Tumgik
duckbookreview · 8 months
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Le Crime Parfait d'Agatha Christie, Bénédicte Jourgeaud
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Reçu comme cadeau de Noël parce qu'il avait été confondu comme étant réellement un livre de l'autrice.
[CETTE CRITIQUE CONTIENT DU SPOIL]
Commençons par le commencement et sûrement ce qui appelle le plus de commentaires: le titre. Très honnêtement, je n'apprécie que très peu l'idée d'utiliser le nom d'une autrice classique, morte depuis maintenant un moment, pour publier avec son nom en énorme sur la couverture. Ce n'est rien de nouveau, on a déjà vu ce genre de roman paraître pour des personnages tels que Sherlock Holmes, ou plus récemment Arsène Lupin si l'on veut faire preuve d'un peu de népotisme franchouillard. Des personnages d'auteurs depuis longtemps décédés, réincarnés par la plume d'un autre. Sauf qu'ils ne se limitaient qu'à ça: des personnages. De plus, les livres de ce genre ont la fâcheuse tendance à commencer par être guidé par une volonté noble (d'hommage, par exemple), avant d'être perverti par la force inéluctable du consumérisme. Ce qui en fait généralement, il faut le dire, de très médiocres romans. Le livre a été édité deux fois, avait l'air d'avoir reçu une réception correcte, et on me l'avait offert, j'ai donc voulu tenter l'expérience. Même si d'autres livres du même acabit ne m'avait pas offert satisfaction, celui-là pourrait très bien faire exception!
Ici cependant, le roman va bien plus loin que simplement reprendre les personnages d'Agatha Christie et prend le point de vue de l'autrice elle-même, en 1926, alors en grande difficulté suite à la demande de divorce de son mari. Elle s'engage alors dans un voyage au détour d'une coïncidence bienheureuse, qui la mènera jusqu'à un bateau, sur lequel les intrigues de ses romans vont peu à peu se réaliser et prendre vie. Le roman prend d’énormes libertés sur la description de la vie d'Agatha et sa manière de réfléchir, la narration se faisant avant tout à la 1ère personne et cela m'a gêné plusieurs fois dans le livre mais nous y reviendrons quand je mentionnerai le dénouement.
J'ai donc entamé ma lecture plutôt sceptique, mais ouvert d'esprit. Cet état s'est prolongé quelques temps avant que je sois mis face à l'évidente recherche biographique qu'avait effectué l'autrice sur Agatha Christie au fur et à mesure des descriptions et dialogues, que j'ai honnêtement trouvé plutôt bien fait. C'est donc en de meilleures dispositions que j'ai continué ladite lecture et que j'ai pu remarquer quelques références et choses qui m'ont intriguées, autant en des termes positifs que négatifs.
Tout d'abord, j'ai pu constater que certains noms de personnages des romans de Christie (majoritairement ceux du Crime de l'Orient-Express en fait) revenaient à plusieurs endroits. J'ai d'abord pensé à une référence innocente, avant de me rendre compte que cela faisait réellement partie intégrante de l'histoire. Plus encore, si vous n'avez pas lu beaucoup d'Agatha Christie, préparez-vous à ce que l'autrice de ce roman vous les spoil salement. Ainsi, le Crime de l'Orient-Express, le Train Bleu, et le Meurtre de Roger Ackroyd sont à la fois référencés et complètement et entièrement divulgâchés au sens le plus strict du terme. Selon son l'intrigue Christie écrit la mort des passagers, qui meurent ensuite le lendemain de la manière exacte dont il est écrit. De plus, les personnages meurent de la même manière et pour les mêmes raisons (allant jusqu'aux mêmes fausses identités des victimes) que dans les romans dont Bénédicte Jourgeaud reprend sans honte les intrigues. Ainsi, il se crée la désagréable sensation que l'autrice semble prétendre que les meurtres se déroulant à bord du Sphinx (le bateau sur lequel se passe la majorité du roman) ont inspiré les véritables plus grand succès de Christie, et donc ainsi que cette intrigue a inspiré la véritable Christie. Cela n'est bien sûr pas le cas, à moins d'un énorme trou dans l'espace-temps qui m'aurait échappé, et je ne crois pas l'autrice assez bête ou prétentieuse pour tenir ce genre de propos. C'est cependant l'impression que cela m'a laissé, et les impressions étant tout ce que je cherche à retranscrire ici, la voici. Une très forte impression de flemme, justifiée selon moi cette fois, s'est aussi faite ressentir. L'autrice n'a pas eu besoin de trouver des morts originales à ses (ou peut-être faudrait-il dire "ces"?) personnages, elle a simplement repris les idées qu'avait déjà mis en place Agatha Christie dans ses romans. Cela m'a déçu. En plus de tout cela, Christie est censée déjà être connue dans le roman (au point de causer une recherche nationale lors de sa disparition), sans encore avoir écrit ses plus grands succès (les romans cités précédemment), ce qui cause une énorme incohérence. Ceci étant dit, il est vrai que l'idée, sur le papier, peut être sympathique. Il y a peut être même une manière de l'écrire qui ne fasse pas ressortir ce genre de sentiments. Le style est ici si quelconque que ce n'est clairement pas non plus par lui que l'autrice brille d'originalité. Il en ressort donc une impression amère de non-envie d'écrire, c'est dommage.
Cependant, le potentiel de la suite m'a tenu en haleine. En effet, même si l'idée n'est pas très imaginative, elle a un potentiel narratif assez efficace! Et si le dénouement est bon, il pourrait me permettre d'outrepasser cette impression première. Malheureusement, ce dernier est, de très loin, le pire point du roman.
Un peu de contexte tout d'abord :
Chaque chapitre est précédé d'une citation d'un certain livre: "Twenty Rules For Writing Detective Stories" de S. S. Van Dine. Ce livre est un classique pour toute personne intéressée par l'écriture de roman policier, bien qu'on puisse évidemment se passer de sa lecture pour en écrire un bon, il donne un certain nombre de pistes et de pièges à éviter lors de leur conception. L'autrice va ensuite passer chaque chapitre à démonter méticuleusement chaque règle qu'elle énonce. Je trouve l'idée sympa, il y a quelque chose à creuser. Sauf que certaines règles n'existent pas pour rien, pour la plupart on peut passer outre, même si c'est pas toujours bien fait, mais la dernière concerne ce que doit être le dénouement d'un roman policier. Dans un roman policier, c'est peut-être LE truc a ne pas raté. Or, ici, il n'est pas seulement raté, il est complètement claqué au sol. Je ne vous apprendrais pas que le cliché de "o mé en fét ct un rêv" est très connu dans le mauvais sens du terme. Je ne pensais pas y être confronté un jour, mais ce roman m'a forcé à reconsidéré cette position... En effet, c'est plus ou moins ce qu'apporte la fin du roman, qui peut se résumer au fait que: Christie est devenue folle des suites de sa détresse émotionnelle associés à un accident de voiture, et a du coup inventé la totalité du roman. J'avais vécu la même déception avec la fin de Metro 2033, mais au moins le style d'écriture, l'univers et l'histoire m'avait maintenu en haleine. Ici, ce n'était pas franchement le cas, j'attendais même beaucoup de la fin, et peut-être trop du coup, puisque clairement la fin "en fait elle était folle" n'est vraiment pas un dénouement satisfaisant à lire en tant que lecteur puisque toute l'histoire n'a donc finalement servi à rien!
Malgré cela, force m'est de constater que le personnage d'Agatha Christie elle-même est plutôt bien écrit et agréable à lire, notamment dans ses réactions et dialogues. C'était vraiment sympa de lire la manière dont elle répondait aux gens, ses pensées en revanche l'était beaucoup moins. En effet, il y a aussi un énorme problème tout au long du roman avec la description des personnages féminins, notamment les commentaires sur leur physique. Un sexisme intériorisé terrible de la part de la narratrice, mais aussi de l'autrice qui projette des insécurités sur le poids et l'âge sur les différents personnages. Un héritage de son passé de journaliste pour le Figaro peut-être? Dans tous les cas, comme dans l’œuvre de Christie, les femmes ne sont pas à l'honneur. Que les hommes du roman fassent ce genre de réflexions, en 1926, je peux encore l'imaginer. Mais presque 100 ans ont passé depuis les œuvres de Christie, et il serait bien d'éviter ce genre de banalités vulgaires dont les romans policiers sont remplis et qui émanent autant de la part des personnages que de l'autrice.
En un paragraphe comme en cent, je ne vous conseille absolument pas ce livre, c'est aussi pour ça que j'ai salement spoil tout le livre, c'est fondamentalement une perte de temps et en particulier si vous n'avez pas lu Agatha Christie (ce que je vous conseille en revanche fortement). Un cas symptomatique de littérature de gare ou de plage, qui a habituellement un intérêt, hein! Mais si vous voyez celui-ci spécifiquement, passez votre chemin, la couverture est très jolie, mais le contenu est sans grand intérêt. Il aura au moins eu le mérite de me faire rédiger une critique aussi longue et réfléchir sur les questions qu'il soulève, c'est déjà ça!
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duckbookreview · 8 months
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Review: Le Bureau des Affaire Occultes, Éric Fouassier
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Lu sur le conseil d'une bonne amie, dont c'est une des sagas favorites.
Lauréat du prix Maison de la Presse de 2021 et premier tome d'une saga de trois volumes.
Une lecture dans l'ensemble très agréable, mais avec un bon lot de défaut qui m'ont dérangé au fil de la lecture, malgré un style très prenant dans les descriptions. Ces défauts ressemblent beaucoup à des défauts de maturité de l'écriture, donc j'ai plutôt hâte de lire la suite que je pense continuer.
L'intrigue se déroule dans un Paris du début du 19ième siècle, un bref apaisement de surface à la suite des grands troubles de la fin du 18ième amenés par la Révolution. Au niveau de cette ambiance pesante de révoltes sous-jacente, le livre est très réussi. Paris apparaît comme une série de rue putrides, grises et brumeuses, dont les pavés tremblant dissimulent les colères inassouvies du peuple. Le style est, de ce côté, très bien réussi. Les descriptions sont très prenantes, agrémentées de notes de bas de page comportant des précisions historiques, affirmant la véracité des anecdotes ou autres. Je conçois que la présence de telles notes puissent déranger certaines personnes et les sortir de leur lecture, mais le roman s'en passe très bien si vous ne souhaitez pas les lire, il n'en est que meilleur si vous les lisez. On y aperçoit un peu du travail de documentation de l'auteur pour nous plonger dans cette période, ce qui est très réussi.
L'autre gros point fort du livre est la description des émotions des personnages. Les émotions des personnages sont le plus souvent décrites en les mettant face à un autre personnage. Ainsi, on obtient un aperçu des émotions de Valentin (le personnage principal), quand il est mis face à ce qu'il ressent pour son père, ou pour Aglaé. Ce mode de description des émotions m'a beaucoup parlé et m'a permis, par son biais, de m'attacher aux personnages très efficacement.
De même, les émotions y sont décrites avec une subtilité toute particulière, que je trouve rafraichissante dans ce genre de lectures. Personne ne tombe amoureux en 4 secondes, personne n'a de sentiments unilatéraux et d'une seule nature envers qui que ce soit. Ici, tout est une affaire de subtilités, un personnage est attirant tout en étant repoussant, et tout à la fois dans le même temps et au même degré. Ces descriptions sont étonnantes de justesse, en particulier dans les relations entre Valentin et son père ou Aglaé, avec lesquelles les émotions sont plus longtemps explorées.
Cependant, il y a un revers car pour toute description réussie il y en avait une complètement ratée: celles du personnage principal, Valentin. Il est décrit comme un héros d'un mauvais shonen, d'un manwha, ou d'un isekai cliché. Il sait tout faire, connait tout et est trop fort dans tout. Les premiers chapitres sont riches en description lourdingues au possible sur à quel point il est plein de prouesses physiques et mentales. En plus de le rendre très peu identifiable, cela le rend apathique, peu crédible et son expertise le devient encore moins à mesure que les révélations sur sa personne s'empilent (en particulier la révélation finale). Notre homme est en effet: inspecteur à la brigade des mœurs, avec une formation avancée en médecine et pharmacie, mais aussi apolloniquement beau, avec de l'esprit, évidemment très intelligent, mais qui sait aussi extrêmement bien se battre, tout ça présenté dans les trois ou quatre chapitres d'ouverture. Bref, un personnage présenté comme étant sans défauts et sans failles, comme dans une fan-fiction de qualité discutable. Heureusement, ce défaut est largement compensé par la suite avec de nombreux défauts, certains dont il a conscience, d'autres implicites, qui sont présentés et contés. Le problème n'est donc pas le personnage en soi (qui à la fin de la lecture paraît plutôt équilibré), mais bien la manière dont il est présenté. C'est vraiment fort dommage parce que les dialogues du personnage principal sont plein d'esprit et donne vraiment envie de le connaître plus et de s'y attacher, quand toutes les descriptions qui en sont faites au début le rendent inatteignable et irréaliste.
Petit point que je ne sais pas trop où caser pour souligner aussi la présence de Vidocq au casting. L'ancien bagnard et chef de la sûreté (ayant pris sa retraite au moment de l'intrigue du livre) est un personnage très important dans l'intrigue (allant presque jusqu'au Deus Ex Machina), même s'il n'est pas forcément présenté comme tel (volontairement je pense). C'est l'un des deux seuls moments que j'ai pu repérer où le livre s'éloigne d'une réalité historique (je ne citerais pas l'autre pour éviter le spoil), et ça pourrait en gêner certain donc je le cite. J'ai personnellement beaucoup apprécié la présence de ce "personnage" (le terme étant employé autant au sens historique qu'au sens littéraire pour le coup), mais c'est Vidocq donc c'est normal. En revanche il me paraît très franchement mal écrit (ou volontairement pas écrit?) et mériterait un spin-off étant donné qu'il vit visiblement un meilleur roman que nous en faisant tourner la totalité de Paris pendant tout le roman. Trait d'humour à part, sa présence m'a plu mais ses actions m'ont dérangé par le fait qu'il soit utilisé comme un ressort scénaristique dont toutes les actions sont éllipsées.
Quelque chose qui a aussi pu me déranger et qui rebondit un peu sur le point du dessus est le fait que l'histoire est un peu clichée et ne tient en haleine que par le style et les twists, qui sont aussi pour certains clichés. Au vu de la période, du style et des personnages ce n'est pas quelque chose qui m'a tant dérangé dans ma lecture, je ne me suis fait la réflexion qu'après l'avoir terminé, mais le livre aurait évidemment été plus divertissant avec une histoire comportant plus d'originalité. C'est notamment en réfléchissant à la structure du livre que cette réflexion me parvient, un peu comme s'il avait été réfléchi comme une dissertation: un plan réfléchi par avance au début, puis remplir les cases sans trop dévier. Le style ainsi que les personnages et leurs interactions maintiennent évidemment une certaine personnalité au livre, mais je ne trouve rien de particulièrement bien ou mal à dire au sujet de l'intrigue, envers laquelle je suis très neutre. Cette intrigue est, comme cité plus haut, ponctuée de divers twists, que j'ai parfois trouvé mal amenés, notamment l'ultime twist, que je trouve très très maladroit, en particulier en relisant certains passages du livre qui auraient dû être réécris en conséquence. Les explications suivants ce twist sont toutefois bienvenues et permettent de relativiser cette réaction de "hein mais quoi mais pourquoi?" originale.
J'ai enfin eu l'impression un peu étrange à plusieurs reprises dans le roman que le style se retrouvait contrit. J'ai beaucoup aimé le style de l'auteur tout au long de l’œuvre, mais j'ai eu comme l'impression qu'il se limitait à plusieurs moments, comme si le style voulait aller plus loin, faire plus long, mais que l'auteur le limitait volontairement au point de fin de phrase. Je sais que les velléités d'un auteur peuvent être grandement limitées par celles des éditeurs, en particulier lorsqu'on écrit pour un prix (ce qui semble avoir été le cas ici), et c'est peut-être ce qu'il s'est passé, mais étant un lecteur qui apprécie voir le phrasé d'un auteur s'épanouir, j'ai trouvé dommage qu'Éric Fouassier n'en laisse pas le loisir à sa plume, d'autant plus que je trouvais le sien très réussi!
Dans l'ensemble ce livre ne m'a clairement pas laissé indifférent et j'en ai beaucoup apprécié la lecture, malgré ce que cette critique semble suggérer. J'ai hâte de lire la suite de la saga, que je finirai sans trop de doutes ni difficultés. C'est le genre d'ouvrages que je préfère: ceux qui me donnent, comme vous avez pu le constater, beaucoup de choses auxquelles penser.
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duckbookreview · 8 months
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Synthèse statistiques de lecture année 2023
Après un peu moins d'une année de reprise de lecture, je publie ici (majoritairement pour que je puisse les retrouver facilement) mes statistiques de lecture de l'année passée (2023).
Au global j'ai plutôt pas mal lu, même si le rythme est assez irrégulier et que le début a été un peu laborieux le temps de trouver mon style de prédilection, mais je laisse les stats parler d'elles-mêmes:
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(pour info, j'utilise l'application payante Classbook qui marche très bien sur iOS et m'a permis d'avoir ces stats)
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