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La mort de belle

Les Ashby hébergent Belle, la fille d'une amie de Christine. Un soir que cette dernière est partie à une soirée chez les Mitchell, Spencer travaille dans son bureau à la maison quand Belle rentre et passe sa tête pour dire bonne nuit. Enfin, il suppose car il ne l'entend pas, tout occupé à son tour à bois. Le lendemain, Belle est retrouvée morte étranglée dans sa chambre. Spencer Ashby est la dernière personne à l'avoir vue et le premier suspect... Un roman dur remarquable de Simenon où un suspect innocent finit par devenir coupable à force d'être suspecté. 

7,5/10

La mort de Belle / Georges Simenon.- Le Livre de poche.

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Un été 79

L'été 79 sera l'été de tous les changements pour la famille Royer. Le père, Michel, cadre à la SNCF, ancien champion de judo, s'est laissé pousser le ventre et un peu macho, très beauf, n'en fait pas une à la maison. Il vient d'obtenir une importante promotion qui l'obligerait à quitter son domicile de l'Est de la France pour travailler à Paris la semaine. Andrée, la mère, directrice d'école, a perdu ses rêves et l'entrain de sa jeunesse. Elle s'apprête à quitter Michel. L'ainé des fils, Pascal, vingt-deux ans, arrogant et sur le chemin de la réussite, collectionne les conquêtes amoureuses. Philippe, quinze ans, est écrasé par l'aura de son frère. Il est plutôt rêveur, amateur d'Histoire et de littérature. Plutôt que de partir dans le Sud-Ouest chez les parents d'Andrée comme tous les étés, Michel propose de s'évader quinze jours dans les Alpes.. Un été 79 est un roman au parfum nostalgique qui parlera aux plus de cinquante ans ou à tous ceux qui ont connu l'ambiance des villages vacances. Entre randonnées, parties de pétanque, soirées disco et premiers flirts, Jean-Philippe analyse finement la psychologie d'une famille des années 1960-70 et l'ambiance générale d'un pays qui va basculer à gauche pour la première fois depuis le début de la Ve République...

7,5/10

Un été 79 / Jean-Philippe Blondel.- L'Iconoclaste.

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Rester en vie

Matt Haig raconte comment la dépression s'est abattue sur lui à vingt-quatre ans alors qu'il travaillait à Ibiza. Tout au long d'un récit facile à lire aux chapitres courts, il parle de son incapacité à vivre et comment et pourquoi il faut résister à l'envie irrépressible d'en finir, de mettre fin à cette souffrance sans fin car elle en aura une et finalement la vie n'en sera que meilleure une fois sorti de ce gouffre. Il détaille les raisons de rester en vie, les lectures qui l'ont aidé, les rechutes, l'importance des proches et notamment de sa compagne, ceux qui ne comprennent pas la dépression cette maladie invisible, les dépressifs célèbres et la méfiance qu'il faut garder envers les médicaments... Un récit de vie sombre et lumineux, comme la venue du soleil après l'orage, qui fait du bien.

7,5/10

Rester en vie / Matt Haig.- Philippe Rey.

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Kingdomtide

Un petit avion de tourisme s'écrase dans les montagnes du Montana. Une seule survivante : Cloris Waldrip, soixante-douze ans. Le pilote et son mari, ce cher M. Waldrip, sont morts. La ranger Debra Lewis carbure au merlot depuis qu'elle a appris que son mari vivait une triple vie mais elle est certaine que Cloris est encore vivante quelque part dans l'immensité de la nature sauvage. Contrairement à ses acolytes et à Bloor, un agent très spécial qui a été délégué sur les lieux de la catastrophe. Cloris est bien vivante et essaye de survivre et de rejoindre la civilisation tout en se plongeant dans ses pensées et son passé. Heureusement elle est aidé par un mystérieux homme des bois qui cache son visage derrière un masque... Kingdomtide est un roman d'aventures et de survie assez peu commun puisque l'héroïne est une vieille dame et les policiers sensés la retrouver des personnages farfelus ou déglingués par la vie. Un premier roman frappé et prometteur.

7,5/10

Kingdomtide / Rye Curtis.- Gallmeister.

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Strange Pictures

Strange pictures est un polar japonais très original où la progression et la résolution de l'intrigue sont accompagnées par l'analyse d'étranges dessins. Deux étudiants découvrent un blog à l'apparence banale où un homme raconte sa vie quotidienne avec sa compagne et la naissance de leur futur enfant. Mais la jeune femme meurt en couches. Les dessins qu'elle a effectués pendant sa grossesse font dire aux étudiants que sa mort n'est pas naturelle. Dans un deuxième chapitre, une femme vit avec Yuta, son fils de six ans. Le père est mort trois ans auparavant. Un jour le fils disparait en laissant un dessin de l'immeuble ou l'appartement qu'il occupe avec sa mère est comme tâché, barbouillé. La maitresse de Yuta soupçonne que l'enfant a été maltraité. Mais la vérité est tout autre. Ensuite un professeur d'arts plastiques peu aimé de sa famille et de ses élèves est retrouvé mort dans la montagne. Le dessin esquissé et froissé des montagnes qui l'entouraient est retrouvé dans sa poche. Est-ce un message pour les enquêteurs ? Toutes ces morts et disparitions sont liées et Uketsu, mystérieux écrivain dont on ne connait pas la véritable identité, mène le bal et le lecteur avec maestria dans un récit qui renouvelle le genre.

8/10

Strange Pictures / Uketsu.- Seuil.

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Cinéma : une chronologie du 7e art

Documentaire qui propose une chronologie du 7e art en alternant exposés sur des grands thèmes tels que les effets spéciaux, les stars, l'expressionnisme allemand, le western, la guerre, le néoréalisme italien, l'horreur... et doubles pages effeuillant les années depuis la naissance du cinema jusqu'en 2023. L'auteur, américain, fait une grande place au cinéma hollywoodien mais n'oublie pas les autres pays et les films cités, la belle iconographie proposée permettent au lecteur amateur ou spécialiste de se créer un panorama mental de la totalité de l'histoire du cinéma. Un beau travail de collecte et d'analyse.

8/10

Cinéma : une chronologie du 7e art / Ian Haydn Smith.- Du May.

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Qu'un sang impur

Matt boit tranquillement un verre à la terrasse d'un café parisien après le boulot quand tout à coup toutes les feuilles des arbres tombent et un vacarme retentit. Dans une cohue indescriptible, tout le monde se précipite vers les transports en commun et Matt arrive non sans mal chez lui ou il rejoint sa compagne Clem et son fils Téo dans un petit immeuble cossu de banlieue. Ils apprennent que le pays va être confiné suite à l'éruption d'un volcan en Roumanie qui a entrainé des tsunamis et peut-être atteint une centrale atomique.. Dans leur immeuble, il y a Joël l'écrivain pour enfants, Chantal retraitée complotiste, Yazid, Fatima et leurs enfants fervents musulmans et René et Jacqueline paisibles retraités. Tous s'entendent plutôt bien et s'entraident à l'occasion. Mais après que le Président lors d'une deuxième allocution ait affirmé qu'il n'y avait plus rien à craindre, Clem et Téo sont violemment agressés dans la supérette de leur quartier par des personnes pris soudainement d'une violence incontrôlable les poussant à dévorer leurs victimes. Un virus circule dans l'air et il ne reste plus qu'à se barricader dans l'immeuble et essayer de survivre tout en regardant le massacre se propager sur les chaines d'infos et sur internet. Qu'un sang impur est un roman post apocalyptique où un virus mystérieux transforme certains en monstres cannibales mais c'est surtout un huis-clos où l'auteur regarde à la loupe un groupe de personnes hétéroclites essayant de survivre ensemble et ayant toujours accès au téléphone, à la télévision et à internet. Il montre la complexité de l'être humain, à la fois veule, égoïste et cruel mais aussi solidaire, prêt à donner sa vie pour un proche et résilient. Un roman qui se lit avec avidité comme on regarderait Walking Dead ou The Last of Us.

7,5/10

Qu'un sang impur / Michaël Mention.- Belfond (Belfond Noir).

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L'ours est un écrivain comme les autres

Arthur Bramhall, professeur d'université, après avoir perdu un manuscrit dans un incendie, a mis toute son âme dans l'écriture de Désir et Destinée et il est sur d'avoir délivré un excellent roman. Pour fêter ça, il décide d'aller acheter du champagne et cache son livre dans une mallette au pied d'un arbre. Mais un ours l'a observé et alléché par un possible festin, s'empare de la mallette. Point de miel ni de gâteau mais des feuilles recouvertes de signes. Cependant, l'ours est attiré par quelques mots et se met à lire. Oui c'est un ours qui sait lire et il trouve le livre excellent. Il prend la mallette et se dirige vers la ville. L'ours devient Dan Flakes, écrivain charismatique invité sur les plateaux télé où sa parole rare et centrée sur la recherche de nourriture est interprétée comme des sentences pleines de sagesse. De son côté, Arthur Bramhall désespéré d'avoir perdu son roman, sombre dans la mélancolie et se terre dans une caverne pour l'hiver. Dan Flakes, malgré l'insistance de son éditeur, ne trouve pas ce second livre qu'il lui permettrait de vivre encore en homme. Et Arthur Bramhall sort de son hibernation pour poursuivre son voleur en justice... L'ours est un écrivain comme les autres est un roman que l'on lit le sourire aux lèvres où un ours entre dans la communauté des hommes sans que personne ne s'en rende compte. Mais Dan Flakes reste guidé par ses instincts primaires, en particulier la recherche de nourriture, ce qui donne lieu à des situations savoureuses. Comme le dit Terry Pratchett en exergue du roman : "très drôle, et sans doute vrai."

8/10

L'ours est un écrivain comme les autres / William Kotzwinkle.- 10-18.

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Les saules

Marie, 17 ans, la fille du pharmacien, a été retrouvée morte étranglée dans la coulée, le petit cours d'eau qui traverse Basse-Motte. C'est la petite Marguerite qui l'a trouvée mais son père Eugène n'a pas voulu s'attirer des emmerdes et a laissé les chasseurs prévenir les gendarmes. Toutes les personnes qui connaissaient Marie sont interrogées par André le gendarme local et Arlette l'enquêtrice venue de la ville : l'ancien petit ami, les parents, leur femme de ménage, les voisins, le grand propriétaire terrien... Se dessine ainsi le portrait d'une jeune fille qui sortait beaucoup, buvait, multipliait les conquêtes et cachait un lourd secret. Marguerite, idiote, lente d'esprit ou simplement taiseuse et différente, délaissée par des parents qui ne savent pas faire, cible des brimades de ses camarades, sait qui a fait du mal à Marie. Pourra-t-elle le dire ? Les Saules est un premier roman au sujet déjà vu mais au traitement remarquable. Un roman noir rural dans la campagne bretonne au sein d'un petit village où clapotent les non-dits, les rivalités et les ragots entre la boulangerie, le garage, le café et les cours de ferme. Alternants les points de vue, les interrogatoires et les scènes poignantes avec la petite Marguerite, Les Saules est une histoire prenante et Mathilde Beaussault une autrice à suivre !

8/10

Les Saules / Mathilde Beaussault.- Seuil (Cadre noir).

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Bastion

Jean-Marc, jeune retraité lyonnais, profite tranquillement de son temps libre entre courses au Super U et déjeuner à la brasserie Midi Minuit. Mais son meilleur ami Bernard se pique de soutenir Eric Zemmour pour les prochaines élections. Jean-Marc, de sensibilité de gauche, accepte de suivre Bernard dans se maraudes pour venir en aide aux sans-abris. Mais quand il se rend compte que les nouveaux amis de Bernard ne donnent qu'aux sdf blancs, qu'ils portent fièrement le crane lisse et le tatouage nazi, Jean-Marc décide de faire le sous-marin pour sortir Bernard de ce traquenard. Il découvre que Didier Barnier, un grand ponte du BTP lyonnais, tire les ficelles et prépare l'arrivée de Zemmour au pouvoir en échafaudant des actes terroristes sur le territoire. Plein d'idées malgré lui sur la préparation de certaines actions, Jean-Marc devient un des cerveau du dispositif tout en prévenant Xavier un gendarme de ce qui se trame. Mais quand il apprend que ce Xavier est de mèche avec l'ultradroite lyonnaise, Jean-Marc regrette aussitôt de s'être mêlé de ce qui ne le regardait pas... Dans Bastion, Jacky Schwartzmann est encore plus politisé que dans ses précédents romans noirs où l'humour et le comique de situation prévalaient. Ici il n'hésite pas à tirer à boulets rouges sur l'idéologie droitière, et à dénoncer le racisme décomplexé, la récupération politique et la manipulation des masses mais jamais au détriment d'une bonne intrigue et de situations savoureuses. Même si j'ai préféré la veine de Shit ! son précédent roman.

8/10

Bastion / Jacky Schwartzmann.- Seuil (Cadre noir).

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Dérive sanglante

Stoney Calhoun a tout oublié de son passé, un passé que l'on devine mouvementé, après avoir été traversé par la foudre. Il s'est réveillé dans un hôpital et à sa sortie, il a été attiré par l'Etat du Maine où il s'est installé depuis cinq ans. Il travaille dans pour Kate dans un magasin d'article de pêche qui propose également un service de guide pour les touristes amateurs de la canne. Un jour débarque un homme de soixante dix ans qui se fait appeler Fred Green désireux d'explorer un coin à truites dont il a entendu parler. Mais Calhoun ne sent pas le bonhomme et préfère rester au magasin à fabriquer des mouches. Il envoie son ami et collègue Lyle MacMahan pour accompagner le visiteur. Mais Lyle ne revient pas et Stoney le retrouve mort noyé dans un étang. Green a disparu. Calhoun décide alors d'aider le shérif local et se découvre un instinct et des ressources insoupçonnées d'enquêteur. On devine que Stoney Calhoun était un ancien policier, espion ou soldat au passé effacé mais aux réflexes intacts ; il est d'ailleurs visité régulièrement par un homme sans nom qui s'inquiète qu'il retrouve la mémoire. Stoney est tiraillé entre son besoin de solitude, l'amour qu'il porte à Kate et le désir de retrouver l'assassin de son ami. Dérive sanglante est un excellent roman, ancré dans le Maine profond, qui met en scène un personnage charismatique et amnésique que l'on se plaira à retrouver dans Casco Bay et Dark Tiger.

8/10

Dérive sanglante / William G. Tapply.- Gallmeister (Totem).

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Tssitssi

Elle ne veut plus qu'on l'appelle Hélène. C'est quoi ce prénom de vieux ? Sur les réseaux, son pseudo c'est Tssitssi et avec sa photo de profil en bikini, elle atteint les mille followers. En plus, grâce à Poppée, elle va pouvoir rencontrer un chugar daddy et négocier un salaire de 3000 euros en échange de sa présence. Ou 1000 on verra, même si Poppée veut prendre 50%. Mais Papa qui est vraiment trop saoulant ne doit rien savoir et la mère des jumeaux non plus. Et ça la gonfle d'aller aux séances de Niksarlian la psychologue, c'est pas ça qui va faire remonter ses notes ni lui donner accès aux hôtels cinq étoiles et aux douches de champagne... Hélène a seize ans et c'est elle qui raconte avec son bagout, son impertinence et surtout sa candeur, son désir de gagner beaucoup d'argent, son quotidien entre son père trop papa poule et "la mère des jumeaux" qui nous apparait un peu absente, on comprendra pourquoi. Mais la rencontre réelle avec ces hommes qu'elle croyait pouvoir manipuler s'avèrera une expérience perturbante et désillusionnante. Claire Castillon réussit plutôt bien à entrer dans la tète d'une ado d'aujourd'hui, une ado certes perturbée par un évènement traumatisant mais qui est comme tant d'autres attirée par le bling-bling, l'argent facile et les fausses promesses des influenceurs des réseaux sociaux. Mais c'est surtout par petites touches que l'on découvre sous le vernis frondeur de Tssitssi, la profonde humanité d'Hélène.

7,5/10

Tssitssi / Claire Castillon.- Gallimard.

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La nuit ravagée

Saint-Auch, petite ville dortoir près de Toulouse dans les années 1990. Quatre lycéens, Alex, Tom, Mehdi et Max, bientôt rejoints par Lena font les quatre cents coups, glandent dans des serres désaffectées et fument des joints à l'occasion. Comme d'autres enfants ou adolescents, certains ont des parents divorcés, d'autres ont perdu un être cher, subi des violences familiales ou se sont fait harceler à l'école. Dans l'impasse des Ormes, une maison abandonnée les attirent et les repoussent en même temps. Et quand un adolescent du quartier est retrouvé mort, les bras ouverts vidés de leur sang, les cinq amis ne croient pas à la thèse du suicide mais plutôt à l'influence maléfique de la maison de l'impasse qui va bientôt infiltrer leurs rêves et leur réalité... La nuit ravagée commence comme un roman social et provincial à la Nicolas Mathieu sur les vicissitudes d'un groupe d'ados des années 1990 pour ensuite basculer dans le fantastique avec une maison hantée par un crime horrible du passé et par une entité qui se nourrit des désirs des êtres qui osent franchir son seuil. Jean-Baptiste Del Amo rend hommage aux lectures et aux films d'horreur qui ont bercé son adolescence dans un roman haletant, inquiétant, dérangeant qui n'a rien à envier au Ça de Stephen King.

8/10

La nuit ravagée / Jean-Baptiste Del Amo.- Gallimard.

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Patronyme

Vanessa Springora apprend la mort de son père alors que sort son premier livre Le Consentement. Celui qu'elle n'a vu qu'épisodiquement au cours de sa vie est mort seul dans un deux-pièces de Courbevoie. Quand elle se rend dans l'appartement pour trier ses affaires, Vanessa Springora découvre un taudis dans le salon qu'occupait son père et une chambre musée inoccupée depuis le décès de sa grand mère neuf ans plus tôt. Elle connaissait peu son père, grand mythomane et affabulateur qui s'inventait mille vies alors qu'il ne restait jamais longtemps en poste, avait divorcé trois fois et s'était réfugié chez sa mère passé la cinquantaine alors qu'il était au chômage pour ne plus repartir. Elle découvre au travers d'une lettre que son père cachait son homosexualité, ce qui pouvait expliquer une partie de son comportement. Mais le sujet du livre va se décentrer sur son grand-père d'origine tchèque, Joseph. En vidant l'appartement, elle découvre deux photos de celui qu'elle adorait quand elle était petite. Sur l'une, il est en tenue d'escrime et arbore des signes nazis, sur l'autre il porte un uniforme orné de la croix gammée. Sous le choc, Vanessa Springora entreprend une enquête historique, part en Tchécoslovaquie sur les traces de la jeunesse de son grand-père et rencontre avec émotion une membre éloignée de sa famille. Tout en essayant de comprendre le passé et les motivations de son père et de son grand-père, Vanessa Springora entame une réflexion sur le patronyme, le nom de famille, son origine et sa répercussion sur les descendants. Un travail historique d'envergure hanté par les mensonges et les faux-semblants.

7,5/10

Patronyme / Vanessa Springora.- Grasset.

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Le ciel de Tokyo

La Gaijin House accueille les étrangers de passage dans ce quartier reculé de Tokyo. De passage plus ou moins long, de quelques jours à plusieurs années comme Flavio le Brésilien érudit qui est là depuis onze ans mais qui malgré ses études au Japon n'a pu décrocher qu'un travail alimentaire à mi-temps. Lénine le Belge vit en louant sa compagnie à de riches bourgeoises tokyoïtes. Camille a fui de France un mariage étouffant et ne sait absolument pas ce qu'elle fait là ni ce qu'elle va faire. Lénine tombe amoureux de Camille mais elle tombe dans les bras de l'Allemand Marvin qui part ensuite rejoindre un centre bouddhiste.. Sous Le ciel de Tokyo des amours éphémères se font et se défont... Mais ce roman doux-amer raconte aussi l'histoire de cette vieille bâtisse, ancienne maison de passe, qui craque et qui suinte, humide et bruyante, qui a vu défiler des générations de routards et de voyageurs égarés et en filigrane l'accueil réservé aux gaijin, les non-japonais.

7,5/10

Le ciel de Tokyo / Emilie Desvaux.- Rivages.

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La guerre par d'autres moyens

Dan Lehman, ex-président la République de gauche s'est remarié avec l'actrice allemande Hilda Muller après avoir divorcé de Marianne Bassani, écrivaine, avec qui il a eu trois enfants. Désœuvré depuis sa défaite à la présidentielle, Lehman sombre dans l'alcoolisme mais s'occupe avec amour de sa dernière fille, Anna, qu'il a eu avec Hilda, une petite fille née sourde et muette. Romain Nizan, réalisateur sulfureux qui n'a plus que des contrats publicitaires, se voit proposer l'adaptation du dernier roman de Marianne, l'histoire d'une femme qui meurt sous les coups de son compagnon, et il choisit Hilda comme actrice principale. L'occasion pour cette dernière de retrouver un grand rôle à l'aube de ses quarante ans et pour le réalisateur de revenir sur le devant de la scène après l'échec de ses derniers films. Le film est pressenti pour être présenté à Cannes mais des rumeurs de violence sur le plateau de tournage font surface... Karine Tuil reprend une citation de Clausewitz ,"La guerre est la simple continuation de la politique par d'autres moyens", dans son dernier roman pour poser une question : que devient un homme politique qui après avoir tutoyé les sommets du pouvoir n'en a plus aucun ? Son Dan Lehman n'est pas un personnage unidimensionnel. Il est complexe, fort et faible, violent dans ses rapports avec certains mais doux avec ses proches mais tout son être devient enkysté dans sa dépendance à l'alcool, ce qui précipitera sa chute. On suit aussi les coulisses d'un film qui sera peut-être un chef d'œuvre mais adapté d'une romancière qui aime encore son mari cinq ans après avoir été quittée, réalisé par un metteur en scène malsain et ambigu, jouée par une actrice prête a tout pour retrouver la lumière des projecteurs. Sur une trame très actuelle (metoo, wokisme, violences faites aux femmes notamment par des hommes issus du milieu culturel), Karine Tuil fait vivre avec virtuosité des personnages tourmentés par leurs ambitions, leurs démons ou leurs désirs dans un passionnant roman balzacien.

8/10

La guerre par d'autres moyens / Karine Tuil.- Gallimard.

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Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi est iranienne et professeure de littérature. Elle raconte ses années d'enseignement et en filigrane l'Histoire de son pays depuis la chute du Shah et la mise en place de la République islamique jusqu'au mitan des années 1990 où elle partit enseigner aux Etats-Unis. Elle dit la difficulté d'enseigner sereinement à l'université surtout pour une femme, sans cesse contestée par les hommes et les gardiens de la Révolution. Elle décide de quitter l'université et de créer un cercle littéraire chez elle avec des étudiantes volontaires. Il est question de Nabokov, Henry James, Saul Bellow, Jane Austen... On y parle littérature mais c'est surtout une expérience de sororité ou des femmes peuvent parler librement de ce qu'elles traversent. Certaines ont été emprisonnées, d'autres mal-mariées ou maltraitées par leurs maris, nombre se désespèrent de trouver l'amour. Reste la lecture. Un essai important qui documente de façon inédite un pan de l'Histoire iranienne.

7,5/10

Lire Lolita à Téhéran / Azar Nafisi.- Plon.