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#Contes du Levant
alexar60 · 1 year
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L’enfant des fées (4)
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Précédents épisodes
Personne ne comprenait les raisons qui poussaient Teagan O’hara à s’allonger pour écouter régulièrement le sol. Il collait l’oreille contre la terre et, après avoir retenu sa respiration, il fermait les yeux pour entendre ce que le commun n’entendait pas.
Fils d’un irlandais et d’une française, l’enfant Teagan vécut dans un folklore totalement méconnu. Il fut bercé par les contes et légendes de trolls, gobelins ou autre leprechaum, voleurs de bébés ou porteurs de chance à ceux qui leur offrent l’hospitalité. Il apprit très tôt à écouter les vibrations des peuples invisibles. Parfois, il étonnait en chantonnant une mélodie inconnue. D’autres fois, il soupirait bêtement comme s’il avait compris le sens d’une phrase triste.
Son amour pour l’Irlande poussa le jeune homme à intégrer l’IRA, l’armée clandestine d’un pays encore inexistant. Il participa à des exactions, des attentats contre les intérêts britanniques au nom de l’indépendance de son ile. Ses méfaits l’obligèrent à retourner en France, son pays natal puisqu’il était né à Paris. Malheureusement, la guerre obligea Teagan à intégrer un nouvel uniforme, un uniforme bleu horizon. C’est ainsi qu’il se retrouva au milieu des tranchées, à fermer les yeux lorsqu’une pluie de bombes tombait lourdement avec un bruit assourdissant. Il détestait cette guerre, regrettant la verte Irlande et la tourbe des champs de ses oncles. Il détestait les bombes alors qu’il avait appris à les fabriquer et les utiliser. Mais c’était contre les anglais, les mêmes avec qui il combattait dans les tranchées.
L’irlandais, comme l’appelaient ses camarades, parlait peu. Il préférait la lecture ou juste dormir, se reposer en fermant les yeux avec l’impression de quitter ce monde. Cette solitude l’approchait énormément de Louis. De plus, les deux hommes parlaient souvent en anglais, s’éloignant encore plus des autres soldats dont la langue se limitait au français ou au patois.
Cependant, cette étrange manie d’écouter le sol, devint une qualité aux yeux de ses supérieurs. Ainsi, il pouvait partir en éclaireur, entendre le mouvement de l’ennemi. Ennemi qu’il n’a pratiquement jamais vu, si ce n’est une pointe de casque avec l’éclat du soleil à travers la fumée. Il partait accompagné de deux ou trois camarades. Puis, il s’allongeait de temps en temps, collant l’oreille, utilisant la pointe de sa baïonnette pour sentir ces bruits que personne ne pouvait détecter. Il écoutait, comprenait et repartait ensuite, prévenir sa hiérarchie qui, faisait immédiatement un rapport à l’état-major.
Louis lisait une lettre de son épouse Armande lorsque Teagan réapparut avec Gaston Poulbot et Marcel Lequellec. En entrant dans l’abri, l’irlandais imposait par sa corpulence. Ses épaules frôlèrent les dormants de la porte. Le sommet de son crâne rasa la lampe à pétrole qui éclairait la pièce. Il faisait chaud, cela sentait horriblement le fauve, l’animal fatigué, usé de se battre. Il approcha de Louis, s’allongea sur le lit de camps vide à sa gauche, avant de souffler d’épuisement.
-          Quelles nouvelles ? Demanda Louis Macé.
-          Les boches n’ont pas bougé, répondit Marcel.
-          Ça, on le savait déjà ! s’écria Louis en levant les yeux vers le plafond.
Quelques bombes éclatèrent au loin. Elles tombaient aussi en pleine nuit. Le sergent Macé ne comprenait rien à l’écoute des sols. Par contre, il avait appris à reconnaitre le sifflement des bombes. Il savait que celles qui tombaient à ce moment, étaient de fabrication Krupp. Le bruit de leur chute résonnait plus que celle des français ou des anglais. Louis gratta sa barbe, pinça les poils comme pour extirper un insecte, puis, il s’allongea et retourna dans la lecture de la dernière lettre d’Armande. Elle sentait bon l’eau de parfum de rose. Elle écrivit sur la vie de Nantes. Sur son métier d’institutrice, car elle devait subvenir aux besoins des enfants qui grandissaient, et attendaient désespérément la première permission de leur père. Louis renifla en souvenant qu’il avait perdu cette fameuse permission pendant un bombardement. On lui refusa une nouvelle. Alors, il attendait la prochaine qui n’arrivait pas. Elle écrivit sur ses désirs, l’envie de l’embrasser, de le serrer dans ses bras. Elle écrivit tout ce qu’une femme souhaite de son mari parti à la guerre. Mais surtout, qu’il revienne en vie.
Une fois la lettre lue, il la posa contre sa poitrine, imbibant sa chemise trouée de son parfum de rose. Puis, il regarda la lampe à pétrole danser. Dehors, les bombes continuaient d’éclater. Quelques hommes discutaient à voix basse pour ne pas réveiller la majeure partie en train de dormir. Elle ne formait qu’un vulgaire tas d’ombre sur les murs, remuant au gré de la lampe.
Tout à coup, Teagan se releva. Son regard fixa la lampe. Il pencha le torse jusqu’à s’allonger sur le sol,  et, sans se soucier de la boue ni des crottes de rats, il colla son oreille. Sa réaction inquiéta Louis au point d’abandonner brusquement sa couche.
-          Qu’y-a-t-il ?
-          Chut ! répondit l’irlandais.
Son corps de bucheron parut encore plus imposant entre les paillasses. Certains soldats levèrent la tête pour observer le spectacle de leur collègue, mais très peu se soucièrent de son geste. C’était devenu une habitude ! Toutefois, ses yeux plissèrent, il se concentrait de plus en plus.
-          Des coups ! annonça-t-il brusquement.
-          Les allemands ? demanda Louis qui s’allongea à son tour en espérant entendre quelque-chose.
-          Non ! Cela vient de l’autre monde. Ils creusent la terre pour essayer de sortir.
-          De qui ?
Teagan ne répondit pas. Il soupira, Il demeurait inerte, étendu sur la terre battue, l’oreille toujours collée. Il écoutait, il entendait. Dès lors, Louis fit de même. Il écoutait sous les regards étonnés des autres militaires. L’un d’eux posa une question sans obtenir de réponse.
Le jeune sergent reconnut des chocs. Le sol semblait trembler sous son tympan. Un coup suivi d’un autre à intervalle régulier. Mais contrairement à Teagan, Louis Macé restait persuadé d’une attaque allemande via un sous-terrain. Ils avaient déjà fait sauter des tranchées grâce à un travail de sape. Ils avaient déjà enterré vivant des camarades.
-          Je les entends, ils ne sont donc pas loin ?
C’était Marcel qui venait d’écouter à son tour le sol. Tout le monde encerclait le trio étendu. Certains respiraient fort, angoissés par l’idée de sauter par en-dessous. D’autres interrogeaient Marcel ou Louis qui ne savaient pas quoi répondre pour les rassurer
-          Shut up ! Vociféra Teaghan. Ce ne sont pas les schleus ! C’est autre chose.
Le silence régna soudainement. Dehors quelques bombes tombaient telles des étoiles filantes peignant le ciel noir de filets d’or et de sang. Louis se releva, il s’éloigna. Les hommes s’écartèrent pour le laisser passer. Il se dirigea vers la sortie.
-          Je dois prévenir le lieutenant, dit-il.
A ce moment, une explosion souffla la casemate. Il n’entendit rien ni les hurlements des hommes, ni les flammes qui brulèrent tout à une vitesse effroyable, encore moins la détonation pourtant percevable à des lieux à la ronde. Il se retrouva sur le dos, les vêtements déchirés, la figure, les membres noircis par la saleté et les brulures. Une poutre coinça ses jambes, l’immobilisant au milieu de ce qui fut l’unique lieu de repos. Personne ne parlait, il était le seul survivant.
Dehors, le bombardement continuait. Louis comprit que l’une d’elle venait de tomber sur le bunker effondrant la toiture après l’avoir crevée. Il tendit l’oreille. Il cherchait à entendre autre chose qu’un sifflement continu. Toutefois, ses mains sentirent des vibrations. Elles provenaient de sous la terre. Il comprit que Teaghan avait raison.
Alex@r60 – juillet 2023
Photo : Britanniques écoutant le mouvement de l’ennemi (1914-1918)
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rita-travestie · 1 month
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Lettre à une amie féministe
Beaucoup de petits garçons deviennent des hommes (Ça va sans dire, mais ça va tellement mieux en le disant.) Cela s’effectue selon un processus assez parallèle au processus « On ne naît pas femme : on le devient » Merci Simone (Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, tome 2 L’expérience vécue, Gallimard, 1949 p 13)
Tome 1 : phylogenèse, le développement de l’individu ne se fait pas par nature. Tome 2 : ontogenèse, le développement de l'individu se fait depuis la fécondation de l'œuf jusqu'à la mort et sous de nombreuses influences (consenties et subies) tant extérieures que personnelles.
Certains petits garçons deviennent des femmes. Même si ça ne nous plaît pas. Encore Merci, Simone.
Et oui ! Certains garçons deviennent des porcs. Cela ne devrait pas nous surprendre, Homère le chantait déjà, il y a trois mille ans (Circé transforme dix-neuf hommes en porcs, Homère, Odyssée, Chant X, VIII° ou VII° siècle, p 215 <= Ὁμήρου, Ὀδύσσεια, Ραψωδία ι')
De même que certaines grenouilles deviennent des princes charmants (ceux qui jouent aux billes ¬ accroupis comme des grenouilles ¬ deviennent en se levant des…) Merci les frères Grimm (Wilhelm et Jacob Grimm, Le roi Grenouille ou Henri de Fer, KHM 001, Contes de l'enfance et du foyer (Kinder- und Hausmärchen) 1812.)
Remarquez que ce conte est le premier (KHM 001) de la première édition (1812) sur 6 éditions de leur vivant (1850). Remarquer surtout que la transformation ne sa fait pas par un baisé mais par la violence et la violence de la fille.
Je suis un homme. Je suis désolé, mais je n’ai pas choisi.
Je suis un homme. Tu dirais un mâle. Je te dis que j’ai bien du mal à l’être, du moins à chaque instant. Même si, le plus souvent, je le fais sans y penser, j’aimerais, parfois, avoir le droit de faire autrement et, par intermittence, je parviens à le faire. Tu avoueras que c’est beaucoup demander à une personne d’endosser le costume du responsable, de l'expert, de l'autorité, de celui qui doit être fort et sûr de lui et celui de toujours protecteur, jamais le protégé. Cinq costumes l’un sur l’autre, ça fait beaucoup ; j’ai trop chaud et je me sens engoncé.
Mais ce n’est pas tant la difficulté de l’un ou l’autre de ces tôles, ni leur cumul, ni l’obligation.
« C'est pô juste!" » dirait Titeuf. Ce n’est pas juste de deux manières :
Quoique je fasse, j’ai tord. J’opte pour la douceur et je deviens une poule mouillée. Je continue à faire le boulot d'homme et je suis non seulement une brute, mais un vestige du passé.
Si je ne parviens pas à me montrer fort, intrépide, impassible quelles que soient les horreurs qui adviennent ¬ pilier de la force, du droit, et du pouvoir, tuant tous les dragons qui se présentent ¬, cela te semble insupportable. Si, au contraire, je n’ai pas des comportements maternels ou sensibles, tu es déçue.
Perdant sur tous les tableaux !
Chère Féministe,
Aide-moi ! Aide-moi s'il te plait
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editionskelach · 7 months
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Contes du Soleil Levant
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Un jour, un livre aux Éditions Kelach.
Contes du Soleil Levant.
Jeunesse - Quête - Aventure.
La princesse Chrysanthème s’ennuie.
En ouvrant un livre trouvé dans la bibliothèque royale, elle ne s’attendait pas à être projetée dans un autre univers où vivent des doubles de ses proches.
Afin de retourner dans son monde, elle part à la recherche de boules de jade magiques.
Une quête qui va la conduire à croiser une doubleuse de voix venue du monde des hommes, mais également des adversaires redoutables : poulpe géant, seigneur monstrueux ou fille-serpent.
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Touille en ayant eu terriblement marre de la voiture, Touille s'est fait une petite journée ! (C'est quand même très bizarre de parler de soi à la troisième personne ... Je vais devenir schizophrène avec ce blog moi)
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Petite journée qui a commencé à l'aube, puisque je voulais voir le soleil levant sur la plage .... Ça valait vraiment le détour !
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Ensuite c'était petite balade entre plage, prairie, forêt, et transhumance de moutons flippés. (Visiblement, quel que soit le continent, le mouton n'a rien à envier au QI des plantes locales)
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J'ai découvert au passage que la mission imperméabilisation des chaussures de Touille est un échec cuisant. Il est 21h et j'ai toujours froid aux pieds -_- mais il y avait des fleurs bien fluo sur le chemin, c'était marrant !
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Puis ça a été posage sur la plage, à lire puis à aider une gentille dame qui avait perdu ses clés de voiture ...
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La mission clés fut également un échec cuisant, mais on a pas mal discuté ! Notamment de la restitution des terres aux Maoris, et du dilemme que ça pose par rapport aux descendants d'immigrés : certes, les terres ont été indûment perçues à l'origine, mais cela fait maintenant plusieurs générations qu'ils sont installés, qu'ils développent la zone, qu'ils ont tous leurs souvenirs là, est ce vraiment une bonne chose que de leur arracher tout ce qu'ils connaissent pour rendre à d'autres la terre de leurs ancêtres ? Un bon sujet éthique bien clivant...
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J'ai ensuite changé de zone, nouvelle petite balade tranquille en bord de falaises cette fois. Des petits panneaux nous informent sur les légendes locales.
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J'ai particulièrement apprécié celle sur les deux amants qui fuient leur village, puisque leurs parents ne soutiennent pas leur relation; ils ont un enfant, retournent dans leurs familles pour leur demander pardon ... Et ils sont balancés sans pitié du haut de la falaise. C'est sympa les contes pour enfants quand même.
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Du coup, je me suis posée sous l'arbre ci dessus pour méditer bouquiner, puis sur la plage ci dessous pour faire de même !
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On a donné un coup de main à une dame qui avait perdu son chien (décidément), et cette fois la mission est un succès ! Ça finit quand même bien la journée 🥰
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paysendormis · 2 years
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Alentours d’𝓗𝘶𝘳𝘭𝘦𝘷𝘦𝘯𝘵, il y a quelques matins.
𝐓𝐇𝐄 𝐒𝐖𝐎𝐑𝐃𝐒 𝐎𝐅 𝐎𝐋𝐃 𝐇𝐄𝐑𝐎𝐄𝐒 : ˗ ˏ ˋ 𝓈𝒸𝑒̀𝓃𝑒𝓈 ˎ ˊ ˗
Aux abords de la ville, il est une forêt dense aux sapins frissonnants fouettés par un vent froid venu de l'est. Un garçon marche au côté de son destrier. La chanson qu’il siffle du bout des lèvres résonne pour la lune penchée sur l’horizon, aussi ronde qu’une monnaie d’argent. Elle écoute leur pas cadencé et la mer en contrebas qui lui rugit sa terreur. 
Il y a un cimetière non loin de là. 
Félix en aperçoit les monolithes immenses lorsqu’il longe la lisière de la sylve. Leurs mornes couleurs se détachent contre le matin qui bleuit à vue de nez. Comme pour confirmer l'intime instinct qui avait guidé son regard vers les monuments, il distingue dans le lointain le clairon des cloches de la cathédrale d’Hurlevent. Elles sonnent cinq fois.
Le garçon s'enfonce au cœur des bois. Il poursuit un sentier ténu jusqu'à percer une plage, le bord d'un lac, dissimulée par le couvert des arbres. Il laisse son cheval s’abreuver, puis s'agenouille à son tour contre les galets frais du rivage. 
Il plonge ses deux paumes dans l'eau glacée, et rinçant son visage, tourne ses paupières closes dans la direction du levant. Une prière murmurée échappe ses lèvres gercées. 
Son corps bousculé par le manteau froid de la nuit tremble et frissonne, mais toujours brave, toujours droit, Félix reste statuesque jusqu’à la fin du rituel. Le crépuscule mourrant le traverse sans qu'il ne plie.
Quand il rouvre les yeux, une jeune fille nue est accroupie de l’autre côté du lac. 
La moitié de son visage est ensanglantée et dans sa mâchoire, elle serre une épée de bronze enroulée de chaînes fines, dont les métaux aux diverses nuances lui sont inconnues. Alors qu’elle crache son tribut dans l’eau pour en retirer la terre, le garçon aperçoit quelques pierres précieuses miroiter. 
Elle, vomit une bave rougeâtre et pousse des râles pathétiques ponctués d’injures et de grognements sauvages. Elle tousse parfois des touffes de poils noirs. 
Il veut le trésor pour lui. Et la fille, aussi. 
Ses cheveux si sales qu’ils paraissent bruns traînent dans l’eau claire. Elle observe les environs en reprenant son souffle. Felix porte une oeillade inquiète à son camp de fortune, puis juge inconfortablement qu'il n'a rien à craindre. Le bosquet qu'il a choisit est assez dense et éloigné pour l’abriter de son regard inhospitalier. 
Les gestes décisifs mais lents de la fille trahissent un épuisement qu'il observe avec curiosité. Et pourtant ces mains pâles n’ont que des manières précises et agiles. Les manières rodées d'une femme de chambre rinçant les bijoux de sa reine tous les jours, d'une lavandière habituée à la rare pureté d'un linge propre, d'une mère caressant la peau délicate d'un nouveau-né.
Elle ramasse son butin et l’enroule dans un large pan de tissu brun qu'il n'avait pas encore vu.
Quand elle entre dans l’onde pour s’y baigner, Félix détourne son visage, pudique.
(…)
Goran suit le garçon du coin de l’œil depuis l’autre côté de la berge. Il parcoure à pas de loup la distance qui les sépare. Il doit se congratuler intérieurement pour sa discrétion. 
Elle l’attend. Ses muscles bandés brûlent sans discontinuer depuis sa transformation. Son souffle rauque, ses mains tendues mais tremblantes, les larmes qui s’écoulent de ses yeux comme si elle avait été frappée au nez, sont autant de signes qu’elle a appris à reconnaître : elle est épuisée. 
Fuir aurait été la solution la plus sage. Mais elle ne l’avait repéré que quelques minutes plus tard, alors qu’il avait déjà vu l’épée et, surtout, son petit manège autour de l’arbre lui servant de cache. Elle était nue et vulnérable. Aucune de ses favorites flagellations mentales ne lui rendaient pas sa force.
Il aurait fallut étrangler le garçon pendant sa prière, tout de suite, à la manière de cette sirène gargantuesque dont elle avait entendu parler dans les contes.
Si elle n’avait pas mis autant de temps à retrouver cette tombe, elle dormirait déjà sur l’une des branches de l’arbre. Son butin serait secret. Son avenir serait sauf. Elle n’aurait pas à s’imaginer le tuer.
Ses cheveux s’étendent autour de son visage à moitié immergé, comme une épaisse toile d’araignée dans laquelle elle serait empêtrée. 
La marque pourpre que Félix avait aperçu de loin ne disparaît pas tout à fait sous l’eau. Le soleil levant apparaît entre les troncs et ricoche, accusateur, sur sa joue tatouée. Je te vois. Je sais ce que tu as fais. 
Goran admet qu’elle a repéré le garçon, qu’elle fixe effrontément — lui, prétend encore se cacher derrière son arbre. Trop proche de ses possessions. Un gargouillement sauvage étreint son estomac. Elle lui crache dessus un long filet d’eau teinté par son sang.  
« — Va-t-en! »
Son regard évite précisément le trou entre les racines qui abrite ses affaires. Peut-être qu’il n’a pas vu. 
« — Les hommes ne sont pas autorisés dans ces bois, » ment-elle sans ciller, « Un pas de plus et je devrais te tuer. »
Le mythe se glisse sous sa peau. Être une nymphe sanguinaire vaut mieux qu’être… elle-même. Faible, maigrichonne, Goran. Elle sent tous ses muscles contractés par l’eau glaciale. Ses lèvres sont à présent plus bleues que rosées, donnant à sa peau des reflets métalliques qui ne lui appartiennent pas.
à continuer?
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bspolink1348 · 2 years
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Nouveautés de la semaine (10/10/2022)
À la une : Fondements de science politique / Nathalie Schiffino, Olivier Paye, Vincent Legrand, Jérôme Jamin, Pierre Baudewyns, Thierry Balzacq
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Cote de rangement : JA 71 F 264745 / Domaine : Sciences politiques
"Comment décoder les grands enjeux politiques actuels ? Comment expliquer les rapports de force, les divisions sociales, les idéologies ? Comment interpréter les comportements électoraux et les mobilisations citoyennes ? La mondialisation et le numérique changent-ils la donne ? Voici quelques-unes des questions dont s’empare ce manuel coécrit par six professeurs d’université, qui donne en détail les ressources et les clés pour comprendre le monde et l’actualité politiques. Sa pédagogie le rend accessible aux étudiants issus de différentes filières tout au long de leur cursus. Chaque chapitre offre une entrée différente et peut être lu indépendamment des autres. Avec : de nombreux exemples couvrant toutes les aires géographiques, des encadrés apportant un éclairage supplémentaire sur un thème ou un auteur, un glossaire, un index, une bibliographie fournie, des questions pour tester sa compréhension, des questions à choix multiples en ligne." - Quatrième de couverture
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Cinéma
C'est un scandale ! ces films qui ont choqué leur époque de 1915 à nos jours / Guillaume Evin
Cote de rangement : PN 1993 .5 E 264733
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Communication
Les Lumières à l'ère numérique / sous la direction de Gérald Bronner
Cote de rangement : HM 851 L 264736
Le porte-parole : fondements et métamorphoses d'un rôle politique / Samuel Hayat, Nicolas Kaciaf, Cédric Passard (dir.)
Cote de rangement : JA 85 P 264735
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Économie
Simulating Roman economies : theories, methods, and computational models / edited by Tom Brughmans and Andrew Wilson
Cote de rangement : HC 39 S 264751
The global lab : inequality, technology, and the new experimental movement / Adam Fejerskov
Cote de rangement : HM 821 F 264750
Mobilizing hope : climate change and global povertye / Darrel Moellendorf
Cote de rangement : QC 903 M 264749
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Gestion
Le lean management au cœur des services : rendre l'entreprise meilleure / Olivier René et Bertrand de Graeve
Cote de rangement : HD 58 .9 R 264732
Histoire, management et société : mélanges en l'honneur d'Henri Zimnovitch / Sous la direction d'Yves Levant
Cote de rangement : HD 33 H 264740
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Histoire
Qu’est-ce que l’histoire culturelle ? / Peter Burke
Cote de rangement : D 13 B 264741
L'Afrique et le monde : histoires renouées : de la préhistoire au XXIe siècle / sous la direction de François-Xavier Fauvelle et Anne Lafont
Cote de rangement : DT 14 A 264739
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Méthodologie
Pour une science du social / Dulac
Cote de rangement : H 61 D 264730
Le goût de l’entretien : 40 ans d’enquête au sommet de l’État / Samy Cohen
Cote de rangement : JN 2916 C 264737
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Philosophie
Troublante identité / Paul Audi
Cote de rangement : BD 236 A 264743
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Sciences politiques
Russes et Ukrainiens : les frères inégaux du Moyen Âge à nos jours / Andreas Kappeler
Cote de rangement : DK 508 .57.R8 K 264734
Qu'est-ce que la géopolitique ? / Florian Louis
Cote de rangement : JC 319 L 264725
Dispositifs de la démocratie : entre participation, délibération et représentation / Jane Mansbridge
Cote de rangement : JC 423 M 264729
Géopolitique de la Russie / Lukas Aubin
Cote de rangement : JZ 1616 .A9 A 264727
Jamais frères ? Ukraine et Russie : une tragédie postsoviétique / Anna Colin Lebedev
Cote de rangement : DK 67 .5.U38 C 264742
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Sociologie
Panthères et pirates : des Afro-Américains entre lutte des classes et Black Power / Sylvain Pattieu
Cote de rangement : E 840 .6 P 264726
Pour une sociologie enfin écologique / Paul Cary avec Jacques Rodriguez
Cote de rangement : GE 195 C 264731
Iconoclastia : la pazzia contaggiosa della cancel culture che sta distruggendo la nostra storia / Emanuele Mastrangelo, Enrico Petrucci
Cote de rangement : HM 1176 M 264744
Faut-il encore penser le féminin et le masculin ? : la continuité de genre en question / Martine Paulicand
Cote de rangement : HQ 1075 P 264728
Sociétés urbaines : au défi de la métropole / Agnès Deboulet
Cote de rangement : HT 166 D 264738
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Tous ces ouvrages sont exposés sur le présentoir des nouveautés de la BSPO. Ceux-ci pourront être empruntés à domicile à partir du 24 octobre 2022.
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angelitam · 3 years
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L'Artisan Parfumeur et les roses
L’Artisan Parfumeur et les roses
La reine des fleurs fait partie des parfums de L’Artisan Parfumeur. Arcana Rosa La Botanique L’Artisan Parfumeur x Deyrolle La parfumerie utilise deux variétés de roses, la Rose Centifolia qui exhale une senteur ronde, verte et miellée et la Rose Damascena qui se fait plus vive, épicée et fruitée. Elles font partie des parfums L’Artisan Parfumeur. L’Artisan Parfumeur et les roses Mémoire de…
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Elle est magique ,meurt et renait infiniment.
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La Grenouille s'accouche en fouillant les yeux des galaxies.
Je suis morte des millions de fois
Je suis née des millions de fois.
La Grenouille chantait la vie et la Lionne l'accompagnait dans le Rose des Nébuleuses aux rugissements d'étoiles. 
Mon parfum était pure.
Mon être tout entier est si pure malgré le Viol et il est encore plus  pure car il ose détruire le mâle et se reconstruire dans les abysses.
Il est si puissant même quand je meurt car le cri de mes lignes et de mes mots ressuscitent le mal en Art fou et Liberé.
Tel l'esclave arrachant ses chaînes avec ses dents ,je renait.
Il saigne et le sang s'aspire dans les nuages blanc le faisant renaître,enfin.
Tout deviens si Rose car il faut résister et récupérer ce soleil que l'orage nous à voler.
Il faut mettre des mots et des Couleurs sur la folie ,des cri et des points levés sur le mal du mâle viril qui nous égorge à coup de viol et de coups.
Aujourd'hui renaissons toutes en coeur
Aujourd'hui Dieu est punk et les étoiles sont des chiennes révoltées qui urinent dans la rue , vulve sanglante déployée dans la pureté de leur âme.
L'Hôpital psychiatrique est la prison des cri cosmique et du vertige de la vérité, cachant cette Femme qui hurle trop et le délire qui derrière sa laideur fait naître l'Art mystique des désaxés.
Une cigarette à la main ,j'écris la souffrance d'un ciel combattant  pour que le capitalisme ne l'achète pas.
J'écris les clodos errants , une bière dans leur  main ,leur air puant mais leur bonté vierge comme la Lune et sa morphine d'Amour.
J'écris l'autre ,le different car prendre dans les bras le puant ,le toxicomane, le migrant, la transgenre ,le fou,la folle,la marginale c'est abolir les chaînes et hurler l'humanité caché dans le regard des étoiles et de cette folie pourtant bannie.
Demain le ciel ne sera plus un ciel.
Il sera l'Éternité.
Demain le fou et la folle ne seront plus fous ou folles mais Humaines et Humains. 
Mes fesses sont triangulaires car je suis le cri de cette folie  ,une lumière future  et géniale.
Mes yeux sont le tribunal de l'éternité.
Je chante ,je suis spéciale, je fait trembler la vie ,la mort en étant rien et à jamais rien. 
La fourmi n'est rien et le ciel se prosternera pourtant  un jour devant elle.
Un jour la souffrance sera abolie ,après la torture et la révolution des big bang spirituel de la Terre et de l'Éternité .
Un jour les chants seront communistes  ,surréalistes, psychédéliques ,anarchistes, mystiques ,rassemblant les dualités et l'incohérence dans le grandiose du génie fou mais  universel .
En vérité peut importe le courant de pensée ou de politique ,il faut aller à contre-courant quitte à risquer sa vie pour le droit à l'Humanisme éternelle .
Jésus est un punk.
L'Église catholique est une secte qui abbat son esprit le plus puissant.
Traitez moi de folle ,de mystique.
Je suis une visionnaire 
Van Gogh ,la fourmi et le plus incompris des gueux sont des visionnaires.
Aujourd'hui tout est Rose mais si sanglant et si pure à la fois,pas comme dans un conte de fée si niais  mais plutôt comme un conte de fêlée se levant pour réclamer leur droit  et revendiquer la révolution de leur Couleur .
Aujourd'hui nous sommes fières et revendiquons que nous sommes fières de respirer même brutalement.
Aujourd'hui je suis fière d'être née même si la naissance et les millions de naissances  que j'ai subit m'ont accouché après les tortures viscérales et les tripes qui s'égorgent encore en moi.
Aujourd'hui je veux vivre plus que tout et atteindre Uranus mais pas la Lune comme tant le veulent .
Aujourd'hui nous abolissons les chemins tout tracés.
Aujourd'hui je veux mourir encore infiniment  car je suis ainsi et c'est en moi mais bien moins violemment et renaître à chaque fois encore plus puissamment qu'une poussière de ciel dans le chaos.
La révolution sera Rose des Femmes qui détruiront la Barbie et se réappropriront la puissance dans  la douceur forte d'un coucher de soleil et d'une poupée punk  et libre.
Dans le Jaune de la Folie ,la voix des incompris va éclore et  de son doré ,il abolira et provoquera  la mort de l'oppression.
Si les Femmes sont la nuit et les Hommes le jour ,la Nuit dois enfin hurler  jusqu'a démolir le mur du son qui se décomposera pour devenir Art ,Folie Rose,Jaune et  Révolution !
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Nébuleuse
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Nébuleuse
Bonjour ,
Suite à la découverte d'une nouvelle Huile Essentielle ( la plante s'appelle : Kunzea ) et ma prise d'hallucinogène j'ai subit une transformation intérieure puissante et intense .
J'avais vu ce Rose si intensément dans une vision puissante en début d'après-midi midi.
Ça me travaillais de l'intérieur et me bouffais puis j'en ai écris un texte en étant très mal et perturbée suite à tout ça, un soir d'après.
Je ne sais pas si le vendredi 20 mai symbolise quelque chose spirituellement ou historiquement mais quelque chose à véritablement changer en moi depuis cette Huile Essentielle de Kunzea que j'ai pourtant détester et depuis l'hallucinogène, la vision salvatrice du Rose l'après-midi et la ma merveilleuse histoire avec la Grenouille le soir même. 
J'ai enfin pour la première fois commencer véritablement débloquer le Rose en commençant au début doucement et à la fois très fort avec une robe de soirée très pailletée mais d'un Rose que je ne portais jamais ,que je trouve super et qui m'a permise de ne pas risquer d'aller trop vite .
C'est un Vieux Rose /Rose pastel mais avec un maquillage Rose pétant .
Je me suis pour la première fois sentie bien et même puissante en en reportant même si différemment.
En plus je suis sortie et j'arrivais parfaitement à gérer le regard des autres même si au début c'était étrange et troublant même.
C'etait une petite sortie au GEM ( mon association) mais j'ai croiser pleins de monde et suis revenue chez moi en souriant tellement que mon père croyait que j'avais bu .
J'étais sobre et je suis enfin clean grâce à la Grenouille, à cette Huile Essentielle, au déblocage du mal-être du Rose et son retours cette fois officielle dans ma vie. 
L'animatrice du GEM ( une des animatrices) et moi on à parler de cette souffrance que je tente et suis entrain de débloquer ( c'est pas un puissant  déclic mais presque  voir pratiquement , un travail long encore peut-être, mais c'est ce bouleversement qui le déclenche et va le rendre beaucoup moins violent ).
Je vais sûrement rechuter dans quelques mois comme d'habitude mais j'ai compris la médecine de la Grenouille qui passe sa vie à mourir et à renaître.
J'ai fait un rap improvisée au GEM sur le Rose, le feminisme ,la puissance pour la première fois car avant je leur cachais beaucoup ce talent et les autres se sont direct tue et avaient l'air impressionnée
Je me suis sentie si puissante .
Nébuleuse
Aujourd'hui je came mon âme.
Mon enfer est une pluie Rose où l'acide est de Couleur overdose .
Il est plus que beau le Rose mais il me viole et il me haïe dans ce Bleu si infernal et si masculin .
Dans le Rose l'enfer et le paradis s'égorgent dans mon âme et  pourtant rien n'est plus beau que la larme du rose bonbon sur la macadame sans passion .
Je suis née à l'âge de 20 ans ,c'est l'âge où on m'a voler mon corps et je le cherche encore .
Je suis née dans le Rose de Dieu ,Couleur d'une Femme pure ,fragile,pudique du corps et de l'âme  mais immaculée subissant le viol et les coups des mâles ,subissant le mal abyssale et sale des milles et un drames.
 
Comme une odeur de naïveté enfantine et perdue ,je suis née à 20ans dans le cri d'un viol ,accouchée dans la torture .
Un goût d'enfance édulcorée prenait la tournure d'une mort aux rats aigre et sordide.
.
Aujourd'hui je came mon âme à coup de larmes ,dans une mer de cachets amers.
J'essaie d'oublier le viol 
Je me drogue 
J'essaie d'oublier le Rose que j'aime tant.
Je me drogue. 
Le Rose reviens ,comme une chanson que vous trouvez des plus belles à vos yeux mais qui vous rappele votre enfant  mort bien trop tôt.
Il est tel un matin que vous trouvez splendide ,plus beau qu'une aspirine d'étoile ,plus beau que la musique  à déguster et le silence enivrant mais en s'enveloppant de lui il vous étrangle, vous étouffe. 
J'ai mentie au monde pour cacher cette plaie ,par pudeur, parfois par honte  mais ce soir tout dois être révélé .
Le Rose fût ma première et dernière Couleur préférée enfant ,adolescente et même adulte ,tel une petite fille éternelle.
Le Jaune était si puissant mais avant il ne l'était  pas autant que la nuance des bonbons et leur pleurs aux sucres de peur.
Maintenant et depuis si longtemps la vérité est dans sa destinée, au  fond de moi-même.
Le Rose est comme un grand-père mort dans l'au-delà.
Il se ressent,s'aime tellement  mais il est inaccessible et quand vous contacter la mort en étant remplie d'extase et d'espoir pour lui parler ,c'est le diable en personne  qui vous reçois .
Aujourd'hui, mes larmes sont Rose comme une rosée du matin éventrée.
La Lumière Rose est une torture si belle ,criant le viol et la paix .
Dans ce Rose si somptueux je cherche Dieu et l'innocence ,la danse , la nouvelle puissance d'une femme pure mais ressuscitée dans le courage de marcher la tête haute ,de dire non brutalement  ,de s'aimer avec douceur et ardente .
Candice était Rose mais au fond Candice à toujours été Alexia. 
Retrouver véritablement le Rose en moi-même sera la plus beau,noble et douloureux des combats.
Je cherche le silence des églises, des etoiles et en toutes dualités réunies l'anarchie d'une poupée punk et féministe  dont l'étoile qui brille est Rose. 
Je ne trouve que le viol et son cri ,mon corps brisé  ,le regard des hommes me rappelant que je ne suis qu'une ridicule respiration qui dois s'excuser d'être .
Ringarde,tel  un gros bonbon désuet, fragile ,ridicule ,grotesque, prude ,coincée ,je m'y sent prisonnière et victime naïve  d'un passée atroce.
Je tente de faire la paix avec ce soleil  qu'est le Rose et de trouvée Dieu de manière absolue, extrême et immortelle  mais je ne trouve que le gâteau d'anniversaire poignardée qu'est le viol de cette enfant dans son corps d'adulte .
Rose ,Couleur ambigüe dans mon âme
Si il y avais un synonyme de l'ambiguïté ce serait le Rose qui est en moi le Viol laid.
Pour trouver véritablement Dieu en moi et à jamais rien ne sera plus véritable que le Jaune salvateur et le Cri Rose aujourd'hui si violent mais si tendre au fond de lui.
Couleur des poupées pop et révoltées,des douceurs profondes affectueuses ,des fleurs sucrée et magiques du pastels clair au plus éclatant.
Couleur du cœur ,de l'amour pour l'opprimée et contre l'oppresseur subissant toutes sortes de  discriminations absurdes.
Avec le Jaune elle est la Couleur du sourire adressé à un clochard ou une femme perdue dont le visage s'illumine devant un soupçon d'humanité si vraie.
Couleur tellement patriarcale mais au fond  si pure et si spirituelle quand elle n'est pas salie par celui ci.
Couleur qui s'assume comme on assume un voile de religieuse et de piété sur les cheveux, une poitrine ronde  dénudée publiquement,une homosexualité ,un crâne de femme  entièrement rasée,un voyage sans billet retours en Inde ou en Amazonie ou la prostitution décidée de soi-même.
Une fierté controversée voir humiliante  mais courageuse ,légitime et puissante, un enfer ,une affirmation ,une soumission uniquement  divine,une tête haute ,une rébellion ,un regard droit et non baissé.
Couleur si symbolique ,si folle ,si fragile et si puissante 
Couleur du mâle qui est en moi avec sa piqûre de moustique mortuaire  et démoniaque qu'est son sexe visqueux ,tel un ver de terre dégustant un cadavre ,celui du Rose cette fois .
Aujourd'hui je cesserais de camer mon âme dans cette morgue lente et à venir qu'est la drogue quand j'aurais retrouver le Rose sur mes vêtements et dans mon Art.
Ce sera le Nivrana comme un soleil torturé de l'intérieur et enterré vivant en lui-même qui se lève un matin en dansant soudainement et en éclairant le ciel ,oubliant combien les trous noirs l'ont démolie. 
Un jour la Pluie  Rose ne sera plus l'enfer et je renaitrais entièrement ,possédée par l'esprit de l'Amour,de la Colère sublimée par le hip hop , de la Paix et de la Tolérance .
Mon Avenir est Jaune et Rose dans le  Christ ,le Feminisme et l'Art.
Au fond elles sont depuis bien longtemps mes 2 Couleurs favorites en moi-même.
Le Rose sera la paix en mon âme qui est actuellement torture de la came, de l'addiction  ,de la larme et des lames de pions .
Le Jaune est ma lumière éternelle depuis toujours et mon cacheton extatique et spirituel contre le suicide .
Aucune de ces deux Couleurs ne se dépassent en moi .
Elles sont à égalité pure mais ce fût auparavant un secret pour l'une des deux.
Le Rose crie et j'en ai le vertige. 
Je les aime autant sauf que l'une est une torture ensevelie ,un profonde  secret  et l'autre est depuis toujours et à jamais  l'extase absolue .
J'espère que de la torture naître la plus belle Nébuleuse Jaune et Rose teintée puissamment  de Orange aux reflets Verdoyant et Violet -Mauve.
Le Chaos Rose donnera naissance à une Nébuleuse dont le Jaune sera cette fois encore plus vraie.
Il est déjà si puissant mais le jour où ma peau dure reflètera enfin cette âme Rose appaisée ,la vérité du Jaune en moi crèvera la mur du son et tout sera  nirvana sortie de l'horreur.
Le Jaune en moi est aujourd'hui plus que splendide mais il est encore tellement  naissant. 
 .Grâce au Rose il sera accomplie ,triomphant et maître de mon corps et des éternités artistiques .
Du Jaune naît le Rose mais du Rose naît le Jaune.
Je ne suis alors qu'une humble  poussière Couleur Paille,Safran et Soleil   mais un jour je deviendrais une des particules Jaune  les plus folles et merveilleuses dans cette guerre abolie.
Il ressuscitera et mon corps sera exorcisé. 
Les galaxies de mon être ne seront plus ecartelées et tiraillées dans le feu qui les brûlent vives .
Sos .
Détresse 
Blessures et Allégresse 
Dans le Jaune et le Rose aussi puissant l'un que l'autre , la drogue et la torture ne seront plus des murs à abattres  mais des montagne que j'aurait gravie si je n'en meurt pas .
Tout renaitra et l'homme qui m'a voler ou voudra me voler encore baissera son âme devant moi ,ma grandeur ,ma lois puis à jamais devant la Femme et sa Foi, il se taira.
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Nébuleuse 
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untoldiaries-blog · 4 years
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DICAS SOBRE AS PEÇAS DO GRAU 8 DO ABRSM: PRIMEIRO MOVIMENTO DE POULENC SONATA
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Minhas próximas postagens no blog serão dicas sobre algumas das minhas peças favoritas das listas de repertórios do ABRSM Série 8. Mesmo que você não esteja trabalhando para o seu 8º ano, espero que essas dicas possam lhe fornecer um pouco de reflexão ao abordar este repertório.
Poulenc Sonata para flauta e piano
Alto E O primeiro desafio desta sonata é a entrada em um E alto, com algumas edições marcando a entrada como piano , no entanto, a última edição é marcada mf. Qualquer que seja a dinâmica, é uma boa prática começar com um "ataque suave", ou seja, um começo suave para a nota. Isso pode ser alcançado com ou sem a língua.
Um bom exercício para praticar notas agudas e ataque suave é a "harmônica reversa", um exercício que Geoffrey Gilbert e outros ensinaram e um que eu ensino aos meus próprios alunos. Eles trabalham digitando uma nota alta (por exemplo, E) e depois dividindo a nota em partes parciais inferiores ("tons de fantasma"). Quando chegar ao tom mais baixo de fantasma, aumente lentamente a velocidade do ar e levante a corrente de ar, trazendo a mandíbula para a frente, mas não deixe a dinâmica aumentar. Prática lenta com atenção cuidadosa para não usar demais ou contrair músculos é importante. Quando você voltar para a nota de topo, articule-a novamente para praticar a colocação com a velocidade e a direção corretas do ar. Isso lhe dará uma chance maior de sucesso! Aqueles de vocês com um mecanismo "split E" em suas flautas terão um tempo um pouco mais fácil!
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Depois de praticar Es de capota macia, dê uma olhada no esqueleto da abertura. Observe como a melodia melancólica das quatro primeiras barras é muito cromática. Queremos ouvir essa forma melódica descendente quando todas as notas forem adicionadas de volta.
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Existem três repetições do tema principal E menor, portanto, idealmente, elas não devem soar iguais. Talvez este seja o raciocínio para as marcações dinâmicas de p-mf-f na edição em que reproduzo, onde cada repetição do tema reforça a última, como dizer algo três vezes: “Arrume seu quarto; arrume seu quarto; ARRUME SEU QUARTO!"
Com as escalas ascendentes, tente praticar os 7s em diferentes grupos (4 + 3 e 3 + 4). É importante garantir que todas as notas levem à nota de topo, mas igualmente importante que elas estejam juntas com o piano, que também possui uma escala. Eles devem proporcionar um momento de emoção após a melodia melancólica. Eles parecem rápidos, mas você tem mais tempo do que imagina, por isso tome cuidado para não se apressar.
Coordenação
O próximo desafio é a rápida alternância de E para C, encontrada nas barras 26 a 32. Preste atenção aos Es e os Cs devem cuidar de si mesmos. Você pode praticar o arremesso de E e C tocando-os como harmônicos de baixo C, baixo C e E e F e A. Você encontrará a velocidade e a direção do ar de que precisa. Pense em "ooh" no E e "aah" no C, incentivando a mandíbula a avançar para a nota mais alta. Ao voltar a digitar as notas normalmente, você achará muito mais fácil e todas as notas soarão com um bom tom.
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Língua dupla
Sempre que os alunos começam a aprender esta peça, a seção de língua dupla (5ª barra após a Figura 5) geralmente se torna um ponto de foco ou obstáculo. É importante lembrar que este é um acompanhamento da melodia do piano, por isso precisa ser leve, seguindo o fraseado da melodia do piano. Para obter um bom tom suave em todas as notas, pratique devagar e arrastando primeiro, depois pratique em um "peh" (sem a língua) e, em seguida, cada uma das teclas toca "Tu" e "Ku" (ou "Du" e "Gu ”). Tente manter a vogal que segue a consoante inicial da mesma forma, ou seja, du-gu du-gu du-gu, não de-gu du-ga da-ge, pois isso ajudará a manter o som consistente. Pratique um pouco mais alto no início para se sentir confortável com ele e depois tente com suavidade.
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Em seguida, toque-o como está escrito, prestando atenção à qualidade do som e à uniformidade da língua. Você também pode praticar esse canto e tocar ao mesmo tempo. Se você seguir essa abordagem regularmente com escalas, verá que sua língua dupla melhorará e esta seção não causará nenhum estresse!
Na figura 8, temos a seção "Happy Sarabande", onde as batidas 1 e 2 são importantes. O padr��o de estresse geralmente é a liberação do estresse, como um Sarabande. Os desmembradores (notas 32) precisam ser cuidados e usados ​​para ajudar a moldar as frases, e não jogá-las fora. Certifique-se de que toda a dinâmica seja apresentada, pois elas representam os diferentes caracteres da mesma melodia.
O último desafio são os últimos compassos:
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Em primeiro lugar, estar junto com o piano exige um bom ensaio com o seu pianista e uma clara noção do ritmo. Subdividir em trêmulos, para que você conte os demais cuidadosamente. A marcação ceder pode afastar algumas pessoas. Tente não deixar isso afetar o seu ritmo, mas veja-o como um momento de descanso em termos de dinâmica e andamento.
Em segundo lugar, o B final, como o 5º perfeito acima do E e o 3º menor acima do G agudo no piano, pode soar plano, portanto, tenha um tom alto o suficiente para um acorde agradável. Observe como o movimento se apóia em um acorde E maior, após uma tonalidade menor. A cor que você escolher para o B final deve refletir isso.
Espero que essas dicas ajudem com alguns dos desafios desta peça e permitam mais diversão com essa música maravilhosa.
Conhecimento e pratica esse é o link que me trouxe aqui
Obrigado pela leitura.
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traitor-for-hire · 5 years
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Chapitre 11 - Expériences
«  Le premier juin, enfin. Les King partent pour le bord de mer demain, et je suis libre ! Trois mois de vacances ! Comme je vais m'amuser ! » s'exclama Meg, en rentrant à la maison par une chaude journée pour trouver Jo étendue sur le sofa dans un état d'épuisement peu commun, tandis que Beth lui retirait ses souliers poussiéreux et qu'Amy préparait de la citronnade pour tout le monde.
« Tante March est partie aujourd'hui, quelle joie ! dit Jo. J'avais horriblement peur qu'elle me demande de venir avec elle ; si elle l'avait fait, je me serais sentie obligée d'y aller, mais Plumfield est aussi gai qu'un cimetière, et je préfère en être dispensée. Nous nous sommes démenés pour préparer son départ, et j'avais peur chaque fois qu'elle m'adressait la parole, car j'étais tellement pressée d'en finir que j'ai été inhabituellement aimable et complaisante, et je craignais qu'elle ne trouve impossible de se séparer de moi. J'ai tremblé jusqu'à ce qu'elle soit dans la voiture, et j'ai eu droit à une dernière frayeur, car, comme elle démarrait, elle a passé la tête à l'extérieur en disant, « Josyphine, veux-tu ? » Je n'en ai pas entendu davantage, j'ai lâchement tourné les talons et j'ai fui. J'ai couru pour de bon, et filé jusqu'après le tournant, où je me suis sentie en sécurité.
—  Cette pauvre vieille Jo ! Elle est arrivée ici comme si elle était poursuivie par des ours, » dit Beth, en cajolant les pieds de sa sœur avec un air maternel.
« Tante March est une vraie samphire, n'est-ce pas ? » fit remarquer Amy, en goûtant son breuvage.
« Elle veut dire vampire, murmura Jo, mais peu importe, il fait trop chaud pour se montrer tatillonne sur sa façon de parler.
—  Qu'allez-vous faire pendant vos vacances ? » demanda Amy, changeant le sujet avec tact.
« Je ferai la grasse matinée, et ne travaillerai pas du tout, » répondit Meg, depuis les profondeurs du fauteuil à bascule. « J'ai dû me lever tôt tout l'hiver, et passer mes journées à travailler pour d'autres, alors maintenant je vais me reposer et profiter tout mon content.
—  Hum ! dit Jo. Paresser de la sorte ne me conviendrait guère. J'ai des tonnes de livres de côté, et je vais occuper mes journées à lire sur mon perchoir dans le pommier, quand je ne partirai pas à l'aventure avec Laurie.
—  Ne nous occupons pas de nos leçons pour un temps, Beth, mais jouons toute la journée et reposons nous, comme veulent le faire les filles, proposa Amy.
—  Eh bien, je le ferai, si Mère est d'accord. Je voudrais apprendre de nouvelles chansons, et mes enfants ont besoin que je les arrange pour l'été, ils manquent terriblement de nouveaux vêtements.
—  Le pouvons-nous, Mère ? » demanda Meg en se tournant vers Mrs. March, qui était occupée à coudre dans ce qu'elles appelaient « le coin de Marmee ».
« Vous pouvez tenter cette expérience pendant une semaine, et voir si ça vous plaît. Je pense que d'ici samedi soir vous vous rendrez compte que s'amuser sans jamais travailler ne vaut pas mieux que le contraire.
—  Oh, Seigneur, non ! Je suis sûre ce que sera délicieux, dit complaisamment Meg.
—  Je propose maintenant un toast, ainsi que le dit mon ami et partenaire Sairy Gamp. Assez trimé, amusement pour tous, » s'écria Jo, en se levant, le verre à la main, tandis que l'on servait la citronnade.
Elles burent toutes joyeusement, et commencèrent l'expérience en flânant le reste de la journée. Le matin suivant, Meg n'apparut pas avant dix heures ; son petit-déjeuner pris en solitaire n'eut pas bon goût, et la pièce semblait vide et dérangée, car Jo n'avait pas rempli les vases, Beth n'avait pas fait la poussière, et les livres d'Amy étaient éparpillés un peu partout. Rien n'était en ordre ou plaisant en dehors du « coin de Marmee », qui était comme d'habitude, et c'est là qu'elle s'assit pour « se reposer et lire », c'est à dire bâiller, et imaginer les jolies robes d'été qu’elle s'achèterait avec son salaire. Jo passa la matinée sur la rivière avec Laurie, et l'après-midi dans le pommier à lire et à pleurer sur Le Vaste, Vaste Monde. Beth commença la journée en mettant sens dessus dessous le contenu du grand placard, où sa famille résidait ; mais, fatiguée avant d'avoir fini de ranger, elle laissa tout pêle-mêle et s'en fut à sa musique, se réjouissant de n'avoir pas de vaisselle à laver. Amy arrangea sa charmille, mit sa plus belle robe blanche, et s'installa sous le chèvrefeuille pour dessiner, espérant que quelqu'un la verrait et demanderait qui était la jeune artiste. Comme personne n'apparut à l'exception d'un faucheux curieux qui examina son travail avec grand intérêt, elle s'en fut se promener, fut surprise par une averse, et revint trempée.
À l'heure du thé elles comparèrent leurs expériences, et toutes furent d'accord pour dire que ça avait été une journée délicieuse, quoique étonnamment longue. Meg, qui était sortie dans l'après-midi pour faire des achats, et était revenue avec une « charmante mousseline bleue », avait découvert après avoir découpé la lisière que le tissu ne lui conviendrait pas, et cette mésaventure l'agaçait légèrement. Jo avait pris un coup de soleil sur le nez en canotant, et, à lire trop longtemps, avait écopé d'une terrible migraine. Beth était embêtée par le désordre dans son placard, et par la difficulté d'apprendre trois ou quatre chansons à la fois. Amy regrettait profondément d'avoir gâté sa robe, car la fête de Katy Brown avait lieu le jour suivant, et maintenant, comme Flora McFlimsy, elle n'avait « rien à se mettre ». Mais ce n'était que des broutilles, et elles assurèrent leur mère que l'expérience se déroulait à merveille. Elle sourit, ne dit rien, et accomplit leurs corvées négligées avec l'aide d'Hannah, gardant la maison plaisante et l'ordre domestique en bon état de marche. Il était étonnant de constater quel étrange et désagréable état des choses entraînait cette résolution de « se reposer et profiter ». Les jours se faisaient de plus en plus longs, le temps était inhabituellement changeant, tout comme les humeurs ; un certain malaise envahissait tout le monde, et Satan trouva nombre de sottises à faire accomplir aux mains désœuvrées. Meg s'offrit le luxe de mettre de côté sa couture, et trouva ensuite le temps si long, qu'elle se prit à retailler et gâcher ses vêtements dans une tentative de les embellir à la Moffat. Jo lit jusqu'à ce que ses yeux n'en puissent plus et qu'elle soit écœurée des livres ; et finit par être si nerveuse que même l'affable Laurie se disputa avec elle, et si démoralisée qu'elle souhaitait désespérément être partie avec Tante March. Beth s'en tirait assez bien, car elle oubliait constamment qu'elle était censée jouer sans travailler, et retrouvait par moment ses habitudes ; mais quelque chose dans l'air la dérangeait, et plus d'une fois son calme se trouva perturbé, au point qu'en une occasion elle secoua la pauvre vieille Joanna en lui disant qu'elle était affreuse. Amy était celle qui souffrait le plus de cet état des choses, car ses ressources étaient limitées, et, tandis que ses sœurs la laissaient s'amuser et s'occuper toute seule, elle ne savait plus que faire de sa petite personne. Elle n'aimait pas les poupées, les contes de fées étaient puérils, et elle ne pouvait pas passer ses journées à dessiner.  Les goûters n'apportaient pas grande satisfaction, pas plus que les pique-niques, à moins d'être en bonne compagnie. « Avec une belle maison pleine de gentilles jeunes filles, ou en voyageant, l'été serait délicieux. Mais rester à la maison avec trois sœurs égoïstes et un grand garçon, c'est assez pour éprouver la patience de Boaz lui-même » se plaignit Miss Malaprop après plusieurs jours dédiés au plaisir, à l'irritation et à l' ennui .
Aucune ne voulait admettre qu'elle était fatiguée de l'expérience ; mais le vendredi soir, toutes reconnurent en elles-mêmes qu'elles étaient heureuses que la fin de la semaine approche. Espérant graver la leçon plus profondément dans leurs esprits, Mrs. March, qui ne manquait pas d'humour, décida de finir l'épreuve de manière appropriée ; aussi elle donna un congé à Hannah, et laissa les filles profiter pleinement du système.
Quand elles se levèrent le samedi matin, il n'y avait pas de feu dans la cuisine, pas de petit-déjeuner dans la salle à manger, et leur mère n'était visible nulle part.
« Miséricorde ! Que s'est-il passé ? » s'écria Jo avec consternation.
Meg grimpa les escaliers quatre à quatre, et revint bientôt, l'air soulagée mais plutôt perplexe, et un peu honteuse.
« Mère n'est pas malade, seulement très fatiguée, et elle dit qu'elle va rester tranquillement dans sa chambre toute la journée, et nous laisser faire du mieux qu'on peut. C'est très étrange de sa part, elle n'agit pas du tout comme d'habitude, mais elle dit que la semaine a été dure pour elle, aussi nous ne devons pas nous plaindre mais nous débrouiller seules.
—  C'est bien assez facile, et j'aime cette idée ; je mourais d'envie d'avoir quelque chose à faire - c'est à dire, quelque amusement nouveau, vous voyez ? » ajouta rapidement Jo.
En fait c'était un immense soulagement pour elles toutes d'avoir un peu de travail, et elles se mirent à la tâche avec entrain, mais découvrirent bientôt la vérité du dicton d'Hannah, « Tenir une maison n'est pas une mince affaire. » Il y avait abondance de nourriture dans le cellier, et tandis qu'Amy et Beth mettaient la table, Meg et Jo s'occupèrent du petit-déjeuner, tout en se demandant pourquoi les domestiques parlaient toujours d'un travail difficile.
« On va en monter un peu à Mère, même si elle a dit de ne pas se soucier d'elle, » dit Meg, qui présidait, et se sentait très adulte devant la théière.
Aussi un plateau fut préparé avant de commencer à manger, et porté à l'étage avec les compliments du chef. Le thé avait bouilli et était amer, l'omelette était brûlée, et les biscuits saupoudrés de levure, mais Mrs. March reçut son repas avec grâce, et rit de bon cœur une fois Jo partie.
« Pauvres chéries, elles vont passer une dure journée, j'en ai peur ; mais elles n'en souffriront pas, et cela leur fera du bien, » dit-elle, en sortant les provisions qu'elle avait mises de côté pour elle et en se débarrassant du mauvais petit-déjeuner, pour ne pas les vexer - une petite ruse maternelle dont elles furent reconnaissantes.
Au rez-de-chaussée, les plaintes étaient nombreuses, et la cuisinière en chef était bien chagrinée par ses échecs. « Ne t'inquiète pas, je vais m'occuper du déjeuner et jouer les domestiques. Toi, tu seras la dame qui garde les mains bien blanches, reçoit les visites et donne des ordres, » dit Jo, qui en savait encore moins que Meg en matière de cuisine.
Cette offre obligeante fut acceptée avec joie, et Margaret se retira dans le parloir, qu'elle mit rapidement en ordre en poussant le désordre sous le sofa et en fermant les volets, pour ne pas avoir à faire la poussière. Jo, avec une foi parfaite en ses propres capacités, et un désir amical de réconciliation, déposa immédiatement une note dans le bureau de poste pour inviter Laurie à déjeuner.
« Tu ferais bien de voir ce dont tu disposes avant de penser à inviter de la compagnie, » dit Meg en apprenant cet acte hospitalier, mais inconsidéré.
« Oh, il y a du bœuf salé, et quantité de pommes de terre ; et je vais aller chercher quelques asperges, et un homard, "pour un hors d'œuvre", comme le dit Hannah. Nous aurons de la laitue, et je ferai une salade ; je ne sais pas comment on fait, mais tout est écrit dans le livre. Il y aura du blanc-manger et des fraises pour le dessert, et du café, aussi, si tu veux être élégante.
—  N'essaie pas trop de plats, Jo, car tu ne sais rien préparer de mangeable autre que du pain d'épices et des caramels. Je me lave les mains de ce déjeuner, et, puisque c'est toi seule qui as invité Laurie, tu pourras bien t'occuper de lui.
—  Je ne te demande que d'être aimable avec lui, et de m'aider pour le dessert. Tu me conseilleras si j'ai un souci, pas vrai ? demanda Jo, passablement vexée.
—  Oui, mais je ne connais pas grand chose en cuisine, sauf pour le pain, et quelques babioles. Tu ferais mieux de demander la permission de Mère avant d'acheter quoi que ce soit, répondit prudemment Meg.
—  Naturellement, je ne suis pas idiote. » Et Jo s'en alla, fâchée que l'on doute de ses talents.
« Achetez ce que vous voulez, et ne me dérangez pas. Je sors pour le déjeuner et je ne peux pas m'occuper de ce qui se passe à la maison, dit Mrs. March quand Jo vint lui parler. Je n'ai jamais aimé faire le ménage, et je vais prendre un congé aujourd'hui ; lire, écrire, faire des visites et m'amuser. »
Le spectacle inhabituel de sa mère, si active, en train de se balancer confortablement et de lire, tôt dans la matinée, fit à Jo l'effet d'un phénomène. Une éclipse, un tremblement de terre ou une éruption volcanique ne lui auraient pas semblé plus étranges.
« Tout est détraqué aujourd'hui, se dit-elle en descendant l'escalier. Et voilà Beth qui pleure ; un signe certain que quelque chose ne va pas dans cette famille. Si Amy l'embête, je lui secoue les prunes. »
Se sentant elle-même passablement détraquée, Jo se précipita dans le parloir pour y trouver Beth sanglotant devant Pip, le canari, qui gisait dans sa cage, ses petites griffes tendues de manière pathétique comme pour implorer la nourriture dont le manque avait causé sa mort.
« C'est de ma faute - je l'ai oublié - il n'y a plus une graine ou une goutte d'eau - oh, Pip ! Oh, Pip ! Comment ai-je pu être si cruelle ? » s'écria une Beth en larmes, en prenant la pauvre bête dans ses mains pour essayer de le ranimer.
Jo regarda dans l'œil entrouvert, chercha le petit cœur, et trouvant l'oiseau raide et froid, secoua la tête, et offrit sa boîte de dominos comme cercueil.
« Mettez-le dans le four, peut-être qu'il va se réchauffer et revivre, dit Amy avec espoir.
—  Il est mort de faim, et on ne le fera pas cuire. Je vais lui faire un linceul, et nous l'enterrerons dans le jardin, et je n'aurai jamais d'autre oiseau, jamais ! Car je suis trop mauvaise pour en avoir un, » murmura Beth, assise sur le sol avec son oiseau entre les mains.
« Les funérailles auront lieu cet après-midi , et nous viendrons tous. Maintenant, ne pleure pas, Bethy ; c'est fort dommage, mais tout va de travers cette semaine, et Pip a subi le pire de notre expérience. Fais le linceul, et couche-le dans ma boîte. Après le déjeuner, nous ferons une jolie cérémonie, » dit Jo, qui commençait à avoir l'impression d'avoir endossé de grandes responsabilités.
Laissant les autres consoler Beth, elle s'en alla à la cuisine, qu'elle trouva dans un état de désordre décourageant. Passant un grand tablier, elle se mit au travail, et empila les plats avant de les laver, quand elle se rendit compte que le feu était mort.
« Voilà qui promet ! » marmonna Jo, ouvrant le four d'un coup sec et tisonnant vigoureusement les cendres.
Ayant ranimé les flammes, elle décida d'aller au marché pendant que l'eau de la vaisselle chauffait. La promenade lui remonta le moral, et, se flattant d'avoir fait de bonnes affaires, elle rentra lourdement chargée après avoir acheté un très jeune homard, quelques très vieilles asperges, et deux barquettes de fraises acides. Le temps qu'elle finisse de nettoyer, l'heure du déjeuner approchait, et le four était chauffé au rouge. Hannah avait laissé du pain à lever ; Meg l'avait travaillé de bonne heure, posé sur l'âtre pour le faire lever, puis l'avait oublié. Elle était en train de discuter avec Sallie Gardiner dans le parloir quand la porte s'ouvrit en grand, et une figure rouge et échevelée, couverte de farine et de cendres, demanda sèchement,
« Dis donc, est-ce que le pain n'est pas suffisamment levé quand il déborde du plat ? »
Sallie commença à rire, mais Meg hocha la tête, et haussa les sourcils aussi haut qu'elle le pouvait, ce qui fit disparaître l'apparition. Jo mit le pain au four sans plus attendre. Mrs. March sortit, après avoir jeté un œil ici et là pour voir comment se déroulaient les choses, et après quelques mots de réconfort à Beth, qui était en train de coudre un linceul tandis que le cher défunt reposait dans la boîte des dominos. Un étrange sentiment d'impuissance envahit les filles quand le bonnet gris disparut au coin de la rue, et le désespoir s'empara d'elles quand, quelques minutes plus tard, Miss Crocker apparut et dit qu'elle venait pour le déjeuner. Cette dame était une vieille fille maigre et jaune, au nez pointu et aux yeux inquisiteurs, qui voyait tout et commérait sur tout. Elles ne l'aimaient pas, mais on leur avait appris à être bonnes avec elle, simplement parce qu'elle était vieille et pauvre, et avait peu d'amis. Aussi Meg lui offrit le fauteuil, et fit de son mieux pour la distraire, tandis qu'elle posait des questions, critiquait tout, et racontait des histoires sur les gens qu'elle connaissait.
Il est impossible de décrire par des mots les angoisses, les expériences, les efforts endurés par Jo ce matin-là ; et le déjeuner qu'elle servit fut longtemps matière à plaisanteries. Craignant de demander d'autres conseils, elle fit de son mieux toute seule, et découvrit qu'il fallait plus que de l'énergie et de la bonne volonté pour faire une bonne cuisinière. Elle fit bouillir les asperges durant une heure, et fut bien peinée de s'apercevoir que les pointes en avaient disparu, réduites en bouillie, tandis que les tiges étaient plus dures que jamais. Le pain finit en bloc de charbon, car l'assaisonnement de la salade l'avait tellement accaparée qu'elle avait abandonné tout le reste, jusqu'au moment où elle fut enfin convaincue qu'elle ne pourrait le rendre mangeable. Le homard lui était un mystère écarlate, mais elle le martela et le piqua jusqu'à l'extraire de sa carapace, et sa maigre chair fut dissimulée dans une masse de feuilles de laitue. Les pommes de terre avaient été préparées à la va-vite, pour ne pas faire attendre les asperges, et n'étaient absolument pas cuites. Le blanc-manger était grumeleux, et les fraises n'étaient pas aussi mûres qu'elle l'avait cru - les plus rouges avaient été soigneusement disposées sur le sommet des barquettes.
«  Eh bien, ils pourront manger du bœuf, et du pain et du beurre, s'ils ont faim. Mais c'est terriblement gênant d'avoir travaillé tout la matinée pour rien, » pensa Jo, tandis qu'elle sonnait la cloche une demi-heure plus tard que d'habitude ; et, en nage, fatiguée et démoralisée,  inspectait le festin déployé pour Laurie, accoutumé à toutes sortes d'élégances, et pour Miss Crocker, dont les yeux curieux remarqueraient tous les défauts que sa langue acérée ne manquerait pas de colporter.
La pauvre Jo aurait bien voulu se cacher sous la table, comme chaque plat se voyait délaissé sitôt goûté. Amy gloussait, Meg semblait désolée, Miss Crocker pinçait les lèvres, et Laurie parlait et riait avec toute son énergie, pour donner un aspect riant à la scène. Le point fort de Jo était les fraises, car elle les avait bien sucrées, et avait un pichet de crème riche pour les accompagner. Ses joues en feu se rafraîchirent un peu, et elle respira plus aisément quand les jolies assiettes de verre firent le tour de la table et que chacun regarda poliment les petits ilôts rosés qui flottaient dans un océan de crème. Miss Crocker goûta la première, fit une grimace, et se hâta de boire un verre d'eau. Jo, qui avait refusée d'être servie, pensant qu'il n'y en aurait peut-être pas assez - car le nombre de fruits avait fort diminué après inspection - jeta un coup d'œil à Laurie, mais il continuait de manger courageusement, bien qu'il eut la bouche légèrement pincée et qu'il gardât les yeux fixés sur son assiette. Amy, qui était friande de ce genre de délicatesses, en prit une grande cuillerée, manqua de s'étouffer, se cacha le visage dans sa serviette et quitta la table précipitamment.
« Oh, quoi encore ? s'exclama Jo, tremblante.
—  Du sel au lieu de sucre, et la crème est aigre, » répondit tragiquement Meg.
Jo grogna, et se laissa tomber dans sa chaise, en se rappelant qu'elle avait saupoudré une dernière fois les fraises avec le contenu de l'une des deux boîtes posées sur la table de la cuisine, et négligé de mettre la crème au frais. Elle devint écarlate, et était sur le point de fondre en larmes, quand elle croisa le regard de Laurie, pétillant de joie en dépit de tous ses efforts. Le côté comique de l'affaire la frappa alors subitement, et elle rit jusqu'aux larmes. Tout le monde en fit autant, même « Croaker », ainsi que les filles l'appelaient ; et le malheureux déjeuner se termina gaiement, avec du pain et du beurre, des olives et de la joie.
« Je n'ai pas la force d'esprit nécessaire pour débarrasser et ranger maintenant, aussi nous allons reprendre notre sérieux en procédant aux funérailles, » dit Jo quand ils se levèrent, et Miss Crocker se prépara à partir, pressée de raconter cette nouvelle histoire à la table de quelque autre ami.
Ils reprirent effectivement leur sérieux, pour Beth. Laurie creusa une petite tombe sous les fougères, dans le bois ; sa tendre maîtresse y déposa le petit Pip avec force larmes  et le recouvrit de mousse, tandis qu'une guirlande de violettes et de millet ornait la pierre qui portait son épitaphe, composé par Jo en même temps qu'elle s'efforçait de préparer le dîner :
Ici repose Pip March
Mort le sept juin
Aimé et regretté de tous
À jamais dans nos cœurs
À la fin de la cérémonie, Beth se retira dans sa chambre, toute retournée par l'émotion et par le homard ; mais il n'y avait nul endroit où se reposer, car les lits n'étaient pas faits, et elle se calma en regonflant les oreilles et en remettant un peu d'ordre. Meg aida Jo à nettoyer les restants du festin, ce qui leur prit la moitié de l'après-midi, et les laissa dans un tel état de fatigue qu'elles se mirent d'accord pour se contenter de thé et de toasts pour le dîner. Laurie emmena Amy faire une promenade en voiture, ce qui était un acte de charité de sa part, car la crème aigre semblait avoir eu un mauvais effet sur l'humeur de celle-ci. Mrs. March rentra à la maison et trouva les trois aînées en plein travail au milieu de l'après-midi, et un regard dans le placard lui donna une idée du succès d'une partie de son expérience.
Avant que les ménagères puissent se reposer, plusieurs personnes vinrent en visite, et il fallut se préparer à les recevoir dans la précipitation, puis il fallut prendre le thé, faire quelques courses, et quelques nécessaires travaux de couture qui avaient été reportés au dernier moment. Quand vint le crépuscule, calme et humide, une à une elles se rassemblèrent sous le porche où les roses de juin commençaient à fleurir. Chacune s'assit avec un soupir ou un grognement, comme fatiguée ou troublée.
« Quelle horrible journée ça a été ! commença Jo, toujours la première à prendre la parole.
—  Elle a semblé être plus courte, mais tellement pénible, dit Meg.
—  Pas du tout comme d'habitude, ajouta Amy.
—  Il ne peut pas en être autrement sans Marmee et le petit Pip, » soupira Beth en regardant la cage vide au dessus de sa tête, les yeux pleins de larmes.
« Mère est ici, ma chérie, et tu pourras avoir un autre oiseau demain, si tu le souhaites. »
Tout en parlant, Mrs. March était venue prendre sa place parmi elles, avec l'air de ne pas avoir davantage profité de son jour de repos que ses filles.
« Êtes-vous satisfaites de votre expérience, les filles, ou voulez-vous la prolonger d'une semaine ? » demanda-t-elle, tandis que Beth se blotissait contre elle, et que les autres tournaient vers elle leurs visages rassérénés, comme les fleurs se tournent vers le soleil.
« Oh que non ! s'écria Jo avec détermination.
—  Moi non plus, reprirent les autres en écho.
—  Vous pensez, alors, qu'il vaut mieux travailler un peu chaque jour, et vivre un peu pour les autres, c'est cela ?
—  Trainailler et s'amuser n'apportent rien, observa Jo en secouant la tête. J'en ai assez, et je compte bien me mettre de suite à travailler sur quelque chose.
—  Tu pourrais apprendre un peu de cuisine simple. C'est un talent utile, et que toute femme devrait posséder, » dit Mrs. March en riant au souvenir du déjeuner de Jo, car elle avait croisé Miss Crocker, qui lui avait tout raconté.
« Mère ! Est-ce que tu es partie en abandonnant tout, juste pour voir comment on s'en sortirait ? s'écria Meg, qui avait eu des soupçons durant toute la journée.
—  Oui, je voulais que vous vous rendiez compte que le confort de tous dépend du travail de chacun. Tant qu'Hannah et moi faisions vos corvées, vous vous en êtes assez bien tirées, quoique je ne pense pas que vous étiez très heureuses. Aussi je me suis dit que je vous montrerai ce qui arrive quand chacun ne pense qu'à soi, pour vous donner une petite leçon. Ne trouvez-vous pas qu'il est plus agréable de s'aider les uns les autres, d'avoir des tâches quotidiennes qui rendent à leur tour les loisirs plus agréables, et d'endurer et d'être patientes, pour que la maison puisse être confortable et agréable pour tout le monde ?
—  Oui, Mère, oui !
— Alors laissez-moi vous conseiller de reprendre vos petits fardeaux, car bien qu'ils semblent parfois bien lourds, ils sont bons pour nous, et s'allègent au fur et à mesure. Le travail est salutaire, et il n'en manque pas. Il nous préserve de l'ennui et des sottises, est bon pour la santé et l'esprit, et nous donne un sentiment de puissance et d'indépendance, plus qu'argent ou qu'élégance.
—  Nous travaillerons comme des abeilles, et nous aimerons ça, tu vas voir ! dit Jo. Je vais apprendre la cuisine pendant mes vacances, et le prochain déjeuner que je donnerai sera un succès.
—  Je ferai les chemises pour Père, au lieu de te laisser les faire, Marmee. Je le peux et je le veux, même si je n'aime pas trop la couture. Ce sera mieux que d'essayer de modifier mes propres affaires, qui sont bien assez jolies comme elles sont, dit Meg.
—  J'apprendrai mes leçons tous les jours, et je ne passerai pas autant de temps avec mon piano et mes poupées. Je suis une bécasse, qui devrait étudier, au lieu de jouer, » résolut  Beth, et Amy suivit héroïquement son exemple en déclarant, « Je vais apprendre à coudre des boutonnières, et faire attention à ma façon de parler.
—  Très bien ! Alors je suis satisfaite de cette expérience, et j'espère que nous n'aurons pas à la répéter. Mais ne tombez pas dans l'excès opposé, en trimant comme des esclaves. Gardez des heures régulières pour le travail et pour les loisirs, faites que chaque journée soit à la fois utile et agréable, et prouvez que vous connaissez la valeur du temps en l'employant au mieux. Ainsi la jeunesse sera pleine de délices, le grand âge n'apportera que peu de regrets, et la vie sera un beau succès, en dépit de la pauvreté.
—  Nous nous en souviendrons, Mère ! » Et c'est ce qu'elles firent.
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iamjustsonow · 5 years
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#30jourspourécrire
Jour 22
Les os de nos ancêtres #conteàrêverlesyeuxouverts
Elle serre entre ses doigts le petit sac de jute brodé, elle sent rouler et s'entrechoquer doucement le contenu. Ça la rassure. Elle s'est souvent pensée comme une imposture. Ne pas mériter ni le regard, ni l'attention des autres, alors de l'amour...Elle lève ses sourcils et secoue sa tignasse. Elle nage en eau trouble, en apnée, louvoie, plonge, se cabre, remonte pour respirer. Le monde est un marécage. Elle, elle vient d'un autre rivage, ici, elle se sent en cage. Elle ne porte pas le bon costume. Elle ne comprend pas leur langage sans délicatesse, sans coeur, sans poésie, sans sensualité, ni rêve, ni imagination. La nuit lui va bien, elle est bleue comme l'eau des rivières profondes, comme l'encre savante des livres, comme les sombres dessins à l'eau forte, comme ses tatouages-histoires-de-peau... Au fond, elle l'a toujours su. Lui reviennent en mémoire, les ritournelles, incompréhensibles pour la fillette qu'elle était, que lui chantait sa grand-mère, gravées dans sa mémoire, le nom des plantes des sous bois qu'elle recopiait avec soin en tirant la langue, sur les étiquettes des bocaux de verre, une fois séchées et rangées. Elle revoit dans un demi sommeil, les gens qui passaient voir mère-grand, quand s'enfuyaient les ombres, dos voûtés, yeux inquiets, endeuillés, souffreteux, tristes et qui repartaient plus légers, dansant dans la brume blanche à ras des champs ou sous la lune ronde et pleine. Elle caresse, dans sa poche, le cuir chaud du carnet parcheminé, il ravive dans le silence des quais de Seine, le souvenir intact de sa grand-mère gribouillant à la hâte de sa plume maladroite ce qu'elle ne savait lire. Il est arrivé au courrier, hier matin, avec une lettre d'un notaire et le petit sac brodé. Pas d'explications, rien que des instructions: le jour de son quart de siècle, se rendre au parc Montsouris, trouver un aulne, mélanger son sang rouge au bois coupé de l'arbre qui rougit au contact de l'air, lire à voix haute la première page du carnet, sortir et jeter le contenu du petit sac à ses pieds et au pied de l'arbre appelé aussi "l'arbre aux morts". Elle n'a pas eu peur, elle n'a peur de rien, pourquoi cela lui a semblé presque normal, elle ne sait pas, comme l'impression d'avoir déjà entendu cette histoire, enfant, encore et encore, elle ne se souvient juste plus de la fin du conte. L'air est mouillé de larmes, elle longe les hautes grilles des jardins du Luxembourg, bientôt, elle arrivera aux Catacombes. Elle sait qu'il va lui falloir trouver comment entrer dans le parc, il ferme tôt en novembre. Puis chercher l' aulne...Elle court presque, Paris est anonyme la nuit, sauf pour elle, étudiante à L'EN d'Auteuil, elle s'y est maintes fois égarée par plaisir, déambulant au hasard, qui manifestement n'en était pas un...Un portillon qu'elle escalade, contourner le béveldère, longer le lac, chercher le pavillon et reconnaitre la silhouette du seul Aulne qui lui fait face. Soupirer. S'ils sont bleus, ils sont néanmoins yeux de chat, nyctalope, héritage de mère-grand, entre autre apparemment. Couper l'écorce et mettre à nu en creusant, un petit morceau de la chair du sylphe, trancher sa propre chair et mélanger leurs sangs. Lire la première page et jeter le contenu du petit sac brodé. Ça a l'air simple. À peine une hésitation, ça parait quand même un peu étrange, mais elle n'a jamais été très rationnelle, ni très raisonnable, elle a toujours préféré le mystère des étoiles et le pouvoir des mots. Des bâtonnets blancs gravés de runes scintillantes éparpillés à ses pieds et des gouttes de sangs mélés s'échappe une douce silhouette bienveillante et bleutée qu'elle reconnait aussitôt. La voix familière coule dans ses veines et fait corps avec elle. Elle sait. Maintenant, elle sait. Elle est mémoire et oubli, elle est le vide et le plein, le bord du monde et le ciel. Elle est la fenêtre, elle est le phare, elle est la lumière entre deux mondes. Elle est l’être et le paraître, elle est l’idée et l’intention. Elle est le fil, la clé, la serrure, le passé, le présent, le futur. Elle est le pont entre l'ouest où le soleil se couche et le levant. Elle ramasse les bâtonnets blancs gravés qui s’éteignent. Ils sont les os de ses ancêtres, ceux des femmes avant elle, gardiennes du passage vers l’Autre Monde. Elle a le goût des autres sur le bout de sa langue, ceux d’ici et ceux de l’au-delà. Elle parle enfin leur langage et puis le sien, les mots sont libres et fluides. Elle sourit, la vie est belle, tout est calme et tranquille, tout est possible. Elle est faiseuse de rêves, elle est passeuse d’histoires, elle est l’amour et l’espoir.
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alexar60 · 2 years
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L’enfant des fées (3)
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Les deux premiers épisodes sont disponibles ici.
Malgré le tonnerre, Louis oublia sa vie dans ses pensées. En fermant, les yeux, il revivait une journée, un beau dimanche passé à la campagne. Il marchait avec Armande à ses côtés. Son épouse, habillée d’une longue robe et d’un grand chapeau, ne sortait jamais sans une ombrelle. Elle aimait ce paysage viticole du sud de Nantes. Ils marchaient presque main dans la main, tels des adolescents amoureux transis.
Le jeune commissaire de police entendit, plus loin, des enfants jouer. Le sourire apparut sur le visage boueux du soldat fatigué. Il se souvenait d’Henriette, son ainée. Elle ressemblait énormément à sa mère avec la même forme ovale du visage, les mêmes yeux bleus et un sourire identique. Tout le monde disait qu’elle sera le portrait craché de sa mère quand elle sera plus vieille, jusqu’à avoir son caractère trempé. Ce jour, elle s’était faufilée en compagnie de son petit frère dans les vignobles. Ils couraient, jouaient, un peu déçus de ne pas trouver de raisin à picorer.
-          Jules, cesse de te rouler à terre. Tu salies ta chemise, cria Armande.
Mais le garçon se fichait complètement de ressortir tout crotté. Il frotta ses genoux poussiéreux, puis il repartit rejoindre sa sœur. Leur père rit. Il taquina tendrement sa femme pour sa manière de se faire respecter. Elle soupira en levant les épaules. A son regard, Jules passerait un mauvais quart d’heure en rentrant à la maison.
Les craquements dans le ciel devinrent de plus en plus intenses. Il était noir, mal éclairé par des étoiles filantes qu’on pouvait distinguer dès que la fumée se dissipait. Mais elle ne se dissipait jamais. Il entendit quelques voix tremblantes autour de lui. Une prière…des bruits de pas…Un ordre…Alors, Louis retourna dans son passé.
Blandine était magnifique avec un nœud rose dans les cheveux. Elle ne comptait pas encore un an de vie et restait assise dans le landau poussé par la nourrice. C’était une fille de paysan, venue à Nantes pour échapper à la dure vie des champs. Marie-Anne avait choisi Nantes plutôt que Paris contrairement à ses amies. Louis se doutait que c’était pour accompagner un amoureux, un gars des chemins de fer. Elle était plutôt jolie, si ce n’est cet affreux accent breton.
Peut-être parce qu’elle était la plus jeune, ou parce qu’elle lui ressemblait, la dernière de ses enfants restait sa préférée. Sa petite pupuce, comme il aimait l’appeler. Elle souriait tout le temps, elle voulait qu’il la porte chaque fois qu’il approchait de son landau. Alors, il s’amusait à faire des grimaces. Ce jour-là, il avait surpris sa belle-famille, en donnant la bouillant à sa fille. « Nourrir les gamins reste une affaire de femmes ! », avait balancé son beau-père.
Une pluie d’explosion réveilla Louis. Il était au milieu d’une tranchée. Ils étaient tous à attendre, le dos collé contre les sacs de terre. Ils tremblaient, se passant les bouteilles de pinard pour se donner du courage. Louis regarda son supérieur. Ce dernier surveillait sa montre, il porta un sifflet à la bouche. Avec son rôle de commissaire de police, il aurait dû être lieutenant comme lui. Mais le rapport d’un juge le dégrada au rôle de sergent.
Il connaissait la cible, il savait où foncer. Surtout, il savait ce qu’il y avait en face. Son voisin tendit une bouteille. Alors, il fit comme tout le monde, il but une gorgée de ce picrate. Puis il pensa à sa famille. Il pensa de nouveau à Armande, à ses caresses quand ils faisaient l’amour. Il se souvint du goût de ses baisers sur la bouche, oubliant ainsi celui du mauvais vin. Il pensa à Henriette. Il se rappela bêtement d’une histoire pour la faire dormir. C’était un conte de fées. Il pensa à Jules et au jour où il apprit à jouer du cerceau. Il pensa à Blandine. De son jour de naissance…de l’immense douleur, du visage en sueur de sa femme allongée sur le lit conjugal. Il se rappela qu’il s’est senti petit et fragile lorsqu’il prit sa fille dans les bras. Il n’avait pas connu ce bonheur pour les deux premiers. Il n’était pas présent à leur naissance.
Soudain, le silence ! C’était pour très bientôt! Puis, un long sifflement déchira les cœurs. Les poilus se jetèrent sur les échelles. Les agneaux partaient à la boucherie !
Les hommes tombaient, fauchés par la mitraille, avant d’avoir atteint la première ligne de barbelés. Louis réussit ce miracle. Il s’allongea à côté de cadavres en putréfaction, oubliés lors des charges précédentes. Il y avait des français, des allemands…des corps dans de sales uniformes troués. Le fil remua subitement avant de bouger.
-          Aide-moi, cria Marcel étendu à sa gauche.
A l’aide d’une tenaille, Son compagnon coupa le fil tenu par Louis. Ses mains sentirent les piques égratigner sa peau. Il prit ensuite une grande inspiration avant de se lever. Il aperçut l’objectif. Alors, il courut à côté de Marcel et d’autres camarades. Il courut en oubliant sa famille, en pensant à survivre. Les mitrailleuses continuèrent leur massacre.
Il était devant eux, à attendre les bras en l’air. La statue était tout ce qui restait du calvaire. Avant la guerre, il régnait au milieu d’un croisement de routes. A ce moment, il n’était plus qu’une pâle copie de statue grecque amputée de quelques membres. Le Christ attendait tel un cul-de-jatte qu’on l’aide à quitter cet enfer. Enfin, Louis arriva à sauter dans un trou à côté de l’idole, sans se soucier de possible présence de gaz moutarde. Puis, il attendit parce qu’il n’était pas possible d’aller plus loin.
L’objectif ne pouvait être atteint. Soudain les allemands arrêtèrent de tirer. Il entendit crier. Il reconnut le sifflet du lieutenant et sa voix qui répétait: « retraite ! »
-          Tout ça pour ça ! ragea-Marcel situé dans un autre trou.
Et le tonnerre retentit ! Des sifflements précédèrent les explosions. L’artillerie des poilus visaient tant bien que mal les tranchées allemandes. Dès lors, Louis comprit que les vert-de-gris étaient en train de contre-attaquer. Il porta son fusil contre sa poitrine, et il pria en observant la statue au-dessus de sa tête. Il espérait juste une chose : pas de corps-à-corps.
L’artillerie décimait l’ennemi qui ne réussit pas non plus à franchir leur première ligne de barbelés. Les soldats demeurèrent coincés dans le no man’s land à attendre que cela se passe. Les bombes fusèrent, elles éclatèrent sans se soucier de la couleur de l’uniforme. Elles tuèrent dans les deux camps. Et Louis attendait son tour.
Le bombardement dura une quinzaine de minutes. Le silence s’imposa tout à coup. C’était un silence glacial qui ne dura pas car les appels à retourner dans leur base, les râles des mourants, les cris des blessés graves réalisant avoir perdu un morceau…tout incita Louis à retourner dans ses souvenirs. Il voulait embrasser sa femme. Il rêva de voir ses enfants grandir. Il espéra tenir le bras d’Henriette, lorsqu’elle entrera habillée d’une magnifique robe de mariée dans la basilique Saint Nicolas. Il imagina Jules en bon avocat ou politicien. Et chose étonnante pour son époque, il vit dans un flash que Blandine deviendrait la future Marie Curie.
Il réalisa qu’une grande lumière venait de l’éblouir. Aussitôt, il ferma les yeux puis les cligna les paupières cherchant à retrouver la vue rapidement. Lorsqu’il reconnut le christ, il entendit d’étranges petits bruits. Cela semblait venir de la terre, comme des grignotements, comme si on creusait la terre. Il écouta plus attentivement et crût discerner quelques voix…Des petites voix dont il n’arrivait pas à comprendre la langue.
Quelque-chose surgit tout-à-coup en tombant dans le trou. Il brandit son fusil pointant sa baïonnette pour se défendre jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il s’agissait d’un français.
-          Vous n’êtes pas blessé, Sergent ? demanda le seconde classe.
-          Non, juste mon orgueil ! répondit-il.
Les deux hommes retournèrent dans la tranchée en courant. Personne ne tenta de les empêcher car en face, ils faisaient de même, ramassant au passage des blessés. Le lieutenant, le visage couvert de boue commençait à recenser les restes de sa section. La mine triste, il passa, devant le sergent Louis Macé. Ce dernier n’eut aucun mot. Il ne le salua pas non plus. Il préféra retourner dans ses souvenirs.
Alex@r60 – mars 2023
Photo : Le Christ des tranchées de Neuve-Chapelle.
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camilledef · 5 years
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Emile, encore et toujours Emile / Le cycle des Rougon-Macquart de Zola.
Par une force insoupçonnée, je me suis replongée dans la lecture du célèbre cycle zolien, les Rougon-Macquart. Je dis "insoupçonnée", puisque cela faisait bien longtemps qu'étaient délaissées dans ma bibliothèque les lectures scolaires, les lectures trop classiques, celles que l'on avale souvent sous la force et la pression de mauvais professeurs. Bien que ne négligeant pas les "classiques", je ne me tournais depuis quelques temps que vers ceux qui me paraissaient dignes d'un intérêt personnel, liés à mes goûts et mes envies du moment. Et un Zola, comme un Balzac ou un Proust (quoique Proust...) ne se plaçaient pas en travers de mes lectures. Et puis pouf. Zola réémerge subitement. Un peu comme un oiseau qui frappe un pare-brise et oblige le conducteur (moi en l'occurrence) à s'arrêter, paniqué, pour reprendre sa respiration et observer l'élément perturbateur, attendant bien trop longtemps que de coutume pour reprendre sa route.
Je me suis laissée piégée par l'oiseau libre mais captivant qu'est Zola. Qu'est tout livre de Zola.
Je me souviens de ces moments de terreur à la lecture de Thérèse Raquin. Je dis bien de "terreur", oui. Plus de frissons m'ont traversé l'échine que pour une histoire de Stephen King. J'ai appris, au lycée, avec Thérèse, le glauque et l'horreur des mots et des livres. Tout en étant effrayée, j'ai aimé ça. J'en ai redemandé, plus tard, en suppliant d'autres auteurs et d'autres fictions de me redonner ce goût de l'effroi un livre à la main. Je ne sais pas pourquoi j'ai délaissé Zola aussi longtemps. Disons huit ans. Probablement par paresse, par oubli, et/ou par préjugé. Parce qu'au fond, l'expérience n'avait pas été si mauvaise que cela.
Et voilà que l'autre jour, dans un de mes nombreux détours dans une librairie, je tombe sur La bête humaine. Et que mon intérêt, au lieu de me pencher vers d'autres livres, s'est concentré dessus. De ce petit livre de poche je voulais en être propriétaire et l'avaler le plus vite possible. Ce que je fis en rentrant chez moi.
Probablement est-ce d'abord le titre, plus que le nom cultissime de l'auteur qui m'a poussé à rentrer dans mon nid douillet en sa compagnie. En tant que philosophe, portée essentiellement sur les question de l'être, de l'homme et de ses détours, je ne pouvais que tomber dans une longue chaîne de fantasmes étymologico-sémiotiques, entre bête et homme. Dans un second temps, ce fut le désir insatiable de plonger profondément dans l'univers d'un auteur culte/classique/incontournable mis trop longtemps de côté.
Je ne fus pas déçue. La bête humaine, c'est terrible. Moins terrible que mes souvenirs de jeunesse de Thérèse, mais tout de même assez pour exciter mon imagination. De ces rouages ferroviaires, témoins des plus grandes indécences et des crimes plus ou moins passionnels, je suis tombée sous le charme. Un charme métallique, âpre, gris et poussiéreux. Zola a gagné son pari ici, il m'a récupéré dans son camp. Il m'en fallait donc de suite un deuxième, et si possible, un deuxième qui serait le premier de l'épopée.
La Fortune des Rougon s'est donc imposé tout naturellement. Il est le premier de cette tragédie familiale de grande ampleur. De lui naît une filiation complexe, retors, tragique. La preuve qu'avec un peu de passion et de bonne volonté, on peut tout faire : d'une époque de l'histoire de France qui ne me passionne guère (les soubresauts de la République au XIXe), j'en suis venue à me délecter des histoires de chacun de ces personnages atypiques et de leur environnement social, politique et historique. Pire encore, j'en suis venue à attendre cette colonne des insurgés en marche depuis la forêt de la Seille et à espérer secrètement qu'il envahisse et démantèle le salon jaune de Plassans. Tout en sachant qu'il y aura des morts. Car la mort chez Zola ne se fait guère attendre. Elle rôde toujours, non pas surnaturelle et mystique, mais bien naturelle et froide. Elle est toujours là, à attendre ce moment où elle reprendra ses droits sur l'homme, où elle définira une fois pour toute le rythme et le sens de la vie humaine, d'un jugement sourd et sans appel. Elle n'est pas seulement l'aval de toute vie, la mort est aussi et surtout chez Zola, le barème et l'indice de l'amour. Plus un amour est fort et passionné, plus la mort sera proche. Ce pourquoi les deux adolescents éperdus, Miette et Silvère, sentent presque le souffre froid de la mort sur leur épaules, dans le terrain vague de Saint-Mittre.
Et ce fut ainsi que, pendant près de deux années, ils s'aimèrent dans l'allée étroite, dans la campagne large. Leur idylle traversa les pluies glacées de décembre et les brûlantes sollicitations de juillet, sans glisser à la honte des amours communes ; elle garda son charme exquis de conte grec, son ardente pureté, tous ses balbutiements naïfs de la chair qui désire et qui ignore. Les morts, les vieux morts eux-mêmes, chuchotèrent vainement à leurs oreilles. Et ils n'emportèrent de l'ancien cimetière qu'une mélancolie attendrie, que le pressentiment vague d'une vie courte ; une voix leur disait qu'ils s'en iraient, avec leur tendresses vierges, avant les noces, le jour où ils voudraient se donner l'un à l'autre. Sans doute ce fut là, sur la pierre tombale, au milieu des ossements cachés sous les herbes grasses, qu'ils respirèrent leur amour de la mort, cet âpre désir de se coucher ensemble dans la terre, qui les faisaient balbutier au bord de la route d'Orchères, par cette nuit de décembre, tandis que les deux cloches se renvoyaient leurs appels lamentables.
La Fortune des Rougon, Zola, 2004, le livre de poche, p.309
D'appel lamentable, il y a aussi celui de tante Dide, point de départ à toute cette lignée des Rougon et des Macquart, délaissée par chacun de ses enfants dans sa petite impasse Saint-Mittre. Elle lutte contre l'appel tonitruant du passé. Les souvenirs douloureux de son dernier amour, Macquart, sont toujours pour elle source de douleurs. Seul Silvère, doux et charitable, reste auprès de cette femme meurtrie mais qui n'est pas sans faute, expiant pour elle, par sa pureté et sa générosité et dans une ignorance sincère, les anciens péchés commis. Malgré cela, Adélaïde n'est jamais à l'abri de crises aiguës provoquées par les fantômes du passé, ou de triste lamentations intérieures sur ce qui n'est plus mais qui toujours l'appelle et la retient. Elle apparaît alors comme la lamentable prisonnière de ces méfaits qui ne lui appartiennent plus, mais qui ressortissent désormais aux chemins de la mémoire.
La grand-mère était venue par hasard au puits. En apercevant, dans la vieille muraille noire, la trouée blanche de la porte que Silvère avait ouverte toute grande, elle reçut au cœur un coup violent. Cette trouée blanche lui semblait un abîme de lumière creusé brutalement dans son passé. Elle se revit au milieu des clartés du matin, accourant, passant le seuil avec tout l'emportement de ses amours nerveuses. Et Macquart était là qui l'attendait. Elle se pendait à son cou, elle restait sur sa poitrine, tandis que le soleil levant, entrant avec elle dans la cour par la porte qu'elle ne prenait pas le temps de refermer, la tirait cruellement du sommeil de sa vieillesse, comme un châtiment suprême, en réveillant en elle les cuissons brûlantes du souvenir. Jamais l'idée ne lui était venue que cette porte pût encore s'ouvrir. La mort de Macquart, pour elle, l'avait murée. Le puits, la muraille entière auraient disparu sous terre qu'elle ne se serait pas sentie frappée d'une stupeur plus grande. Et, dans son étonnement, montait sourdement une révolte contre la main sacrilège qui, après avoir violé ce seuil, avait laissé derrière elle la trouée blanche comme une tombe ouverte. Elle s'avança, attirée par une sorte de fascination. Elle se tint immobile, dans l'encadrement de la porte.
Ibid., p. 284
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bornutyboisson · 6 years
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Epilogue de la fille du président
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(conte de noël érotique pour backpackers névrosés)
Île du Soleil, lac Titicaca, 24 décembre au soir, Bolivie.
La fille du président prenait son bus pour aller à la frontière du Chili, en passant par Arequipa, la grande ville péruvienne du sud du pays, le soir-même. Elle m'a embrassé en se levant.
Il faut que j'aille voir mes deux amis pour prendre des billets pour le bus de ce soir. Je te laisse Bornu. Quelle nuit nous avons passé! N'est-ce pas mon chou ? Je l'oublierai jamais, tu peux en être sûr. Et elle se donna une claque sur la fesse en rigolant. On se voit en fin d'après midi ?
D'accord ma belle, j'ai répondu. On se retrouve avant que tu partes. Promis.
Je me suis rendormi une petite heure puis je suis allé prendre un café dans la cuisine de l’hôtel. Marina y était. Elle avait le regard sombre et, sans cérémonie, elle a dit, tu es sans doute fier de toi ? Baiser avec une gamine poilue comme un singe. Vous n'étiez pas beau à voir tous les deux sur ce lit.
Bonjour d'abord, Marina. Il y a un problème ?
Oui, je trouve cela dégueulasse. C'est bien connu, les françaises ce sont toutes des putes.
Oh non Marina, pas ma mère. Ma mère n'est pas une pute, je peux te le certifier.
Fais pas le malin avec moi Bornu. Ta mère, comme les autres, une pute. Sinon, elle se serait abstenue de mettre au monde un type comme toi. Et puis, se faire tailler une pipe dans la rue par une gamine et laisser tomber sa canne, ce n'est pas très fin tout ça.
C'était donc toi, la personne qui nous matait dans ce passage. C'est toi la dégueulasse, pas nous.
J'arrivais pas à dormir, alors je suis partie vous rejoindre au Lukuku. Je vous ai vus au loin prendre ce passage. Je voulais vous rejoindre. J'étais loin de penser à ce que vous avez fait. Si tu crois que je prends mon plaisir à regarder ces horreurs là, tu te trompes.
Mais qu'est-ce qu'il t'arrive à monter sur tes grands chevaux, j'ai dit. Excuse pour le bruit, si c'est ce que tu veux, des excuses. Mais pour le reste, c'est ma vie. Cela ne te regarde pas.
Jusqu'ici, elle avait une tasse dans la main et s'était tapotée les lèvres avec une serviette deux ou trois fois. Je remarquai qu'entre ses doigts, maintenant, la tasse tremblait. Elle la reposa et me foudroya du regard.
Bien sûr que ça me concerne. Si tu avais la moindre jugeote, tu ne poserais pas ce type de question. Puis elle a dit, d'une voix haute et froide, tu passes la soirée avec moi et tu baises avec une gamine quasiment sous mon nez. Tu me crois insensible ?
Je n'ai jamais dit cela.
Elle ne  m'a pas écouté et elle a ajouté, d'une voix éteinte, je ne te plais donc pas ?
Ce n'est pas la question, Marina. Tu sais mon âge ? Tu es bien trop jeune pour moi.
Je sais que ce n’était pas très fin de dire cela, mais je le pensais réellement. Elle s'est mise à hurler.
Tu baises avec une pute de singe française qui a tout juste 18 ans et moi, qui ai 32 ans, je serais trop vieille pour toi. Tu n'es qu'un gros con le Frenchie, et elle tapa du poing sur la table.
Je suis resté coi. J'aurais jamais imaginé Marina tapant du poing sur une table.
Marina, calme toi. On est amis tous les deux.
Non, Bornu. Pourquoi tu n'as pas essayé avec moi? Tu n'as pas eu un geste depuis que je te connais, pour me monter que je te plais. Tu détestes peut-être les filles comme moi ?
Au contraire, Marina. Je te trouve superbe, et j'ai eu plus d'une fois envie de t'embrasser. Plus même, je pensais que je n'avais aucune chance avec toi. C'est juste pour cette raison. Tu es beaucoup trop belle pour moi.
Cette dernière phrase était stupide aussi, je le savais. Marina est une femme au-dessus du commun. Dans la rue, même les filles s'arrêtent pour l'admirer. Et sans doute que si j'avais eu 20 ou 30 ans de moins, j'aurais agi autrement, j’aurais laissé aller mes sentiments et me serais battu comme un lion pour elle. Aujourd'hui, je n'étais pas de taille face à des beaux mecs de son âge. Moi avec elle, je croyais que je n'avais pas  une chance sur un million.
Je me suis approché d'elle et j'ai posé une main sur son épaule. Excuse-moi, Marina. Si j'avais su.
Me touche pas, Frenchie, elle a crié en se tournant d'un quart vers moi. C'est trop tard et tu comprends rien.
J'ai fait un bon en arrière. Marina s'est levée et m'a fait face.
C'est toujours la même chose avec vous les garçons. Vous baisez avec n'importe qui et à moi, vous dites que je suis trop belle pour vous. Je me retrouve toujours seule à la fin. Tu sais, c'est dur et douloureux à porter d'être la plus belle.
À mon tour, je me suis énervé. Elle aussi disait des phrases bateau que je ne supportais pas.
Marina, j'ai dit, arrête de faire ta malheureuse. Je connais des centaines, voire des milliers de filles, qui rêveraient être rien que le quart aussi belle que toi. Alors, ne fais pas ta narcissique malheureuse. Personne ne m'aime parce que je suis la plus belle, j'ai fait, en imitant sa voix. Marina, c'est des conneries. C'est dans ton esprit que cela se passe. Tu te prends pour une princesse ou je ne sais trop quoi d'autre. Tu te regardes trop dans le miroir et tu ne regardes pas assez les filles et les garçons de la rue. Tu n'as qu’à faire comme nous, si tu as envie de quelqu’un, bats-toi pour lui montrer tes sentiments et arrête avec ton narcissisme de petite fille bien élevée.
J'ai juste eu le temps de finir ma phrase que je recevais une baffe monumentale. Une seule. Mon oreille en sifflait, mais j'ai quand-même compris ce qu'elle m'a dit, avant de faire demi-tour.
Tu as raison.
Ensuite, elle est retournée dans le dortoir et a fait ses bagages. Elle a payé la nuit et est partie. Je ne l'ai plus revue.
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Mais, une semaine plus tard, j'ai eu des nouvelles. J'étais dans la ville de Puno, dernière ville péruvienne, à la frontière avec la Bolivie, au bord du lac Titicaca et berceau de la civilisation inca. Je buvais un café dans un bar, dans la rue principale, quand la Française de l'Hostel Lucky, qui jusqu'ici n'avait pas quitté les bras de son superbe Péruvien, rentra et me vit. Je lui proposai un café. Elle travaillait comme volontaire dans un hôtel sur la place de la cathédrale et attendait de l'argent de France. Elle avait les traits tirés. Il n'y avait plus aucune trace de bonheur sur son visage. Ce n'était pas difficile à deviner, elle le portait sur elle. Elle s'était faite larguer par son mec. Dehors, il faisait un froid de canard. Depuis deux heures, il pleuvait des cordes. Par la fenêtre du café, je voyais les gens dans la rue, pliés en deux, faisant des grimaces sous leurs parapluies, et beaucoup étaient coiffés, le plus souvent avec classe, de leurs chapeaux melons, leurs hautes-forme ou leurs bonnets à oreillettes traditionnels des indiens Quechuas et Aymaras du  lac Titicaca. Sur les carreaux, la buée laissait des traces qui ressemblaient à de la bave. Je me sentais bien au sec et au chaud. Elle a commencé très fort et je me suis dit. Ça y est, on recommence.
Toutes des putes, les Colombiennes et les Américaines (déjà, j'avais compris ce qu'il s'était passé). Tu te rappelles le bar à coté de la place San Blas, elle m'a demandé.
Oui, je vois bien, le Km Zéro.
C'est ça. Donc, elle a quitté notre hôtel. Tu vois, le jour où toi et la petite Française et le pitbull...
Je l'ai coupée, je ne voulais plus entendre parler de pitbull. Oui oui, je vois très bien. Elle a donc pris un autre hôtel, avec une chambre perso. Pas un dortoir. Elle savait ce qu'elle faisait, la sale pute.
J'avais envie de lui dire, bon, c'est fini les insultes entre filles, ça vous grandit pas, ni toi, ni elle. Mais la haine était trop forte. Cette fille était salement blessée. Elle avait dû l'aimer du plus profond d'elle-même, son Péruvien. D'un coup, son monde  s’écroulait. Elle s'était transformée en une bombe attendant d'exploser sa haine. Elle aurait été capable de déchiqueter le beau Péruvien et Marina.
C'est donc au Km Zéro qu'ils se sont vus pour la première fois. Dès que je suis rentrée dans le bar, car j'avais rendez-vous avec Mario, la chienne perverse m'a vue. Elle m'a fait un sourire sournois et elle est partie en douce. J'avais compris son jeu. De toute façon, Carlos n'était déjà plus le même. Je sentais qu'il était sous le charme de cette sorcière. Si vite, quand-même ! Non, j'aurais pas cru cela de Carlos. Le soir même. Tu comprends ce que ça veut dire ? Deux heures plus tard, il me larguait comme une vieille chaussette. Il m'a dit qu'il ne m'aimait plus et, sans autre explication, il a fait son sac et a changé d’hôtel. Je l'ai suivi, je me suis traînée à ses genoux, je lui ai promis tout ce qu'il voulait. Mais non, rien, il n'a plus dit un mot. Il m'a abandonnée dans la rue.
Elle avait les larmes aux yeux. Il n'y avait rien à dire. Se faire larguer par quelqu'un qu'on aime au bout de deux mois ou de vingt ans ne change rien. La même douleur vous déchire les entrailles et il n'y a aucun baume pour vous soulager, excepté le temps, ce foutu temps de l’absence et de la souffrance, avec lesquelles vous allez vous coucher en boule, le poing dans le ventre, nuit après nuit, sans pouvoir dormir avant de longues et douloureuses heures. Avec la haine qui était en elle, je lui souhaitais bon courage. Il allait lui en falloir.
Oui, elle a repris, on était bien tous les deux, avant que cette salope de sorcière ne l'ensorcelle. Je ne vois pas d'autre raison. Elle est peut-être belle, pour vous les mecs. Mais quand on la regarde de près, on voit bien que ce n'est que du vent. Elle finira toute ridée, seule et ce sera bien fait pour cette pute colombienne.
J'avais envie de lui dire que c'était le lot de toutes et de tous, salopes ou pas, de finir  ridés et seuls. C’était peut-être moche aux yeux de personnes âgées de seulement 30 ans, mais avec les années, la démolition et la solitude, personne n'y échappait. Cette Française me déprimait. À la fin, dans ce bar, elle parlait autant à elle-même qu'à moi. Toutefois, j'appris que tous les deux étaient partis à Lima. Carlos avait toute sa famille dans la capitale et la Française connaissait son adresse. Elle n'allait pas se laisser tondre la laine sur le dos sans réagir, a-t-elle dit. Ils vont en chier, je peux te le jurer. Je pars dans huit jours à Lima. Je ne vais pas les lâcher d'un pas. Si moi je suis malheureuse, je ne vois pas pourquoi la pute et lui seraient heureux. Tu n'es pas d'accord, elle m'a demandé. J'ai juste dit si si, pour avoir la paix et j'ai ajouté qu'il fallait que j'y aille, j'avais mon blog à écrire. Elle est restée assise et je suis allé au comptoir payer nos deux cafés.
Avant de sortir, je me suis retourné. Elle regardait fixement par la fenêtre du bar. Des larmes mouillaient le coin de ses yeux et elle avait les dents serrées. Les poings aussi. J'ai ouvert la porte du café et être happé par la pluie froide des rues de Puno fut un soulagement.
Même si je ne pouvais pas être heureux de la douleur de cette fille, j'étais content pour Marina. Le Péruvien était un type sympa et attentionné. Ils formaient un magnifique couple. Contrairement à ce que disait la française, je ne voyais pas Marina plonger dans les bras de Mario dès le premier jour. Je crois que cette fille a une éthique de l'amour. Elle n'irait pas coucher avec un homme qui a déjà une histoire. J'imagine plutôt que Mario a dû donner de sacrés gages avant que Marina l'accepte, comme par exemple de se séparer immédiatement de la Française. C'est cela, j'imagine. Elle a attendu deux ou trois jours avant de coucher avec lui. Et, ensuite, elle a  tout donné. Je suis sûr que Marina fait une merveilleuse amoureuse. Et j'avais certainement tort (mais je n'ai pas eu le temps de m'expliquer). Elle n'est pas une grande narcissique, elle est juste un peu paumée avec toutes ces images merdiques que véhicule une société d'hommes au sujet des femmes. Je suis sûr que tous les deux vivent une très belle histoire. En tout cas, je leur souhaite, ce serait un très beau cadeau ce soir, puisque c'est le soir de noël.
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Je suis sur l'Île du Soleil, sur le lac Titicaca. À part en faisant les courses ou en croisant les Indiens sur les chemins de l'île, je n'ai parlé avec personne depuis 6 jours. Je pense beaucoup à la fille du président. Souvent, elle me manque, sa présence me manque. En même temps, son fantôme est souvent à coté de moi. Quand je marche dans l'île, canne à la main, je souris. Je vois ma canne tomber pendant qu'elle me fait une petite gâterie. Je me suis aussi surpris à rire en me rappelant qu'elle m'avait appelé Pépé. C'était la première fois qu'on m'appelait Pépé. Faut bien en passer par là aussi, non ? Surtout quand on a une canne ! Je la vois se mettre une main devant la bouche et s'excuser tandis que je la regarde, furieux. Aujourd'hui, je peux en rire, ce qui n'était du tout le cas à Cuzco. Le seul souvenir qui ne me fait toujours pas rire et, au contraire, qui me donne encore des frissons d'horreur, c'est de me rappeler Lula en train de me renifler le trou de balle. Si je peux dire ainsi, je n'arrive pas à prendre du recul avec cette image. Ça doit être mon coté mec. J'associe immédiatement l'image de mon cul et ce pitbull avec l'image de mes couilles et de Lula en train de les bouffer. C'est d'un désagréable !
La fille du président me manque, aucun doute. La raison est peut-être due au fait que nous n'avons pas pu nous revoir avant son départ pour le Chili. Elle et ses deux amis avaient avancé l'heure de leur départ parce qu'il y avait une promo sur les prix des bus de l'après-midi. Elle m'a dit sur Messenger, viens tout de suite Bornu, nous partons dans une heure. Hélas, le temps que je lise le message et que je coure à la station d'autobus, je la ratais de 5 minutes. Cela fait 15 jours exactement et, depuis, je n'ai reçu aucune nouvelle d'elle. Des fois, je me demande si c'est à cause de cette nuit où nous avons fait l'amour. Je n'étais pas trop fier de moi et j'ai un peu, un peu seulement, mauvaise conscience. Ça avait été une nuit sauvage et elle n'a que 18 ans, tout compte fait. Presque 19, elle m'avait dit au lit, dans 4 mois mon chou.
Nous y sommes donc, au 24 décembre, le jour le plus terrible de l'année, tout le monde est en famille, exceptés quelques millions d'hommes et de femmes seuls, immensément seuls. Je me suis promené plusieurs heures sur les chemins de l’Île du Soleil. Mon dos tenait, je faisais des photos de lamas, d'alpagas, d’ânes, des couleurs sur le lac, des montagnes enneigées au loin, des pierres et des fleurs de l'île, mais pas des hommes et des femmes. Je n'ai jamais su photographier des hommes. Je ne m’en sens pas légitime. Et puis je crois, comme certains peuples, que faire une photo d'une personne, c’est lui voler son âme. J'ai fait quand-même quelques photos d'enfants mais j'étais pas fier de moi, car, sur une photo, vous verrez si vous regardez mon blog, une enfant tend la main pour que je la paie.
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Le soir approche et, avec lui, je sens grandir un nœud de tension dans mon ventre. Chaque année, à la même heure, entre 4 et 6 heures, c'est la même chose. L'angoisse de la solitude me saisit et ne me lâche plus, jusqu'à ce que je trouve le sommeil, au milieu de la nuit, souvent après avoir bu une ou deux bouteilles de vin. Je me pose toujours la même question. Est-ce que cette année encore, je vais réussir l'épreuve et en sortir vivant ? Noël, c'est la mort sans la fête des morts et, de toute façon, a-t-on vu quelqu'un mourir une nuit de noël parce qu'il vient de prendre conscience de l'absolue solitude de tout être vivant ? Que cette solitude est le côté irréductible à notre désir du commun, d'être avec des amis, des amours, de la famille ? Goûter à la solitude d'un soir de noël ne serait-il pas plutôt la souffrance nécessaire pour que nous puissions vivre 364 jours de l'année en paix? Je ne sais plus. Mais je crois que oui.
Je vais, comme tous les soirs, au restaurant Pachamama, en haut du village. Il y a la fille et la maman. Ce sont des Guatémaltèques en vacances au Pérou et en Bolivie.  Elles ont une chambre dans un hôtel pas très loin du mien. Je les ai saluées et j'ai été m’asseoir face à la baie vitrée qui donne sur le lac, du côté nord-ouest, et donc du côté Pérou. À l'horizon, il y a une immense masse de nuages noirs sous laquelle un soleil d'un rouge fluo et en même temps d'un rouge d'une douceur incroyable  subsiste encore en entier, au dessus des montagnes. Dès que le soleil disparaît, les couleurs du ciel s'intensifient et celles de la terre de l’île deviennent plus charnelles, comme une révérence à la lumière, avant que, évanescente, celle-ci ne se meure dans la nuit. Il n'y a personne d'autre dans le resto. À côté du Pachamama, dans l'autre restaurant ouvert, un groupe de 6 personnes sont en train de prendre leur repas, peut-être des Américains ou des Canadiens car, dans l'après-midi, je les ai entendus parler anglais. Il y a aussi deux filles, des Allemandes, qui faisaient des photos du coucher de soleil dans le village. C'était la première fois que je les voyais et elle sont vite rentrées dans leur hôtel. Les deux petites filles que j'ai prises en photo tout à l’heure, dont une me tendait la main pour que je lui donne de l'argent, ont conduit leurs  lamas, qui étaient à la pointe de l’île, dans la petite étable de la maison de leurs parents. Il n'y a donc  plus personne dehors. La nuit arrive, il est 19h30 en Bolivie, une heure de moins au Pérou. Quand j'ai eu fini de manger la truite avec du riz, unique plat de cette soirée, j'ai eu envie d'un truc de sucré parce que nous étions le soir de noël. La patronne a ramené quelque chose qui ressemblait à de la crème brûlée, et c'était excellent. Je suis encore resté regarder le paysage à travers la baie vitrée du Pachamama. Dans le ciel, les couleurs vives s'étaient dissoutes en quelques  traits oranges et grenats qui résistaient encore à l'encre de la nuit. Et puis, soudain, le ciel s'est illuminé, comme chaque soir. Il est redevenu comme en plein jour. On voyait le lac et, à l'horizon, les montagnes à des centaines de kilomètres. Cela a duré une fraction de seconde, ce ciel zébré d'un éclair furieux puis la nuit est tombée, noire, intense. On sentait venir la pluie. J'ai remercié la patronne et le serveur et je leur ai souhaité bon Noël. J'ai fait aussi une bise aux deux Guatémaltèque, puis j'ai mis mes gants, mon foulard et mon bonnet à oreillettes et j'ai pris ma canne. Des le premier pas, j'ai senti le froid de cette nuit-là. Un froid différent des autres nuits, le froid de l'homme seul. Il y avait de la lumière dans les quelques maisons du village mais, déjà, les trois petits magasins fermaient leurs portes. J'ai eu juste le temps d’acheter, au double du prix du continent, une bouteille de rhum et une de coca, le vin étant hors de prix. Mais, avec la bouteille de rhum, j'avais largement assez pour combattre contre la mort, la solitude et même le père Noël, s'il venait à déposer des cadeaux dans mon soulier. Ça faisait longtemps que je ne croyait plus au père Noël. Si toutefois je me trompais et qu'il passait me voir, j'espère qu'il savait boxer car j'avais la haine contre lui, et le seul cadeau que j'allais lui offrir, c'est un uppercut bien placé. Je posais avec précaution ma canne entre les pierres du chemin pour ne pas glisser, je redescendais du côté est de l'île et il ne restait plus aucune lumière, exceptée celle, blafarde, qui s'échappait des fenêtres de quelques maisons. Si tôt dans la soirée et il était déjà impossible de marcher sans une torche. Pendant les 10 minutes qui séparaient l'hôtel du village, je n'ai rencontré qu'un vieil Indien qui remontait avec ses trois ânes. Il m'a juste dit bonne nuit et j'ai répondu bonne nuit, mais le ton n'y était pas. Je savais que cette nuit n'était pas une bonne nuit.
La Bolivie comme le Pérou sont des pays pauvres. Le chauffage est un luxe que ne peut se permettre ni la majorité de la population ni les hôtels pour petits budgets. Sur l'île du soleil, dans la journée, il fait bon et on peut marcher en short, avec son pull autour de la taille. Cependant, à quatre mille mètres d’altitude, la nuit, les températures sont plutôt proches de zéro. Ma chambre avait conservé la chaleur de la journée. Quand j'ai refermé la porte derrière moi, je me suis senti au chaud. J'ai enlevé mon pull mais, très vite, je me suis rendu compte que ce n'était qu'une illusion due au contraste avec l'extérieur. Il ne faisait pas si chaud que ça et je l'ai vite remis. Je me suis servi un grand verre de rhum avec un peu de coca et, machinalement, j'ai allumé mon ordinateur. Depuis trois mois, je n'avais lu aucun livre. Je ne lisais que des journaux et des revues en espagnol, avec un stylo à coté de moi, et une application de traduction espagnol/français allumée sur mon smartphone ou sur mon ordinateur. Je traduisais des articles avec une lenteur exaspérante et, au bout d'une heure, j'étais complètement crevé, je n’avais plus aucune envie de lire. Ce n'est pas ce soir que j'allais m'y mettre, même si la lecture d'un roman ou d'une poésie me manquait.
Internet ne passait déjà plus et je me suis surpris à penser que j'étais coupé du monde. Des bêtises. L'ordinateur n'a jamais été le lien unique avec le monde. Il était si tôt, je n'avais rien à faire et je n'avais pas de télé pour boucher ce gouffre d'ennui qui s'ouvrait devant moi. Aussitôt après avoir bu mon verre de rhum coca, je me suis resservi un verre de rhum sans coca et je l'ai bu cul sec. J'ai soufflé, je me sentais mieux et j'ai commencé à écrire cette histoire.
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Je n'avais pas écrit plus de deux lignes que j'ai entendu les premières gouttes tomber sur les marches de bois de l'escalier extérieur. C'étaient des gouttes lourdes comme l'annonce de la fin du monde. Plouc plouc plouc, elles faisaient et elles résonnaient jusque dans mon crâne. J'ai été ouvrir la porte et j'ai vu que la masse de nuages qui était à l'horizon quand je mangeais au Pachamama s'approchait de l'île, le vent s'était levé. Il y avait des éclairs et il y a eu le tonnerre. J'ai compté 6 secondes de décalage. Cela devenait sérieux, surtout que ça s'est mis à péter trois fois, très fort, et que la pluie s'est précipitée sur l'hôtel et a crépité sur le toit. On n'entendait plus rien d'autre. J'ai commencé à trembler. J 'avais une peur bleue de l'orage.
Putain de Noël ! Pas d'Internet et de l'orage, il ne manquerait plus que le père Noël fasse son apparition et je faisais un infarctus, tandis que la foudre tombait sur l'hôtel, explosait mon ordinateur et me grillait les neurones.
On m'a toujours dit de faire comme ça et c’est ce que j'ai fait. J'ai refermé la porte et j'ai vite éteint mon ordinateur. Ça n'a d'ailleurs servi à rien car, moins de trente secondes plus tard, il y a eu une coupure généralisée d’électricité. J'étais dans le noir complet et je flippais encore plus. Les éclairs se multipliaient et je comptais l'écart avec le bruit du tonnerre. On était rendu à 4 secondes, puis à trois, deux et même une seconde. C’est une toute petite île que celle du Soleil, au milieu d'un lac qui fait plus de 100km de long. Quand l'orage éclate, le son se propage sur l'eau et sur  toute cette étendue d'air, sans aucun obstacle. J'avais l'impression que le son était la voix d'un ogre affamé et fou qui avalait l'espace, la terre et le lac, en éclatant de rire. Le ciel se couvrait d'éclairs. Parfois, on voyait plus loin qu'en plein jour par flash et, parfois, c'était des salves de trois ou quatre éclairs, suivies de  roulements de tambours infernaux et de coups de canons si proches qu'ils semblaient exploser sur votre peau.  En dehors des éclairs, tout était d'encre dans l'île et l'atmosphère était chargée à bloc de je sais trop quoi qui vibrait dangereusement comme une bête invisible et monstrueuse qui allait  bientôt apparaître en crachant du feu, monsieur, que Noël est une torture ! J'ai vite été me réfugier sous les couvertures du lit. J'aurais voulu que quelqu'un me prenne dans ses bras. L’orage augmentait. La pression se faisait sentir jusque dans la pièce. La lumière des éclairs jaillissait dans la chambre. Je comptais encore  deux secondes puis une, ça n’arrêtait pas, cette guerre du ciel et  de la terre. Je crois que les couvertures, les draps, les murs et surtout mes cheveux vibraient. J'aurais mis mes doigts dans une prise, je m'imagine avoir la même sensation, de n'être plus qu'à  un instant de brûler.
Puis, après, il n'y a même plus eu de tonnerre, ce n'était presque que le silence, mais je savais qu'on était au cœur de cet orage et qu'entre le bruit du tonnerre et l'éclair, il n'y avait plus rien d'autre que le toit. À ce moment-là, j'ai entendu des cracs. Trois  fois. Je savais ce que c'était. La foudre tombait aux alentours, à moins de 30 mètres, j'aurais pu la toucher de la main. Mais j’étais tétanisé, aucun doigt ne bougeait, mon cœur ne battait plus pendant que mes cheveux se dressaient et accusait le ciel. Je tremblais de toute mon âme, mon corps refusait tout mouvement. Il me demandait de le rendre invisible.
Puis, à nouveau, il y a eu un décalage entre le son de l'orage et la lumière. Une seconde puis deux secondes. L'orage s'éloignait, il quittait l’île. Il y avait encore toute la masse de nuages au dessus de l'hôtel, mais le cœur électrique de la bête nous avait dépassés. L'eau tombait encore à une incroyable vitesse et elle tambourinait sur le toit, comme si la pluie désirait me cabosser la tête. Mon Dieu, cela avait duré 15 minutes tout au plus, mais, parfois, il y a des minutes qui nous révulsent comme l'éternité de la mort.
Je n'ai jamais eu aussi peur de noël que ce soir-là. Je me suis dit, la bonne droite que je vais lui mettre au P'tit Père des cadeaux. Dans son intérêt, valait mieux pas qu'il vienne.
Et pourtant, en quelque sorte, c'est ce qu'il a fait.
Il ne s'est pas réellement pointé, vous vous en doutez. Mais néanmoins, il m'a fait un   cadeau.
Il a fait nuit noire encore vingt minutes. Je suis sorti de ma chambre. On aurait dit que l'orage n'était jamais passé par l'Île du Soleil. On sentait juste le froid et cette humidité lourde de la pluie qui s'était posée sur toute chose. J'ai mis mon bonnet, mes gants et ma veste. Il y avait quelques étoiles au-dessus de nous. Ici et là, la lumière des petits villages autour du lac aidait à en deviner les contours. Ça a fait ploc, un petit bruit, et la lumière est apparue dans ma chambre. Dans les maisons voisines aussi. Dans l’hôtel, j'étais seul. Les propriétaires et leurs deux enfants vivaient de l'autre côté. J'aurais aimé avoir un peu de présence, mais non. Dans l’hôtel où il y avait les deux Guatémaltèques, il n'y avait pas de lumière. La fille et la mère devaient dormir avec des boules Quiès ou alors elles avaient un sommeil de plomb. Il y a des personnes que rien ne dérange pendant leur sommeil. De toute évidence, c'était le cas de ces deux femmes. Même l'enfer ne les empêchait pas de dormir.  Je suis rentré à nouveau dans ma chambre, il y faisait froid mais j’étais habitué au froid de ces hôtels de montagne. C’était juste un peu dur pour les mains. Si vous vouliez écrire la nuit, ce qui était mon cas, j’étais obligé de les réchauffer toutes les cinq minutes.
Soudain, j'ai dressé l'oreille. J'entendis l'universel petit son de mon smartphone indiquant que j'avais un appel.
Miracle. Internet fonctionnait et on m'appelait.
J'ai sauté sur mon smartphone et ouvert Messenger, c'était Lou, mon fils. Il avait écrit Bon noël Papa et il envoyait une photo de lui et de sa maman. J'ai été surpris de trouver sa mère très belle, toujours. Elle avait des cheveux blonds et longs, aussi beaux qu'au moment où je l'avais connue. Ses yeux pétillaient. Je savais qu'elle avait bu ses deux verres de champagne. Lou, qui allait avoir 19 ans, portait une longue barbe rousse. Je le reconnaissais à peine. J'ai répondu aussitôt. Qui est cette jolie jeune femme un peu pompette a côte de ce très vieux père Noël ? Bon Noël à vous deux ! Bien qu'il fut six heures du matin en France, il a répondu dans la seconde, LOL !
Et puis encore une sonnerie? C'était qui ????
C'était mes amis Nico et Marianne. Ils étaient maintenant à Grenoble et Nico essayait de réparer les conneries faites par les chirurgiens de cette clinique de Popayan, en Colombie
Je leur avais envoyé un bon noël quelques heures plus tôt. Ils me répondaient.
Oui, moche et dégueulasse. Je ne sais pas si cela va te remonter le moral mais voilà ce qu en disait à raison le bon vieux Bukowski.
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On t'embrasse fort.
Ce poème était une vrai piqûre de rappel. Bukowski n'avait pas besoin de milliers de mots pour dire exactement ce que nombreux, nous pensions. Je me suis promis de le relire au moins un fois par an.
Je leur ai répondu aussitôt que j'avais justement envie de lire un poème de Bukowski une nuit de noël pour me sentir mieux, et c'est fait. Je me sens mieux ! Merci les amis. Et j'ai ajouté une dizaine de stickers de bisou.
Encore ! Quelle adorable sonnerie. C'était qui ? Qui ? Qui ? C'était elle !!!  J'ai vite ouvert.
Salut mon chou, va vite sur ton mél.
J'ai retenu ma respiration, j'ai fermé l’application Messenger, ouvert mon mél et j'ai vite trouvé le sien, elle l'avait intitulé, la fille du président. Bien sûr. Je ne l'ai pas lu tout de suite. Je me suis levé, j'ai remis ma veste, mes gants, un bonnet. Je suis retourné dehors, ai regardé le ciel. On y voyait un peu plus d'étoiles. L'orage avait disparu et j' étais encore vivant. La nuit était loin d'être finie, mais j'avais l'intime conviction que cette fois ci encore, je devrais survivre. J'avais plus du tout envie de boxer le père Noël. Mon fils, des ami-es et la fille du président dans le même soulier, il ne pouvait pas me faire un plus beau cadeau. J'ai regardé le ciel. J'étais connecté au monde, un être sacré. L'univers était sacré. Je me suis dit qu'est-ce que c'est que ce charabia New-age que j'ai dans la tête ? Ce n'est pas parce que tu es sur le lac Titicaca, à 4000 mètres d'altitude, un soir de noël, qu'il faut te prendre pour un gourou. Tu es juste excité comme une puce parce que tu viens de recevoir un mél de la fille du président et que tu penses, n'est-ce pas! En fait, une petite pipe, hein  Bornu? Une petite pipe, Pépé, un soir de noël, ça te dirait?  
Oui, je me suis dit, c'est certain. Cela m'intéresse plus que les étoiles et l'univers entier.
Je suis rentré dans ma chambre, j'ai balancé mes affaires sur le lit et j'ai sauté sur l'ordinateur.
"SALUT MON CHOU"
C’était d'un nul d'appeler tout le monde mon chou. En même temps, j'adorais quand elle disait mon chou, en avançant ses lèvres et qu'on dirait une trompette. J'ai rebu un verre de rhum et je me suis mis à dévorer ses mots.
"Quelle connerie ces bus ! On n'a pas pu s'embrasser avant de partir de Cusco. Bornu Bornu Bornu, mille excuses de ne pas t'avoir donné de nouvelles parce que, à Arequipa, je me suis faite tirer mon téléphone à la gare routière et, tu sais, je n'ai pas beaucoup d'argent. Mais hier, on m'en a donné un autre et tu es la première personne à qui j'écris. Chéri, bon noël !
Je vais rentrer tout de suite dans le gras du sujet.
Quelle nuit j'ai passé avec toi.  Et Lula ! Quel gros con cet asthmatique ! Et puis mon œil, asthmatique ! C'est juste un truc pour faire pleurer dans les chaumières et gagner du fric. Il n'est pas plus asthmatique que toi et moi. Je t'écris surtout pour te parler de l'après Lula, quand tu m'as enculée, mon chou."
C'est bien ce que je pensais, je n'allais pas lire une lettre de Chateaubriand. J'ai repris ma lecture, avec un enthousiasme hésitant.
"Tu me l'as vraiment bien mise tout au fond, ta jolie petite bite que n'avait pas dévorée le camarade Lula."
En effet, la fille du président ne faisait pas dans la dentelle. Elle avait vraiment pris une année sabbatique avec le parler correct de son école de prépa. J'ai continué à lire.
" Oh ne t'inquiète pas. Tu ne m'as pas violée. C'est bien moi qui ai écarté mes fesses au maximum et qui ai passé la tête à travers la fenêtre ouverte, moi qui t'ai guidé à l’intérieur et c'est encore moi qui ai crié dans la rue, je veux ta grosse queue.  Hum mon  chou, c'était ma première enculade. Tu m'as défoncé le trou duc et j'étais mouillée comme une petite fille qui  vient de faire pipi dans sa culotte. J'ai adoré, encore plus la deuxième fois. Tu sais que j'en rêve encore la nuit. Je ne savais pas que c'était si bon. J'ai joui,  jusqu'au fond de mon ventre et de mon cul à la fois. Quelle surprise pour moi qui n'avais fait que l'amour à la papa et taillé quelques  innocentes petites pipes par-ci par-là. Pas beaucoup mon chou. Pas à tous les garçons à trente kilomètres à la ronde, comme tu me l'a dit, quand tu étais furieux, à Cusco. Non, à quatre seulement, mon grand-père, mon père, toi, et aussi le directeur du lycée Henry IV pour qu'il augmente ma moyenne. Claro que no !  Es una broma, amor ! Bien sûr que non, c'est une plaisanterie amour ! C'est quand même ta queue que j'ai préférée, même si elle avait un petit goût de caca après son gentil passage dans mon petit cul de jeune fille en fleur de chou. MDR !
Promis, je n'ai rien bu et n'ai pris aucune drogue. Une question très philosophique maintenant.
À part baiser et se faire sodomiser, à quoi d'autre peut penser une jeune fille bien élevée, ce qui est mon cas ? Et bien à rien d'autre.  Et tout ça, c'est de ta faute si je deviens accro au sexe. C'est trop bon. Merci merci merci.
La plupart des garçons que j'ai connus n'aiment pas faire ça . Ils trouvent ça dégueulasse parce qu'il y a de la merde mais c'est des cons qui comprennent rien. Moi, je dis et je crois qu'il y en a beaucoup avant moi qui l'ont déjà dit.  Là où il y a de la merde, il y a de la vie. Voilà Bornu. Depuis cette nuit-là, je ne suis plus la même. Je ne sais pas comment le dire. Je suis comment ? Plus large, plus épaisse. J'ai pris du volume, du muscle, de la profondeur. C'est bête de dire que je me sens une autre femme parce que j'ai pas les mots pour le dire. Je me sens plus qu'avant, j'ai quelque chose non en moins mais en plus. Quoi ? Impossible à dire. Ce que je sais, c'est qu'en me défleurant par derrière, tu m'as aidée à grandir. Sérieusement.
Je me suis repris une rasade de rhum. J'avais vraiment peur d'avoir été trop loin avec la fille du président. À la lire, elle m'enlevait toute mauvaise conscience et je savais que quand j'aurai fini cette lettre, j'irai me coucher. Je dormirai beaucoup mieux et noël sera passé.
Cette fille était la plus belle chose qui m'était arrivée depuis longtemps. J'avais envie de prendre à bras le corps mon ordinateur, de l'embrasser. Il y avait quelque chose d'elle là-dedans. J'ai continué.
"Il faut que je sois honnête avec toi Bornu. Je t'aime énormément et dès que je t'ai vu la première fois à Cali, j'étais trempée. Oh la la, il aurait fallu que je change de petite culotte toutes les trente secondes (J'exagère toujours un peu, tu as remarqué ?). Surtout que j'étais en short et tu cherchais ma chatte avec tes yeux qui étaient déjà en moi. Je savais que tu avais envie de moi... et moi de toi . Et qu'on allait coucher.
J'ai un petit copain. Il s'appelle Mario et c'est un Argentin, mais c'est un Argentin sympa, pas un arrogant comme beaucoup d'autres. Tu le connais, tu l'as vu une fois à Cusco. Il voyage avec moi et mon ami chilienne. Mais, à Cusco, je n'étais pas encore avec lui. Depuis notre nuit, j'ai envie de faire l'amour tout le temps et Mario est beau et très cool avec moi, et puis, à 22 ans, les queues des garçons sont un peu plus rapides à l'allumage que celles des plus vieux. Elles ont juste un petit défaut, ça se met à cracher tout de suite. Tandis que toi mon chou, tu tiens bien les longues distances. Sauf pour ma première p'tite pipe ! Ce ne seraient pas des images toutes faites sur la sexualité des hommes jeunes et vieux ce que je viens d'écrire ?
SI!
J'avais dit si, à haute voix, de toute ma conviction. En fait, j'en savais rien. J'avais toujours entendu des plaisanteries douteuses sur les queues des jeunes et des vieux. Tout bien réfléchi, peut-être que la fille du président avait raison. On est plus lent en vieillissant et aussi, même si elle ne l'a pas dit, on a moins de capacité de répétition  qu''un jeune. Quand on a baisé une fois, au mieux deux, alors on est heureux. On sait qu'on ne pourra pas donner beaucoup plus. Tandis qu'à vingt ans, si je me rappelle bien... Fait chier les souvenirs ! J'ai ajusté  mes lunettes et j'ai collé mon nez sur l'écran. Elle avait écrit.
"Je suis bien avec Mario. Surtout que toi, de toute façon, tu ne serais pas resté avec moi. Tu me l'as dit je ne sais plus combien de fois cette nuit-là. Je n'avais pas  d'avenir avec toi, j'allais m'ennuyer, perdre mes meilleures années. Bornu, tu m'en as dit des conneries pour que je ne m'accroche pas à toi. Tu ne le sais pas, mais quand on s'est ratés à la gare routière, j'en ai pleuré.
Je ne crois pas du tout que je n'ai pas un avenir parce que j'aime me faire sauter par un pépé. Pardon Bornu, mais c'est bien cette question du pépé qui est importante. Ce n'est pas parce que j'ai dix huit ans que l'avenir est quelque chose qui se dessine sur dix ou vingt ou trente ans. Je peux aussi revendiquer un petit avenir de trois mois par exemple. Trois mois à faire l'amour avec toi et voyager avec toi. Cela aurait été très beau, fantastique peut-être. Tu n'en as pas voulu, alors j'ai pleuré dans le bus . J'ai pleuré, mais j'étais heureuse aussi. Tu m'avais bien défoncé le cul mon cochon, et puis je suis passée à autre chose, Mario. La vie est comme ça, Bornu chéri.
Tu sais d'où je t'écris, mon amour d'une nuit ? Non, bien sûr. On est sur l'île de chiloé dans la famille à Fausto, c'est dans le sud du Chili. Sa famille est comme Fausto, très chou. Je l'adore. Je suis bien avec Mario, mais toi, tu me manques. Mario est comme les autres garçons que j'ai connus avant, il n'aime pas faire ces choses-là. C'est peut-être la raison pour laquelle tu me manques tant.
Demain, on retourne sur le continent et on descend jusqu'à la Terre de Feu. J'ai hâte  d'aller si loin dans le sud, j'en trépigne d'impatience. J'ai trouvé le livre que tu m'as indiqué, de Francisco Coloanne. C'est génial son Tierra del Fuego. Je ne voyais pas du tout la Terre de Feu dans les années 30 comme ça, avec ces bandits de grands chemins, ces milliers d'aventuriers venant à la chasse à la baleine, les derniers Indiens et, l'été, les étudiants de Santiago du Chili qui traversaient le pays pour aller faire une saison dans des immenses fermes isolées de tout. J'ai adoré et je vais lire ses autres livres.
J'ai beaucoup réfléchi aussi concernant mon année de prépa. J'ai toujours été bonne en sciences et en maths. Je suis une fille très rationnelle, même si ce n'est pas ce côté de moi que tu as vu. Je ne crois pas pour autant que je serais heureuse en choisissant une voix scientifique. J'aimerais faire de la philosophie, du journalisme. J'écris bien non ? Et puis, même si je n'écris pas bien, c'est cela que je veux faire aujourd’hui, étudier les sciences politiques, la philo, écrire pour des journaux. Quand je rentrerai à Paris, tu pourras m'aider ? Dis, tu viendras me voir ? Je te promets, je ne te toucherai pas.
Voila chéri pour l'essentiel des nouvelles. Ah j'allais oublier ! J'ai perdu au moins trois kilos grâce ou à cause de Mario. Il n'aime pas le poil. Lui ne me voit pas comme une ligne de coke ou de la MD ou une ecstasy. Il trouve que le poil ça fait sale. Je sais que je suis stupide. Cela fait un peu femme soumise. Pour lui plaire, j'ai tout rasé partout, même mes cheveux. Je n'ai plus un poil sur le caillou. Plus rien à déclarer. Rien sous les bras, rien sur les pattes, rien sur la foufoune et rien sur la tête. Cela l'excite comme un fou, Mario.
En attendant, moi j'ai une drôle de tronche. Elle est toute ronde. Je ne sais pas si tu m'aimerais ainsi. Oui ?
Je pense très fort à toi, et je t'embrasse d'un million de bisous de noël.
On se reverra Bornu, n'est-ce pas ?
Et elle avait signé d'un prénom qui ne correspondait pas à celui de son adresses mél.
Éloïse
Comment j'avais pu oublier un tel prénom ? Il était magnifique. Aujourd'hui, je dirais un prénom inoubliable.
Le matin, quand j'ai ouvert la porte de ma chambre, la lumière éblouissante du lac et du ciel réunis me fit cligner des yeux. Il faisait encore frais, mais j'avais mis mon pull, je me suis étiré et j'ai respiré à fond. J'avais passé une nuit à dormir d'une traite et sans rêves. Je me sentais en pleine forme. Le bateau pour le continent partait dans deux heure. Il était temps de me laver et de plier bagages. Éloïse, son nom, je l'avais en bouche comme un bonbon, je l'ai répété plusieurs fois et il fondait sous ma langue. Il avait un goût sucré et doux et en même temps âpre et ambré, comme son joli minois. J'étais heureux que son voyage se déroule parfaitement bien et j'étais encore tout surpris qu'elle ait adoré notre unique nuit alors que j’étais certain d'avoir été  un goujat. La sodomie lui avait plu (Là aussi, elle exagérait, nous ne l'avions fait qu'une fois. J'avais juste pris une petite pause). N'empêche, c'était un beau cadeau qu'elle me faisait en m'écrivant qu'elle avait aimé. Je ne sais pas encore si de retour dans ma ville, j'irai la voir. Je me reposerai la question dans plusieurs mois, quand le temps aura décanté notre rencontre. Au fond de moi, je crois que oui, j'aurai envie de la voir. Éloïse m'avait offert une nuit incroyable de surprises et d'amour, mais elle ne pouvait être grande que si elle ne se répétait pas. On ne pouvait pas construire un avenir sur cette nuit de Cusco.
Elle me demandait un petit avenir de 3 mois. Je  lui avait dit non. J'avais bien fait. Cela aurait été une catastrophe. J'aurai fini le voyage en tirant la langue et elle, les mains sur les hanches en me disant  alors Pépé on assure plus ?... Peut-être pas ?
Personne n'est préparé à vivre avec une autre personne. On ne peut jamais rien en dire d’avance, cela aurait pu être  bien  ou catastrophique, un désastre ou une merveille. C'était un risque à prendre et pour être honnête, je me rappelai le visage de ces backpackers dans ce bar vénézuélien de Cusco quand  je la tenais d'une main par la taille et de l'autre je m’appuyais sur ma canne.  Ils avaient des têtes à vouloir nous écraser sous leurs réprobations et leurs préjugés.  Je n'avais donc pas   eu le courage de suivre la voie qu'elle m'avait proposée. C'est Eloïse qui ne manquait pas de courage, qui allait de l'avant, qui rejetait tout les préjugés Elle est forte, généreuse et elle se donne à fond. Je l'avait déçu en refusant de rester avec elle et parfois j'ai des regrets. Parfois seulement. A d'autres moments je me dit que j'avais eu mille fois raison de refuser. C'était important qu'elle fasse son voyage  et qu'elle aime une  personne de sa génération, pas de la mienne.
Éloïse est une femme petite, moins d'un mètre soixante, avec des yeux comme des billes, des seins ronds  et fermes, une peau blanche, légèrement laiteuse des dents blanches aussi et régulière, une bouche un peu boudeuse qui fait que les garçons  toute de suite pensent à plein de choses cochonnes, une jambe dont la cuisse est ferme et élastique, un cul comme un ballon bien gonflé, et son minois est adorable dont l'odeur est comme un tas de bonnes drogues  dont on ne se lasse pas.  Elle avait des cheveux châtains qui lui tombaient sur les épaulent et ondulaient quand elle faisait l'amour dans cette nuit de Cusco.
Quel con ce Mario !
Pas besoin de décanter longtemps cette rencontre avec la fille du président. J'étais maintenant certain. Je la reverrai.
          ��         fin
Depuis tout petit, le nom du lac Titicaca me fait rêver. Je voyais un océan sur le toit du monde, des Indiens philosophes, un ciel pur comme un diamant et je rêvais qu'un jour viendra où je pourrais vérifier si mes images correspondaient à la réalité. C'est fait !
La réalité est plus sublime encore que le rêve du lac Titicaca. Ce paysage dans lequel je m'étais fondu pendant six jours était devenu une partie de ma chair. Sans tomber  dans le spiritualisme de bac à sable, je suis un peu de cette terre, de ce lac et de ce ciel. Pour toujours, ce paysage sera en moi. J'avais le cœur serré en quittant l'Île du Soleil.
Ce voyage arrive bientôt à sa fin. Une fois le bateau accosté au port de Copacabana, je prends un bus qui, en trois heures, va m’amener au plus loin et le plus au sud de mon voyage, à La Paz.
En ce jour de Noël,  je vais arriver dans la capitale de la Bolivie, dont je ne connais rien, excepté le nom de son président, un Indien socialiste, Evo Morales. Ensuite, en repassant par le Mexique, j'aurai trois mois avant de rentrer chez moi, à Paris. Le compte à rebours commençait.
Et, pour finir, je vous envoie une chanson des Rolling Stones, de 1974. Je viens juste de la redécouvrir et il me semble qu'elle fait une bonne conclusion à cette histoire.
Time waits for no one
Bonne lecture et bonne musique j'espère. Si c'est possible,  bon noël et surtout, prenez soin de vous.
Merci mille fois à Sylvain et Sarah pour leur patience et leurs corrections de ce texte
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blogdimanche · 2 years
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Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 16,19-31
« En ce  temps-là, Jésus disait aux pharisiens :  19 « Il y avait un homme  riche, vêtu de pourpre et de lin fin, qui faisait chaque jour des festins  somptueux.
20  Devant son portail gisait un pauvre nommé Lazare, qui était  couvert d’ulcères.
21  Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table  du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères.
22  Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès  d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra.
23  Au séjour des morts, il était en proie à la torture ;  levant les yeux, il vit Abraham de loin et Lazare tout près de lui.
24  Alors il cria : “Père Abraham, prends pitié de moi et  envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me rafraîchir la  langue, car je souffre terriblement dans cette fournaise.
25  – Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : tu as  reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur pendant la sienne.  Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance.
26  Et en plus de tout cela, un grand abîme a été établi entre vous  et nous, pour que ceux qui voudraient passer vers vous ne le puissent pas, et  que, de là-bas non plus, on ne traverse pas vers nous.
27  Le riche répliqua : “Eh bien ! père, je te prie  d’envoyer Lazare dans la maison de mon père.
28  En effet, j’ai cinq frères : qu’il leur porte son  témoignage, de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de torture !”
29  Abraham lui dit : “Ils ont Moïse et les Prophètes :  qu’ils les écoutent !
30  – Non, père Abraham, dit-il, mais si quelqu’un de chez les  morts vient les trouver, ils se convertiront.”
31  Abraham répondit : “S’ils n’écoutent pas Moïse ni les  Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne  seront pas convaincus.” »
(Texte  biblique tiré de « La Bible — traduction officielle liturgique— AELF »)
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(Illustration  du site Apprenez-nous à prier)
Commentaire Lc 16,31
« S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. » (Lc 16,31) Elle est doublement terrible cette dernière phrase : d’abord elle semble désespérée, comme si rien ne pouvait forcer un cœur de pierre à changer ! Mais elle est plus terrible encore dans la bouche de Jésus : on peut se demander s’il pense à lui-même en disant cela ? « Quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts ? » Et quand Luc écrit son évangile, il ne sait que trop bien que la Résurrection du Christ n’a pas converti tout le monde, loin de là, elle en a même endurci plus d’un. Venons-en à l’histoire du riche et du pauvre Lazare : le riche, finalement, nous ne savons pas grand chose de lui, même pas son nom ; il n’est pas dit qu’il soit spécialement méchant, au contraire, puisqu’il pensera même plus tard à sauver ses frères du malheur dans l’au-delà. Simplement, il est dans son monde, dans son confort, « dans sa tour d’ivoire », pourrait-on dire, comme les Samaritains dont parlait Amos dans la première lecture. Tellement dans sa tour d’ivoire qu’il ne voit même pas à travers son portail, le mendiant qui crève de faim et qui se contenterait bien de ses poubelles. Le mendiant, lui, a un nom « Lazare » qui veut dire « Dieu aide » et cela, déjà, est tout un programme : Dieu l’aide, non parce qu’il est vertueux, on n’en sait rien, mais parce qu’il est pauvre, tout simplement. Voilà peut-être la première surprise que Jésus fait à ses auditeurs en leur racontant cette parabole : car, en fait, cette histoire, ils la connaissaient déjà, c’était un conte bien connu, qui venait d’Égypte ; les deux personnages étaient un riche plein de péchés et un pauvre plein de vertus : arrivés dans l’au-delà, les deux passaient sur la balance : et on pesait leurs bonnes et leurs mauvaises actions. Et au fond la petite histoire ne dérangeait personne : les bons, qu’ils soient riches ou pauvres, étaient récompensés… les méchants, riches ou pauvres, étaient punis. Tout était dans l’ordre. Les rabbins, eux aussi, avant Jésus, racontaient une histoire du même genre, elle aussi bien évidemment empruntée à l’Égypte. Le riche était un fils de publicain pécheur, le pauvre un homme très dévot ; eux aussi passaient sur une balance qui pesait soigneusement les mérites des uns et des autres ; très logiquement, le dévot était reconnu plus méritant que le fils du publicain. Jésus bouscule un peu cette logique : il ne calcule pas les mérites et les bonnes actions ; car, encore une fois, il n’est dit nulle part que Lazare soit vertueux et le riche mauvais ; Jésus constate seulement que le riche est resté riche sa vie durant, pendant que le pauvre restait pauvre, à sa porte : c’est dire l’abîme d’indifférence, ou d’aveuglement si vous préférez, qui s’est creusé entre le riche et le pauvre, simplement parce que le riche n’a jamais entrouvert son portail. Autre détail qui a son importance dans le récit de Jésus : il n’est pas tout-à-fait exact qu’on ne sait rien du riche ; en fait, on sait comment il était habillé : de pourpre et de lin, ce qui est une allusion évidente aux vêtements des prêtres ! La couleur pourpre qui était primitivement la couleur des vêtements royaux, était devenue la couleur des grands prêtres parce qu’ils servent le roi du monde ; quant au lin c’était le tissu de la tunique du grand prêtre ; là, dans la bouche de Jésus, il y a certainement une petite pointe à l’égard de ses auditeurs : très pieux mais peut-être indifférents à la misère des autres ; Jésus leur dit quelque chose comme « grand-prêtre ou pas, si vous méprisez vos frères, vous ne méritez pas votre titre de fils d’Abraham ». Car, on l’aura remarqué : Abraham est cité sept fois dans cette page ; c’est donc certainement une clé du texte. Au fond, la question de Jésus c’est « qui est vraiment fils d’Abraham ? » et sa réponse : si vous n’écoutez pas la Loi et les Prophètes, si vous êtes indifférents à la souffrance de vos frères, vous n’êtes pas les fils d’Abraham. Jésus va encore plus loin : le pauvre aurait bien voulu manger les miettes du riche, mais c’étaient plutôt les chiens qui venaient lécher ses plaies ; or les chiens étaient des animaux impurs… ce qui fait que même si le riche pieux s’était donné la peine d’ouvrir son portail, il aurait été choqué de toute façon et il aurait fui cet homme impur léché par les chiens… la leçon de Jésus, là encore, c’est « vous attachez de l’importance aux mérites, vous veillez à rester purs, vous êtes fiers d’être les descendants d’Abraham… mais vous oubliez l’essentiel ». Cet essentiel est dit dans la loi et les prophètes ; et là, nous n’avons que l’embarras du choix, dans le livre d’Isaïe par exemple : « Le jeûne qui me plaît, n’est-ce pas ceci :… partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton semblable ?... Si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres… » (Isaïe 58,6-7.10). Pas besoin de signes extraordinaires pour nous convertir : nous avons la Loi, les Prophètes, les Évangiles : à nous de les écouter et d’en vivre ! (Note du P. Mario Doyle, C.Ss.R. : Ce commentaire reproduit largement celui d’une bibliste bien connue des catholiques de France : Marie Noëlle Thabut)
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Contes du Levant (eau de parfum) Les Merveilles L’Artisan Parfumeur Nose: Christophe Raynaud
Woods
An opulent rose from a dream.
In a simple and clear writing, the perfumer wanted to capture the green and spicy scent of a Damask Rose treated in majesty, just infused with sumptuous notes of incense and patchouli. He succeeds in putting in tension the freshness of this Turkish rose and the addictive warmth of the pepper and ciste trio. This fragrance, entirely structured around the favourite flower of the Orientals, deploys its aura of mystery on the skin.
"This fragrance features three vibrant peppers - white, pink and black - to enhance the iconic rose du levant, majestic in each of its facets, on a mysterious and bewitching patchouli base.” Christophe Raynaud
Key notes: Patchouli, Pink pepper, Rose
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