Tumgik
alexxxxxxxxandre-blog · 6 years
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Le dément
Et parfois la tĂŞte se creuse
mille fils partent du milieu de la tĂŞte
par-delà la tête, au-delà colorés, fins
au milieu de la tête s’épanouissent
creusent l’espace, le magma,
la douleur du délire s’énonce ainsi
s’annonce, épouse la tête,
la forme s’approfondit… c’est un grand espace
quelque chose physique, le dément
aux couteaux, qui s’agitent, il se ronge
les dents, amusé, mille fois s’approfondit
dans les dents (j’en ai plein la mâchoire,
de la couleur, des Ă©motions plein lĂ )
et toujours creuse le magma plus profond,
l’espace s’étend, alourdit la tête,
abasourdit mes défenses, la grande chute
dans le corps, la dégringolade, l’espace
au milieu du corps maintenant, immobiles
mes dents, puissante la puissance de lui,
le dément noir, caché, il me surprend
la racaille Ă  tabasser! mais dites-lui!
qu’il arrête d’aiguiser les couteaux!
je n’en peux plus de son souffle…
je veux mourir, sans honte, bien mourir,
quand il est là, s’approche, le bout du museau,
ne plus dégringoler le long des lignes
dont mon corps est plein, imaginez!
des lignes rouges, roses, blanches
le long de la nuque, le long des couteaux
du dément, son rire (c’est partout son rire)
le rire du dément dans ces lignes,
et devoir pour la survie pour la danse
danser autour d’elles, devoir les aimer!
imaginez la danse à l’intérieur du corps…
les mots manquent pour dire cela, et
toujours l’enclos de la bouche dit rien,
y a rien Ă  dire puisque les mots se
font tabasser par le dément, le sale dément,
le chien de Protée aux mille sarcasmes!
l’entendez-vous qui me gueule dans la bouche?
moi je l’entends… il habite en moi depuis
tant d’années… à vomir sa substance… à
marcher la nuit pour l’extraction du délire…
le long délire bleu de la nuit… ah! écoutez!
et la pensée vit tapie dans l’ombre...
là... à l’arrière du crâne... près des oreilles...
satisfaite... grande… le sourire aux lèvres…
je les sens ses petites lèvres de lion… l’affamée…
et le rire chaud du dément s’avance alors,
la goulue de son rire, je veux dire : l’haleine et la vacance en même temps, de l’espace normal de la tête, la peau normale de la pensée s’estompe (magnifiquement),
se retire comme la mer par la marée,
la couleur après la couleur, la chaleur se fait
au-devant du crâne, et quand il répète la musique,
la boucle de la musique au milieu de la tĂŞte
à me rendre fou! car jamais il ne s’arrête!
croît en moi alors l’arête roublarde!
celle qui me cogne Ă  mes parois
(à l’intérieur de la tête) fracasse la face
contre la musique, toujours qui boucle
son tour derrière le front, je suis rendu fou!
et parfois (parfois!) ça gicle sur ma mâchoire,
des taches éparses dans la mâchoire,
roses surtout, à portée des dents,
je bascule la tête, j’amorce la danse
libératrice de la mâchoire,
je gémis pour éteindre la douleur,
goutte Ă  goutte qui rejoint le clinamen
du monde… et toujours, je retrouve
le sentiment de la chute, le long
du grand chemin rocailleux qui parcourt
la pensée, aïe! aïe! j’en ai assez ! assez !
assez ! assez ! je suis ivre de toi !
toi le dément moqueur ! toi le paladin qui
transperce d’airain mon esprit vulnérable
et fatigué ! le farceur inarrêtable ! moi la proie facile !
toi la bouillie de lumière collée à mes parois !
je suis ivre de toi ! tu te joues de ma face
apeurée ! je suis ivre de toi ! ivre de toi oui !
tu dodelines ma pensée au-dedans de toi !
car je sens la chute ! je dégringole !… envie de hurler, dans la salle de bain... sentir la bouche
tendue par le cri... la tête disparaître
avec lui, pour qu’ils se confondent en un cri,
bientôt peu de vent, bientôt disparue…
j’aimerais tant ça… aboutir à ce cri
de conclusion (la belle fin!)... crever
mon ampoule venteuse! mourir enfin !
Et se retrancher (pour toujours!) au fond du délire, malaxer les mauvais sentiments,
ronger la langueur des jours,
aimer la plaque de verre qui traverse le crâne !
car j’assouvis le délire !
je le traverse autant qu’il m’égare
et quand je dis la plaque de verre
je veux dire cette Ă©troite Ă©motion de loup Ă©mu
l’idoine qui se plaque l’un contre l’autre
et leur engeance, la grande fissure grise
et transparente de la réalité conquise
— car le dément conquiert et soumet,
d’un coup de rire (un seul!)
et moi je suis un petit Matamore,
je sens la fanfaronnade s’estomper petit à
petit dans l’ivresse du délire,
et fanfaronner de quoi ? d’avoir soumis
le dément ? contourné les couteaux ?
aimé ce qu’ouvrait le délire ? —
pauvre petit bonhomme ! pauvre chat apeuré !
petite chose dans le ballot du dément !
je suis ivre de toi oui ! triple lutte en mon visage, crache ma face! vas-y! libère-moi de tes mains petit bourreau! que cesse la crispation de mes muscles pour la contenance de la bonne face! car surtout (la première règle) c’est ne rien montrer aux autres, pas laisser dépasser le petit bout de quoi qui révélera l’édifice secret du dément — surtout, tout cacher derrière la face neutre et l’éclat amusé des yeux pris par le dément,
continuer à retenir la stéréotypie malade des bras et des mains, pas faire les gestes de la libération et du sacrifice ! pas se frotter la main contre l’omoplate, pas casser le coude deux fois par seconde, pas agiter la jambe le long de la danse du dément,
pas crisper la bouche pour l’extraction du délire,
pas gémir les mains contre la bouche, pas
casser la tête contre les murs... ah oui! ah ! oui ! j’avais pas parlé de ça encore... le désir de la tête éclatée contre les murs —
la tête contre les murs naît du noeud dans la tête,
le noeud du dément (eh oui! ses magouilles petites n’ont jamais de fin! trop facile!) démange agace racle la paroi de la tête et ne se défera que contre les murs, fracassée la tête ainsi dénouera le noeud, et imaginez la joie ! d’avoir défait le noeud ! par le simple claquement de la tête ! moi je pense — ça vaut le coup...
mais je ne peux le dire... on aurait trop peur... le dément doit rester caché... qui rôde...
mais j’imagine la soulage immense dans le corps lorsque le noeud est défait ! pour ma sauvegarde, le noeud a perdu de sa vigueur, l’abilify a estompé sa gaillardise, qui a permis aussi l’élucidation du délire! car avant, l’œil pas décillé, je voyais même pas la face du délire, j’étais la même plaque de verre que lui, pas même différent…
là est le secret du délire froid et sec,
la gabegie froide du dément ! qui me fait croire…
que… tout est là… inséré dans le creux du cerveau… qu’à bien macérer la viande
de la pensée… quelque chose sortira…
que j’en serai plus fort… roucarné de rouille, aboli par le bibelot… hein ? y a quoi ?
je me fatigue dans l’errance, un moment
je m’arrête, j’applaudis plus tout ça,
ça continue bien sûr… mais je n’en peux mais —
alors l’errance commence, la vraie celle-là,
en-dehors de toute joie, car c’est moi alors
qui creuse le noir, avec mes petits doigts,
dans le lit, bercé par le flot du rire du dément,
car il encadre tout bien sûr ! je ne quitte pas
le périmètre ! sale dément ! tu m’auras donc !
et si je ne quitte plus le lit, Ă  ne plus mĂŞme pisser,
c’est pour accueillir ta fureur, sentir tes
dents malaxer ma pauvre pensée… me faire
vomir dans ma salle de bain! je vomis parfois
les deux doigts dans la gorge, pour sentir
le contenu de mon estomac basculer de bas
en haut, surtout cette sensation de libération :
dans la poubelle, le vomi ! loin de moi ! le vomi
loin de moi ! avec lui, la pagode sale du délire !
pour un temps ! car seul un temps m’est accordé
hors du délire, un petit temps d’ombre et de coton, doux cet espace, un peu
de soleil sur mes mains, mais revient toujours le délire du dément, sa face, ses sales
dents, le lion solitaire qui m’habite…
car le dément si je l’accueille aussi,
c’est pour ce qu’il creuse au fond
de mon ventre, la danse belliqueuse de
bleu et de noir au fond du ventre,
la petite lumière d’or qui ouvre la tête,
l’irise, la couvre délicatement de violence
et de lumière, car le dément si —
n’est pas sans prétexte ni charme
il me séduit, la virevolte de la pensée
au-devant de lui, car quand il prend le corps
plus rien n’égaille l’émotion ! et la
grande chaleur de celui qui gagne me prend !
vous savez quoi ? la tête m’explose de toute cette pensée!
maudite pensée ! et j’aimerais dire
(j’aimerais! mais on dit quoi dans
ce petit langage troué de puces?
dites-moi quoi ! moi je suis épuisé d’avoir essayé !
je n’en peux plus ! on dit rien ! tout s’échappe
entre nos doigts ! la pensée c’est du sable,
nos mots pas mieux ! il nous manque cent
mille concepts ! au minimum ! il y a une douleur
pas dite, celle de la langue qui doit
s’arrêter car les mots manquent...
celle de la pensée qui se ramifie au plus
près du neurone pour épuiser
le petit sens... qui manque...
pourrait faire notre sentiment...)
je ne sais plus ! j’ai perdu le fil !
encore une humiliation du corps...
alors je vais dire ça ! écrire dans la forme du langage  c’est déjà dire non au dément,
à l’haleine et aux dents du bandit
préférer aplatir le délire dans le blanc du verbe,
oui! oui! c’est ça l’exacte sensation :
aplatir, s’aplatir la gueule déformée
du dément dans le langage
pas pour l’airain ou l’invincibilité
(non pas ça, vraiment pas ça)
plutĂ´t pour trouver le rythme oĂą caler le corps,
l’arrondir de trop de forme, immobiliser
le dément, casser ses petites jambes
torses pour la grandeur du langage
— au fond, dire quoi? rien que la petitesse
invraisemblable, la folle grandeur de l’espace
du dément, et le combattre pied à pied,
douloureusement ça c’est sûr, avec l’amour
du dément, circonscrire la rage
au-delà des fils irisés du cerveau /
ah mais que veux-je dire lĂ ? essayez de sentir
lisez lentement, gueulez ! c’est important !
important la configuration du verbe !
c’est pour la danse que j’écris…
pour la danse dans le corps
que m’offre le dément...
Le dément se ronge les dents en mon intérieur,
je sens ses petites dents tapoter la paroi
de la pensée, tâter le terrain pour l’envahir,
la musique résonne en moi… on devient fou ici…
j’ai envie de vomir l’intégralité de mon corps —
je suis allongé sur le lit, malade du dément,
qui revient, me plonge dans l’eau bouillante
des pensées noires, me donne l’envie
de couper les veines pour l’extraction de la douleur,
qu’elle s’en aille dans le sang ! j’ai si mal
à la tête, l’envie de l’éclater avec un marteau,
c’est lui le marteau oui ! qui me tabasse la face
aujourd’hui, sous le grand soleil du monde,
les rayons de l’automne moussant le ciel,
la mousson de la lumière, délicate, c’est
le tissu précieux du ciel, notre seconde peau,
on est rien que ça, à se ramifier jusqu’au
bout de la pensée, cette robe délicate de la
lumière en automne, rien que nous,
image adéquate à se jeter sur la face pour
la consolation d’être un corps… le soleil
s’étend le long de ses rayons, indolent
dans sa douceur, je recueille un peu de cette
lumière sur ma peau, mes mains la recueillent,
et je ressens en cet instant — comme est
douce parfois la sensation de vivre, qu’elle
fait un poids précieux dans la balance
quand monte en moi la haine et le magma —
mais toujours revient le dément… il perce avec douceur
la quiétude de la pensée… je sens l’espace chaud
qui l’annonce, au-devant du crâne
ses petits pieds de loup, et l’excitation
qui l’accompagne, seule interrompue par le cri
brusque et soudain, la torsion de la bouche
et qu’il me faille craquer la pression
du délire, tout de suite! ne pas laisser
l’extension du magma se faire,
calmer là la prétention du dément…
et parfois je deviens irascible… monte dans ma
tête l’énergie… incroyable! dévastatrice de ma
gorge déployée dans des cris ! le démon !
saisi ! ah ! j’aimerais hurler ! et tout me vomir !
l’intégralité du corps par la gorge ! tout
l’estomac passé par la gorge ! j’aimerais
aimer cet espace lumineux de l’excitation,
m’en faire un manteau pour les jours sans,
et abjurer tout autre état de la pensée !
le corps bondit, se tord… la grande musique
se soulève au milieu de la tête, commence
à tabasser le rythme, ouvre les meurtrières
refermées de l’esprit indolent, rabat les parois
sur la crispation, imaginez! votre esprit
pris dans la parade des couleurs de la pensée!
parfois le fauve rugit Ă  travers tous les petits
plis de la pensée, la circonvolution s’agace,
manifeste, rit de tout cette pensée déversée,
par terre, là devant nous, à mes yeux écarquillés !
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