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roleplay-and-sarcasm · 9 years ago
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Autour du RP : La Guerre des Mots
Bonjour à tous !
Rassurez-vous, il ne sera pas question ici de la beauté de l���écriture, de son pouvoir de rapprocher les gens ou de leur apprendre la beauté de notre langue lorsque maîtresse orthographe est domptée. Tout cela, d’autres que moi savent le défendre, et bien mieux que je ne saurais le faire. Non, pour ma part, fidèle à moi même et au nom de ce blog, je vous révèlerai le côté obscur de l'écriture rôliste, la Guerre des Maux... pardon, des Mots, dans toute sa terrible réalité.
Mais avant de sortir les squelettes du carton Halloween, commençons par le début. Le jeu de rôle, pour rappel, consiste à créer puis interpréter un personnage fictif vivant ses aventures dans un univers virtuel, ou encore jouer son propre rôle dans une situation fictive — par exemple simuler un entretien d’embauche, mais c’est curieusement beaucoup moins amusant. Il existe plusieurs formes de jeu de rôle, dont la plus connue consiste à se rassembler en petit comité autour d’un maître de jeu qui mènera les joueurs dans une aventure de son cru. Mais de telles réunions nécessitant la disponibilité de tout le monde au même moment, ainsi qu’une aptitude sociale dépassant celle du félin moyen, d’autres joueurs préfèrent pratiquer ce loisir à l’écrit et sur internet, comme c’est mon cas.
Et c’est là que tout a dérapé
Ah, Internet. Un monde de merveilles, qui permet de rassembler martiniquais et parisien, réunionnais et québécois, bref, francophones de tous les horizons — ou anglophones, ou sinophones, mais on parle de la sphère francophone, là, ne chipotez pas — sur un même support virtuel, à se raconter moult aventures trépidantes avec force détails et circonvolutions textuelles. Là, nous pouvons inventer des hordes de personnages et leur faire subir tous les sévices possibles… heu, pardon, leur faire vivre mille et une fantastiques aventures dans des univers tantôt réalistes, familiers, horrifiques, mystérieux, et plus encore. Et tout ceci avec un seul instrument : l’écriture.
Et c’est là que les choses ont dérapé. Le terrible pouvoir de l’écriture a échappé à ses utilisateurs, et le cauchemar a commencé. Les rôlistes textuels aiment les mots. C’est avec eux qu’ils font vivre leurs personnages adorés, avec eux qu’ils créent leurs histoires. Alors beaucoup d’entre eux en viennent à vouloir plus, à vouloir mieux. Et l’on aura beau répéter encore et encore que la beauté du jeu de rôle textuel ne passe pas par la quantité, la passion est sourde à la raison. Et voilà que désormais, pour certains rôlistes, écrire plus, c’est écrire mieux. Écrire est devenu l'essence même du jeu, voire un impératif. Et pourtant, parfois, l’inspiration n’est pas au rendez-vous. Parfois, la petite étincelle de créativité nous fait défaut. Mais c’est trop tard, alors. Il faut écrire. Il en va d’une réputation, d’un prestige, d'une notion de respect. Écrire moins, ce serait trahir ce à quoi on a dédié tant d’heures, ce serait trahir ses partenaires de jeu, ses lecteurs fidèles, ou les règles en place. Ce serait sous-entendre que votre interlocuteur n'arrive pas à se montrer assez intéressant pour déclencher votre verve. Ce serait peut-être même admettre que l’envie n’y est plus, que l’enthousiasme s’est estompé, que jeunesse se passe. Par les dieux, devenir vieux et blasé ?! Tout mais pas ça !
Alors vient l’écriture pour écrire. L’écriture de remplissage. Les techniques secrètes du rôliste en mal de mots. Un art secret et honteux qui ne s’enseigne à personne, qui s’apprend par l’observation et la roublardise, dont on dit du mal en coulisse, sans oser admettre avoir, parfois, cédé à la tentation d'en faire plus que nécessaire. Et le moment est donc venu de vous révéler ces techniques imparables qui sauveront certainement vos textes du pilori de la honte.
Comment écrire pour écrire
Si vous faites partie de mes lecteurs réguliers, vous avez peut-être remarqué que j'aime les listes. Avec un peu de chance, vous partagez ce goût. Avec de la malchance, vous êtes bien ennuyé, parce que justement j'ai là sous le coude une série d'astuces ré-vo-lu-tion-naires pour compenser le manque de tonus littéraire de vos textes par un peu de remplissage. L'aspartame du roleplay, en fait, de quoi rajouter un peu de sel.
Le résumé de l'épisode précédent : Aficionados des séries télévisées, sans doute connaissez-vous ou avez-vous connu ces résumés rapides sensés synthétiser ce qui s'est passé jusqu'alors dans l'histoire. Pourquoi ne pas faire de même pour votre RP1 ? Après tout, votre partenaire pourrait avoir la mémoire courte, ou bien se perdre dans ses multiples histoires en cours avec ses différents personnages. Il sera donc assurément ravi de pouvoir lire à chacun de vos RPs une synthèse complète et détaillée de tout ce que vous avez écrit depuis le début. Même si celui ci date de moins de trois messages.
De la répétition naît la connaissance : Les dialogues dans certains RPs ont une intéressante tendance à prendre un volume non négligeable, parfait reflet de la réalité où les gens aiment à écouter quelqu'un monologuer pendant un quart d'heure, en prenant des notes pour y répondre point par point — mais ça, je crois bien en avoir déjà parlé avant. Pour venir en aide au lecteur qui aurait perdu le fil de la conversation, n'hésitez donc pas à réintégrer l'intégralité des lignes de dialogue du ou des messages précédents à votre propre message, votre quota vous en sera reconnaissant !
Plus c'est long, plus c'est bon ! : Il vous manque quelques mots pour atteindre le seuil de la perfection ? N'hésitez pas à dégainer métaphores imagées et tournures galvaudées pour exprimer les idées les plus simples en un maximum de mots. Le matin deviendra alors "les premiers rayons de l'astre du levant caressant doucement les toits de la ville, chassant les restes épars de la brume nocturne". En plus, c'est joli.
Musique, maestro : Si l'inspiration continue à se faire réticente, trouvez-la ailleurs ! Prenez une de vos chansons favorites et égrenez-en les paroles au cours de votre message de roleplay. Cela donnera instantanément un côté profond et recherché à votre texte, et posera l'ambiance facilement, le tout sans trop vous fatiguer. Parce que tout de même, le jeu de rôle textuel, c'est un loisir, faudrait pas pousser non plus.
Retour vers le passé : Las du présent et de l'absence d'évènements passionnants à conter ? Retournez donc vers le passé. Voilà que votre personnage est saisi d'une vision puissante venue de son passé, qu'il vous faut impérativement narrer avec force détails. Qu'il soit le seul à savoir ce qui lui passe par la tête n'a aucune forme d'importance, nul doute que votre partenaire de jeu sera passionné de savoir tous ces détails d'un passé révolu, traumatismes anciens et vieux amours oubliés.
La complainte du narrateur : Dans un jeu de rôle textuel, le narrateur, qu'il soit le personnage lui-même ou une sorte d'observateur omniscient, se permet occasionnellement des considérations plus ou moins personnelles, sur le temps qu'il fait, sur le destin ingrat ou encore sur l'opinion du personnage envers ses interlocuteurs. C'est donc l'occasion pour vous de lui répondre, de lui expliquer gentiment, par exemple, qu'il fait fausse route dans ses considérations. Ou encore de lui indiquer comment vous prévoyez d'agir dans un avenir proche, à condition que votre partenaire de jeu daigne saisir cette perche que vous lui tendez au lieu de s'obstiner dans cette voie qui ne vous inspire pas. Certes, cela ne fait guère avancer l'action, ces débats silencieux, mais il faut bien remplir ces quinze lignes qui vous manquent...
Le système D : Lorsque les mots font définitivement défaut, c'est le moment de faire subir à votre texte le traitement de la grenouille2. Par quelques astucieux effets de style, vous pouvez lui donner un air plus impressionnant, plus imposant. Lettres espacées, marges réduites, ajout d'images qui bougent en boucle et hypnotisent le lecteur, sauts de lignes à l'envi, et magie, votre texte semble s'étendre à l'infini, et on n'y verra que du feu. Peut-être. En croisant les doigts.
Avec tout cela, vous serez définitivement parés pour affronter le monde infiniment sérieux et prestigieux du jeu de rôle textuel où l'écriture, c'est du sérieux, c'est pas pour les kikoos. À vous la fierté des messages de 5000 mots, compteur en main — c'est tellement plus drôle de passer tous ses messages au compteur en plus du correcteur — à vous le plaisir d'attendre une réponse toutes les trois semaines, à vous la sensation grisante de savoir ce qu'est le "vrai" RP, contrairement à tous ces naïfs qui se contentent de quelques lignes par message. Comme si on pouvait raconter une histoire avec aussi peu de mots.
Heureusement que je suis là, hein ?
Le terme RP désigne ici soit un message de jeu de rôle («J'écris mon RP») soit une suite de messages constituant une session de jeu, une situation en cours. Par exemple sur un Forum RPG, un RP peut désigner aussi bien un post (message) qu'un topic (sujet) entier. Cf. mon passionnant glossaire à ce propos. ↩︎
Cf. La Fontaine, La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf. Je ne sais pas vous, mais les poésies de la Fontaine me faisaient sourire quand j'étais petite... alors que maintenant, je les trouve vaguement glauques. ↩︎
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