Tumgik
inhogwartsitrust · 1 year
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T1C17
C'était Quirrell.
- Vous ! s'écria Harry, suffoqué.
Quirrell sourit, le visage parfaitement calme.
- Oui, c'est moi, dit-il tranquillement. Je me demandais si vous alliez me rejoindre ici, Potter.
- Mais je croyais... Rogue...
- Severus ?
Quirrell éclata de rire, non pas du petit rire grêle et tremblant qu'on lui connaissait, mais d'un rire franc et glacial.
- Oui, Severus faisait un bon coupable, n'est-ce pas ? Toujours en train de fondre sur tout le monde comme une chauve-souris géante ! A côté de lui, qui donc aurait pu soupçonner le p... p... pauvre et bé... bégayant p... p... professeur Quirrell ?
Harry ne parvenait pas à le croire. Ça ne pouvait pas être vrai ! C'était impossible !
- Mais Rogue a essayé de me tuer !
- Non, non, non, c'est moi qui ai essayé de vous tuer. Votre amie, Miss Granger m'a bousculé par accident quand elle s'est précipitée pour mettre le feu aux vêtements de Rogue, pendant le match de Quidditch. A cause d'elle, j'ai perdu le contact visuel avec vous. Quelques secondes de plus et j'aurais réussi à vous faire tomber de ce balai. J'y serais même parvenu bien avant si Rogue n'avait pas marmonné des formules magiques pour essayer de vous sauver.
- Rogue essayait de me sauver ?
- Bien sûr, dit Quirrell avec froideur. Pourquoi croyez-vous qu'il ait tenu à arbitrer le match suivant ? Il voulait simplement s'assurer que je ne recommence pas. C'est vraiment drôle... Il n'aurait pas dû se donner cette peine. Dumbledore présent, je ne pouvais rien faire. Tous les autres professeurs pensaient que Rogue voulait empêcher Gryffondor de gagner. Il est vrai qu'il n'attirait guère la sympathie. Mais tout cela n'était que du temps perdu puisque de toute façon, je vais vous tuer cette nuit.
Quirrell claqua des doigts. Aussitôt, des cordes surgirent de nulle part et ligotèrent solidement Harry.
- Vous êtes un peu trop curieux pour vivre bien longtemps, Potter. Quelle idée de vous promener dans les couloirs le soir de Halloween ! Il me semblait que vous m'aviez surpris pendant que j'allais voir ce qui protégeait la Pierre.
- C'est vous qui avez fait entrer le troll ?
- Bien sûr. J'ai un don avec les trolls. Vous avez dû constater ce que j'ai fait à celui qui se trouve dans l'autre salle, là-bas ? Malheureusement, pendant que tout le monde le cherchait partout, Rogue, qui me soupçonnait déjà, est monté directement au deuxième étage pour m'empêcher d'entrer dans le fameux couloir. Et non seulement mon troll n'a pas réussi à vous tuer, mais ce chien à trois têtes n'est même pas parvenu à arracher la jambe de Rogue. Et maintenant, laissez-moi tranquille, Potter, je dois examiner cet intéressant miroir.
À ce moment-là seulement, Harry se rendit compte que le miroir du Riséd se trouvait derrière Quirrell.
- Ce miroir est la clé qui mène à la Pierre, murmura Quirrell en le contournant pour s'y regarder. On peut faire confiance à Dumbledore pour manigancer ce genre de choses... Mais il est à Londres... Et quand il reviendra, je serai loin.
La seule chose que pouvait tenter Harry, c'était de faire parler Quirrell pour l'empêcher de se concentrer sur le miroir.
- Je vous ai vu avec Rogue, dans la forêt, lança-t-il.
- Oui, dit Quirrell d'un ton dégagé en allant examiner le dos du miroir. Il me suivait de près, à ce moment-là. Il voulait savoir où j'en étais. Depuis le début, il me soupçonnait. Il a essayé de me faire peur, comme s'il avait pu y arriver, alors que j'avais Lord Voldemort avec moi...
Quirrell scruta à nouveau le miroir d'un air avide.
- Je vois la Pierre... Je suis en train de l'offrir à mon maître... Mais où est-elle ?
Harry essaya de se débarrasser de ses liens, mais il n'y avait rien à faire. Il fallait absolument qu'il détourne l'attention de Quirrell du miroir.
- Pourtant Rogue avait l'air de me détester, dit-il.
- Oh mais, bien sûr, il vous déteste, répondit Quirrell d'un ton désinvolte. Il était à Poudlard avec votre père, vous ne le saviez pas ? Ils se méprisaient cordialement. Mais il n'a jamais voulu vous tuer pour autant.
- Je vous ai entendu sangloter, il y a quelques jours. Je croyais que Rogue vous menaçait...
Pour la première fois, pendant une fraction de seconde, les traits de Quirrell se convulsèrent dans une expression de peur.
- Parfois, dit-il, j'ai du mal à suivre les instructions de mon maître. Lui, c'est un grand sorcier et moi, je suis faible.
- Vous voulez dire que votre maître était avec vous dans cette salle de classe ? s'exclama Harry avec horreur.
- Il est toujours avec moi, où que j'aille, répondit tranquillement Quirrell. Je l'ai rencontré quand je voyageais autour du monde. J'étais un jeune homme stupide, à l'époque, plein d'idées ridicules sur les notions de bien et de mal. Lord Voldemort m'a montré à quel point j'avais tort. Il n'y a pas de bien ni de mal, il n'y a que le pouvoir, et ceux qui sont trop faibles pour le rechercher... Depuis ce temps-là, je l'ai servi fidèlement, bien que je l'aie laissé tomber à plusieurs reprises. Il a dû sévir, avec moi. Quirrell fut soudain parcouru d'un frisson.
- Il ne pardonne pas facilement les erreurs. Le jour où je n'ai pas réussi à voler la Pierre, à Gringotts, il était très mécontent. Il m'a puni. Et il a décidé de me surveiller de plus près...
La voix de Quirrell faiblit. Harry se rappela sa journée sur le Chemin de Traverse. Comment avait-il pu être aussi stupide ? Il avait vu Quirrell ce jour-là, il lui avait serré la main au Chaudron Baveur.
Quirrell marmonna un juron.
- Je ne comprends pas. Est-ce que la Pierre est à l'intérieur du miroir ? Faut-il que je le casse ?
Harry réfléchissait à toute vitesse. Ce qu'il désirait le plus au monde, en cet instant, c'était de trouver la Pierre avant Quirrell. Par conséquent, s'il se regardait dans le miroir, il se verrait en train de la trouver, il verrait donc du même coup l'endroit où elle était cachée ! Mais comment se regarder dans le miroir sans que Quirrell s'aperçoive de ce qu'il avait en tête ?
Il essaya de se glisser discrètement vers la gauche pour se mettre face au miroir sans que Quirrell le remarque, mais les cordes étaient trop serrées autour de ses chevilles. Il trébucha et tomba. Quirrell ne fit pas attention à lui. Il continuait de se parler à lui-même.
- Comment fonctionne ce miroir ? Quel est son secret ? Aidez-moi, maître !
Harry, horrifié, entendit alors une voix lui répondre et la voix semblait venir de Quirrell lui-même.
- Sers-toi du garçon... Sers-toi du garçon...
Quirrell se tourna vers Harry.
- Bien. Potter, venez ici.
Il frappa dans ses mains et les cordes qui ligotaient Harry tombèrent aussitôt sur le sol, Harry se releva lentement.
- Venez ici, répéta Quirrell. Regardez dans le miroir et dites-moi ce que vous y voyez. Harry s'approcha de lui.
« Il faut que je lui mente, pensa-t-il. Je vais regarder et mentir en lui racontant ce que je vois. »
Quirrell se tenait derrière Harry, tout près de lui, et celui-ci sentit une étrange odeur qui semblait provenir de son turban. Il ferma les yeux, fit un pas vers le miroir et les rouvrit.
Il vit tout d'abord son reflet, pâle et terrifié. Mais un instant plus tard, le reflet lui sourit. Il se vit alors mettre la main dans sa poche et en retirer une Pierre rouge sang. Son reflet lui adressa un clin d'œil et remit la Pierre dans sa poche. Au même moment, Harry sentit quelque chose de lourd tomber dans sa vraie poche. Il ne savait pas comment, il n'arrivait pas à le croire, mais maintenant, c'était lui qui avait la Pierre !
- Alors ? dit Quirrell avec impatience. Qu'est-ce que vous voyez ? Harry rassembla tout son courage.
- Je me vois en train de serrer la main de Dumbledore, prétendit-il. J'ai... j'ai fait gagner la coupe à Gryffondor.
Quirrell poussa à nouveau un juron.
- Poussez-vous, dit-il.
En s'éloignant du miroir, Harry sentit la Pierre philosophale contre sa jambe. Allait-il tenter de prendre la fuite ? Mais il avait à peine fait quelques pas qu'une voix aiguë s'exprima alors que Quirrell n'avait pas ouvert la bouche.
- Il ment... Il ment... dit la voix.
- Potter, revenez ici, cria Quirrell. Et dites-moi la vérité ! Qu'est-ce que vous avez vu ?
La voix aiguë s'éleva à nouveau.
- Laisse-moi lui parler face à face.
- Maître, vous n'avez pas assez de forces, dit Quirrell.
- J'en ai assez pour ça...
Harry eut alors l'impression qu'un Filet du Diable le clouait sur place. Il ne parvenait plus à remuer le moindre muscle. Pétrifié, il regarda Quirrell lever les bras et commencer à défaire son turban. Bientôt, le turban tomba et la tête de Quirrell parut soudain étrangement petite. Puis il pivota sur ses talons.
Harry aurait voulu crier, mais il était incapable d'émettre le moindre son. Derrière la tête de Quirrell, au lieu de son crâne, il y avait un visage, le visage le plus terrifiant que Harry eût jamais vu. Il était d'une blancheur de craie avec des yeux rouges flamboyants et des fentes en guise de narines, comme sur la tête d'un serpent.
- Harry Potter... murmura le visage.
Harry essaya de faire un pas en arrière, mais ses jambes refusaient de lui obéir.
- Tu vois ce que je suis devenu ? dit le visage. Ombre et vapeur... Je ne prends forme qu'en partageant le corps de quelqu'un d'autre... Heureusement, il en reste toujours qui sont prêts à m'accueillir dans leur cœur et leur tête... Le sang de licorne m'a redonné des forces, ces dernières semaines... Dans la forêt, tu as vu le fidèle Quirrell s'en abreuver pour moi... Et lorsque j'aurai l'élixir de longue vie, je pourrai recréer un corps qui sera bien à moi... Maintenant... Donne-moi cette Pierre qui se trouve dans ta poche.
Il savait donc. Harry sentit soudain ses jambes revenir à la vie. Il fit un pas en arrière.
- Ne sois pas stupide, dit le visage avec colère. Tu ferais mieux de sauver ta vie et de me rejoindre... Ou alors, tu connaîtras le même sort que tes parents... Ils sont morts en me suppliant de leur faire grâce...
- MENTEUR ! s'écria Harry.
Quirrell reculait vers lui pour que Voldemort ne le perde pas de vue. Le visage maléfique souriait, à présent.
- Comme c'est émouvant... siffla-t-il. J'apprécie toujours le courage... Oui, mon garçon, tes parents ont été courageux... J'ai d'abord tué ton père et il m'a résisté avec une grande bravoure... Quant à ta mère, je n'avais pas prévu qu'elle meure... mais elle essayait de te protéger... Alors, donne-moi la Pierre sinon, elle sera morte en vain.
- JAMAIS !
Harry bondit vers la porte enflammée.
- Attrape-le ! cria alors Voldemort.
D'un geste, Quirrell saisit le poignet de Harry. Celui-ci ressentit aussitôt une douleur aiguë à l'endroit de sa cicatrice. Il avait l'impression que sa tête allait se fendre en deux. Il se mit à hurler en se débattant de toutes ses forces et à sa grande surprise, Quirrell le lâcha. Il eut soudain beaucoup moins mal à la tête. Quirrell, en revanche, était plié en deux par la douleur, le regard fixé sur ses doigts qui se couvraient d'ampoules à vue d'œil, comme brûlés par une flamme.
- Attrape-le ! ATTRAPE-LE ! répéta Voldemort.
À nouveau, Quirrell plongea sur Harry. Il le fit tomber à terre et l'immobilisa en l'écrasant sous lui, les deux mains serrées autour de son cou. La cicatrice devint si douloureuse que Harry en était presque aveuglé. Il parvenait cependant à distinguer le visage de Quirrell qui poussait des hurlements. Il semblait en proie à une effroyable souffrance.
- Maître ! Je n'arrive pas à le tenir, gémit-il. Mes mains... mes mains !
Tout en maintenant Harry par terre avec ses genoux, Quirrell lâcha son cou et contempla d'un air incrédule les paumes de ses mains. Harry voyait qu'elles étaient complètement brûlées, écarlates, la chair à vif.
- Alors, tue-le, imbécile ! Qu'on en finisse ! couina Voldemort de sa voix suraiguë.
Quirrell leva le bras pour lancer un maléfice mortel, mais Harry, d'un geste instinctif, plaqua les mains contre le visage de son ennemi.
- AAAAAAAAAARG !
Quirrell roula sur le sol, le visage également brûlé. Harry se rendit compte que son adversaire ne pouvait pas le toucher sans souffrir de terribles brûlures. Sa seule chance, c'était de saisir Quirrell et de lui infliger une telle douleur qu'il soit incapable de lancer un sort. Harry se releva d'un bond, attrapa le bras de Quirrell et serra de toutes ses forces. Quirrell poussa un hurlement en essayant de se dégager et Harry sentit à nouveau la douleur de sa cicatrice. Il ne voyait plus rien, il entendait seulement les horribles cris de Quirrell ainsi que les glapissements de Voldemort qui répétait :
- TUE-LE ! TUE-LE ! !
Il entendait aussi, peut-être dans sa propre tête, d'autres voix crier : « Harry ! Harry ! »
Soudain, il sentit le bras de Quirrell s'arracher à son étreinte et il comprit à ce moment que tout était perdu. Il sombra alors dans une longue, longue, longue chute où tout n'était plus que ténèbres.
Un objet doré brillait juste au-dessus de lui. Le Vif d'or ! Il essaya de l'attraper, mais ses bras étaient trop lourds.
Il cligna des yeux. Ce n'était pas du tout un Vif d'Or, c'était une paire de lunettes. Étrange. Il cligna à nouveau des yeux et distingua alors le visage souriant d'Albus Dumbledore.
- Bonjour, Harry, dit-il.
Harry le regarda fixement. Puis il se souvint.
- La Pierre ! s'écria-t-il. C'était Quirrell ! C'est lui qui a volé la Pierre ! Vite !
- Calme-toi, mon garçon, tu es un peu en retard, dit Dumbledore. Quirrell n'a pas volé la Pierre.
- Alors, qui ?
- Du calme, sinon, Madame Pomfresh va me jeter dehors.
Harry regarda autour de lui et se rendit compte qu'il se trouvait à l'infirmerie de Poudlard, Il était couché dans un lit avec des draps de lin blanc et juste à côté, il y avait une table couverte d'une quantité de friandises suffisante pour ouvrir un magasin.
- Quelques cadeaux de la part de tes amis et admirateurs, dit Dumbledore. Ce qui s'est passé dans les sous-sols du château, entre Quirrell et toi, est un secret absolu, par conséquent, toute l'école est au courant. Je crois que ce sont tes amis Fred et George Weasley qui t'ont envoyé un siège de toilettes en pensant que ça t'amuserait. Mais Madame Pomfresh a trouvé que ce ne serait peut-être pas très hygiénique et elle l'a confisqué.
- Ça fait combien de temps que je suis là ?
- Trois jours. Mr Ronald Weasley et Miss Granger vont être grandement soulagés de voir que tu es revenu à toi. Ils se sont terriblement inquiétés à ton sujet.
- Mais la Pierre...
- Je vois qu'il est inutile d'essayer de te distraire. Très bien. Alors... La Pierre, le professeur Quirrell n'a pas réussi à te la prendre. Je suis arrivé à temps pour l'en empêcher, bien que tu te sois admirablement débrouillé tout seul, je le reconnais.
- Vous étiez là ? Vous avez reçu le hibou d'Hermione ?
- Nous avons dû nous croiser dans les airs. J'étais à peine arrivé à Londres qu'il m'est nettement apparu que ma place était à l'endroit que je venais de quitter. Et je suis revenu juste à temps pour t'arracher à Quirrell...
- C'était vous ?
- J'avais peur qu'il soit trop tard...
- Il était moins une. Je n'aurais pas pu l'empêcher plus longtemps de prendre la Pierre.
- L'important, ce n'est pas la Pierre, c'est toi. L'effort que tu as fait a failli te tuer. Pendant un moment, j'ai craint que ce ne soit le cas. Quant à la Pierre, elle a été détruite.
- Détruite ? répéta Harry d'une voix blanche. Mais votre ami... Nicolas Flamel...
- Ah, tu connais Nicolas ? dit Dumbledore qui avait l'air ravi. Tu as vraiment bien
fait les choses. Eh bien, Nicolas et moi, nous avons eu une petite conversation et il nous est apparu que tout était pour le mieux.
- Mais ça signifie que lui et sa femme vont mourir, non ?
- Il leur reste suffisamment d'élixir pour mettre leurs affaires en ordre et ensuite, en effet, ils vont mourir.
Dumbledore sourit en voyant l'air stupéfait de Harry.
- Pour quelqu'un d'aussi jeune que toi, je sais que c'est incroyable, dit-il, mais pour Nicolas et Pernelle, c'est comme d'aller se coucher à la fin d'une très, très longue journée. Après tout, pour un esprit équilibré, la mort n'est qu'une grande aventure de plus. Tu sais, la Pierre n'avait rien de si extraordinaire. Elle donnait autant d'argent et permettait de vivre aussi longtemps qu'on le souhaitait ! Les deux choses que la plupart des humains désirent le plus au monde ; l'ennui, c'est que les humains ont un don pour désirer ce qui leur fait le plus de mal.
Harry restait immobile, ne sachant que répondre. Dumbledore chanta un petit air et regarda le plafond en souriant.
- Monsieur ? dit enfin Harry. Je me demande... Même si la Pierre n'existe plus,
Vol... Je veux dire, Vous-Savez-Qui...
- Tu peux l'appeler Voldemort, Harry. Nomme toujours les choses par leur nom.
La peur d'un nom ne fait qu'accroître la peur de la chose elle-même.
- Voldemort va chercher d'autres moyens de revenir, n'est-ce pas ? Je veux dire qu'il n'a pas complètement disparu ?
- Non, en effet. Il est toujours là, quelque part, peut-être à la recherche d'un autre corps à partager... Comme il n'est pas vraiment vivant, on ne peut pas le tuer. Il a laissé mourir Quirrell. Il montre aussi peu de pitié pour ses partisans que pour ses ennemis. Tu as sans doute réussi à retarder son retour au pouvoir, Harry, mais il se trouvera bien quelqu'un pour reprendre un combat qui semble perdu... Pourtant, si à chaque fois, on continue à le retarder, alors il est possible qu'il ne reprenne jamais le pouvoir.
Harry hocha la tête, mais il s'interrompit aussitôt car il avait encore mal.
- Il y a d'autres choses que j'aimerais bien savoir, dit-il, si vous pouvez me les dire... J'aimerais bien connaître la vérité sur ces choses-là.
- La vérité, soupira Dumbledore. Elle est toujours belle et terrible, c'est pourquoi il faut l'aborder avec beaucoup de précautions. Mais je veux bien répondre à tes questions, sauf si j'ai de bonnes raisons de ne pas le faire, auquel cas, je te demande de me pardonner. Mais bien sûr, je ne te mentirai pas.
- Alors, voilà : Voldemort a dit qu'il a tué ma mère uniquement parce qu'elle essayait de me protéger. Mais pourquoi donc voulait-il me tuer ?
Cette fois, Dumbledore poussa un profond soupir.
- Hélas, la première question que tu me poses fait partie de celles auxquelles je ne peux pas répondre. Aujourd'hui, en tout cas. Un jour, tu sauras, mais pour l'instant, chasse cette pensée de ton esprit. Quand tu seras plus grand... Je sais que tu n'aimes pas ce genre de phrase... Disons plutôt que quand tu seras prêt, tu comprendras.
Et Harry savait qu'il était inutile de discuter.
- Et pourquoi Quirrell ne pouvait pas me toucher sans se brûler ?
- Ta mère est morte pour te sauver la vie. S'il y a une chose que Voldemort est incapable de comprendre, c'est l'amour. Il ne s'est jamais rendu compte qu'un amour aussi fort que celui que ta mère avait pour toi laisse sa marque. Pas une cicatrice, ou un signe visible... Avoir été aimé si profondément te donne à jamais une protection contre les autres, même lorsque la personne qui a manifesté cet amour n'est plus là. Cet amour reste présent dans ta chair. Quirrell était plein de haine, de cupidité,d'ambition, il partageait son âme avec Voldemort et c'est pour cela qu'il ne supportait pas de te toucher. Toucher quelqu'un qui a été marqué par quelque chose d'aussi beau ne pouvait susciter en lui que de la souffrance.
Dumbledore manifesta un intérêt soudain pour un oiseau qui venait de se poser sur
le rebord de la fenêtre, ce qui donna le temps à Harry de s'essuyer les yeux avec son drap.
- Et la cape d'invisibilité ? demanda Harry, lorsqu'il eut retrouvé sa voix. Vous savez qui me l'a envoyée ?
- Ah... Il se trouve que ton père l'avait laissée en ma possession et j'ai pensé que tu aimerais peut-être l'avoir. C'est parfois utile... Quand il était au collège, ton père s'en servait pour se glisser jusqu'à la cuisine et voler des tas de choses à manger.
- J'ai encore une question...
- Vas-y.
- Quirrell a dit que Rogue...
- Le professeur Rogue.
- C'est ça, lui... Quirrell a dit que s'il me détestait, c'était parce qu'il détestait aussi mon père. C'est vrai ?
- En effet, ils se haïssaient cordialement. Un peu comme toi et Mr Malefoy. Et ton père a fait quelque chose qu'il n'a jamais pu lui pardonner.
- Quoi ?
- Il lui a sauvé la vie.
- Comment ?
- Oui, dit Dumbledore d'un air rêveur. C'est curieux comme les gens réagissent, n’est-ce pas ? Le professeur Rogue ne supportait pas d'avoir une dette envers ton père... Je suis sûr que s'il a fait tant d'efforts pour te protéger, cette année, c'est parce qu'il a pensé qu'ainsi ton père et lui seraient quittes. Alors, il pourrait continuer à haïr son souvenir en paix...
Harry essaya de comprendre ce que Dumbledore venait de lui dire, mais il eut mal à la tête, et il laissa tomber.
- Encore une dernière chose, dit Harry. Comment se fait-il que la Pierre soit passée du miroir dans ma poche ?
- Je suis content que tu m'aies posé cette question. C'était une de mes idées les plus brillantes, ce qui n'est pas peu dire, entre nous... Seul quelqu'un qui désirait trouver la Pierre - la trouver, pas s'en servir - pourrait la prendre, les autres ne verraient que leur reflet fabriquer de l'or et boire l'élixir de longue vie. Mon intelligence me surprend moi-même, parfois... Et maintenant, assez de questions. Si tu entamais ces friandises ? Ah, les Dragées surprises de Bertie Crochue ! Un jour, quand j'étais jeune, j'en ai trouvé une qui avait le goût de poubelle. Depuis, j'ai peur d'en manger, mais toi, ne t'en prive surtout pas ! Enfin, je pense que je ne risque rien avec un caramel.
Il sourit et mit la dragée d'un brun doré dans sa bouche. Puis il se mit à tousser.
- Quelle horreur ! De la cire des oreilles !
Madame Pomfresh était une femme charmante, mais très stricte.
- Seulement cinq minutes, supplia Harry.
- Il n'en est pas question.
- Vous avez bien laissé entrer le professeur Dumbledore...
- Bien entendu, c'est le directeur. Mais maintenant, tu as besoin de repos.
- Je me repose, regardez, je suis couché. S'il vous plaît, Madame Pomfresh…
- Bon, d'accord, mais pas plus de cinq minutes !
Et elle laissa entrer Ron et Hermione.
- Harry !
Hermione était sur le point de le serrer à nouveau dans ses bras, mais elle se retint. Harry en fut soulagé : il avait encore très mal à la tête.
- Harry, on pensait que tu allais... Dumbledore se faisait tellement de souci...
- Toute l'école ne parle que de ça, dit Ron. Alors, qu'est-ce qui s'est passé, en vrai ?
C'était une de ces rares circonstances où la vérité paraît encore plus étrange et plus passionnante que les rumeurs. Harry leur fit un récit détaillé, sans rien omettre : Quirrell, le miroir, la Pierre, Voldemort. Ron et Hermione, bon public, l'écoutaient en étouffant des exclamations aux bons moments. Et lorsqu'il raconta ce qu'il y avait sous le turban de Quirrell, Hermione poussa un cri.
- Alors, la Pierre n'existe plus ? dit Ron lorsque Harry eut terminé. Et Flamel va mourir ?
- C'est ce que je lui ai dit, mais Dumbledore m'a répondu... Comment c'était, déjà ? Ah oui, « pour un esprit équilibré, la mort n'est qu'une grande aventure de plus ».
- J'ai toujours dit qu'il était cinglé, remarqua Ron qui semblait impressionné de voir à quel point son héros était fou.
- Et vous, qu'est-ce qui vous est arrivé ? demanda Harry.
- Je n'ai eu aucun mal à revenir sur mes pas, dit Hermione. J'ai ranimé Ron - il m'a fallu un bout de temps - et on s'est précipités vers la volière pour envoyer un mot à Dumbledore. C'est juste à ce moment-là qu'on l'a rencontré dans le hall d'entrée. Il était déjà au courant. Il nous a dit : « Harry est allé le retrouver ? » et il a foncé au deuxième étage.
- Tu crois qu'il voulait vraiment que tu y ailles ? demanda Ron. C'est pour ça qu'il t'a envoyé la cape d'invisibilité ?
- Si jamais c'est vrai, c'est terrible ! s'écria Hermione. Tu aurais pu te faire tuer !
- Ce n'est pas tout à fait ça, répondit Harry d'un air songeur. C'est un drôle de personnage, ce Dumbledore. Je crois qu'il a voulu me donner une chance. Il doit savoir à peu près tout ce qui passe à l'école et je pense qu'il devait se douter de notre projet, mais au lieu d'essayer de nous arrêter, il a cherché à nous aider. Je ne crois pas que ce soit un hasard s'il m'a laissé découvrir comment le miroir fonctionnait. C'est un peu comme s'il me reconnaissait le droit d'affronter Voldemort face à face si je le pouvais...
- Décidément, Dumbledore est vraiment dingue, dit Ron avec fierté. Et maintenant, écoute : il faut absolument que tu sois debout pour le banquet de fin d'année, demain. Le compte des points a été fait et bien entendu, ce sont les Serpentard qui ont gagné la coupe. Tu n'étais pas là pour le dernier match et on s'est fait écraser par les Serdaigle. Mais il y aura de bonnes choses à manger.
À ce moment, Madame Pomfresh fit irruption dans la chambre.
- Ça fait presque un quart d'heure, maintenant. DEHORS ! dit-elle d'un ton sans réplique.
Après une bonne nuit de sommeil, Harry se sentit à nouveau dans son état normal.
- Je veux aller au banquet, dit-il à Madame Pomfresh. Je peux, n'est-ce pas ?
- Le professeur Dumbledore a dit que tu avais le droit d'y assister, dit-elle d'un ton pincé, comme si elle était persuadée que Dumbledore ignorait les risques que peut présenter un festin. Et tu as un autre visiteur.
- Ah, très bien, dit Harry. Qui est-ce ?
Hagrid se glissa alors dans l'encadrement de la porte. Comme d'habitude, il paraissait trop grand par rapport à la pièce. Il s'assit au chevet de Harry et fondit en larmes.
- C'est... c'est ma faute... sanglota-t-il en plongeant son visage dans ses mains. J'ai dit à ce misérable comment faire pour passer devant Touffu ! C'était la dernière chose qu'il ne savait pas et c'est moi qui l'ai dite ! Tu aurais pu en mourir ! Tout ça pour un œuf de dragon ! Je ne boirai plus jamais ! On devrait me chasser et m'envoyer vivre chez les Moldus !
- Hagrid ! s'exclama Harry, désolé de voir des larmes couler le long de sa barbe.
Il aurait trouvé, de toute façon ! Il s'agit de Voldemort, ne l'oubliez pas. Même si vous ne lui aviez rien dit...
- Tu aurais pu en mourir, répéta Hagrid, le corps agité de sanglots. Et ne prononce pas ce nom !
- VOLDEMORT ! cria Harry.
Hagrid parut si choqué qu'il cessa aussitôt de pleurer.
- Je l'ai vu, je peux l'appeler par son nom. Ne soyez pas triste, Hagrid, nous avons sauvé la Pierre et elle est détruite maintenant, il ne peut plus s'en servir. Prenez donc un Chocogrenouille, j'en ai plein.
Ah, au fait, ça me fait penser que j'ai un cadeau pour toi, dit Hagrid en s'essuyant le nez d'un revers de main.
- J'espère que ça n'est pas un sandwich à l'hermine.
- Mais non, sourit Hagrid, Dumbledore m'a accordé un jour de congé hier pour le préparer. Il aurait plutôt dû me renvoyer. Voilà...
Il lui donna un beau livre à la reliure de cuir. Harry l'ouvrit avec curiosité : il était rempli de photos de sorciers. A chaque page, son père et sa mère lui souriaient en lui adressant des signes de la main.
- J'ai envoyé des hiboux à tous les amis d'école de tes parents en leur demandant des photos. Je savais que tu n'en avais pas. Ça te plaît ?
Harry fut incapable de parler et Hagrid le comprit très bien.
Ce soir-là, Harry quitta sa chambre pour assister au banquet. Madame Pomfresh avait insisté pour l'examiner une dernière fois et la Grande Salle était déjà pleine lorsqu'il arriva enfin. Elle était décorée aux couleurs vert et argent des Serpentard pour célébrer leur septième victoire consécutive. Une immense bannière déployée sur le mur, derrière la Grande Table, montrait un serpent, symbole de leur maison. Lorsque Harry fit son entrée, il y eut un soudain silence, puis les conversations reprirent toutes en même temps. Il s'assit à la table des Gryffondor, entre Ron et Hermione, et fit semblant de ne pas remarquer que tout le monde se levait pour mieux le voir.
Heureusement, Dumbledore arriva à son tour et la rumeur des conversations s'évanouit.
- Une autre année se termine, dit joyeusement Dumbledore, et je vais encore vous importuner avec des bavardages de vieillard avant que nous entamions enfin ce délicieux festin. Quelle année ! Fort heureusement, vos têtes sont un peu plus remplies qu'auparavant... et vous avez tout l'été pour les vider à nouveau en attendant le début de l'année prochaine... Le moment est maintenant venu de décerner la coupe des Quatre Maisons. Le décompte des points nous donne le résultat suivant : en quatrième place, Gryffondor avec trois cent douze points. En troisième, Poufsouffle avec trois cent cinquante-deux points. Serdaigle a obtenu quatre cent vingt-six points et Serpentard quatre cent soixante-douze.
Un tonnerre d'applaudissements, d'acclamations et de trépignements explosa à la table des Serpentard. Harry voyait Malefoy frapper la table avec son gobelet et ce spectacle le rendait malade.
- Oui, oui, très bien, Serpentard, reprit Dumbledore. Il convient cependant de prendre en compte des événements récents.
Il y eut alors un grand silence et les sourires des Serpentard devinrent moins triomphants.
- J'ai quelques points de dernière minute à distribuer, poursuivit Dumbledore.
Voyons... Oui, c'est ça... Je commencerai par Mr Ronald Weasley...
Ron devint écarlate. Il avait soudain l'air d'un radis qui aurait pris un coup de soleil.
- Pour la plus belle partie d'échecs qu'on ait jouée à Poudlard depuis de nombreuses années, je donne à Gryffondor cinquante points.
Les acclamations des Gryffondor atteignirent presque le plafond enchanté. Les étoiles au-dessus de leur tête parurent frémir.
- C'est mon frère ! disait Percy aux autres préfets. Mon plus jeune frère ! Il a réussi à traverser l'échiquier géant de McGonagall !
Le silence revint.
- J'en viens maintenant à Miss Hermione Granger... Pour la froide logique dont elle a fait preuve face à des flammes redoutables, j'accorde à Gryffondor cinquante points.
Hermione enfouit sa tête dans ses bras. Harry la soupçonnait d'avoir fondu en larmes. Tout autour de la table, les Gryffondor ne se tenaient plus de joie. Ils avaient cent points de plus.
- Enfin, parlons de Mr Harry Potter, reprit Dumbledore. Un grand silence se fit dans la salle.
- Pour le sang-froid et le courage exceptionnels qu'il a manifestés, je donne à Gryffondor soixante points.
Le vacarme qui s'ensuivit fut assourdissant. Ceux qui étaient en état de faire des additions tout en s'égosillant savaient que Gryffondor avait à présent quatre cent soixante-douze points - exactement le même nombre que Serpentard. Ils étaient ex æquo. Si seulement Dumbledore avait pu donner à Harry un seul point de plus !
Dumbledore leva la main et le silence revint peu à peu.
- Le courage peut prendre de nombreuses formes, dit-il avec un sourire. Il faut beaucoup de bravoure pour faire face à ses ennemis mais il n'en faut pas moins pour affronter ses amis. Et par conséquent, j'accorde dix points à Mr Neville Londubat.
Quelqu'un qui se serait trouvé à l'extérieur de la Grande Salle aurait pu penser qu'une terrible explosion venait de se produire, tant le vacarme qui s'éleva de la table des Gryffondor était assourdissant. Harry, Ron et Hermione se levèrent pour acclamer Neville qui avait le teint livide et disparut bientôt sous les embrassades. Jusqu'alors, il n'avait pas gagné le moindre point pour les Gryffondor. Harry donna un petit coup de coude à Ron et lui montra Malefoy. Abasourdi et horrifié, il semblait figé sur place comme s'il avait subi le maléfice du Saucisson.
- Ce qui signifie, poursuivit Dumbledore en essayant de couvrir le tonnerre d’applaudissements - car les Serdaigle et les Poufsouffle étaient ravis de la chute des Serpentard - ce qui signifie que nous allons devoir changer la décoration de cette salle.
Il frappa dans ses mains et en un instant, le vert et argent se transforma en rouge et or, et le grand serpent disparut, remplacé par le lion altier des Gryffondor. Rogue serra la main du professeur McGonagall avec un horrible sourire qui n'avait rien de naturel. Harry croisa son regard et il sut aussitôt que les sentiments de Rogue à son égard n'avaient pas changé. Mais il n'en éprouvait aucune contrariété. La vie redeviendrait normale dès l'année prochaine, aussi normale qu'elle pouvait l'être à Poudlard.
Ce fut la plus belle soirée que Harry eût jamais connue. Il était encore plus heureux que le jour où il avait gagné le match de Quidditch, plus heureux que le soir de Noël, plus heureux que lorsqu'ils avaient vaincu le troll. Il garderait à jamais le souvenir de ces précieux instants.
Harry en avait presque oublié le résultat des examens. A leur grande surprise, Ron et lui avaient obtenu de bonnes notes. Hermione, bien entendu, avait été la meilleure et même Neville avait réussi à passer de justesse : sa bonne note en botanique rattrapait celle, catastrophique, qu'il avait obtenue en potions. Ils avaient espéré que Goyle, qui était aussi bête que méchant, serait renvoyé, mais lui aussi était passé.
Comme l'avait dit Ron, on ne peut pas tout avoir dans la vie...
Bientôt, leurs armoires se vidèrent, leur valises furent fin prêtes et le crapaud de Neville s'égara dans un coin des toilettes. On distribua aux élèves des avis qui les prévenaient que l'usage de la magie était interdit pendant les vacances (« Chaque année j'espère qu'ils vont oublier de nous les donner », dit Fred). Hagrid leur fit traverser le lac dans ses barques et ils s'installèrent dans le Poudlard Express qui les ramenait chez les Moldus. Tout le monde parlait et riait tandis que le paysage devenait de plus en plus verdoyant. On mangeait des Dragées surprises de Bertie Crochue et on enlevait les robes de sorcier pour remettre vestes et blousons. Enfin, ils arrivèrent sur la voie 9 3⁄4 de la gare de King's Cross.
Ils mirent un certain temps pour quitter le quai. Un vieux gardien ridé les faisait passer par groupes de deux ou trois pour qu'ils n'attirent pas l'attention en surgissant soudain au milieu de la barrière. Inutile d'affoler les Moldus.
- Il faut que vous veniez à la maison, cet été, dit Ron à Harry et Hermione. Je vous enverrai un hibou.
- Merci, dit Harry. J'attends ça avec impatience.
Des voyageurs les bousculaient de tous côtés tandis qu'ils replongeaient dans le monde des Moldus. Harry entendait fuser autour de lui des « Au revoir, Harry, à bientôt, Potter ! »
- Toujours célèbre, fit remarquer Ron avec un sourire.
- Pas là où je vais, je te le garantis !
- Le voilà, M'man, regarde, il est là ! dit une petite voix, alors qu'ils franchissaient le portillon.
C'était Ginny Weasley, la jeune sœur de Ron, mais ce n'était pas Ron qu'elle montrait du doigt.
- Harry Potter ! s'écria-t-elle. Regarde, M'man ! Je le vois !
- Tais-toi un peu Ginny, et ne montre pas du doigt, c'est malpoli. Mrs Weasley leur adressa un grand sourire.
- Vous avez eu une année chargée ? dit-elle.
- Très, répondit Harry. Merci pour le pull, Mrs Weasley.
- Oh, ce n'était rien.
- Alors, tu es prêt ?
C'était l'oncle Vernon, toujours moustachu, toujours écarlate, toujours furieux que Harry ait l'audace de se promener avec un hibou dans une cage au milieu d'une gare remplie de gens parfaitement normaux. Derrière lui se tenaient la tante Pétunia et Dudley qui eut l'air terrifié dès qu'il vit Harry.
- Vous êtes la famille de Harry ? dit Mrs Weasley.
- Façon de parler, répliqua l'oncle Vernon. Dépêche-toi, mon garçon, nous n'avons pas que ça à faire.
Et il s'éloigna. Harry resta quelques instants avec Ron et Hermione.
- Alors, on se voit cet été ?
- J'espère que tu passeras de... de bonnes vacances, dit Hermione en jetant un drôle de regard à l'oncle Vernon.
Elle n'avait encore jamais vu quelqu'un d'aussi désagréable.
- Oh, sûrement, répondit Harry avec un grand sourire. Eux, ils ne savent pas que l'usage de la magie est interdit à la maison. Je crois que je vais bien m'amuser avec Dudley, cet été.
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inhogwartsitrust · 1 year
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T1C16
Longtemps encore, Harry se demanderait comment il avait pu faire pour passer ses examens tout en ayant sans cesse la hantise de voir Voldemort surgir dans la salle de classe. Pourtant, au fil des jours, il ne faisait aucun doute que Touffu était toujours bien vivant et fidèle au poste.
Il faisait une chaleur étouffante, surtout dans la Grande Salle où se déroulaient les épreuves écrites. Les élèves avaient reçu des plumes neuves auxquelles on avait jeté un sort qui empêchait leurs utilisateurs de tricher.
Il y eut aussi un examen pratique. Le professeur Flitwick les appela un par un dans sa classe pour voir s'ils arrivaient à faire danser un ananas sur une table. Le professeur McGonagall les regarda transformer une souris en tabatière - elle ajoutait des points si la tabatière était particulièrement belle mais elle en enlevait si on y décelait des moustaches. Ils étaient tous paniqués devant Rogue qui les surveillait de près pendant qu'ils essayaient de fabriquer une potion d'Amnésie.
Harry fit de son mieux pour ne pas prêter attention aux douleurs qui, par instants, lui transperçaient le front depuis son aventure dans la forêt. Il n'arrivait presque plus à dormir. Son vieux cauchemar le réveillait sans cesse, plus effrayant que jamais : aux images habituelles s'ajoutait celle d'une silhouette encapuchonnée, dégoulinante de sang de licorne.
Ron et Hermione n'avaient pas tous ces soucis, c'est sans doute pourquoi ils paraissaient moins préoccupés que Harry par le sort de la Pierre. La pensée de Voldemort leur faisait peur, mais il n'était pas présent dans leurs rêves et ils étaient si absorbés par leurs révisions qu'ils n'avaient guère le temps de s'inquiéter des manigances de Rogue ou de quiconque d'autre.
Leur dernier examen était celui d'histoire de la magie. Ils durent passer une heure à répondre à des questions concernant de vieux sorciers un peu fous, inventeurs de chaudrons dont le contenu tournait tout seul puis ils furent enfin libres pendant toute une semaine jusqu'aux résultats des examens.
Lorsque le fantôme du professeur Binns leur annonça qu'ils pouvaient poser leurs plumes et rouler leurs parchemins, Harry ne put s'empêcher de pousser des exclamations de joie avec les autres.
- C'était beaucoup plus facile que je ne le pensais, dit Hermione tandis qu'ils rejoignaient les autres dans le parc ensoleillé. Je n'aurais même pas eu besoin d'apprendre le Code de conduite des loups-garous de 1637, ni l'ascension d'Elfric l'Insatiable.
Hermione aimait bien passer en revue les réponses aux examens, mais Ron lui dit que cela le rendait malade et ils se contentèrent d'aller s'allonger sous un arbre, au bord du lac. Les jumeaux Weasley chatouillaient les tentacules d'un calmar géant qui se réchauffait entre deux eaux.
- Fini les révisions, soupira Ron avec bonheur en s'étirant dans l'herbe. Tu pourrais être plus joyeux, Harry, on a une semaine de tranquillité avant de savoir tout ce qu'on a fait de travers. Pour l'instant, plus la peine de s'inquiéter.
Harry se frottait le front.
- J'aimerais bien savoir ce que ça signifie, s'écria-t-il soudain avec colère. Ma
cicatrice continue à me faire mal. Ça m'était déjà arrivé avant, mais jamais aussi souvent.
- Va voir Madame Pomfresh, suggéra Hermione.
- Je ne suis pas malade, dit Harry. Je crois plutôt que c'est un avertissement. Il y a un danger qui menace.
- Détends-toi, conseilla Ron. Hermione a raison. Il n'y a rien à craindre pour la Pierre tant que Dumbledore est dans les parages. D'ailleurs, on n'a aucune preuve que Rogue ait trouvé le moyen de passer devant Touffu sans se faire dévorer. Il a déjà failli se faire arracher la jambe une fois, il ne va pas recommencer tout de suite. Et le jour où Hagrid laissera tomber Dumbledore, Neville jouera au Quidditch dans l'équipe d'Angleterre.
Harry approuva d'un signe de tête, mais il avait le vague sentiment d'avoir oublié quelque chose d'important. Lorsqu'il essaya de l'expliquer à Hermione, celle-ci répondit :
- Ce sont les examens qui font ça. La nuit dernière, je me suis réveillée et je me suis mise à relire la moitié de mes notes de métamorphose avant de me souvenir qu'on avait déjà passé l'examen.
Mais Harry était convaincu que son sentiment de malaise n'avait rien à voir avec le travail.
Il vit un hibou passer dans le ciel, tenant une lettre dans son bec. Hagrid était le seul à lui envoyer des lettres mais il ne trahirait pas Dumbledore. Jamais il ne révélerait à quiconque comment faire pour neutraliser Touffu. Jamais... Pourtant...
Harry se leva d'un bond.
- Où tu vas ? demanda Ron d'une voix ensommeillée.
- Je viens de penser à quelque chose, dit Harry qui était devenu livide. Il faut que nous allions voir Hagrid immédiatement.
- Pourquoi ? s'étonna Hermione.
Mais Harry se hâtait déjà vers la cabane et les deux autres se précipitèrent pour le rattraper.
- Vous ne trouvez pas ça bizarre, dit Harry, que Hagrid ait toujours rêvé d'élever un dragon et que comme par hasard, il rencontre quelqu'un qui a justement un œuf de dragon dans sa poche ? Vous en connaissez beaucoup, des gens qui se promènent avec des œufs de dragon dans leurs poches, alors que c'est interdit chez les sorciers ? Étrange que celui-là soit précisément tombé sur Hagrid, vous ne trouvez pas ? J'aurais dû m'en rendre compte plus tôt.
- Qu'est-ce que tu racontes ? dit Ron.
Mais Harry ne répondit pas et se hâta en direction de la forêt.
Hagrid était assis dans un fauteuil, devant sa cabane. Il avait relevé ses manches et ses bas de pantalon et s'occupait à écosser des petits pois dans un grand bol.
- Alors, dit-il, c'est fini, ces examens ? Vous voulez boire quelque chose ?
- Non, on est pressés, dit Harry. J'ai quelque chose à vous demander. Le soir où vous avez gagné Norbert aux cartes, à quoi ressemblait le voyageur qui vous l'a donné ?
- Je ne sais pas, répondit Hagrid, il a gardé sa cape avec son capuchon sur la tête.
En voyant l'air stupéfait des trois autres, il leva les sourcils.
- Ce n'est pas si étonnant que ça, dit-il. Il y a des tas de gens un peu bizarres dans ce pub. Peut-être que c'était un marchand de dragons ?
Harry se laissa tomber à côté du bol de petits pois.
- Qu'est-ce que vous lui avez dit ? demanda-t-il. Vous lui avez parlé de Poudlard ?
- C'est possible que ce soit venu dans la conversation, dit Hagrid en fronçant les sourcils pour essayer de se rappeler. Ah oui, c'est ça, il m'a demandé ce que je faisais comme travail et je lui ai dit que j'étais garde-chasse ici... Ensuite, il m'a posé des questions sur le genre de créatures dont je m'occupais et là, je lui ai dit que j'aurais bien voulu avoir un dragon... et puis... je ne me souviens plus très bien, il n'arrêtait pas de me payer à boire... Voyons... Ah, oui, il a dit qu'il avait justement un œuf de dragon et qu'on pourrait peut-être le jouer aux cartes si ça m'intéressait... Mais il voulait être sûr que je sache m'en occuper... Et je lui ai répondu qu'après Touffu, je n'aurais pas de mal à m'occuper d'un dragon...
- Et il... il s'est intéressé à Touffu ? demanda Harry, en essayant de garder son calme.
- On ne rencontre pas beaucoup de chiens à trois têtes dans la région, alors, je lui en ai un peu parlé, je lui ai dit que Touffu était doux comme un mouton quand on savait s'y prendre. Il suffit de lui jouer un air de musique et il s'endort. Hagrid parut soudain horrifié.
- Je n'aurais jamais dû vous dire ça ! s'écria-t-il. Oubliez-le ! Hé ! Où allez-vous ?
Harry, Ron et Hermione ne s'arrêtèrent de courir que lorsqu'ils furent arrivés dans le hall d'entrée du château, qui paraissait sombre et glacé quand on venait du parc.
- Cette fois, il faut aller voir Dumbledore, dit Harry. Ce voyageur avec son capuchon, c'était soit Rogue, soit Voldemort. Il a dû le faire boire et Hagrid lui a révélé le moyen de passer devant Touffu. J'espère au moins que Dumbledore va nous croire. Firenze nous aidera peut- être si Bane ne l'en empêche pas. Où est le bureau de Dumbledore ?
Ils regardèrent autour d'eux, comme s'ils espéraient voir un écriteau qui leur indiquerait la bonne direction. On ne leur avait jamais dit où habitait Dumbledore et ils ne connaissaient personne qui ait jamais été envoyé dans son bureau.
- On n'a qu'à... commença Harry mais une voix résonna soudain dans le hall.
C'était le professeur McGonagall qui traversait le hall avec une énorme pile de livres dans les bras.
- On veut voir le professeur Dumbledore, dit courageusement Hermione.
- Voir le professeur Dumbledore ? répéta le professeur McGonagall, comme si elle trouvait l'idée particulièrement saugrenue. Et pourquoi donc ?
- C'est... c'est un secret, répondit Harry, la gorge sèche.
Sa réponse n'était pas très habile, pensa-t-il en voyant le professeur McGonagall froncer le nez.
- Le professeur Dumbledore est parti il y a dix minutes, répondit-elle froidement.
Il a reçu un hibou urgent du ministère de la Magie et il s'est immédiatement envolé pour Londres.
- Il est parti ? dit Harry d'une voix fébrile.
- Le professeur Dumbledore est un grand sorcier, Potter, il est très demandé.
- Mais c'est très important, ce que j'ai à lui dire !
- Vous avez quelque chose de plus important à lui dire que le ministre de la Magie, Potter ?
- Écoutez, reprit Harry en renonçant à toute prudence. Il s'agit de la Pierre philosophale.
La pile de livres que le professeur McGonagall avait dans les bras s'effondra sur le sol, mais elle ne se baissa pas pour les ramasser.
- Comment savez-vous ?... balbutia-t-elle.
- Professeur, je crois, ou plutôt, je sais, que Ro... que quelqu'un va essayer de voler la Pierre. C'est pour ça qu'il faut que je parle au professeur Dumbledore.
Elle parut à la fois stupéfaite et méfiante.
- Le professeur Dumbledore sera de retour demain, dit-elle enfin. Je ne sais pas comment vous avez fait pour connaître l'existence de la Pierre, mais soyez rassuré, personne ne peut la dérober, elle est trop bien protégée.
- Mais, professeur...
- Potter, je sais ce que je dis, répliqua-t-elle sèchement.
Puis elle se pencha pour ramasser ses livres.
- Je suggère que vous retourniez tous les trois dehors pour profiter du soleil. Mais ils restèrent là.
- C'est cette nuit que ça va se passer, dit Harry lorsqu'ils furent certains que le professeur McGonagall était trop loin pour les entendre. Rogue va essayer d'ouvrir la trappe, il a tout ce qu'il faut pour y arriver et il s'est arrangé pour éloigner Dumbledore. C'est lui qui a envoyé cette lettre. Ils vont être étonnés, au ministère de la Magie, en voyant débarquer Dumbledore.
À ce moment, Hermione étouffa un cri. Ron et Harry firent volte-face. Rogue se tenait derrière eux.
- Bonjour, dit-il d'une voix douce.
Ils le regardèrent avec des yeux ronds.
- Vous ne devriez pas rester à l'intérieur avec un beau temps pareil, dit-il, et il eut un étrange sourire qui ressemblait à un rictus.
- Nous étions... commença Harry sans avoir aucune idée de ce qu'il allait dire.
- Vous devriez faire attention, dit Rogue. A vous voir comme ça, tous les trois, on dirait que vous préparez un mauvais coup. Et Gryffondor ne peut pas se permettre de perdre encore des points, n'est-ce pas ?
Harry devint écarlate. Ils se tournèrent vers la porte, mais Rogue les arrêta.
- Je vous préviens, Potter, dit-il. Si vous recommencez à vous promener la nuit dans les couloirs, je veillerai personnellement à ce que vous soyez renvoyé du collège. Bonne journée.
Et il s'en alla en direction de la salle des professeurs.
- Voilà ce qu'on va faire, dit Harry aux deux autres lorsqu'ils furent de retour dans le parc. L'un de nous surveillera Rogue. Il faut l'attendre à la sortie de la salle des profs et le suivre. Hermione, c'est toi qui devrais t'en charger.
- Pourquoi moi ?
- C'est évident, dit Ron. Tu peux faire semblant d'attendre Flitwick. Oh, professeur, ajouta-t-il en prenant une voix haut perchée, je suis terriblement inquiète, j'ai peur d'avoir mal répondu à la question 14 b...
- Ça suffit, coupa Hermione.
Elle accepta cependant d'assurer la surveillance de Rogue.
- Et nous, on ferait bien de se poster devant le couloir du deuxième étage, dit Harry à Ron. Allez, viens.
Mais cette partie du plan ne fonctionna pas. A peine avaient-ils atteint la porte qui séparait Touffu du reste de l'école que le professeur McGonagall apparut à nouveau, et cette fois, elle perdit son calme.
- Vous êtes plus difficiles à éviter qu'un mauvais sort ! tonna-t-elle. J'en ai assez de vos balivernes ! Si jamais j'apprends que vous êtes revenus dans ces parages, j'enlève cinquante points de plus à Gryffondor ! Parfaitement, Weasley ! Même si c'est ma propre maison !
Harry et Ron retournèrent dans la salle commune. Quelques instants plus tard, le portrait de la grosse dame pivota et Hermione entra à son tour.
- Je suis désolée, Harry, gémit-elle. Rogue est sorti de la salle des profs et m'a demandé ce que je faisais là. Je lui ai dit que j'attendais Flitwick et il est allé le chercher. Quand j'ai pu repartir, je ne savais plus où était Rogue.
- Bon, alors, c'est fini, dit Harry.
Les deux autres le regardèrent avec inquiétude. Il était pâle et ses yeux flamboyaient.
- Ce soir, dit-il, je vais essayer d'aller chercher la Pierre avant lui.
- Tu es fou ! s'exclama Ron.
- Tu ne peux pas faire ça ! dit Hermione. Après ce que McGonagall et Rogue ont dit ? Tu vas te faire renvoyer !
- Et alors ? explosa Harry. Vous ne comprenez donc pas ? Si Rogue parvient à s'emparer de la Pierre, Voldemort va revenir ! Vous n'avez jamais entendu dire comment c'était quand il a voulu prendre le pouvoir ? S'il y arrive, on ne pourra plus se faire renvoyer tout simplement parce que Poudlard n'existera même plus ! Il va le détruire, ou le transformer en école de magie noire ! Perdre des points n'a plus aucune importance. Tu crois qu'il vous laissera tranquilles, vous et vos familles si Gryffondor gagne la coupe ? Si je me fais prendre avant d'avoir réussi à atteindre la Pierre, je n'aurai plus qu'à retourner chez les Dursley et y attendre que Voldemort vienne me chercher. Ça ne fera que retarder un peu le moment de ma mort, parce que moi, je ne me mettrai jamais du côté des forces obscures ! Cette nuit, je passe par cette trappe et vous ne pourrez pas m'en empêcher ! C'est Voldemort qui a tué mes parents, il ne faut pas l'oublier.
- Tu as raison, Harry, dit Hermione d'une petite voix.
- Je me servirai de la cape d'invisibilité, dit Harry. C'est une chance que je l'aie récupérée.
- Et tu crois qu'elle est assez grande pour nous couvrir tous les trois ? Demanda Ron. - Tous... tous les trois ?
- Tu ne crois quand même pas qu'on va te laisser y aller tout seul ?
- Bien sûr que non, dit sèchement Hermione. Comment veux-tu parvenir jusqu'à la Pierre sans notre aide ? Je ferais bien d'aller voir un peu dans mes bouquins. J'y trouverai sûrement des choses utiles...
- Mais si on se fait prendre, vous aussi, vous serez renvoyés, fit remarquer Harry.
- Je pourrai peut-être m'arranger, répondit Hermione. Flitwick m'a dit en secret que j'avais cent douze pour cent de bonnes réponses à son examen.
Après dîner, ils s'assirent tous les trois à l'écart dans la salle commune. Personne ne les dérangea puisque les autres Gryffondor refusaient toujours d'adresser la parole à Harry.
Pour une fois, celui-ci en était plutôt soulagé. Hermione parcourait ses cahiers de cours, espérant y dénicher le moyen de neutraliser les sortilèges qu'ils devraient affronter. Harry et Ron ne disaient pas grand-chose. Tous deux pensaient à ce qui les attendait.
Peu à peu, la salle se vida à mesure que les élèves allaient se coucher. Lorsque le dernier fut parti, Harry monta dans le dortoir pour aller chercher la cape d'invisibilité. En même temps, il glissa dans sa poche la flûte que Hagrid lui avait offerte à Noël. Il comptait l'utiliser pour endormir Touffu. C'était mieux que d'avoir à chanter quelque chose.
- On ferait mieux de mettre la cape dès maintenant, dit-il quand il fut redescendu.
- Qu'est-ce que vous faites ? dit alors une voix à l'autre bout de la salle.
Neville apparut derrière un fauteuil en tenant contre lui son crapaud qui s'était à nouveau évadé.
- Rien, rien, dit Harry qui s'empressa de cacher la cape derrière son dos.
- Vous allez encore vous balader ? dit Neville.
- Non, non, non, dit Hermione. Pas du tout. Va donc te coucher.
Harry jeta un coup d'œil à la pendule. Ils ne pouvaient pas se permettre de perdre du temps. A cette heure-ci, Rogue était peut-être en train d'endormir Touffu.
- Si vous sortez, vous allez vous faire prendre, dit Neville, et Gryffondor aura encore plus d'ennuis.
- Tu ne comprends pas, dit Harry. C'est très important. Mais Neville avait l'air décidé à tenir bon.
- Je ne vous laisserai pas partir, dit-il en allant se poster devant le trou qui servait d'entrée. Je... je suis prêt à me battre !
- Neville ! s'exclama Ron, laisse-nous passer, ne fais pas l'idiot.
- Ne me traite pas d'idiot ! répliqua Neville. Vous avez suffisamment fait de choses interdites ! D'ailleurs c'est toi-même qui m'as dit que je devais me défendre.
Et il lâcha son crapaud qui disparut sous un meuble.
- Essaye de me frapper, dit-il en levant les poings.
- Pas contre nous ! lança Ron.
- Fais quelque chose, dit Harry en s'adressant à Hermione. Elle s'avança alors vers Neville et brandit sa baguette magique.
- Désolée, Neville, dit-elle, mais il le faut. Petrificus Totalus !
Aussitôt, les bras de Neville se collèrent le long de ses flancs, ses jambes se joignirent, son corps devint rigide, il vacilla un instant, puis tomba en avant et resta immobile à plat ventre, raide comme une planche.
Hermione s'empressa de le retourner sur le dos. La mâchoire de Neville était collée, il ne pouvait plus parler. Seuls ses yeux bougeaient en jetant des regards horrifiés.
- Qu'est-ce que tu lui as fait ? murmura Harry.
- C'est le maléfice du Saucisson, dit Hermione d'une voix navrée. C'est comme s'il était ligoté et bâillonné. Je suis vraiment désolée, Neville...
- Il le fallait, on n'a pas le temps de t'expliquer, dit Harry.
- Tu comprendras plus tard, ajouta Ron.
Ils s'enveloppèrent alors dans la cape et sortirent de la salle commune. Être obligés de laisser Neville dans cet état ne leur semblait pas un très bon présage. Ils avaient les nerfs à vif et croyaient voir dans chaque ombre la silhouette de Rusard et entendre dans le moindre souffle de vent l'arrivée de Peeves.
Parvenus devant le premier escalier, ils aperçurent Miss Teigne tapie en haut des marches.
- Si on lui donnait un coup de pied, pour une fois ? murmura Ron à l'oreille de Harry.
Mais celui-ci refusa d'un signe de tête et ils montèrent l'escalier en la contournant soigneusement. La chatte tourna vers eux ses yeux brillants comme des lampes, mais elle n'eut aucune réaction.
Quelques instants plus tard, ils arrivèrent dans le couloir du deuxième étage. Ils virent alors Peeves qui faisait des plis dans le tapis pour faire trébucher les gens.
- Qui est là ? dit-il soudain, ses petits yeux noirs rétrécis. Je sais que vous êtes là, même si je ne peux pas vous voir. Qui êtes-vous ? Gnomes, fantômes ou sales mômes ?
Il s'éleva dans les airs et les observa.
- Je devrais appeler Rusard si quelque chose d'invisible rôde aux alentours.
Harry eut soudain une idée.
- Peeves, dit-il d'une voix rauque, le Baron Sanglant a ses raisons d'être invisible.
Peeves fut tellement abasourdi qu'il faillit tomber. Il se rattrapa à temps et resta suspendu à trente centimètres de l'escalier.
- Je suis désolé, votre sanglante excellence, Monsieur le Baron, dit-il d'une voix onctueuse. J'ai commis une erreur, une regrettable erreur, je ne vous avais pas vu. Bien sûr, puisque vous êtes invisible. Je vous demande de pardonner sa plaisanterie à ce vieux Peeves, Monsieur le Baron.
- J'ai des affaires à mener ici, dit Harry de sa voix rauque. Ne reviens plus dans les parages cette nuit.
- Oh mais bien sûr, Monsieur le Baron, bien entendu, dit Peeves en remontant dans les airs. J'espère que vos affaires se passeront bien, Monsieur le Baron. Je ne vous dérangerai plus.
Et il fila ailleurs.
- Formidable, Harry ! murmura Ron.
Quelques secondes plus tard, ils s'étaient avancés dans le couloir et virent que la porte était entrebâillée.
- Et voilà, dit Harry à voix basse, Rogue a déjà réussi à passer devant Touffu.
La porte ouverte semblait leur faire redouter ce qui les attendait. Sous la cape, Harry se tourna vers les deux autres.
- Si vous préférez ne pas aller plus loin, je ne vous en voudrai pas, dit-il. Vous pouvez garder la cape, je n'en aurai plus besoin, maintenant.
- Ne dis pas de bêtises, répliqua Ron.
- Bien sûr qu'on vient avec toi, dit Hermione.
Harry poussa la porte. Des grognements retentirent aussitôt. Les trois museaux du chien reniflaient frénétiquement dans leur direction, bien qu'il fût incapable de les voir.
- Qu'est-ce qu'il y a par terre ? demanda Hermione.
- Ça ressemble à une harpe, dit Ron. C'est sans doute Rogue qui l'a laissée là.
- Le chien doit se réveiller dès qu'on arrête de jouer, dit Harry. Bon, allons-y.
Il porta la flûte à ses lèvres et se mit à jouer. Ce n'était pas vraiment une mélodie, mais dès la première note, les paupières du monstre devinrent lourdes, il arrêta de grogner, ses jambes faiblirent, il trébucha puis s'effondra sur le sol, profondément endormi.
- Continue à jouer, dit Ron tandis qu'ils se débarrassaient de la cape et s'avançaient silencieusement vers la trappe.
Lorsqu'ils approchèrent des trois têtes du chien, ils sentirent son souffle brûlant et fétide.
- On devrait arriver à soulever la trappe, dit Ron. Tu veux passer la première, Hermione ?
- Non, je n'y tiens pas.
- Bon, tant pis.
Ron serra les dents, enjamba les pattes du chien avec précaution, puis tira l'anneau de la trappe qui se souleva sans difficulté et s'ouvrit.
- Qu'est-ce que tu vois ? demanda Hermione avec angoisse.
- Rien, c'est tout noir, Il n'y a ni échelle ni corde pour descendre, il faudra se laisser tomber.
Harry qui jouait toujours de la flûte fit un signe de la main à Ron et tapota sa poitrine de l'index.
- Tu veux passer le premier ? Tu es sûr ? Je n'ai aucune idée de la profondeur. Donne la flûte à Hermione, sinon, il va se réveiller.
Harry lui tendit la flûte. Lorsque la musique s'arrêta, le chien se remit à grogner et à bouger, mais dès que Hermione joua à nouveau, il replongea dans le sommeil. Harry l'enjamba à son tour et regarda à travers l'ouverture. On ne voyait pas le fond. Il se glissa dans le trou et se suspendit par les mains au bord de la trappe.
- S'il m'arrive quelque chose, dit-il à Ron, n'essayez pas de me suivre. Allez chercher Hedwige dans la volière et envoyez-la avec un message à Dumbledore. D'accord ?
- D'accord, dit Ron.
- A tout de suite... J'espère...
Et Harry se laissa tomber. Il sentait l'air humide lui siffler aux oreilles tandis qu'il tombait, tombait, tombait... Puis soudain, avec un drôle de bruit sourd, il atterrit sur quelque chose de mou. Il se redressa et regarda autour de lui. Ses yeux n'étaient pas encore habitués à l'obscurité, mais il avait l'impression d'être assis sur une sorte de plante.
- C'est O.K. ! cria-t-il en direction de la trappe qui dessinait au-dessus de sa tête un carré lumineux de la taille d'un timbre-poste. On peut sauter, c'est mou, ici !
Ron fut le premier à suivre. Il tomba à côté de Harry.
- Qu'est-ce que c'est que ce truc ? demanda-t-il.
- Je ne sais pas, une espèce de plante, je crois. Elle a dû être placée là pour amortir la chute. Viens, Hermione !
La flûte qu'on entendait faiblement s'interrompit. Le chien aboya bruyamment, mais Hermione avait déjà sauté et elle atterrit de l'autre côté de Harry.
- On doit être à des kilomètres sous le château, dit-elle.
- Une chance qu'il y ait cette plante, fit remarquer Ron.
- Une chance ? hurla Hermione. Regardez-vous, tous les deux !
Elle se leva d'un bond et parvint péniblement à se réfugier contre une paroi humide. Péniblement, car dès l'instant où elle avait atterri, les vrilles de la plante, longues comme des tentacules, avaient commencé à s'enrouler autour de ses chevilles. Quant à Ron et à Harry, des sortes de lianes leur avaient déjà ligoté les jambes sans qu'ils s'en rendent compte.
Hermione avait réussi à se libérer avant que la plante ait eu le temps de l'immobiliser. Elle regarda avec horreur Harry et Ron qui se débattaient pour essayer de se libérer, mais plus ils tiraient sur les tentacules, plus l'emprise du monstre végétal se resserrait autour d'eux.
- Ne bougez plus ! leur ordonna Hermione. Je connais cette plante, c'est un Filet du Diable !
- Je suis ravi de le savoir, ça nous aide beaucoup ! lança Ron d'un ton narquois en essayant d'empêcher la plante de s'enrouler autour de son cou.
- Silence, j'essaye de me rappeler comment il faut faire pour la tuer, dit Hermione.
- Alors, dépêche-toi, parce que j'ai du mal à respirer, dit Harry d'une voix haletante tandis que la plante lui étreignait la poitrine.
- Voyons, le Filet du Diable... Qu'est-ce que nous a dit le professeur Chourave, déjà ? Elle aime l'humidité et l'obscurité...
- Dans ce cas, allume un feu, dit Harry, à moitié étouffé.
- Oui, bien sûr, mais il n'y a pas de bois ! s'écria Hermione en se tordant les mains.
- TU ES FOLLE ? hurla Ron. TU ES UNE SORCIÈRE OU QUOI ?
- Ah, c'est vrai ! dit Hermione.
Elle sortit sa baguette magique, l'agita, marmonna quelque chose et un jet de flammes bleues, semblables à celles qui avaient mis le feu aux vêtements de Rogue,
jaillit en direction de la plante.
En quelques instants, Ron et Harry sentirent la plante desserrer son étreinte tandis qu'elle se recroquevillait sous l'effet de la chaleur et de la lumière. Ils retrouvèrent alors leur liberté de mouvement.
- Une chance que tu écoutes bien en classe, Hermione, dit Harry en la rejoignant près du mur, le visage ruisselant de sueur.
Ils s'engagèrent ensuite dans un passage qui s'ouvrait devant eux et s'enfonçait sous la terre. « Comme à Gringotts », pensa Harry. Avec un haut-le-cœur, il se souvint des dragons qui étaient censés garder la salle des coffres dans la banque des sorciers. Et s'ils se retrouvaient face à un dragon, un dragon adulte ? C'était déjà difficile avec Norbert...
Ils parcoururent ainsi quelques dizaines de mètres.
- Tu entends ? chuchota Ron.
Harry écouta. Venant d'un peu plus loin, on entendait un bruissement confus auquel se mêlaient quelques tintements.
- On dirait des bruits d'ailes, dit Harry.
- Il y a de la lumière là-bas, remarqua Ron. Je vois quelque chose bouger. Parvenus à l'extrémité du passage, ils découvrirent une salle brillamment éclairée, avec un haut plafond en forme d'arche. L'endroit était envahi de petits oiseaux étincelants qui voletaient sans cesse tout autour de la pièce. Dans le mur d'en face, il y avait une grande porte de bois.
- Tu crois qu'ils vont nous attaquer si on traverse la salle ? demanda Ron.
- Sans doute, dit Harry. Ils n'ont pas l'air très méchant, mais s'ils nous foncent dessus tous en même temps... On va bien voir... Je vais courir.
Il prit une profonde inspiration, se protégea la tête avec les bras et s'élança à travers la salle. Il s'attendait à sentir des dizaines de becs le piquer de la tête aux pieds, mais il ne se passa rien du tout et il arriva devant la porte sans avoir subi la moindre attaque. Il tira la poignée. La porte était verrouillée.
Les deux autres vinrent à la rescousse, mais leurs efforts pour ouvrir la porte restèrent vains. Elle refusa de bouger, même lorsqu'Hermione essaya une de ses formules magiques.
- Et maintenant ? dit Ron.
- Ces oiseaux ne sont pas là pour faire joli, fit remarquer Hermione.
Ils observèrent les oiseaux qui brillaient au-dessus de leur tête. Qui brillaient...
- Ce ne sont pas des oiseaux ! s'écria Harry. Ce sont des clés ! Des clés volantes. Regardez bien. Ce qui veut dire...
Il jeta un coup d'œil autour de lui pendant que les deux autres observaient le vol des clés.
- Oui ! Là ! Des balais ! s'exclama Harry. Il faut attraper la clé qui ouvre la porte !
- Mais il y en a des centaines !
Ron examina la serrure.
- Il faut une grosse clé à l'ancienne, probablement en argent, comme la poignée.
Ils prirent chacun un balai et décollèrent en direction du nuage de clés. Ils essayèrent d'en saisir plusieurs, mais les clés magiques filaient, plongeaient, zigzaguaient avec une telle rapidité qu'il était presque impossible d'en attraper une.
Ce n'était pas pour rien, cependant, que Harry était le plus jeune attrapeur qu'on ait connu depuis un siècle. Il avait un don pour repérer des choses que les autres ne voyaient pas. Après avoir parcouru pendant quelques instants ce tourbillon de plumes aux couleurs d'arc-en-ciel, il remarqua une grosse clé d'argent qui avait une aile tordue, comme si quelqu'un l'avait déjà attrapée et brutalement introduite dans la serrure.
- C'est celle-ci ! cria-t-il aux deux autres. La grosse, là, avec les ailes bleues. Les plumes sont toutes froissées d'un côté.
Ron fila dans la direction indiquée par Harry, mais, emporté par son élan, il s'écrasa contre le plafond et faillit tomber de son balai.
- Il faut la cerner, cria Harry, sans quitter des yeux la clé à l'aile blessée. Ron, tu restes au-dessus, Hermione, tu te mets en dessous pour l'empêcher de descendre, et moi, j'essaierai de l'attraper. Attention... Partez ! Ron plongea, Hermione remonta en chandelle, et la clé les évita tous les deux, mais Harry fonça dessus. La clé filait vers le mur. Harry se pencha en avant et dans un craquement sinistre, il réussit à la plaquer contre la pierre avec la paume de la main. Ron et Hermione poussèrent une exclamation de joie qui résonna dans toute la salle.
Ils se dépêchèrent d'atterrir et Harry courut vers la porte, serrant dans sa main la clé qui se débattait. Il l'enfonça dans la serrure et tourna. Il y eut un déclic, puis la clé s'envola à nouveau, les ailes en piteux état.
- Prêts ? demanda Harry, la main sur la poignée de la porte. Les deux autres hochèrent la tête et il ouvrit la porte.
La deuxième salle était plongée dans une telle obscurité qu'ils ne voyaient plus rien. Mais lorsqu'ils eurent franchi le seuil de la porte, une lumière éclatante jaillit soudain en leur révélant un spectacle étonnant.
Ils se trouvaient au bord d'un échiquier géant, derrière des pièces noires qui étaient plus grandes qu'eux et semblaient avoir été sculptées dans de la pierre. En face d'eux, de l'autre côté de la salle, se tenaient les pièces blanches. Harry et les deux autres furent parcourus d'un frisson. Les pièces blanches n'avaient pas de visage.
- Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? murmura Harry.
- C'est évident, non ? dit Ron. Il va falloir jouer une partie d'échecs pour arriver de l'autre côté.
Derrière les pièces blanches, ils apercevaient une autre porte. - Comment on va s'y prendre ? demanda Hermione, inquiète.
- Nous serons sans doute obligés de nous transformer nous-mêmes en pièces d'échecs, dit Ron.
Il s'avança vers un cavalier noir et posa la main sur le cheval. Aussitôt, la pierre s'anima. Le cheval frappa l'échiquier de ses sabots et le cavalier tourna vers Ron sa tête coiffée d'un casque.
- Il faut... euh... qu'on se joigne à vous pour passer de l'autre côté ? demanda Ron.
Le cavalier noir approuva d'un signe de tête. Ron se tourna vers les deux autres.
- Il faut bien réfléchir, dit-il. On va devoir prendre la place de trois des pièces noires. Harry et Hermione restèrent silencieux, attendant que Ron ait pris une décision.
- Ne vous vexez pas, dit-il enfin, mais vous n'êtes pas très bons aux échecs, tous les deux.
- On ne se vexe pas, dit Harry. Dis-nous simplement ce qu'on doit faire.
- Toi, Harry, tu prends la place de ce fou et toi, Hermione tu te mets du même côté sur la case de la tour.
- Et toi ?
- Moi, je prends la place du cavalier, dit Ron.
Les pièces blanches avaient entendu car à cet instant, un cavalier, un fou et une tour quittèrent l'échiquier, laissant trois cases vides que Ron, Harry et Hermione occupèrent.
- Les blancs jouent toujours les premiers, dit Ron en scrutant l'autre extrémité de l’échiquier. Regardez...
Un pion blanc venait d'avancer de deux cases.
Ron commença alors à donner ses ordres aux pièces noires et elles se déplacèrent sans bruit là où il les envoyait. Harry sentit ses jambes faiblir. Que se passerait-il si jamais ils perdaient ?
- Harry, déplace-toi de quatre cases en diagonale vers la droite.
Leur premier choc fut de voir le camp adverse prendre leur autre cavalier. La reine blanche l'assomma en le jetant à bas de sa monture et le traîna au bord de l'échiquier où il resta immobile, face contre terre.
- C'était nécessaire, dit Ron qui paraissait secoué. Maintenant, tu vas pouvoir prendre ce fou, Hermione. Vas-y.
Chaque fois qu'elles perdaient un de leurs hommes, les pièces blanches se montraient sans pitié et bientôt, il y eut une rangée de pièces noires hors de combat alignées le long du mur. Mais Ron s'arrangeait pour prendre autant de pièces blanches qu'ils en avaient perdu de noires.
- On y est presque, murmura-t-il. Voyons, réfléchissons...
La reine blanche tourna vers lui sa tête sans visage.
- Oui, dit Ron à voix basse, c'est le seul moyen... Je dois me faire prendre...
- NON ! s'écrièrent les deux autres.
- C'est le jeu, répliqua Ron. Il faut savoir faire des sacrifices ! Je vais avancer et elle me prendra, ce qui te permettra de faire échec et mat, Harry.
- Mais...
- Tu veux arrêter Rogue, ou pas ?
- Ron...
- Si tu ne te dépêches pas, il va s'emparer de la Pierre !
Il n'y avait rien d'autre à faire.
- Prêt ? demanda Ron, le teint pâle, mais l'air décidé. J'y vais... et ne traînez pas ici quand vous aurez gagné.
Il s'avança. La reine blanche abattit alors son bras de pierre sur sa tête. Ron s'effondra et la reine le traîna jusqu'au bord de l'échiquier. En le voyant assommé, Hermione avait poussé un cri, mais elle n'avait pas bougé de sa case.
En tremblant, Harry se déplaça de trois cases vers la gauche.
Aussitôt, le roi blanc ôta sa couronne et la jeta aux pieds de Harry. Ils avaient gagné. Les pièces blanches s'écartèrent en s'inclinant, dégageant l'accès à la porte du fond. Après avoir jeté à Ron un dernier regard navré, Harry et Hermione franchirent la porte et s'engouffrèrent dans un autre passage.
- Tu crois qu'il... commença Hermione.
- Ne t'inquiète pas, il n'est pas blessé, assura Harry en essayant de s'en convaincre lui-même. Qu'est-ce qui nous attend maintenant, à ton avis ?
- Le Filet du Diable, c'était le maléfice de Chourave. C'est sans doute Flitwick qui a ensorcelé les clés. McGonagall a donné vie aux pièces d'échecs. Il nous reste donc à affronter les sortilèges de Quirrell et de Rogue.
Ils étaient à présent devant une nouvelle porte.
- On y va ? murmura Harry.
- D'accord.
Harry poussa la porte. Aussitôt, une répugnante odeur leur frappa les narines et tous deux durent relever les pans de leur robe pour se couvrir le nez. Ils virent alors, allongé sur le sol, un immense troll encore plus grand que celui auquel ils s'étaient attaqués. Il était évanoui, avec une grosse bosse sanglante sur le front.
- Heureusement qu'on n'a pas eu à se battre avec celui-ci, murmura Harry.
Ils enjambèrent avec précaution l'une de ses chevilles qui leur barrait le chemin et se hâtèrent de gagner la porte suivante. Lorsque Harry l'ouvrit, ils s'attendaient au pire, mais ils ne virent rien d'effrayant, Il y avait simplement une table sur laquelle étaient alignées sept bouteilles de différentes formes.
- Ça, c'est le maléfice de Rogue, dit Harry. Qu'est-ce qu'on doit faire ?
Dès qu'ils eurent franchi le seuil de la porte, de grandes flammes jaillirent derrière eux. Mais ce n'était pas un feu ordinaire : celui-ci était violet. Au même moment, d'autres flammes, noires cette fois, s'élevèrent dans l'encadrement de la porte du fond. Ils étaient pris au piège.
- Regarde ! dit Hermione en prenant un rouleau de parchemin posé à côté des bouteilles. Harry s'approcha et lut par-dessus son épaule :
Devant est le danger, le salut est derrière.
Deux sauront parmi nous conduire à la lumière,
L'une d'entre les sept en avant te protège
Et une autre en arrière abolira le piège,
Deux ne pourront t'offrir que simple vin d'ortie
Trois sont mortels poisons, promesse d’agonie.
Choisis, si tu veux fuir un éternel supplice,
Pour t'aider dans ce choix, tu auras quatre indices :
Le premier : si rusée que soit leur perfidie,
Les poisons sont à gauche des deux vins d'ortie.
Le second : différente à chaque extrémité,
Si tu vas de l'avant, nulle n'est ton alliée.
Le troisième : elles sont de tailles inégales,
Ni naine ni géante en son sein n'est fatale.
Quatre enfin : les deuxièmes, à gauche comme à droite,
Sont jumelles de goût, mais d'aspect disparates.
Hermione poussa un profond soupir et Harry fut stupéfait de voir qu'elle souriait.
- Remarquable ! dit-elle. Ce n'est pas de la magie, c'est de la logique. Une énigme. Il y a beaucoup de grands sorciers qui n'ont pas la moindre logique, ils n'arriveraient jamais à trouver la solution.
- Et nous non plus...
- Bien sûr que si. Tout ce dont nous avons besoin est écrit sur ce papier. Il y a sept bouteilles, trois contiennent du poison, deux du vin, l'une d'elles permet de franchir sans mal les flammes noires et une autre permet de retourner sur nos pas en traversant les flammes violettes.
- Mais comment savoir laquelle boire ?
- Laisse-moi réfléchir.
Hermione relut le papier plusieurs fois. Puis elle examina attentivement les bouteilles en marmonnant pour elle-même. Enfin, elle poussa un cri de victoire.
- Ça y est, j'ai trouvé ! dit-elle. C'est la plus petite bouteille qui nous permettra de traverser les flammes noires et d'arriver jusqu'à la Pierre.
Harry regarda la minuscule bouteille.
- Il y a tout juste une gorgée, là-dedans, dit-il, ce n'est pas assez pour nous deux. Ils échangèrent un regard.
- Quelle est celle qui permet de franchir les flammes violettes ?
Hermione montra une bouteille ronde, à droite de la rangée.
- Alors, bois celle-là, dit Harry. Retourne auprès de Ron, allez prendre des balais dans la salle des clés volantes et utilisez-les pour ressortir par la trappe. Touffu n'aura pas le temps de vous mordre. Filez droit à la volière et envoyez Hedwige à Dumbledore avec un mot disant qu'on a besoin de lui. J'arriverai peut-être à retenir Rogue pendant un moment, mais je ne suis pas de taille à l'affronter.
- Et qu'est-ce qui se passera si jamais Tu-Sais-Qui est avec lui ?
- J'ai eu de la chance une fois, dit Harry en montrant sa cicatrice. Pourquoi pas deux ?
Les lèvres d'Hermione tremblèrent. Elle se précipita soudain sur Harry et le serra dans ses bras.
- Hermione !
- Harry, tu es un grand sorcier !
- Pas autant que toi... répondit Harry, un peu gêné.
- Moi ? J'ai tout appris dans les livres. Mais il y a des choses beaucoup plus importantes, le courage, l’amitié...
- Oh, Harry, fais bien attention...
- Bois la première, dit Harry. Tu es sûre que tu ne te trompes pas ?
- Certaine ! assura Hermione.
Elle but une longue gorgée au goulot de la bouteille ronde et fut parcourue d'un frisson.
- Ce n'est pas du poison ? demanda Harry d'une voix angoissée.
- Non, mais on dirait de la glace.
- Dépêche-toi, vas-y avant que les effets disparaissent.
- Bonne chance... Sois prudent...
- VAS-Y !
Hermione fit volte-face et marcha droit vers les flammes violettes. Harry respira profondément, prit la petite bouteille et se tourna vers les flammes noires.
- J'arrive ! dit-il.
Et il vida la bouteille.
Il eut alors l'impression d'avoir plongé dans un bain glacé. Il reposa la bouteille, contracta ses muscles et s'avança à travers le feu. Les flammes lui léchèrent le corps, mais il ne sentit aucune chaleur. Pendant quelques instants, il ne vit plus que la couleur noire du feu magique, puis il se retrouva de l'autre côté, dans la dernière salle. Quelqu'un était déjà là, mais ce n'était pas Rogue. Ce n'était même pas Voldemort.
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inhogwartsitrust · 1 year
Text
T1C15
Les choses n'auraient pas pu tourner plus mal.
Rusard les conduisit dans le bureau du professeur McGonagall où ils s'assirent en silence. Hermione tremblait. Harry tournait et retournait dans sa tête toutes les excuses qu'il pouvait trouver pour justifier leur conduite, mais aucune ne paraissait convaincante. Ils étaient pris au piège. Comment avaient-ils pu être assez stupides pour oublier la cape ? Aucune excuse au monde ne pourrait justifier aux yeux du professeur McGonagall qu'ils se promènent ainsi au milieu de la nuit et surtout pas dans la plus haute tour d'astronomie qui était réservée aux cours. Si l'on ajoutait Norbert et la cape d'invisibilité, ils pouvaient tout aussi bien faire leur valise dès maintenant.
Pour comble de malheur, lorsque le professeur McGonagall réapparut, elle tenait Neville par le bras.
- Harry ! s'écria Neville. Je t'ai cherché pour te prévenir, j'ai entendu Malefoy dire qu'il allait te coincer, il a dit que tu avais un drag...
Harry fit un signe de tête frénétique pour interrompre Neville, mais le professeur McGonagall l'avait vu. Elle semblait dans un tel état de fureur qu'elle aurait pu cracher le feu beaucoup mieux que Norbert.
- Je n'aurais jamais cru ça de vous. Mr Rusard m'a dit que vous étiez au sommet de la tour d'astronomie. Or, il est une heure du matin. J'exige des explications !
Pour la première fois, Hermione fut incapable de répondre à la question d'un professeur. Elle restait immobile comme une statue, les yeux fixés sur le bout de ses chaussons.
- J'ai une petite idée sur ce qui s'est passé, reprit le professeur McGonagall. Il n'est pas nécessaire d'être un génie pour le comprendre. Vous avez raconté à Drago Malefoy une histoire à dormir debout au sujet d'un prétendu dragon pour l'attirer hors de son lit et lui créer des ennuis. Je l'ai déjà pris sur le fait. Et vous devez être très contents que Neville Londubat ait également cru à votre histoire ?
Harry croisa le regard de Neville et essaya de lui faire comprendre que ce n'était pas vrai. Il avait en effet remarqué son expression stupéfaite et peinée. Pauvre Neville ! Harry savait ce qu'il avait dû lui en coûter de partir à leur recherche dans l'obscurité du château pour les prévenir.
- Je suis outrée, dit le professeur McGonagall. Quatre élèves qui se promènent dans les couloirs la même nuit ! Je n'ai jamais vu une chose pareille. Miss Granger, je pensais que vous étiez plus raisonnable. Quant à vous, Mr Potter, je croyais que vous attachiez plus de prix au prestige de Gryffondor. Vous serez tous les trois en retenue et, croyez-moi, vous aurez du travail à faire ! Oui, oui, vous aussi, Mr Londubat, rien ne vous autorise à errer dans les couloirs en pleine nuit, encore moins en cette période, c'est extrêmement dangereux et j'enlève cinquante points à Gryffondor.
- Cinquante ? s'exclama Harry, suffoqué.
Ils perdaient du même coup la tête du championnat qu'ils avaient gagnée lors du dernier match de Quidditch.
- Cinquante points chacun ! précisa le professeur McGonagall.
- Professeur, s'il vous plaît...
- Vous ne pouvez pas...
- Ce n'est pas à vous de me dire ce que je peux faire ou pas, Potter. Et maintenant, retournez vous coucher tous les trois. Jamais des élèves de Gryffondor ne m'ont fait autant honte.
Cent cinquante points perdus ! Gryffondor était relégué à la dernière place du championnat. En une seule nuit, ils lui avaient fait perdre toute chance de remporter la coupe des Quatre Maisons. Comment pourraient-ils jamais rattraper un tel handicap ?
Harry ne dormit pas de la nuit. Il entendit Neville sangloter dans son oreiller des heures entières. Il ne savait pas quoi dire pour le consoler. Tout comme lui, Neville redoutait l'aube. Qu'arriverait-il lorsque les autres élèves de Gryffondor apprendraient ce qui s'était passé ?
Le lendemain, quand les élèves de Gryffondor passèrent devant les sabliers géants qui comptabilisaient les points de chaque maison, ils crurent d'abord à une erreur.
Comment auraient-ils pu perdre cent cinquante points en une nuit ? L'histoire commença alors à se répandre : c'était Harry Potter, le célèbre Harry Potter, le héros des deux derniers matches de Quidditch, qui leur avait fait perdre tous ces points, lui et deux autres idiots de première année.
Harry qui avait été le plus populaire, le plus admiré des élèves de l'école devint brusquement celui qu'on détestait le plus. Même les Serdaigle et les Poufsouffle s'en prenaient à lui, car ils avaient tous espéré que les Serpentard perdraient la coupe.
Partout où Harry apparaissait, on le montrait du doigt, on l'insultait à haute voix. Les Serpentard, en revanche, applaudissaient et l'acclamaient chaque fois qu'ils le voyaient passer.
- Merci pour le coup de main, Potter !
Il n'y avait que Ron pour lui rester fidèle.
- Ils auront oublié tout ça dans quelques semaines, assura-t-il. Fred et George ont fait perdre des quantités de points à Gryffondor pendant tout le temps qu'ils ont passé ici et tout le monde les aime bien quand même.
- Ils n'ont jamais fait perdre cent cinquante points d'un coup, j'imagine ? dit Harry d'un air malheureux.
- Non, c'est vrai, admit Ron.
Il était un peu tard pour réparer les dégâts, mais Harry se jura désormais de ne plus se mêler de ce qui ne le regardait pas, Il se sentait si honteux qu'il proposa à Dubois de démissionner de l'équipe de Quidditch.
- Démissionner ? tonna Dubois. Et ça nous servira à quoi ? Comment on va faire pour regagner des points si on ne peut plus gagner les matches ?
Mais même le Quidditch avait cessé de l'amuser. Les autres joueurs refusaient d'adresser la parole à Harry pendant les séances d'entraînement et quand ils avaient besoin de parler de lui, ils le désignaient sous le nom d'attrapeur.
Hermione et Neville souffraient, eux aussi. Ils n'avaient pas à subir autant d'avanies, car ils n'étaient pas aussi connus, mais personne ne leur parlait non plus.
Hermione était devenue discrète en classe, gardant la tête baissée et travaillant en silence.
Harry était presque content que la période des examens approche. Toutes les révisions qu'il avait à faire lui occupaient suffisamment l'esprit pour qu'il n'ait plus le temps de penser à ses malheurs.
Une semaine avant les examens, cependant, la promesse que Harry s'était faite de ne plus se mêler de ce qui ne le regardait pas fut mise à l'épreuve. Un après-midi, alors qu'il revenait de la bibliothèque, il entendit un gémissement qui provenait d'une salle de classe, un peu plus loin. Il reconnut bientôt la voix de Quirrell.
- Non, non, ne recommencez pas... s'il vous plaît... implorait-il. On aurait dit que quelqu'un le menaçait. Harry s’approcha.
- D'accord, d'accord, sanglota Quirrell.
Un instant plus tard, il sortit en hâte de la salle en redressant son turban. Il avait le teint pâle et semblait sur le point de fondre en larmes. Il s'éloigna à grands pas et disparut. Harry attendit que le bruit de ses pas se soit évanoui, puis il regarda à l'intérieur de la salle de classe. Elle était vide, mais il y avait de l'autre côté une deuxième porte qui était entrouverte et il s'avança dans cette direction. Il avait déjà parcouru la moitié du chemin lorsque, se souvenant de sa promesse, il se ravisa.
De toute façon, il était prêt à parier une douzaine de Pierres philosophales que c'était Rogue qui était parti par là. Et d'après ce qu'il venait d'entendre, Quirrell avait fini par céder à ses menaces. Harry retourna aussitôt à la bibliothèque et raconta à Ron et à Hermione ce qu'il avait entendu.
- Alors, Rogue a fini par y arriver ! soupira Ron. Si Quirrell lui a révélé comment neutraliser son sortilège...
- Il reste Touffu, fit remarquer Hermione.
- Peut-être que Rogue a trouvé le moyen de passer devant lui sans avoir eu besoin de le demander à Hagrid, dit Ron en jetant un coup d'œil aux milliers de livres qui les entouraient. J'imagine qu'il doit bien y avoir un bouquin qui indique comment s'y prendre avec un chien géant à trois têtes. Qu'est-ce qu'on fait, Harry ?
La lueur de l'aventure brillait à nouveau dans le regard de Ron, mais Hermione répondu avant Harry :
- Il faut aller voir Dumbledore, dit-elle. C'est ce qu'on aurait dû faire depuis le début. Si on tente quelque chose nous-mêmes, on va se faire renvoyer, c'est sûr.
- Mais on n'a aucune preuve, répondit Harry. Quirrell a bien trop peur pour confirmer ce qu'on dira. Rogue se contentera de prétendre qu'il ignore comment le troll est entré le jour de Halloween et qu'il ne s'est pas rendu au deuxième étage. Et qui est-ce qu'on va croire ? Lui ou nous ? Tout le monde sait qu'on le déteste. Dumbledore pensera que nous avons inventé toute l'histoire pour essayer de le faire renvoyer. Rusard ne nous aiderait pour rien au monde, même si sa vie en dépendait. Il est bien trop ami avec Rogue et, à ses yeux, plus il y a d'élèves qui se font renvoyer, mieux c'est. En plus on n'est pas censés connaître l'existence de la Pierre, ni celle de Touffu.
Hermione sembla convaincue, mais pas Ron.
- Et si on se contentait de fouiner un peu ? proposa-t-il.
- Non, répliqua Harry. On a suffisamment fouiné comme ça.
Il tira vers lui une carte de Jupiter et commença à apprendre les noms de ses satellites.
Le lendemain matin, les retenues furent signifiées officiellement à Harry, Hermione et Neville pendant le petit déjeuner. Le mot qu'on leur distribua était le même :
Votre retenue commencera ce soir à onze heures. Rendez-vous avec Mr Rusard dans le hall d'entrée. Prof. M. McGonagall
Dans l'agitation qu'avait provoquée la perte de leurs points, Harry avait oublié qu'ils avaient toujours des retenues à faire. Il s'attendait à ce qu'Hermione se plaigne en disant que c'était une soirée de perdue pour les révisions, mais elle ne prononça pas un mot. Tout comme Harry, elle estimait qu'ils avaient eu ce qu'ils méritaient. À
onze heures, ce soir-là, ils dirent au revoir à Ron dans la salle commune et descendirent dans le hall d'entrée avec Neville. Rusard était déjà là, ainsi que Malefoy. Lui aussi était puni, Harry avait fini par l'oublier.
- Suivez-moi, dit Rusard en les conduisant au-dehors, une lampe à la main. Alors, vous y repenserez à deux fois, maintenant, avant de violer les règlements de l'école ? lança-t-il d'un ton narquois. Travailler dur et souffrir, c'est comme ça qu'on apprend le mieux, vous pouvez me croire. C'est dommage que les anciennes punitions n'aient plus cours, En ce temps-là, on vous suspendait au plafond par les poignets pendant quelques jours, j'ai toujours les chaînes dans mon bureau. Je les entretiens soigneusement au cas où on s'en servirait à nouveau. Allez, on y va. Rusard leur fit traverser le parc. Harry se demanda en quoi allait consister leur punition. C'était sans doute quelque chose de redoutable pour que Rusard ait l'air aussi réjoui.
La lune brillait, mais les nuages qui la masquaient par moments les plongeaient dans l'obscurité. Plus loin, on apercevait les fenêtres allumées de la cabane de Hagrid.
Ils entendirent alors une voix crier :
- C'est vous Rusard ? Dépêchez-vous, j'ai hâte de commencer.
Harry se sentit soudain un peu plus léger. Si leur punition consistait à travailler avec Hagrid, ce serait moins difficile que prévu. Le soulagement avait dû apparaître sur son visage, car Rusard s'empressa de le décevoir.
- Vous vous imaginez peut-être que vous allez passer un peu de bon temps avec ce fainéant ? Détrompez-vous, jeunes gens. C'est dans la Forêt interdite que vous allez et ça m'étonnerait que vous soyez encore entiers quand vous en ressortirez. Neville était un gémissement et Malefoy s'arrêta net.
- La forêt ? dit-il d'un ton qui avait perdu sa morgue habituelle. On ne va quand même pas y aller en pleine nuit ! Il y a des tas de bestioles, là-dedans, même des loups-garous d'après ce qu'on m'a dit.
Harry sentit la main de Neville lui serrer le bras.
- Il fallait penser aux loups-garous avant de faire des bêtises.
Hagrid surgit de l'obscurité, Crockdur sur ses talons. Il avait à la main une grande arbalète et un carquois rempli de flèches en bandoulière.
- C'est pas trop tôt, dit-il. Ça fait une demi-heure que j'attends. Ça va, Harry, Hermione ?
- À votre place, je ne serais pas trop aimable avec eux, dit Rusard avec froideur. Ils sont ici pour être punis.
- C'est pour ça que vous êtes en retard ? répliqua Hagrid en regardant Rusard d'un air mauvais. Vous leur avez fait la leçon, hein ? C'est pas dans vos attributions. Vous avez fait votre part, à partir d'ici, c'est moi qui m'en occupe.
- Je reviendrai à l'aube, dit Rusard, pour récupérer ce qui restera d'eux.
Et il retourna vers le château, éclairé par sa lampe qui se balançait dans l'obscurité.
Malefoy se tourna vers Hagrid.
- Je refuse d'aller dans cette forêt, dit-il.
Harry fut enchanté d'entendre le tremblement de sa voix qui trahissait sa panique.
- Il faudra bien y aller si tu veux rester à Poudlard, répliqua Hagrid d'un ton féroce. Tu as fait des idioties, il faut payer, maintenant.
- Il n'y a que les domestiques qui vont dans la forêt, pas les élèves, protesta Malefoy. Je croyais qu'on allait nous faire copier des lignes, ou quelque chose dans ce goût-là. Si mon père apprenait qu'on m'oblige à...
- C'est comme ça que ça se passe, à Poudlard, coupa Hagrid. Copier des lignes, et puis quoi encore ? A quoi c'est bon ? Ou bien tu fais quelque chose d'utile, ou bien tu es renvoyé. Si tu penses que ton père préfère que tu t'en ailles, tu n'as qu'à retourner au château et préparer ta valise. Allez, vas-y !
Malefoy ne bougea pas. Il lança à Hagrid un regard furieux, puis il baissa les yeux.
- Très bien, dit Hagrid, et maintenant écoutez-moi bien, tous les quatre, parce que c'est dangereux ce que nous allons faire cette nuit. Je ne veux pas que vous preniez des risques. Suivez-moi par là.
Il les amena à la lisière de la forêt, leva sa lampe et montra un étroit sentier qui serpentait parmi les gros arbres noirs. Une petite brise agitait leurs cheveux tandis qu'ils contemplaient la forêt.
- Regardez, dit Hagrid, vous voyez cette chose argentée qui brille par terre ? C'est du sang de licorne. Il y a dans les environs une licorne qui a été gravement blessée par je ne sais quoi. C'est la deuxième fois cette semaine. J'en ai trouvé une morte mercredi dernier. On va essayer de retrouver cette malheureuse bestiole. Il faudra peut-être mettre fin à ses souffrances.
- Et qu'est-ce qui se passe si le je-ne-sais-quoi qui a blessé la licorne nous trouve avant ? demanda Malefoy sans parvenir à dissimuler la terreur qui altérait sa voix
- Tant que tu seras avec moi et Crockdur, rien de ce qui vit dans cette forêt ne pourra te faire de mal, assura Hagrid. Ne vous écartez pas du chemin. Nous allons tout de suite nous séparer en deux groupes et suivre les traces dans des directions différentes. Il y a du sang partout, elle a dû errer dans tous les sens depuis la nuit dernière.
- Je veux Crockdur avec moi, dit précipitamment Malefoy en regardant les longues dents du chien.
- D'accord, mais je te préviens, c'est un trouillard, dit Hagrid. Alors, Harry, Hermione et moi, on va d'un côté, Drago, Neville et Crockdur de l'autre. Si l'un de nous trouve la licorne, il envoie des étincelles vertes, d'accord ? Sortez vos baguettes magiques et entraînez-vous dès maintenant. Voilà, très bien. Et si quelqu'un a des ennuis, il envoie des étincelles rouges pour que les autres viennent à son secours. Allons-y, maintenant, et faites bien attention.
La forêt était noire et silencieuse. Un peu plus loin, ils atteignirent une bifurcation.
Hagrid, Harry et Hermione prirent le chemin de gauche, Malefoy, Neville et Crockdur celui de droite.
Ils avancèrent sans bruit, les yeux rivés au sol. De temps à autre, un rayon de lune traversait les feuillages et faisait briller une tache de sang argenté sur les feuilles mortes.
Harry remarqua que Hagrid avait l'air inquiet.
- Est-ce qu'un loup-garou pourrait tuer une licorne ? demanda Harry.
- Il ne serait pas assez rapide. Les licornes ne sont pas faciles à attraper, ce sont des créatures qui ont des pouvoirs magiques très puissants. Avant ça, je n'avais jamais entendu dire qu'on puisse blesser une licorne. Ils passèrent devant une souche d'arbre couverte de mousse. Harry entendit un bruit d'eau. Il devait y avoir un ruisseau à proximité. Il y avait toujours des taches de sang de licorne le long du chemin.
- Ça va, Hermione ? murmura Hagrid. Ne t'inquiète pas, si elle est gravement blessée, elle n'a pas pu aller bien loin et nous arriverons à... VITE ! CACHEZ-VOUS DERRIÈRE CET ARBRE !
Hagrid attrapa Harry et Hermione et les souleva de terre pour les cacher derrière un grand chêne, à l'écart du chemin. Il saisit une flèche dans son carquois, l'ajusta sur son arbalète qu'il leva, prêt à tirer. Tous trois tendirent l'oreille. Quelque chose rampait sur des feuilles mortes. On aurait dit le bas d'une cape qui traînait sur le sol.
Hagrid scruta le sentier, mais quelques instants plus tard, le bruit s'était évanoui.
- J'en étais sûr, murmura-t-il. Il y a dans cette forêt quelque chose qui ne devrait pas y être.
- Un loup-garou ? risqua Harry.
- Ça, ce n'était ni un loup-garou, ni une licorne, dit sombrement Hagrid. Bon, suivez-moi, mais faites bien attention.
Ils avancèrent plus lentement, guettant le moindre bruit.
Soudain, dans une clairière, un peu plus loin, quelque chose bougea nettement.
- Qui est là ? lança Hagrid. Montrez-vous ! Je suis armé !Dans la clairière apparut alors... était-ce un homme, était-ce un cheval ? Jusqu'à la taille, c'était un homme, mais au-dessous, c'était un cheval, couleur noisette, avec une longue queue aux reflets rougeâtres. Harry et Hermione restèrent bouche bée.
- Ah, c'est toi, Ronan, dit Hagrid, soulagé. Comment ça va ? Il s'avança et serra la main du centaure.
- Salut à toi, Hagrid, répondit Ronan d'une voix grave et triste. Tu t'apprêtais à me tirer dessus ?
- On n'est jamais trop prudent, dit Hagrid en tapotant son arbalète. Il y a quelque chose qui se promène dans cette forêt et qui fait du dégât. Au fait, je te présente Harry Potter et Hermione Granger. Des élèves de l'école. Ronan est un centaure, ajouta-t-il à l'adresse de Harry et d'Hermione.
- On avait remarqué, dit Hermione d'une petite voix.
- Bonsoir, dit Ronan. Vous êtes des élèves de l'école ? Et vous apprenez beaucoup de choses ?
- Un peu, répondit timidement Hermione,
- Un peu, c'est déjà pas mal, soupira le centaure.
Il leva la tête et regarda le ciel.
- On voit bien Mars, ce soir, remarqua-t-il.
- Oui, dit Hagrid en regardant à son tour. Je suis content qu'on soit tombés sur toi, Ronan. Il y a une licorne qui a été blessée. Tu as vu quelque chose ?
Ronan ne répondit pas tout de suite. Il garda les yeux levés vers le ciel, puis soupira à nouveau.
- Les innocents sont toujours les premières victimes, dit-il. Il en a toujours été ainsi, il en sera toujours de même.
- Oui, dit Hagrid. Mais est-ce que tu as vu quelque chose, Ronan ? Quelque chose
d'inhabituel ?
- On voit bien Mars, ce soir, répéta Ronan. Il est beaucoup plus brillant que d'habitude.
- Je te demandais si tu avais vu quelque chose plus près d'ici, dit Hagrid avec impatience. Alors ?
- Les forêts sont pleines de secrets, déclara Ronan.
Hagrid leva à nouveau son arbalète en entendant un bruit derrière eux, mais c'était un autre centaure aux cheveux noirs qui avait l'air plus sauvage que Ronan.
- Salut, Bane, dit Hagrid. Ça va ? Justement, je demandais à Ronan s'il n'avait rien vu d'inhabituel, ces temps derniers. Une licorne a été blessée. Tu sais quelque chose à ce sujet ?
L'autre centaure leva la tête vers le ciel.
- On voit bien Mars, ce soir, dit-il.
- On sait, on sait, grommela Hagrid. Bon, écoutez, si vous remarquez quelque chose, tous les deux, dites-le-moi, d'accord ?
Il s'éloigna ensuite de la clairière, suivi de Harry et d'Hermione.
- Avec les centaures, impossible d'obtenir une réponse claire, dit Hagrid. Ils passent leur temps à regarder les étoiles. Rien ne les intéresse si ça ne se passe pas au moins sur la lune.
- Il y en a beaucoup, ici ? demanda Hermione.
- Oh, pas mal, oui. Ils restent entre eux, le plus souvent, mais ils viennent me voir de temps en temps. Ils savent beaucoup de choses. L'ennui, c'est qu'ils ne sont pas très bavards.
- Vous croyez que c'était un centaure qu'on a entendu, tout à l'heure ? Demanda Harry.
- Non, ça ne ressemblait pas à des bruits de sabots. Je suis sûr que c'était ce qui a tué la licorne. Je n'avais jamais entendu ça auparavant.
Ils s'enfoncèrent un peu plus dans l'épaisse forêt, Harry avait le sentiment désagréable qu'on les observait et il n'était pas fâché que Hagrid soit armé. Soudain, Hermione agrippa le bras de Hagrid.
- Regardez ! s'écria-t-elle. Des étincelles rouges ! Les autres ont des ennuis.
- Attendez-moi ici, vous deux, dit Hagrid. Ne vous éloignez pas du sentier. Je viendrai vous rechercher.
Ils l'entendirent s'enfoncer dans les sous-bois en échangeant un regard terrifié.
- Tu crois qu'ils sont blessés ? murmura Hermione.
- Si c'est Malefoy, ça m'est égal, mais s'il est arrivé quelque chose à Neville… C'est à cause de nous qu'il est ici.
Les minutes passèrent, interminables. Leur ouïe s'affinait, Harry percevait chaque souffle de vent, chaque craquement de brindille. Que se passait-il ? Où étaient les autres ? Enfin, des bruits de pas sonores annoncèrent le retour de Hagrid. Malefoy, Neville et Crockdur étaient avec lui. Hagrid fulminait. D'après ce que Harry et Hermione comprirent, Malefoy s'était approché sans bruit de Neville et l'avait saisi par-derrière pour lui faire une farce. Neville avait alors paniqué et envoyé les étincelles.
- On aura de la chance si on attrape quelque chose, avec tout le raffut que vous avez fait. On va changer les groupes. Neville, tu restes avec moi et Hermione. Toi,Harry, tu vas avec Crockdur et cet imbécile. Je suis désolé, souffla-t-il à Harry, mais toi, au moins, il n'arrivera pas à te faire peur.
Harry partit donc en compagnie de Malefoy et de Crockdur. Ils marchèrent pendant
plus d'une demi-heure. La forêt était de plus en plus épaisse à mesure qu'ils avançaient et le sentier devint presque impraticable. Harry avait l'impression que les taches de sang étaient plus abondantes. Il en vit sur les racines d'un arbre, comme si la malheureuse créature s'était débattue, folle de douleur. A travers le feuillage d'un vieux chêne, Harry aperçut une clairière. Il fit signe à Malefoy de s'arrêter. Il y avait quelque chose d'un blanc brillant sur le sol. Ils s'approchèrent prudemment. C'était bien la licorne. Elle était morte. Harry n'avait jamais rien vu d'aussi beau et d'aussi triste. Ses longues jambes minces s'étaient repliées dans sa chute et sa crinière étalée formait une tache gris perle sur les feuilles sombres.
Harry s'avançait vers elle lorsqu'un bruissement le figea sur place. Au bord de la clairière, un buisson frémit. Puis une silhouette encapuchonnée sortit de l'ombre et rampa sur le sol, comme une bête traquant un gibier. Harry, Malefoy et Crockdur étaient pétrifiés. La silhouette s'arrêta devant le cadavre de la licorne, pencha la tête sur le flanc déchire de l'animal et commença à boire son sang.
- AAAAAAAAAAAAAAAAARGH !
Malefoy laissa échapper un terrible hurlement et prit aussitôt la fuite, suivi de Crockdur. La silhouette au capuchon leva la tête et regarda Harry. Du sang de licorne lui coulait sur la poitrine. La silhouette se releva d'un bond et se précipita vers lui.
Paralysé par la peur, Harry fut incapable de bouger.
Une douleur foudroyante lui traversa alors la tête, une douleur comme il n'en avait encore jamais ressenti. C'était comme si sa cicatrice avait soudain pris feu. A moitié aveuglé, il recula en titubant. Au même moment, il entendit des bruits de sabots qui galopaient derrière lui, puis quelque chose lui sauta par-dessus et fonça vers la silhouette.
La douleur de Harry était si intense qu'il tomba à genoux. Il dut attendre un bon moment avant qu'elle ne s'atténue. Lorsqu'il releva la tête, la silhouette avait disparu et un centaure se tenait devant lui. Ce n'était ni Ronan, ni Bane. Celui-ci paraissait plus jeune ; il avait des cheveux blonds et un corps de couleur claire.
- Ça va ? demanda le centaure en aidant Harry à se relever.
- Oui, merci. Qu'est-ce que c'était ?
Le centaure ne répondit pas. Il avait des yeux d'un bleu surprenant, comme des saphirs délavés. Il observa attentivement Harry et son regard s'attarda sur la cicatrice qui brillait, livide, sur son front.
- Tu es le fils Potter, dit le centaure. Il vaudrait mieux que tu retournes auprès de Hagrid. La forêt n'est pas sûre, ces temps-ci, surtout pour toi. Tu sais monter à cheval ? Ce sera plus rapide. Je m'appelle Firenze, ajouta-t-il en pliant les jambes pour que Harry puisse monter sur son dos.
Il y eut alors un autre bruit de galop et Ronan et Bane surgirent des arbres, les flancs palpitants, couverts de sueur.
- Firenze ! tonna Banc. Qu'est-ce que tu fais ? Tu portes un humain sur ton dos ! Tu n'as donc aucune honte ? Tu te prends pour une mule ?
- Vous savez qui est ce garçon ? répliqua Firenze. C'est le fils Potter. Plus vite il aura quitté la forêt, mieux cela vaudra.
- Qu'est-ce que tu lui as dit ? gronda Bane. Souviens-toi, Firenze, nous avons fait serment de ne pas nous opposer aux décisions du ciel. N'avons-nous pas lu dans le mouvement des planètes ce qui doit arriver ?
- Je suis sûr que Firenze a cru bien faire, intervint Ronan de sa voix sombre.
- Bien faire ! s'écria Bane avec colère, en frappant le sol de son sabot. Qu'avons-nous à voir là-dedans ? Les centaures se soumettent aux décrets du destin. Nous n'avons pas à nous promener comme des ânes pour aller chercher les humains égarés dans la forêt !
Sous le coup de la colère, Firenze se mit à ruer et Harry dut se cramponner pour ne pas tomber.
- Tu ne vois donc pas cette licorne ? lança-t-il à Bane. Tu ne comprends pas pourquoi elle a été tuée ? Les planètes ne t'ont pas dévoilé ce secret ? Je me dresse contre ce qui se cache dans cette forêt, Bane. Même s'il faut pour cela venir en aide à un humain.
Firenze partit alors au galop et Harry essaya de s'accrocher de son mieux tandis qu'ils plongeaient dans la forêt, laissant Ronan et Bane derrière eux.
Harry n'avait aucune idée de ce qui se passait.
- Pourquoi Bane est-il tellement en colère ? demanda-t-il. C'est à cause de cette chose dont tu m'as sauvé ?
Firenze ralentit l'allure et conseilla à Harry de baisser la tête pour ne pas se heurter aux branches basses, mais il ne répondit pas à la question. Ils poursuivirent leur chemin en silence, puis, alors qu'ils traversaient d'épais sous-bois, Firenze s'arrêta soudain.
- Harry Potter, dit-il, sais-tu à quoi sert le sang des licornes ?
- Non, répondit Harry, surpris par l'étrange question. Dans les potions, nous n'utilisons que leurs cornes et les crins de leur queue.
- Tuer une licorne est une chose monstrueuse, dit Firenze. Pour commettre un tel crime il faut n'avoir rien à perdre et tout à gagner. Le sang de licorne permet de survivre, même si on est sur le point de mourir, mais à un prix terrible. Car il faut tuer un être pur et sans défense pour sauver sa propre vie. Et dès l'instant où les lèvres touchent le sang, ce n'est plus qu'une demi-vie, une vie maudite.
Harry observa la tête de Firenze que la lune parsemait de taches argentées.
- Qui pourrait être désespéré à ce point ? se demanda Harry à haute voix. Si on doit être maudit à jamais, mieux vaut mourir, non ?
- Oui, dit Firenze, à moins qu'on ait simplement besoin de survivre suffisamment longtemps pour pouvoir boire quelque chose d'autre, quelque chose qui redonne la force et la puissance, quelque chose qui permette de ne jamais mourir. Harry Potter, sais-tu ce qui est caché dans l'école, en ce moment ?
- La Pierre philosophale ! L'élixir de longue vie, bien sûr ! Mais je ne comprends pas qui...
- Ne connais-tu pas quelqu'un qui a passé des années à guetter la moindre occasion de retrouver son pouvoir, qui s'est cramponné à la vie en attendant sa chance ?
Harry eut l'impression qu'une main de fer venait de se refermer sur son cœur.
Il se souvenait de ce que Hagrid lui avait dit, lors de leur première rencontre : « Certains disent qu'il est mort. A mon avis, ce sont des calembredaines. Je ne crois pas qu'il ait eu en lui quelque chose de suffisamment humain pour mourir. »
- Vous voulez parler de... de Vol...
- Harry ! Harry ! Tu n'es pas blessé ?
Hermione courait vers eux. Hagrid essayait de la suivre en soufflant comme un buffle.
- Ça va très bien, répondit machinalement Harry. La licorne est morte, Hagrid.
Elle est dans la clairière, là-bas.
- C'est ici que je te quitte, dit Firenze tandis que Hagrid se précipitait vers la clairière. Tu es en sécurité, à présent.
Harry se laissa glisser à terre.
- Bonne chance, Harry Potter. Il arrive qu'on se trompe en lisant le destin dans les planètes. Même les centaures. J'espère que c'est le cas aujourd'hui.
Il fit demi-tour et s'en alla dans les profondeurs de la forêt. Harry le regarda s'éloigner en frissonnant.
Ron était tombé endormi dans la salle commune en attendant leur retour. Mais lorsque Harry le secoua, il se sentit parfaitement réveillé et écouta le récit de ce qui s'était passé dans la forêt.
Harry ne tenait pas en place. Toujours tremblant, il faisait les cent pas devant la cheminée.
- Rogue veut la Pierre pour la donner à Voldemort... Et Voldemort l'attend dans la forêt... Et pendant tout ce temps-là, nous pensions que Rogue voulait simplement devenir riche...
- Arrête de prononcer ce nom ! murmura Ron, effrayé.
On aurait dit qu'il avait peur que Voldemort les entende. Mais Harry ne l'écoutait pas.
- Firenze m'a sauvé, mais il n'aurait pas dû le faire... Bane était furieux... Il disait qu'il ne fallait pas intervenir dans ce que décident les planètes. Elles doivent sûrement montrer que Voldemort est de retour... Et Bane pense que Firenze aurait dû laisser Voldemort me tuer... J'imagine que ça aussi, c'était écrit dans les étoiles.
- Arrête de prononcer ce nom ! dit Ron d'une voix sifflante.
- Maintenant, je n'ai plus qu'à attendre que Rogue vole la Pierre, poursuivit Harry d'une voix fébrile, et Voldemort pourra en finir avec moi. Comme ça, Bane sera content...
Hermione paraissait terrifiée, mais elle essaya de le rassurer:
- Harry, tout le monde dit que Dumbledore est le seul dont Tu-Sais-Qui a jamais eu peur. Avec Dumbledore, il n'osera pas toucher à toi. Et d'ailleurs, qui dit que les centaures ont raison ? Ils parlent comme s'ils disaient la bonne aventure et d'après le professeur McGonagall, c'est une branche très douteuse de la magie.
Ils étaient encore là à parler lorsque l'aube se leva. Epuisés, ils montèrent se coucher, la gorge en feu. Mais les surprises de la nuit n'étaient pas terminées.
Lorsqu'il défit son lit, Harry découvrit la cape d'invisibilité soigneusement pliée entre les draps. Un mot y était épinglé, sur lequel était écrit :
« Au cas où ».
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Mr et Mrs Dursley, qui habitaient au 4, Privet Drive, avaient toujours affirmé avec la plus grande fierté qu'ils étaient parfaitement normaux, merci pour eux. Jamais quiconque n'aurait imaginé qu'ils puissent se trouver impliqués dans quoi que ce soit d'étrange ou de mystérieux. Ils n'avaient pas de temps à perdre avec des sornettes.
Mr Dursley dirigeait la Grunnings, une entreprise qui fabriquait des perceuses. C’était un homme grand et massif, qui n’avait pratiquement pas de cou, mais possédait en revanche une moustache de belle taille. Mrs Dursley, quant à elle, était mince et blonde et disposait d’un cou deux fois plus long que la moyenne, ce qui lui était fort utile pour espionner ses voisins en regardant par-dessus les clôtures des jardins. Les Dursley avaient un petit garçon prénommé Dudley et c’était à leurs yeux le plus bel enfant du monde.
Les Dursley avaient tout ce qu'ils voulaient. La seule chose indésirable qu'ils possédaient, c'était un secret dont ils craignaient plus que tout qu'on le découvre un jour. Si jamais quiconque venait à entendre parler des Potter, ils étaient convaincus qu'ils ne s'en remettraient pas. Mrs Potter était la sœur de Mrs Dursley, mais toutes deux ne s'étaient plus revues depuis des années. En fait, Mrs Dursley faisait comme si elle était fille unique, car sa sœur et son bon à rien de mari étaient aussi éloignés que possible de tout ce qui faisait un Dursley. Les Dursley tremblaient d'épouvante à la pensée de ce que diraient les voisins si par malheur les Potter se montraient dans leur rue. Ils savaient que les Potter, eux aussi, avaient un petit garçon, mais ils ne l'avaient jamais vu. Son existence constituait une raison supplémentaire de tenir les Potter à distance : il n'était pas question que le petit Dudley se mette à fréquenter un enfant comme celui-là.
Lorsque Mr et Mrs Dursley s'éveillèrent, au matin du mardi où commence cette histoire, il faisait gris et triste et rien dans le ciel nuageux ne laissait prévoir que des choses étranges et mystérieuses allaient bientôt se produire dans tout le pays. Mr Dursley fredonnait un air en nouant sa cravate la plus sinistre pour aller travailler et Mrs Dursley racontait d'un ton badin les derniers potins du quartier en s'efforçant d'installer sur sa chaise de bébé le jeune Dudley qui braillait de toute la force de ses poumons.
Aucun d'eux ne remarqua le gros hibou au plumage mordoré qui voleta devant la fenêtre.
À huit heures et demie, Mr Dursley prit son attaché-case, déposa un baiser sur la joue de Mrs Dursley et essaya d'embrasser Dudley, mais sans succès, car celui-ci était en proie à une petite crise de colère et s'appliquait à jeter contre les murs de la pièce le contenu de son assiette de céréales.
- Sacré petit bonhomme, gloussa Mr Dursley en quittant la maison.
Il monta dans sa voiture et recula le long de l'allée qui menait à sa maison.
Ce fut au coin de la rue qu'il remarqua pour la première fois un détail insolite : un chat qui lisait une carte routière. Pendant un instant, Mr Dursley ne comprit pas très bien ce qu'il venait de voir. Il tourna alors la tête pour regarder une deuxième fois. Il y avait bien un chat tigré, assis au coin de Privet Drive, mais pas la moindre trace de carte routière. Qu'est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête ? Il avait dû se laisser abuser par un reflet du soleil sur le trottoir. Mr Dursley cligna des yeux et regarda fixement le chat. Celui-ci soutint son regard. Tandis qu'il tournait le coin de la rue et s'engageait sur la route, Mr Dursley continua d'observer le chat dans son rétroviseur.
L'animal était en train de lire la plaque qui indiquait « Privet Drive » - mais non, voyons, il ne lisait pas, il regardait la plaque. Les chats sont incapables de lire des cartes ou des écriteaux. Mr Dursley se ressaisit et chassa le chat tigré de son esprit.
Durant le trajet qui le menait vers la ville, il concentra ses pensées sur la grosse commande de perceuses qu'il espérait obtenir ce jour-là.
Mais lorsqu'il parvint aux abords de la ville quelque chose d'autre chassa les perceuses de sa tête. Assis au milieu des habituels embouteillages du matin, il fut bien forcé de remarquer la présence de plusieurs passants vêtus d'une étrange façon : ils portaient des capes. Mr Dursley ne supportait pas les gens qui s'habillaient d'une manière extravagante - les jeunes avaient parfois de ces accoutrements ! Il pensa qu'il s'agissait d'une nouvelle mode particulièrement stupide. Il pianota sur le volant de sa voiture et son regard rencontra un groupe de ces olibrius qui se chuchotaient des choses à l'oreille d'un air surexcité. Mr Dursley s'irrita en voyant que deux d'entre eux n'étaient pas jeunes du tout. Cet homme, là-bas, était sûrement plus âgé que lui, ce qui ne l'empêchait pas de porter une cape vert émeraude ! Quelle impudence ! Mr Dursley pensa alors qu'il devait y avoir une animation de rue - ces gens étaient probablement là pour collecter de l'argent au profit d'une œuvre quelconque. Ce ne pouvait être que ça. La file des voitures se remit en mouvement et quelques minutes plus tard, Mr Dursley se rangea dans le parking de la Grunnings. Les perceuses avaient repris leur place dans ses pensées.
Dans son bureau du huitième étage, Mr Dursley s'asseyait toujours dos à la fenêtre.
S'il en avait été autrement, il aurait sans doute eu un peu plus de mal que d'habitude à se concentrer sur ses perceuses, ce matin-là. Il ne vit pas les hiboux qui volaient à tire-d'aile en plein jour. Mais en bas, dans la rue, les passants, eux, les voyaient bel et bien. Bouche bée, ils pointaient le doigt vers le ciel, tandis que les rapaces filaient au dessus de leur tête. La plupart d'entre eux n'avaient jamais vu de hibou, même la nuit.
Mr Dursley, cependant, ne remarqua rien d'anormal et aucun hibou ne vint troubler sa matinée. Il réprimanda vertement une demi-douzaine de ses employés, passa plusieurs coups de fil importants et poussa quelques hurlements supplémentaires. Il se sentit d'excellente humeur jusqu'à l'heure du déjeuner où il songea qu'il serait bon de se dégourdir un peu les jambes. Il traversa alors la rue pour aller s'acheter quelque chose à manger chez le boulanger d'en face.
Les passants vêtus de capes lui étaient complètement sortis de la tête, mais lorsqu'il en vit à nouveau quelques-uns à proximité de la boulangerie, il passa devant eux en leur lançant un regard courroucé. Il ignorait pourquoi, mais ils le mettaient mal à l'aise. Ceux-là aussi chuchotaient d'un air surexcité et il ne vit pas la moindre boîte destinée à récolter de l'argent. Quand il sortit de la boutique avec un gros beignet enveloppé dans un sac, il entendit quelques mots de leur conversation.
- Les Potter, c'est ça, c'est ce que j'ai entendu dire…
- Oui, leur fils, Harry...
Mr Dursley s'immobilisa, envahi par une peur soudaine. Il tourna la tête vers les gens qui chuchotaient comme s'il s'apprêtait à leur dire quelque chose, mais il se ravisa.
Il traversa la maison en toute hâte, se dépêcha de remonter dans son bureau, ordonna d'un ton sec à sa secrétaire de ne pas le déranger, saisit son téléphone et avait presque fini de composer le numéro de sa maison lorsqu'il changea d'avis. Il reposa le combiné et se caressa la moustache. Il réfléchissait... non, décidément, il était idiot. Potter n'était pas un nom si rare. On pouvait être sûr qu'un grand nombre de Potter avaient un fils prénommé Harry Et quand il y repensait, il n'était même pas certain que son neveu se prénommât véritablement Harry. Il n'avait même jamais vu cet enfant. Après tout, il s'appelait peut-être Harvey. Ou Harold. Il était inutile d'inquiéter Mrs Dursley pour si peu. Toute allusion à sa sœur la mettait dans un tel état ! Et il ne pouvait pas lui en vouloir. Si lui-même avait eu une sœur comme celle-là... mais enfin quand même, tous ces gens vêtus de capes...
Cet après-midi là, il lui fut beaucoup plus difficile de se concentrer sur ses perceuses et lorsqu'il quitta les bureaux à cinq heures, il était encore si préoccupé qu'il heurta quelqu'un devant la porte.
- Navré, grommela-t-il au vieil homme minuscule qu'il avait manqué de faire tomber.
Il se passa quelques secondes avant que Mr Dursley se rende compte que l'homme portait une cape violette. Le fait d'avoir été ainsi bousculé ne semblait pas avoir affecté son humeur. Au contraire, son visage se fendit d'un large sourire tandis qu'il répondait d'une petite voix perçante qui lui attira le regard des passants :
- Ne soyez pas navré, mon cher Monsieur. Rien aujourd'hui ne saurait me mettre en colère. Réjouissez-vous, puisque Vous-Savez-Qui a enfin disparu. Même les Moldus comme vous devraient fêter cet heureux, très heureux jour !
Le vieil homme prit alors Mr Dursley par la taille et le serra contre lui avant de poursuivre son chemin.
Mr Dursley resta cloué sur place. Quelqu'un qu'il n'avait jamais vu venait de le prendre dans ses bras. Et l'avait appelé « Moldu », ce qui n'avait aucun sens. Il en était tout retourné et se dépêcha de remonter dans sa voiture. Il prit alors le chemin de sa maison en espérant qu'il avait été victime de son imagination. C'était bien la première fois qu'il espérait une chose pareille, car il détestait tout ce qui avait trait à l'imagination.
Lorsqu'il s'engagea dans l'allée du numéro 4 de sa rue, la première chose qu'il vit – et qui n'améliora pas son humeur – ce fut le chat tigré qu'il avait déjà remarqué le matin même. À présent, l'animal était assis sur le mur de son jardin. Il était sûr qu'il s'agissait bien du même chat. Il reconnaissait les dessins de son pelage autour des yeux.
- Allez, ouste ! s'exclama Mr Dursley.
Le chat ne bougea pas. Il se contenta de le regarder d'un air sévère. Mr Dursley se demanda si c'était un comportement normal pour un chat. Essayant de reprendre contenance, il entra dans sa maison, toujours décidé à ne rien révéler à sa femme.
Mrs Dursley avait passé une journée agréable et parfaitement normale. Au cours du dîner, elle lui raconta tous les problèmes que la voisine d'à côté avait avec sa fille et lui signala également que Dudley avait appris un nouveau mot : « Veux pas ! ». Mr Dursley s'efforça de se conduire le plus normalement du monde et après que Dudley eut été mis au lit, il s'installa dans le salon pour regarder la fin du journal télévisé.
- D'après des témoignages venus de diverses régions, il semblerait que les hiboux se soient comportés d'une bien étrange manière au cours de la journée, dit le présentateur. Normalement, les hiboux sont des rapaces nocturnes qui attendent la nuit pour chasser leurs proies. Il est rare d'en voir en plein jour. Or, aujourd'hui, des centaines de témoins ont vu ces oiseaux voler un peu partout depuis le lever du soleil. Les experts interrogés ont été incapables d'expliquer les raisons de ce changement de comportement pour le moins étonnant. Voilà qui est bien mystérieux, conclut le présentateur en s'autorisant un sourire. Et maintenant, voici venue l'heure de la météo, avec les prévisions de Jim McGuffin. Alors, Jim, est-ce qu'on doit s'attendre à d'autres chutes de hiboux au cours de la nuit prochaine ?
- Ça, je serais bien incapable de vous le dire, Ted, répondit l'homme de la météo, mais sachez en tout cas que les hiboux n'ont pas été les seuls à se comporter d'une étrange manière. Des téléspectateurs qui habitent dans des régions aussi éloignées les unes des autres que le Kent, le Yorkshire et la côte est de l'Écosse m'ont téléphoné pour me dire qu'au lieu des averses que j'avais prévues pour aujourd'hui, ils ont vu de véritables pluies d'étoiles filantes ! Peut-être s'agissait-il de feux de joie, bien que ce ne soit pas encore la saison. Quoi qu'il en soit, vous pouvez être sûrs que le temps de la nuit prochaine sera très humide.
Mr Dursley se figea dans son fauteuil. Des pluies d'étoiles filantes sur tout le pays ?
Des hiboux qui volent en plein jour ? Des gens bizarres vêtus de capes ? Et ces murmures, ces murmures sur les Potter...
Mrs Dursley entra dans le salon avec deux tasses de thé. Décidément, il y avait quelque chose qui n'allait pas. Il fallait lui en parler. Mr Dursley, un peu nerveux, s'éclaircit la gorge.
- Euh... Pétunia, ma chérie, dit-il, tu n'as pas eu de nouvelles de ta sœur récemment ?
Comme il s'y attendait, son épouse parut choquée et furieuse. Elle faisait toujours semblant de ne pas avoir de sœur.
- Non, répondit-elle sèchement. Pourquoi ?
- Ils ont dit un truc bizarre à la télé, grommela Mr Dursley. Des histoires de hiboux... d' étoiles filantes... et il y avait tout un tas de gens qui avaient un drôle d'air aujourd'hui.
- Et alors ? lança Mrs Dursley.
- Rien, je me disais que... peut-être... ça avait quelque chose à voir avec... sa bande...
Mrs Dursley retroussait les lèvres en buvant son thé à petites gorgées. Son mari se demanda s'il allait oser lui raconter qu'il avait entendu prononcer le nom de « Potter ». Il préféra s'en abstenir. D'un air aussi détaché que possible, il dit :
- Leur fils... Il a à peu près le même âge que Dudley, non ?
- J'imagine, répliqua Mrs Dursley avec raideur.
- Comment s'appelle-t-il, déjà ? Howard, c'est ça ?
- Harry. Un nom très ordinaire, très désagréable, si tu veux mon avis.
- Ah oui, répondit Mr Dursley en sentant son cœur s'arrêter. Oui, je suis d'accord avec toi.
Il ne dit pas un mot de plus à ce sujet tandis qu'ils montaient l'escalier pour aller se coucher. Pendant que Mrs Dursley était dans la salle de bains, Mr Dursley se glissa vers la fenêtre de la chambre et jeta un coup d'œil dans le jardin. Le chat était toujours là. Il regardait dans la rue comme s'il attendait quelqu'un.
Mr Dursley imaginait-il des choses ? Tout cela avait-il un lien avec les Potter ? Si c'était le cas... S'il s'avérait qu'ils étaient parents avec des... Non, il ne pourrait jamais le supporter.
Les Dursley se mirent au lit. Mrs Dursley s'endormit très vite mais son mari resta éveillé, retournant dans sa tête les événements de la journée. La seule pensée qui le consola avant de sombrer enfin dans le sommeil, ce fut que même si les Potter avaient vraiment quelque chose à voir avec ce qui s'était passé, il n'y avait aucune raison pour que lui et sa femme en subissent les conséquences. Les Potter savaient parfaitement ce que Pétunia et lui pensaient des gens de leur espèce... Et il ne voyait pas comment tous deux pourraient être mêlés à ces histoires. Il bâilla et se retourna. Rien de tout cela ne pouvait les affecter.
Et il avait grand tort de penser ainsi.
Tandis que Mr Dursley se laissait emporter dans un sommeil quelque peu agité, le chat sur le mur, lui, ne montrait aucun signe de somnolence. Il restait assis, immobile comme une statue, fixant de ses yeux grands ouverts le coin de Privet Drive. Il n'eut pas la moindre réaction lorsqu'une portière de voiture claqua dans la rue voisine, ni quand deux hiboux passèrent au-dessus de sa tête. Il était presque minuit quand il bougea enfin.
Un homme apparut à l'angle de la rue que le chat avait observé pendant tout ce temps. Il apparut si soudainement et dans un tel silence qu'il semblait avoir jailli du sol. La queue du chat frémit, ses yeux se rétrécirent.
On n'avait encore jamais vu dans Privet Drive quelque chose qui ressemblât à cet homme. Il était grand, mince et très vieux, à en juger par la couleur argentée de ses cheveux et de sa barbe qui lui descendaient jusqu'à la taille. Il était vêtu d'une longue robe, d'une cape violette qui balayait le sol et chaussé de bottes à hauts talons munies de boucles. Ses yeux bleus et brillants étincelaient derrière des lunettes en demi-lune et son long nez crochu donnait l'impression d'avoir été cassé au moins deux fois. Cet homme s'appelait Albus Dumbledore.
Albus Dumbledore n'avait pas l'air de se rendre compte qu'il venait d'arriver dans une rue où tout en lui, depuis son nom jusqu'à ses bottes, ne pouvait être qu'indésirable. Il était occupé à chercher quelque chose dans sa longue cape, mais sembla s'apercevoir qu'il était observé, car il leva brusquement les yeux vers le chat qui avait toujours le regard fixé sur lui à l'autre bout de la rue. Pour une raison quelconque, la vue du chat parut l'amuser. Il eut un petit rire et marmonna :
- J'aurais dû m'en douter.
Il avait trouvé ce qu'il cherchait dans une poche intérieure. Apparemment, il s'agissait d'un briquet en argent. Il en releva le capuchon, le tendit au-dessus de sa tête et l'alluma. Le réverbère le plus proche s'éteignit alors avec un petit claquement.
L'homme alluma à nouveau le briquet : le réverbère suivant s'éteignit à son tour. Douze fois, il actionna ainsi l'Éteignoir jusqu'à ce qu'il ne reste plus aucune lumière dans la rue, à part deux points minuscules qui brillaient au loin : c'étaient les yeux du chat, toujours fixés sur lui. Quiconque aurait regardé par une fenêtre en cet instant, même Mrs Dursley et ses petits yeux perçants, aurait été incapable de voir le moindre détail de ce qui se passait dans la rue. Dumbledore rangea son Éteignoir dans la poche de sa cape et marcha en direction du numéro 4. Lorsqu'il y fut parvenu, il s'assit sur le muret, à côté du chat. Il ne lui accorda pas un regard, mais après un moment de silence, il lui parla :
- C'est amusant de vous voir ici, professeur McGonagall, dit-il.
Il tourna la tête pour adresser un sourire au chat tigré, mais celui-ci avait disparu. Dumbledore souriait à présent à une femme d'allure sévère avec des lunettes carrées
qui avaient exactement la même forme que les motifs autour des yeux du chat. Elle aussi portait une cape, d'un vert émeraude. Ses cheveux étaient tirés en un chignon serré et elle avait l'air singulièrement agacée.
- Comment avez-vous su que c'était moi ? demanda-t-elle.
- Mon cher professeur, je n'ai jamais vu un chat se tenir d'une manière aussi raide.
- Vous aussi, vous seriez un peu raide si vous restiez assis toute une journée sur un mur de briques, répondit le professeur McGonagall.
- Toute la journée ? Alors que vous auriez pu célébrer l'événement avec les autres ? En venant ici, j'ai dû voir une bonne douzaine de fêtes et de banquets.
Le professeur McGonagall renifla d'un air courroucé.
- Oui, oui, je sais, tout le monde fait la fête, dit-elle avec agacement. On aurait pu penser qu'ils seraient plus prudents, mais non, pas du tout ! Même les Moldus ont remarqué qu'il se passait quelque chose. Ils en ont parlé aux nouvelles.
Elle montra d'un signe de tête la fenêtre du salon des Dursley, plongé dans l'obscurité.
- Je l'ai entendu moi-même. Ils ont signalé des vols de hiboux... des pluies d'étoiles filantes... Les Moldus ne sont pas complètement idiots. Il était inévitable qu'ils s'en aperçoivent. Des étoiles filantes dans le Kent ! Je parie que c'est encore un coup de Dedalus Diggle. Il n'a jamais eu beaucoup de jugeote.
- On ne peut pas leur en vouloir, dit Dumbledore avec douceur. Nous n'avons pas eu grand-chose à célébrer depuis onze ans.
- Je sais, répliqua le professeur McGonagall d'un ton sévère, mais ce n'est pas une raison pour perdre la tête. Tous ces gens ont été d'une imprudence folle. Se promener dans les rues en plein jour, à s'échanger les dernières nouvelles sans même prendre la précaution de s'habiller comme des Moldus !
Elle lança un regard oblique et perçant à Dumbledore, comme si elle espérait qu'il allait dire quelque chose, mais il garda le silence.
- Nous serions dans de beaux draps, reprit-elle alors, si le jour où Vous-Savez-Qui semble enfin avoir disparu, les Moldus s'apercevaient de notre existence. J'imagine qu'il a vraiment disparu, n'est-ce pas, Dumbledore ?
- Il semble qu'il en soit ainsi, en effet, assura Dumbledore. Et nous avons tout lieu de nous en féliciter. Que diriez-vous d'un esquimau au citron ?
- Un quoi ?
- Un esquimau au citron. C'est une friandise que fabriquent les Moldus et je dois dire que c'est plutôt bon.
- Merci, pas pour moi, répondit froidement le professeur McGonagall qui semblait estimer que le moment n'était pas venu de manger des glaces au citron. Je vous disais donc que même si Vous-Savez-Qui est vraiment parti...
- Mon cher professeur, quelqu'un d'aussi raisonnable que vous ne devrait pas hésiter à prononcer son nom, ne croyez-vous pas ? Cette façon de dire tout le temps « Vous-Savez-Qui » n'a aucun sens. Pendant onze ans, j'ai essayé de convaincre les gens de l'appeler par son nom : Voldemort.
Le professeur McGonagall fit une grimace, mais Dumbledore qui avait sorti deux esquimaux au citron ne parut pas le remarquer.
- Si nous continuons à dire « Vous-Savez-Qui », nous allons finir par créer la confusion. Je ne vois aucune raison d'avoir peur de prononcer le nom de Voldemort.
- Je sais bien que vous n'en voyez pas, répliqua le professeur McGonagall qui semblait moitié exaspérée, moitié admirative. Mais, vous, vous êtes différent des autres. Tout le monde sait que vous êtes le seul à avoir jamais fait peur à Vous-Savez-Qui... ou à Voldemort, si vous y tenez.
- Vous me flattez, dit Dumbledore d'une voix tranquille. Voldemort dispose de pouvoirs que je n'ai jamais eus.
- C'est simplement parce que vous avez trop de... disons de noblesse pour en faire usage.
- Heureusement qu'il fait nuit. Je n'ai jamais autant rougi depuis le jour où Madame Pomfresh m'a dit qu'elle trouvait mes nouveaux cache-oreilles ravissants.
Le professeur McGonagall lança un regard perçant à Dumbledore.
- Les hiboux, ce n'est rien comparé aux rumeurs qui circulent, déclara-t-elle. Vous savez ce que tout le monde dit sur les raisons de sa disparition ? Ce qui a fini par l'arrêter ?
Apparemment, le professeur McGonagall venait d'aborder le sujet qui lui tenait le plus à cœur, la véritable raison qui l'avait décidée à attendre toute la journée, assise sur un mur glacial. Car jamais un chat ni une femme n'avait fixé Dumbledore d'un regard aussi pénétrant que celui du professeur en cet instant. À l'évidence, elle n'avait pas l'intention de croire ce que « tout le monde » disait tant que Dumbledore ne lui aurait pas confirmé qu'il s'agissait bien de la vérité. Dumbledore, cependant, était occupé à choisir un autre esquimau et ne lui répondit pas.
- Ce qu'ils disent, poursuivit le professeur, c'est que Voldemort est venu hier soir à
Godric's Hollow pour y chercher les Potter. D'après la rumeur, Lily et James Potter sont… enfin, on dit qu'ils sont... morts…
Dumbledore inclina la tête. Le professeur McGonagall avait du mal à reprendre sa respiration. - Lily et James... Je n'arrive pas à y croire... Je ne voulais pas l'admettre... Oh, Albus... Dumbledore tendit la main et lui tapota l'épaule.
- Je sais... Je sais... dit-il gravement.
- Et ce n'est pas tout, reprit le professeur McGonagall d'une voix tremblante. On dit qu'il a essayé de tuer Harry, le fils des Potter. Mais il en a été incapable. Il n'a pas réussi à supprimer ce bambin. Personne ne sait pourquoi ni comment, mais tout le monde raconte que lorsqu'il a essayé de tuer Harry Potter sans y parvenir, le pouvoir de Voldemort s'est brisé, pour ainsi dire - et c'est pour ça qu'il a... disparu.
Dumbledore hocha la tête d'un air sombre.
- C'est... c'est vrai ? bredouilla le professeur McGonagall. Après tout ce qu'il a fait.. tous les gens qu'il a tués... il n'a pas réussi à tuer un petit garçon ? C'est stupéfiant... rien d'autre n'avait pu l'arrêter... mais, au nom du ciel, comment se fait-il que Harry ait pu survivre ?
- On ne peut faire que des suppositions, répondit Dumbledore. On ne saura peutêtre jamais.
Le professeur McGonagall sortit un mouchoir en dentelle et s'essuya les yeux sous ses lunettes. Dumbledore inspira longuement en prenant dans sa poche une montre en or qu'il consulta. C'était une montre très étrange. Elle avait douze aiguilles, mais pas de chiffres. À la place, il y avait des petites planètes qui tournaient au bord du cadran.
Tout cela devait avoir un sens pour Dumbledore car il remit la montre dans sa poche en disant :
- Hagrid est en retard. Au fait, j'imagine que c'est lui qui vous a dit que je serais ici ?
- Oui, admit le professeur McGonagall, et je suppose que vous n'avez pas l'intention de me dire pour quelle raison vous êtes venu dans cet endroit précis ?
- Je suis venu confier Harry à sa tante et à son oncle. C'est la seule famille qui lui reste désormais.
- Vous voulez dire... non, ce n'est pas possible ! Pas les gens qui habitent dans cette maison ! s'écria le professeur McGonagall en se levant d'un bond, le doigt pointé sur le numéro 4 de la rue. Dumbledore... vous ne pouvez pas faire une chose pareille ! Je les ai observés toute la journée. On ne peut pas imaginer des gens plus différents de nous. En plus, ils ont un fils... je l'ai vu donner des coups de pied à sa mère tout au long de la rue en hurlant pour réclamer des bonbons. Harry Potter, venir vivre ici !
- C'est le meilleur endroit pour lui, répliqua Dumbledore d'un ton ferme. Son oncle et sa tante lui expliqueront tout quand il sera plus grand. Je leur ai écrit une lettre.
- Une lettre ? répéta le professeur McGonagall d'une voix éteinte en se rasseyant sur le muret. Dumbledore, vous croyez vraiment qu'il est possible d'expliquer tout cela dans une lettre ? Des gens pareils seront incapables de comprendre ce garçon ! Il va devenir célèbre - une véritable légende vivante - je ne serais pas étonnée que la date d'aujourd'hui devienne dans l'avenir la fête de Harry Potter. On écrira des livres sur lui. Tous les enfants de notre monde connaîtront son nom !
- C'est vrai, dit Dumbledore en la regardant d'un air très sérieux par-dessus ses lunettes en demi-lune. Il y aurait de quoi tourner la tête de n'importe quel enfant. Être célèbre avant même d'avoir appris à marcher et à parler ! Célèbre pour quelque chose dont il ne sera même pas capable de se souvenir ! Ne comprenez-vous pas qu'il vaut beaucoup mieux pour lui qu'il grandisse à l'écart de tout cela jusqu'à ce qu'il soit prêt à l'assumer ?
Le professeur McGonagall ouvrit la bouche. Elle parut changer d'avis, avala sa salive et répondit :
- Oui... Oui, bien sûr, vous avez raison. Mais comment l'enfant va-t-il arriver jusqu'ici, Dumbledore ?
Elle regarda soudain sa cape comme si elle pensait que Harry était peut-être caché dessous.
- C'est Hagrid qui doit l'amener, dit Dumbledore.
- Et vous croyez qu'il est... sage de confier une tâche importante à Hagrid ?
- Je confierais ma propre vie à Hagrid, assura Dumbledore.
- Je ne dis pas qu'il manque de cœur, répondit le professeur McGonagall avec réticence, mais reconnaissez qu'il est passablement négligent. Il a tendance à… Qu'est-ce que c'est que ça ?
Un grondement sourd avait brisé le silence de la nuit. Le bruit augmenta d'intensité tandis qu'ils scrutaient la rue des deux côtés pour essayer d'apercevoir la lueur d'un phare. Le grondement se transforma en pétarade au-dessus de leur tête. Ils levèrent alors les yeux et virent une énorme moto tomber du ciel et atterrir devant eux sur la chaussée.
La moto était énorme, mais ce n'était rien comparé à l'homme qui était assis dessus. Il était à peu près deux fois plus grand que la moyenne et au moins cinq fois plus large. Il était même tellement grand qu'on avait peine à le croire. On aurait dit un sauvage, avec ses longs cheveux noirs en broussaille, sa barbe qui cachait presque entièrement son visage, ses mains de la taille d'un couvercle de poubelle et ses pieds chaussés de bottes en cuir qui avaient l'air de bébés dauphins. L'homme tenait un tas de couvertures dans ses immenses bras musculeux.
- Hagrid, dit Dumbledore avec soulagement. Vous voilà enfin. Où avez-vous déniché cette moto ?
- L'ai empruntée, professeur Dumbledore, Monsieur, répondit le géant en descendant avec précaution de la moto. C'est le jeune Sirius Black qui me l'a prêtée.
Ça y est, j'ai réussi à vous l'amener, Monsieur.
- Vous n'avez pas eu de problèmes ?
- Non, Monsieur. La maison était presque entièrement détruite mais je me suis débrouillé pour le sortir de là avant que les Moldus commencent à rappliquer. Il s'est endormi quand on a survolé Bristol.
Dumbledore et le professeur McGonagall se penchèrent sur le tas de couvertures. À l'intérieur, à peine visible, un bébé dormait profondément. Sous une touffe de cheveux d'un noir de jais, ils distinguèrent sur son front une étrange coupure en forme d'éclair.
- C'est là que ?... murmura le professeur McGonagall.
- Oui, répondit Dumbledore. Il gardera cette cicatrice à tout jamais.
- Vous ne pourriez pas arranger ça, Dumbledore ?
- Même si je le pouvais, je ne le ferais pas. Les cicatrices sont parfois utiles. Moi-même,
j'en ai une au-dessus du genou gauche, qui représente le plan exact du métro de Londres. Donnez- le-moi, Hagrid, il est temps de faire ce qu'il faut.
Dumbledore prit Harry dans ses bras et se tourna vers la maison des Dursley.
- Est-ce que... est-ce que je pourrais lui dire au revoir, Monsieur ? Demanda Hagrid.
Il pencha sa grosse tête hirsute vers Harry et lui donna un baiser qui devait être singulièrement piquant et râpeux. Puis, soudain, Hagrid laissa échapper un long hurlement de chien blessé.
- Chut ! siffla le professeur McGonagall. Vous allez réveiller les Moldus !
- Dé... désolé, sanglota Hagrid en sortant de sa poche un grand mouchoir à pois dans lequel il enfouit son visage, mais je... je n'arrive pas à m'y faire... Lily et James qui meurent et ce pauvre petit Harry qui va aller vivre avec les Moldus...
- Oui, je sais, c'est très triste, mais ressaisissez-vous, Hagrid, sinon, nous allons nous faire repérer, chuchota le professeur McGonagall en tapotant doucement le bras de Hagrid tandis que Dumbledore enjambait le muret du jardin et s'avançait vers l'entrée de la maison.
Avec précaution, il déposa Harry devant la porte, sortit une lettre de sa cape, la glissa entre les couvertures, puis revint vers les deux autres. Pendant un long moment, tous trois restèrent immobiles, côte à côte, à contempler le petit tas de couvertures. Les épaules de Hagrid tremblèrent, le professeur McGonagall battit des paupières avec frénésie et la lueur qui brillait habituellement dans le regard de Dumbledore sembla s'éteindre.
- Eh bien voilà, dit enfin Dumbledore. Il est inutile de rester ici. Autant rejoindre les autres pour faire la fête.
- Oui, dit Hagrid d'une voix étouffée. Je vais aller rendre sa moto à Sirius. Bonne nuit, professeur McGonagall, bonne nuit, professeur Dumbledore, Monsieur.
Essuyant d'un revers de manche ses yeux ruisselants de larmes, Hagrid enfourcha la moto et mit le moteur en route. Dans un vrombissement, la moto s'éleva dans les airs et disparut dans la nuit.
- À bientôt, j'imagine, professeur McGonagall, dit Dumbledore avec un signe de tête. Pour toute réponse, le professeur McGonagall se moucha.
Dumbledore fit volte-face et s'éloigna le long de la rue. Il s'arrêta au coin et reprit dans sa poche l'Éteignoir d'argent. Il l'actionna une seule fois et une douzaine de boules lumineuses regagnèrent aussitôt les réverbères. Privet Drive fut soudain baigné d'une lumière orangée et Dumbledore distingua la silhouette d'un chat tigré qui tournait l'angle de la rue. Il aperçut également le tas de couvertures devant la porte du numéro 4.
- Bonne chance, Harry, murmura-t-il.
Il se retourna et disparut dans un bruissement de cape.
Une brise agitait les haies bien taillées de Privet Drive. La rue était propre et silencieuse sous le ciel d'encre. Jamais on n'aurait imaginé que des événements extraordinaires puissent se dérouler dans un tel endroit. Harry Potter se retourna sous ses couvertures sans se réveiller. Sa petite main se referma sur la lettre posée à côté de lui et il continua de dormir sans savoir qu'il était un être exceptionnel, sans savoir qu'il était déjà célèbre, sans savoir non plus que dans quelques heures, il serait réveillé par le cri de Mrs Dursley qui ouvrirait la porte pour sortir les bouteilles de lait et que pendant des semaines, il serait piqué et pincé par son cousin Dudley... Il ne savait pas davantage qu'en ce moment même, des gens s'étaient rassemblés en secret dans tout le pays et qu'ils levaient leur verre en murmurant : « À la santé de Harry Potter. Le survivant ! »
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