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Se désengager de l'amour revient à vivre une vie dénuée de risque. À quoi bon vivre, dans ce cas ?
Deborah Levy, Le coût de la vie (2018)
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L'Atlantique argenté et reptile.
Les barrières de nuages. Le bateau de pêcheurs
tel un noyau d'olive qu'on recrache.
Et la cicatrice blafarde du sillage.
Le travail avance lentement ici-bas.
Je lorgne souvent du côté de l'horloge.
Dans le silence cupide
les ombres des arbres sont des chiffres obscurs.
La vérité repose par terre
mais personne n'ose la prendre.
La vérité est dans la rue.
Et personne ne la fait sienne.
Tomas Transtromer, Pour les vivants et les morts (1989)
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avant j'aimaisÂ
fumer parce que fumer me donnaitÂ
l'impression de consommerÂ
mon propre corps, comme siÂ
Ă force de m'expirerÂ
j'avais pu devenirÂ
cet esprit sans os ni sang,Â
un pur ectoplasme glissant dans la rue,Â
sans voix, un purÂ
monologue se déplaçant
dans l'air,
un roman qui s'Ă©critÂ
en secret.
Alexie Morin, Scénarios catastrophes (2025)
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Dans la poubelle des larves meurent et renaissent mille fois. Leur urgence grouille sous ma peau. J'aimerais qu'elles me disent il est temps de porter ta maison vers là -bas, mais elles ne me disent rien, et c'est la vérité.
Olivia Tapiero, Un carré de poussière (2025)
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Le mystère des grandes familles québécoises ne réside pas tant dans leur étonnante fertilité, dont le record s'établit à vingt-sept enfants, que dans leur extraordinaire exploit de partager la même salle de bains.
Martine Desjardins, Le temps des sucres (2025)
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Une force précise entraîne mon langage vers le mal que je peux me faire à moi-même : le régime moteur de mon dis-cours, c'est la roue libre : le langage fait boule, sans aucune pensée tactique de la réalité. Je cherche à me faire mal, je m'expulse moi-même de mon paradis, m'affairant à susciter en moi les images (de jalousie, d'abandon, d'humiliation) qui peuvent me blesser; et la blessure ouverte, je l'entretiens, je l'alimente avec d'autres images, jusqu'à ce qu'une autre blessure vienne faire diversion.
Roland Barthes, Fragments d’un discours amoureux (1977)
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Et il passait sa langue rouge sur ses lèvres minces, où pendait encore un morceau de cartilage tordu.
Claude-Henri Grignon, Un homme et son péché (1933)
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Raconter une vie sans événements. C’est exactement là où commence la littérature.
Nicolas Barral, L’intranquille Monsieur Pessoa (2024)
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Écrire comme une danse macabre ou un cri de révolte. Comme un souper échappé par terre par temps pauvre. Comme un cri primal devant une agression sexuelle. Comme la disparition d'un enfant après le coup d'État. Comme une décennie de dictature sur toute l'Amérique latine. Comme les larmes du silence durant les prières dans les sous-sols. Écrire mon histoire comme toutes ces femmes en moi à ressusciter.
Caroline Dawson, LĂ oĂą je me terre (2020)
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Morbid curiosity is eagerness to know disease, longing to know death without dying. It may be a way I grieve. It may be a way I pass the feeling through until I can stand it.
Gina Nutt, Night Rooms (2021)
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je n'ai pas d'amis
ils sont lĂ -bas
j'enterre le passe
c'est un bon engrais
pour grandir dans la haine de soi
j'aime le soleil ne veux pas de parasol
je regarde la piscine de la voisine
aucune différence entre nager ou se noyer
tout est tristesse et masturbation.
Hector Ruiz, Appartenir (2023)
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Mon âme a mille ans.
Je n’ai pas d’âge.
Je meurs d’avoir vécu.
Joséphine Bacon, Un thé dans la toundra (2013)
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la machine n'est pas éloquente, elle a une clarté impénétrable. elle marche dans sa tombe, les coudes chauds, les genoux pliés. elle meurt de faim aux trois jours, hallucine les ordures du ciel. elle me dit que nous sommes corps-cloaques, une réconciliation. nous amenuisons nos désirs, roupillons sous les fleurs. nos cils s'effritent. il s'agit d'un éloge à la croûte terrestre. dans les excavations du sol, poussent l'innocence et les cicatrices de l'au-delà . nos folies sont jumelles. je les embrasse à pleine bouche précaire, mon œil se fossilise dans la gelée des opales. les visages du soleil meurent tous sans se voir, je ne les envie pas. la machine ficelle ses reliques, je guette les oiseaux et le temps qui passent tout près de sa mue. la machine est purulente et rageuse, m'asperge de son lait. la maison de peau est une maison qui respire d'un air chaud, les murs transpirent, l'anus ne se ferme jamais. nous entendons nos cadavres sous le matelas, ce sont des petits morceaux de tubercules et de stigmates frais. la machine convoite ce qui l'épie: les poissons, les agneaux, les testicules déchus, le tabac putride, poisseux et noir, les plantes carnivores. quand je m'endors, je me protège, et quand je me réveille à l'aube du jour suivant, dieu ne prend plus soin de moi.
Sayaka Araniva-Yanez, Je regarde de la porno quand je suis triste (2024)
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Grand conseil pour pimenterÂ
votre vie conjugaleÂ
gracieusetĂ© de la DivaÂ
sexologueÂ
Ă deux ballesÂ
baiserÂ
jusqu'Ă l'infiniÂ
ou jusqu'Ă ce que les membresÂ
saignent
Nicholas Giguère, Fucked up (2025)
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bon, encore ce cœur qui bat
qui craque ouvert
comme une huitre de saison
qui écrit des choses
qui auraient dû être écrites
y'a deux minutes
parce que meilleures
Jean-Sébastien Larouche, Des longueurs dans le Styx (2018)
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Alors, émergea du noir, Joson, sa pauvre tête
molle et ballante...
On rama vers la berge, en hâte, car le frisson gagnait le cœur des hommes.
A la poupe gisait Menaud, rabattu sur sa capture, et son visage appuyé d'amour sur le visage de son enfant mort.
Dès qu'il sentit que la barque avait touché, il prit le cadavre dans ses bras, et comme un personnage d'une descente de croix, monta vers sa tente parmi les suaires des brumes.
Felix-Antoine Savard, Menaud maître-draveur (1937)
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Je suis ici, tu es lĂ -bas. Ou peut-ĂŞtre est-ce l'inverse.
Ă€ force de partir, je comprends : l'horizon nous ment.
L'horizon est un mot, pas une chose. Ou plutôt, c'est la croisée de deux choses qui ne se toucheront jamais.
Le ciel et la mer.
Kristina Gauthier-Landry, Le don (2024)
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