’habite en face de la Gaieté Lyrique, et je n’y suis jamais allé. C’est ballot, non ?
Qui t’a surpris récemment ? Fauve. Je trouvais le disque décevant. Je suis quand même allé au concert - les places étaient à 20 euros. Ils sont quand même arrivés à remplir trois Zénith et vingt Bataclan avec des places à 20 euros. Les bières étaient à trois euros. Les t-shirt à dix. J’étais sur le cul.  Les Stones au Stade de France. Je les avais laissées à l’époque des shows pyrotechniques. J’ai retrouvé des septuagénaires jouant du blues. Ils sont retournées à l’essence de ce qu’ils étaient.   Avec ma fille, je suis allé voir les Black Eyed Peas au Stade de France, avec David Guetta en première partie. Ce type seul derrière ses platines arrive à retourner quatre-vingt mille personnes - enfin, quatre-vingt mille personnes moins une (rires).
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Et inversement, qui t’a déçu ? Pete Doherty, je suis parti au bout de vingt minutes. Rodriguez, je n’ai pas tenu deux chansons : je n’avais pas envie de gâcher le plaisir que j’avais pris en regardant le documentaire.
On peut revenir sur Joy Division ? J’y suis venu comme un abruti après le film de Corbijn. J’avais l’impression d’être passé à coté d’un truc. J’ai repris le train en marche, et ça m’a ramené jusqu’aux Happy Mondays. J’ai trouvé chez Joy Division tout ce qui m’avait déjà ému chez Radiohead. Control m’a ouvert les yeux sur cette scène des années 80 que j’avais jusque là refusé de considérer. Même le U2 des années 80 que je n’aimais pas. Je n’avais pas envie de comprendre. Le film m’a débloqué. J’ai toujours aimé les gens qui étaient morts. On ne va pas se mentir : Dylan, il est mort. Les Stones, ils sont morts. Tu vas les voir en concert comment tu vas au musée. J’ai pris beaucoup de plaisir à aller applaudir Patti Smith refaisant Horses, mais Horses, c’était il y a quarante ans quand même ! Si j’ai un grand regret, c’est de ne pas aller voir de musique plus vivante.  Photos : l’ineffable Benoit Grimalt.
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