Je Tiens Réellement À Vous - Anthony Bridgerton
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Résumé : Quand Anthony te voit dans les bras d'un autre homme, il se rappelle la facon dont il a ruiné votre relation à cause de ses sentiments.
Warnings : se passe en 1807 donc Anthony a 23 ans, angst, fin triste, dites-moi si j'en ai loupés d'autres.
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Chanson mentionnée : Piano Concerto No.20, K66 par Mozart
Chansons qui m'ont inspiré : When I Was Your Man par Bruno Mars et Decode par Sabrina Carpenter
Appuyé contre un mur, Anthony Bridgerton te regarde au loin. Te voyant danser, un sourire sur le visage, il ne peut s'empêcher de faire pareil. Il sait à quel point tu aimes les bals, à quel point tu aimes danser au rythme des cordes. Quand ton partenaire de danse, Lord Henry Egerton, te fait tourner, Anthony sent un souvenir revenir.
C'était il y a deux ans. Anthony avait commencé à te faire la cour quelques mois auparavant. Tu le connaissais seulement de nom, mais tu avais toujours été intrigué par lui. Au début, il n'osait pas s'ouvrir, te donnant peu de son temps, mais au fur et à mesure, vous aviez commencé à vous rapprocher. En apprenant à le connaître, tu avais découvert une autre facette de l'homme sérieux croulant sous les responsabilités. Même si tu sentais qu'il ne t'avait pas encore montré sa personne dans son entièreté, tu étais déjà ravie de voir qu'il avait un peu brisé sa coquille avec toi. Par conséquent, tu avais laissé tes sentiments prendre le dessus, t'autorisant à tomber amoureuse d’Anthony Bridgerton. En plus d'être un bon parti, comme le souhaitait ton père, tu sentais au fond de toi que tu serais bien avec lui. Il n'y avait pas de doute. Tu te voyais finir ta vie avec Anthony.
Alors à chaque bal, tu dansais autant que tu pouvais avec lui. Bien sûr, tu dansais avec d'autres hommes. Après tout, tu adorais danser avec n'importe qui, même si le Vicomte était ton partenaire préféré.
Ce soir-là, Anthony t'avait invité pour la première danse de la soirée. Quand les premières notes de Piano Concerto No.20, K466 de Mozart se firent entendre, vous aviez commencé votre danse, ton regard plongé dans le sien comme le sien dans le tien. Si un inconnu avait pu vous voir, il aurait pensé que vous étiez des jeunes mariés tellement vos regards transmettaient de l'amour. Anthony ne cessait d'admirer ta beauté. A chaque fois il pensait que tu ne pouvais pas être plus belle que le jour d'avant et tu lui prouvais le contraire. Un peu plus sous ton charme, il ne put s'empêcher de te partager ses pensées :
- Vous êtes radieuse, Mlle Y/L/N*.
- Merci, Lord Bridgerton. Vous êtes beau également.
- Pas autant que vous. Votre robe est magnifique. Vous êtes réellement à couper le souffle.
- Attention, Monsieur Bridgerton, on pourrait se méprendre et penser que vous voulez demander ma main, rigolas-tu, voulant cacher ton trouble.
- Diriez-vous "oui"? te demanda-t-il, sérieusement.
- Parlez-en d'abord avec mon père, je vous donnerai ma réponse après, répondis-tu avec un sourire.
- Après notre danse, j'irai discuter avec lui.
- Je tiens vraiment à vous, Milord, avouas-tu.
- Tout comme moi, Milady.
A ce moment précis, vous n'aviez qu'une envie, vous embrasser, mais la présence de la bonne société londonienne vous en empêcha. Tu pus seulement sentir ses lèvres sur ta main droite vêtue d'un gant blanc quand la danse fut finie. Il ne quitta pas tes yeux quand il embrassa délicatement ta main.
Mais maintenant, c'est Lord Egerton qui embrasse ta main avec autant de tendresse que lui il y a deux ans. Anthony détourne le regard quand il voit ton visage encore plus rayonnant à ce touché. Anthony est tellement perdu dans ses pensées qu'il ne fait pas attention au groupe de gentlemen se rapprochant de lui, Lord Egerton en fait partie. Il réalise leur présence seulement quand il entend ton partenaire de danse faire une annonce avec un sourire fier :
- Lady Y/L/N* a accepté ma demande en mariage hier.
- Félicitations !
- Vous avez l'air heureux ensemble, déclarent les hommes du cercle.
- Nous allons nous marier dans quelques mois et j'ai hâte. Je n'ai jamais ressenti ça auparavant.
Anthony dit une politesse rapidement avant de reposer ses yeux sur toi. Il te voit au loin parler à d'autres jeunes femmes, un gant en moins pour montrer ta bague de fiançailles. Tu es plongée dans la description de ta demande en mariage, mais tu sens un regard sur toi. Rapidement, tu jettes un regard au loin et trouves Anthony. Tu le vois t'observer avec un regard tristesse. Pendant une seconde, tu as ton cœur qui se serre, mais tu te ressaisis vite et retournes ton attention sur tes amies. Tu essayes de sortir Anthony de ta tête, te rappelant que cette situation est seulement sa faute. Il n'a pas le droit, avec un regard, de te faire te sentir coupable pour avancer quand c'est lui qui a tout ruiné.
Vous étiez fiancés depuis trois mois et toujours aussi amoureux. Votre mariage était prévu dans six mois. Ton esprit était toujours concentré sur les préparatifs. Il y avait seulement quelques courts moments dans la semaine où tu te permettais de faire autres choses. Ce jour-là, tu continuais la broderie que tu avais laissée de côté depuis la demande en mariage d'Anthony. Plantant une nouvelle fois ton aiguille dans le tissu, tu fus interrompue par un des serviteurs, t'annonçant l'arrivée d'Anthony. Tu l'autorisas à le laisser entrer. Ta broderie posée sur la table à côté de toi, tu te levas pour accueillir ton fiancé. Quand il arriva, ton sourire s'agrandit, comme toujours en sa présence.
- Lord Bridgerton, je ne vous attendais pas aujourd'hui.
- Je sais, veuillez m'en excuser, mais j'ai besoin de vous parler, informa-t-il, une expression sérieuse sur le visage, faisant partir ton sourire.
- Bien sûr, quelque chose ne va pas ?
- Pouvons-nous nous asseoir ?
- Je vous en prie, indiquas-tu en montrant le sofa et t'asseyant. Milord, vous m'inquiétez, vous allez bien ? questionnas-tu quand il fut assis à côté de toi.
- Ce que j'ai à vous dire n'est pas facile, Lady Y/L/N*. Je... Je souhaite rompre nos fiançailles.
Suite à son annonce, tu restas silencieuse pendant une seconde, voulant t'assurer d'avoir bien compris. Quand tu réalisas que tu ne t'étais pas trompée, tu ouvris la bouche plusieurs fois, hésitante avant de réussir à articuler :
- Comment ?
- Je ne désire plus me marier. Je voudrais attendre encore quelques années. J'en suis désolé.
- Je ne comprends pas, Monsieur Bridgerton. Ai-je fait quelque chose de mal ? Si c'est le cas, je m'en excuse.
- Vous n'avez rien fait, t'assura Anthony rapidement, te faisant froncer les sourcils.
- Alors pourquoi avez-vous changé d'avis ? Je suis sûre que nous pouvons trouver une solution. Lord Bridgerton, je tiens à vous, je peux très bien attendre quelques années, si c'est vraiment ce que vous souhaitez.
- Je ne peux pas vous demander ceci. Je ne changerai pas d'avis, affirma-t-il en évitant ton regard.
- Pouvez-vous au moins me donner une explication ? imploras-tu les larmes aux yeux.
- Je me suis fait une promesse et si je vous épouse, je sais que je vais la trahir.
- Quelle promesse ?
- De ne pas faire un mariage d'amour, déclara Anthony, te perdant un peu plus.
- Je ne vous comprends pas.
- Je suis le Vicomte Bridgerton donc je dois trouver une femme pouvant faire une parfaite Vicomtesse, comme vous, mais je ne veux pas qu'il y ait de sentiments. Mais, ces dernières semaines… j'ai réalisé que je vous aimais. Je suis navré de vous blesser ainsi.
Il te fallut une seconde avant d'assimiler ses mots. En comprenant ce qu'il disait, tu te levas du sofa, abasourdie. Tu te plaças devant lui, ton trouble visible sur ton visage.
- Êtes-vous réellement en train de me dire que vous m'aimez tellement que vous ne voulez pas vous marier avec moi ? Qu'avez-vous contre les mariages d'amour ? Ne trouvez-vous pas préférable de partager votre vie avec quelqu'un que vous aimez ?
- Je ne souhaite pas cela.
Tu arrêtas de parler, réfléchissant à ce que cette nouvelle information signifierait pour toi. Quand ça te frappa enfin, tu te levas, ta respiration s’accélérant.
- Avez-vous la moindre idée à quel point c'est humiliant ? questionnas-tu, rhétoriquement, une larme coulant sur ta joue. Tout le monde s'attend à notre mariage et personne ne va comprendre, car je ne comprends pas moi-même.
- Je m'occuperai des rumeurs, si c'est votre peur.
- Peu importe ce que vous direz, les personnes penseront toujours que quelque chose ne va pas avec moi, car vous avez décidé de rompre notre engagement, t'exclamas-tu en insistant sur le pronom "vous".
- Je suis terriblement désolé, Lady Y/L/N*.
- Je ne veux pas de vos excuses. Je veux une explication claire, Lord Bridgerton, rétorquas-tu, la frustration de plus en plus forte. Je n'aurais jamais pensé que nos sentiments seraient une raison valide pour arrêter notre relation. Enfin, nos sentiments, je devrais dire mes sentiments. Si vous m’aimiez réellement, vous ne feriez pas cela.
- Je vous assure que je tiens réellement à vous.
- Comment voulez-vous que je vous croie ? Vous vous êtes seulement intéressé à moi, car vous aviez vu en moi cette jeune femme de bonne famille, correspondant à tous ces critères qu'on attend de moi, en tant qu'épouse. On m'a toujours dit que si j'étais polie, attentionnée et à l'écoute, je n'aurais pas de problèmes à trouver un mari et même quand je corresponds à cette norme vide de sens, je ne suis pas assez bien. Qu'ai-je fait pour mériter cela ? pleuras-tu en regardant en l’air.
- Même si vous ne le voulez pas, croyez-moi quand je vous dis que ce n'est pas votre faute. Vous êtes assez bien. Plus que bien, même. La vraie raison pour laquelle je refuse un mariage d'amour, c'est parce que je ne veux pas être la cause de souffrance, précisa-t-il.
- Plus vous vous expliquez, plus je suis perdue.
- A la mort de mon père, ma mère était dévastée, commença-t-il à expliquant en se levant face à toi. Elle était à peine présente pour moi, mes frères et mes sœurs. J'ai dû m'occuper de tout à sa place. Je ne veux pas que la femme que j'épouse vive une situation similaire. Je ne veux pas être la raison d'un futur chagrin.
- Vous ne pouvez pas laisser la mort de votre père vous empêcher d'aimer, dis-tu, perdant un peu plus l'espoir. Même si je ne pourrais jamais le comprendre, je sais que son décès vous a affecté, mais vous ne pouvez pas fermer votre cœur. Anthony Bridgerton, je vous conjure de repenser à votre promesse.
- Je ne le ferai pas, répéta-t-il, sûr de lui.
- Très bien, explosas-tu en lui redonnant sa bague.
- Je suis sincèrement désolé.
- C'en est assez, l'interrompis-tu, en colère. Je ne veux plus rien entendre. Veuillez partir, Lord Bridgerton. S'il vous plaît, raccompagnez-le à la porte, ordonnas-tu au serviteur proche de l'entrée du salon.
Tu ne t'assuras pas qu'il ait entendu ton ordre, trop bouleversée par l'échange. Tu quittas la pièce, te retenant de pleurer encore plus. Tu montas les marches, voulant t'enfermer dans ta chambre. Quand tu arrivas à l'étage, tu entendis Anthony passer le pas de la porte. Quand tu passas celle de ta chambre, tu t'effondras au sol, le cœur brisé. Tu n'arrivais pas à croire que c'était réel. Tu ne t'étais pas préparée à cette discussion en le voyant arriver. Tu repensas à tes mots et à ce que tu aurais pu dire pour le faire changer d'avis. Peut-être que tu aurais pu éviter cette situation si tu avais trouvé les mots justes.
Voulant te reposer de ta danse, tu bois une coupe de champagne en discutant avec ton fiancé. Tu avais rencontré Henry Egerton l'année suivant ta rupture avec Anthony. Vous aviez dansé quelques fois et échangé quelques discussions, mais tu ne sentais pas encore prête à passer à autre chose. Tu étais encore trop occupée à analyser ta relation avec Anthony, cherchant une faille pour le ramener vers toi, mais c'était peine perdue. En comprenant ceci, tu avais accepté de faire ton deuil du futur que tu n'aurais jamais avant de te rapprocher de Lord Egerton à la saison sociale de cette année.
En parlant avec ton fiancé, tu te dis que tu as de la chance de l'avoir trouvé. Ce n'est pas et ne sera jamais Anthony, mais tu sais que tu pourras être heureuse avec lui. Il a réussi à te prouver que tu mérites d'être aimée et tu lui en es éternellement reconnaissant. Rigolant à une de ses blagues dont lui seul a le secret, tu tournes le regard sur ta gauche, sentant quelqu'un se rapprocher. Anthony est devant toi, un visage neutre.
- Lady Y/L/N*, puis-je avoir cette danse, s'il vous plaît ? demande-t-il.
- Je m'excuse, Milord, mais je suis en pleine conversation avec...
- Il n'y a pas de souci, te coupe Henry, avec un sourire, je dois parler avec Lord Featherington, de toute façon. Allez danser, très chère, affirme-t-il en s'éloignant.
- Très bien, je ne vois pas d'autres raisons de refuser votre invitation, Lord Bridgerton, déclares-tu en posant ton verre sur la table derrière toi.
Anthony te présente son bras et tu y places ta main, comme autrefois. Le contact familier te ramène presque deux ans en arrière, mais tu essayes de garder ta concentration. Vous faites la révérence avant de prendre vos places, attendant le son des violons et du piano. Quand le Piano Concerto No.20, K466 commence, tu maudis intérieurement tous les musiciens. Ils ne pouvaient vraiment pas choisir une autre musique ? Mais pour Anthony, cette chanson sonne comme un signe. Même si elle rappelle un moment où vous étiez heureux et ensemble, elle vous appartient encore, malgré la distance.
Anthony et toi commencez à danser, d'abord en silence. Tu oses à peine le regarder, cherchant ton fiancé du regard. Tu le vois parler au patriarche des Featherington, comme il l'avait indiqué. En tournant, tu cherches une autre distraction, alors qu'Anthony garde ses yeux sur toi, appréciant la proximité de ton corps contre le sien. Sûrement la dernière fois avant que tu sois officiellement mariée. Cependant, Anthony ne veut pas que ce dernier échange soit silencieux.
- C'est la chanson sur laquelle nous avions dansé quand je vous ai dit que je voulais vous épouser, te rappelle Anthony.
- Que voulez-vous, Lord Bridgerton ? demandes-tu, sèchement.
- J'ai appris pour vos fiançailles. Je suis heureux pour vous, félicitations. Il a l'air d'être quelqu'un de bien, dit-il, sincère.
- Il l'est, je peux vous l'affirmer. Nous avons longuement parlé et nous sommes sûrs de vouloir les mêmes choses dans la vie.
- Je m'excuse d'avoir rompu notre engagement. Parfois, je me dis que je n'aurais pas dû le faire.
- Arrêtez, s'il vous plaît, le supplies-tu, ne voulant pas en entendre plus. Vous ne pouvez pas me dire ceci, surtout pas maintenant. J'ai passé les deux dernières années de ma vie à chercher une solution pour arranger notre relation. J'ai passé mes journées à l'analyser encore et encore, espérant trouver les signes qui auraient pu me prévenir que vous n’aviez jamais voulu un mariage d’amour, j’ai également cherché par tous les moyens une solution pour vous faire changer d'avis. J'ai passé mes nuits éveillée à essayer de comprendre votre changement de comportement soudain. Maintenant je me demande pourquoi j'ai laissé votre confusion me troubler autant. J'en suis fatiguée, Lord Bridgerton. Tout est fait, il n'y a plus rien à déchiffrer. Il n'y a rien à changer. Il n'y a rien qui aurait pu changer ce qui s'est passé. J'ai réussi à l'accepter et à abandonner, chose que j'ai appris de vous. Au moins, notre relation n’a pas été totalement vaine. Alors, s'il vous plaît, ne me dites pas que vous regrettez votre choix. C'est trop tard, affirmes-tu, le regardant dans les yeux.
- Vous avez raison. C'était inapproprié de ma part. Je suis désolé, déclare-t-il et tu pousses un soupir de soulagement. Cependant, laissez-moi dire que je n'aurais pas dû agir de cette façon. Ce n'était pas honnête de ma part. Je n'aurais pas dû vous laisser espérer. Même si, je l'avoue, je me suis d'abord intéressé à vous, car je savais que vous seriez être une parfaite Vicomtesse, mes sentiments pour vous étaient honnêtes. Je ne l'ai pas montré comme il faut pendant notre relation, mais je tenais vraiment à vous. J'aurais été chanceux de vous avoir à mes côtés. Et je sais que Lord Egerton le sera. Mais, j'espère surtout qu'il saura, lui, reconnaître sa chance. J'espère qu'il saura mieux vous traiter que moi. J'espère qu'il sera toujours proche de vous, qu'il dansera toujours avec vous, j'espère qu'il saura vous donner tout son temps. Tout ce que je n'ai pas pu faire, mais que j'aurais dû. Je vous souhaite le bonheur, Y/N, dit-il, un léger sourire sur le visage.
Tu continues à le regarder, assimilant ses mots. Il te faut quelques secondes avant de pouvoir prendre la parole avec un regard tendre :
- Malgré tout ce qu'on a vécu, sachez que je vous souhaite la même chose. Mais, j'espère surtout que vous saurez trouver la femme qui vous fera vous remettre en question. Celle qui vous fera réaliser que vous méritez une vie d'amour, peu importe votre peur de souffrir. Je n'ai, malheureusement, pas pu être cette femme, mais je sais qu'elle existe. J'espère juste que vous la trouverez avant qu'il ne soit trop tard.
Les musiciens faisant résonner la dernière note, vous arrêtez vos mouvements. Vous continuez à vous regarder, vos regrets et vos remords visibles dans vos yeux. Vous vous saluez, ne brisant pas le contact visuel, enregistrant ce dernier moment dans votre esprit.
- Au revoir, Anthony, murmures-tu avant de t'éloigner totalement de sa vie.
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{Ceci est mon blog secondaire donc je répondrai aux commentaires sous le pseudo @marie-sworld}
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L’enfant des fées (5)
Précédents épisodes
Peu après, la canonnade s’arrêta brutalement. Louis n’entendait que sa respiration. Il sentait le poids des poutres sur ses tibias brisés. Il garda en mémoire le visage de Teaghan, peu avant que la lumière ne s’éteignit ; les yeux exorbités, le crane défoncé par le plafond, et le sang coulant le long du front. Autour de lui, il ne régnait que la poussière, l’obscurité absolue et la mort. Mais, il y avait toujours des coups de pioche contre la terre. Ils brisaient le silence angoissant des ténèbres.
Dans un vain effort, il essaya de remuer les doigts. La douleur fut si terrible, qu’il n’insista pas. Dès lors, il savait qu’il était condamné… condamné à mourir enterré comme un chien perdu au fond d’un puits. Il cria, hurla espérant être entendu. Seuls les morts l’écoutaient. Et les coups continuaient dans le sol.
Petit-à-petit, l’angoisse laissa place à la résignation. Il savait qu’il n’y en avait plus pour longtemps. Et ne pas voir l’état dégradé du plafond au-dessus de sa tête, le rassurait un peu. Dès lors, il attendit que tout s’effondre, que son corps éclate, tel un fruit mûr, sous le poids de la terre et du bois de la charpente. Il attendit patiemment, sagement. Et il attendit avec ses souvenirs. Les pelles continuaient de battre la terre.
Ils étaient partis passer quelques jours dans le vignoble nantais, le temps d’un weekend, dans le domaine familial d’Armande. Ils arrivèrent tôt grâce au chemin de fer, une calèche les attendit à la gare. Habillée d’une élégante robe bleue claire et d’un large chapeau blanc, Armande ouvrait toujours son ombrelle, bien qu’elle ne le trouvât point pratique. Pour la première fois, Louis s’était rasé la moustache. D’habitude, il partait chez le barbier du quartier, mais ce matin, il se rasa lui-même cette moustache qu’il trouvait ridicule. Pourtant, de nombreux hommes portaient la même. A côté du couple, les enfants en tenue du dimanche, restaient debout, attendant sagement de monter dans le carrosse, comme l’appelait Henriette. Jules se démarquait avec son chapeau encerclé d’un long nœud bleu. Il cria, bondit de joie en reconnaissant Martin, un domestique de son grand-père.
Louis, se remémora la traversé des vignes. Elles appartenaient toutes à son beau-père. Des paysans de tous sexes cueillaient les grappes pour les jeter dans un énorme panier accroché au dos d’un gaillard au torse nu. Il suait alors qu’il ne faisait pas vraiment chaud. Chaque coupe de couteau semblait faire le bruit d’une pelle contre la terre.
Les enfants adoraient venir dans cette ferme à l’aspect de château. Ils s’amusaient à courir dans tous les sens, jouant à chat ou à cache-cache. Parfois, des cousins les accompagnaient. D’autre fois, ils suivaient leur grand-mère, fière de ses petits-enfants et impatiente de leur enseigner quelques recettes maison. Louis était toujours reçu comme l’étranger, celui qui avait volé leur fille. On ne lui parlait pas, pas même pour dire bonjour. On le regardait de travers, on avait envie de cracher sur son passage pour conjurer le sort. Mais il se doutait que son métier de policier était la cause de ce mépris.
Toutefois, il était mal vu de ne pas rendre visite à sa belle-famille, une des plus riches de Nantes à Clisson. Leur vin se vendait dans toutes les grands restaurants d’Europe ; de Paris à Vienne, de Londres à Moscou, on enrichissait les parents d’Armande en buvant leur vin blanc.
Après le repas, la famille accompagna les aïeuls dans une longue promenade à contempler les terres et écouter le grand-père dépeindre avec fierté sa fortune. Il n’y avait rien de plus saoulant pour Louis que d’entendre le vieil homme blatérer les mêmes choses en gonflant la poitrine. Le battement de son cœur faisait le même son qu’une pioche creusant un puits.
Les enfants couraient entre les vignes. Ils ne se souciaient pas des nuages gris en train d’envahir lentement le ciel. Si bien qu’ils s’éloignèrent alors que leurs parents commencèrent à faire demi-tour. Leur mère les appela, mais ce fut la pluie qui les rameuta vers la ferme. De grosses gouttes cognèrent le chemin lorsqu’ils arrivèrent enfin sur le perron de la porte. Ils entrèrent accueillis par Martin qui leur apporta une serviette.
- Vous en avez apporté une de trop, mon cher. Déclara la mère d’Armande.
Il n’eut pas le temps répondre. Un cri fit sursauter tout le monde. Armande réalisa que sa dernière fille manquait à l’appel. Dès lors, la famille fut saisie d’angoisse à l’idée de l’avoir laissée au milieu du vignoble sous l’averse. Aussitôt Louis sortit, rassurant en même temps son épouse. Il devinait où elle pouvait se cacher. Il courut sur la route déjà détrempée. La pluie chaude collait sa chemise sur sa peau. Il courut jusqu’à une grange. Il espéra que Blandine s’était réfugiée dedans et, en effet, elle attendait sagement que le beau temps revienne. Elle restait assise sur la paille, souriant à son père, amusée de le voir essoufflé. Les gouttes tombant sur le toit, imitèrent le bruit des coups de pioche dans une mine.
- La gymnastique n’est plus de mon âge, dit-il.
Il s’assit à côté de sa fille. Il soufflait toujours comme un bœuf, cherchant à retrouver un rythme normal. Son cœur battait si fort qu’il crut l’entendre exploser. Il proposa d’attendre la fin de l’averse. Blandine rit, heureuse de rester dans cette grange qu’elle adorait. Durant ces séjours, elle partait toujours dans cet endroit. Pour une fillette, c’était une caverne d’Ali Baba. Elle voulait grandir pour enfin monter l’échelle et découvrir l’étage. Par ce côté aventureux, elle ressemblait énormément à son père.
Les bruits dans la terre résonnèrent de plus en plus fort. Louis préféra se perdre dans ce souvenir lointain. C’était il y a deux ans. Blandine avait à peine trois ans. Cependant, elle paraissait en avoir plus. Il se rappela cette attente avec sa fillette. Elle riait, lui parlait de ses frères et sœurs. Elle posait pleins de questions. C’était surement ce jour qu’elle devint sa préférée. Parce qu’il n’avait jamais discuté avec les deux autres. L’enfant est enfant, l’adulte reste l’adulte. C’est au rôle de la nourrice et de la mère de s’occuper des enfants. De plus, le père doit montrer de la fermeté, jamais de sympathie. Mais ce jour, il accompagna sa fille dans ses rires.
Il aurait voulu revivre ce moment. Poser sa tête sur les genoux de sa fille et lui parler plus profondément. Dire qu’il était fier d’elle et de ses frères. Dire qu’il aimerait la voir grandir, la protéger, et la voir vieillir. Il détesterait son mari, mais il serait fier d’entrer dans l’église pour son mariage. Il serait heureux de regarder ses petits-enfants jouer autours de lui et d’Armande. Ils auraient son rire ou son sourire. Le plus grand aurait son regard.
Pendant que Louis rêvait, une voix s’éleva de nulle part. Il ouvrit les yeux mais ne constata que le noir et la mort autours de lui. Il inspira fortement, gardant en image sa fille caressant sa tête sur ses genoux. Il ne savait plus s’il avait imaginé où s’il avait réellement vécu cette scène. Il crût sentir une petite main frôler ses cheveux, une main d’enfant. Ses jambes ne bougeaient toujours pas. Par contre, il sentit le sol vibrer. La voix retentit de nouveau.
- Je suis là ! cria-t-il, à l’aide !
Il voulait revivre ce moment, retrouver Blandine dans la grange. Il voulait revoir son fil. Il voulait entendre le son de sa voix. Jules devait être grand et fort maintenant. Il voulait embrasser Henriette, celle qu’il a toujours délaissée. Parce qu’elle était l’ainée, parce qu’elle était une fille alors qu’il voulait un garçon. Il voulait sentir le parfum d’Armande, danser avec elle. Et lui dire qu’il l’aime plutôt que de l’écrire. Il voulait retourner chez lui, mais pour cela, il devait vivre.
Alors, il se mit de nouveau à crier, espérant être entendu. Il souhaitait que les coups de pioche soient vrais. Et s’il s’agissait des allemands, il pria leurs âmes d’avoir de la compassion pour un père de famille. Il cria, hurla. Les coups s’approchèrent de plus en plus. Puis plus rien !
Le sergent demeura dans le silence. Sa respiration devint de plus en plus difficile. Il ne savait pas si le plafond menaçait de tomber. Il se rappela de sa fille. Il se souvint de la grange, la pluie qui tombait lorsque soudain :
- Il y a quelqu’un ?
La voix était française. Louis était sauvé.
Alex@r60 – juillet 2023
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