Tumgik
#j'espère que vous avez aimé
lilias42 · 11 months
Text
Acte 5 de “Tout ce que je veux, c'est te revoir…”
Bon, retour à l'histoire des Fraldarius avec la suite de cette histoire... et retour du running gag "j'avais dis dans le dernier billet que le prochain serait le dernier mais en fait non", il va encore avoir un autre billet car cette histoire fait maintenant 600 pages alors qu'elle était censée être courte. Je sais, moi aussi.
Enfin bon ! On reprend juste après les derniers évènements du dernier billet : Lambert est de plus en plus isolé avec Gautier qui s'allie à Sreng et fait sécession, Ivy et Oswald qui prennent les choses en main de leur côté tout comme Ludovic et les habitants de Fhirdiad, Lambert qui a ce qu'il mérite, et Félix qui a enfin retrouvé Rodrigue et Alix.
Comme toujours avec cette histoire, fans de Lambert, Rufus et Gustave, ou ceux qui voient le Royaume comme un gros bloc monolithique avec tout le monde qui suit le roi sans réfléchir, passez votre chemin. Ils sont très clairement antagonistes dans cette histoire, et Lambert va tomber encore plus bas dans la partie 6 alors, ne vous faites pas de mal en lisant cette histoire. Il y en a plein d'autres qui vous correspondront surement mieux ailleurs sur Tumblr et AO3.
Et comme toujours, coucou à @ladyniniane ! J'espère que ça te plaira !
Lachésis fit craquer sa nuque sur sa monture, épuisée alors que le soleil se couchait derrière Fhirdiad. Sa sœur et elle avaient passé des semaines à courir dans tout le domaine royal pour récupérer les ordinaires, et elles avaient dû arracher les sommes réclamées pièce de cuivre par pièce de cuivre !
« Déesse ! Quelle plaie ! Heureusement que nous étions en mission pour les Blaiddyd sinon, le nom de notre famille aurait été terni à jamais… encore plus chez les nobles qui ne veulent même pas mettre la main à la bourse… râla Thècle, épuisée. Et Déesse ! Quelle mauvaise gestion !
– Nous sommes d’accord, nos petits gèrent mieux leur argent de poche, marmonna Lachésis. Pour les baillis qui ont été nommé par Sa Majesté Ludovic ou quand Nitsa était encore là pour éviter les catastrophes, pas de problème, c’était propre, mais pour ceux nommés par Lambert, je préfère éviter de commenter de peur d’être impolie.
– C’était gérer avec les pieds oui… Nitsa serait morte de honte… comment elle a pu tomber amoureuse d’un homme pareil ? Maman n’avait pas tort quand elle disait qu’avoir donné Héléna en mariage à Lambert, c’était comme donner de la confiture à un cochon, sauf que le cochon à l’excuse d’être un cochon pour mettre ce qui est bon pour lui partout, pas Lambert.
– Fallait surtout demander à Myrina vu qu’elles ne se cachaient rien toutes les deux mais, si j’ai bien compris de mon côté, c’était surtout grâce à l’année à Garreg Mach où ils se sont beaucoup rapprochés… et puis, sur la fin, ça sentait mauvais leur mariage, même elle commençait à se détacher… elle lui a même interdit d’entrer dans sa chambre alors qu’elle accouchait, c’est Myrina qui lui a tenu les mains avec Effrosyni alors qu’elle mettait son fils au monde, ça veut tout dire…
– Ça aurait été mieux si Sa Majesté Ludovic avait pu mettre en œuvre son idée de monarchie élective… et si Nitsa avait eu le temps d’envoyer les papiers du divorce dans sa tête d’ahuri…
– Tout ce qu’il méritait si tu veux mon avis. Il l’a épuisée jusqu’à l’os, » gronda l’ainée, les mauvais souvenirs et la peur pour sa sœur refaisant surface, la voyant perdre des forces de jour en jour, comme une chandelle n’ayant plus ni cire ni mèche. « Nitsa avait toujours eu la santé de maman… je m’en souviens, elle n’était jamais tombée malade… pas une seule fois… mais quand elle s’est mariée… je ne sais pas, c’était comme si Lambert était un vampire et lui aspirait la moindre goutte de sang et de vitalité… elle était épuisée et affaiblie tout le temps… enfin, normal quand elle avait son travail et celui de son mari à faire car, elle devait toujours passé derrière lui…
– Quand on sait ça, ce n’est pas étonnant qu’elle ait eu autant de mal à mettre le petit prince au monde… elle qui voulait tant avoir un enfant…
– Et encore, il ne serait peut-être jamais né si Dame Félicia n’avait pas été aussi prévenante avec elle et Sa Majesté Ludovic aussi soucieux d’elle… enfin, on en reparlera plus tard, on doit retourner supporter « l’ahuri en chef » directement à Fhirdiad… les ramena à la réalité Lachésis.
– Je m’étais contenté de l’appeler « l’ahuri » mais, ça lui va bien aussi. En tout cas, je plains Rodrigue qui a dû le supporter tout ce temps ! Surtout qu’on ne peut pas l’ouvrir avec Rufus ! Râla Thècle.
– S’il croit que je vais la boucler sur la gestion de leurs comptes, il se met le doigt dans l’œil jusqu’au coude et continue à s’enfoncer, grogna l’ainée de la fratrie. C’est un gosse immature et irresponsable mais, il va falloir le faire grandir à coup de pied au cul à ce stade. Autant l’un que l’autre.
– Si toi, tu commences à devenir grossière, c’est qu’ils sont fichus. Enfin bon, je propose qu’on passe à la taverne avant d’aller au palais, histoire de voir comment les choses ont évoluées à la capitale. En plus, il est tard, les enfants se couchent tôt.
– Hum… tu as raison, faisons ça, » accepta Lachésis. « Les citoyens de Fhirdiad seront surement plus bavards loin des larbins de Rufus. »
Les deux sœurs se turent en entrant à la capitale, se faisant discrètes, même si les gardes des portes les reconnurent tout de suite. Cependant, ils acceptèrent très vite de ne pas les annoncer – même trop vite – et les encouragèrent plutôt à aller à la taverne dit du père Mercier ce soir.
« On vous jure ! Si vous voulez avoir l’avis de la personne la plus lucide de tout Fhirdiad sur la situation du Royaume, il faut aller là-bas ! Lui assura le soldat avec un gros accent de Dominic, surement un qui avait été levé en masse par Rufus. Vous ne serez pas déçues, croyez-nous ! Et il faut que vous entendiez tout ce qui s’est passé ici ! C’est juste à peine croyable ! »
Les deux sœurs esquivèrent son insistance en jurant qu’elles allaient y réfléchir, même si elles se méfiaient de cette proposition. Vu les antécédents de Rufus, cela pouvait être un guet-apens… mais d’un autre côté, cette taverne était très fréquentée par des soldats de Fraldarius et de Charon, et le propriétaire serait fiable alors, peut-être… elles iraient peut-être avec quelques gardes… surtout qu’elles savaient se défendre, en particulier dans des espaces confinés… et quand elles virent l’état de la capitale, elles se dirent qu’elles n’avaient rien à perdre à connaitre l’avis des habitants…
Les rues étaient sombres et mal entretenues, avec des ordures qui bouchaient les égouts et transformaient la chaussée en mare de boue putride. Les seules personnes bien nourries étaient les rats festoyant au milieu des immondices, et les ratiers chargés de les chasser, même s’ils manquaient très clairement de chat pour tous les exterminer. Sinon, les faces étaient émaciées, creusées par la faim et la fatigue, les yeux vides d’usure après tout ce qui s’était passé ces dernières semaines… le terrain parfait pour le développement d’une épidémie…
« Un seul malade… un seul… et la peste est de retour… c’est pas vrai ! Enragea Lachésis. On avait dit et répété que la somme qu’on laissait à l’entretien des égouts ne devaient pas être utiliser pour autre chose ! On court à la catastrophe ! »
Les deux sœurs passèrent sur la place principale pour voir si rien n’y était placardé, n’espérant même plus que Rufus n’y fasse pas étalage de sa cruauté et de son incompétence. Une grande affiche s’y trouvait bien, juste à côté du gibet où se balançait un corps balloté par le vent, se décomposant déjà. Il aurait dû être dans une fosse commune depuis longtemps… même pas par compassion envers un criminel (et les Charon seraient curieuses de savoir si ce crime en était un aux yeux de la loi ou de ceux de Rufus), juste par mesure de salubrité public histoire que la pourriture ne contamine par l’eau ou les personnes qui passaient à côté… et à la lecture du placard, cela les étonna presque qu’il n’y ait pas plus de monde pendu au gibet… Déesse, Rufus était allé jusqu’à ressortir la réglementation de Clovis ! Heureusement que les juges ne devaient pas la respecter sinon, ce serait une véritable boucherie ! Comment Rodrigue avait pu laisser passer ça ?! Enfin, connaissant Rufus… et si…
« On y va ce soir ? Proposa Thècle.
– Ça me semble plus que nécessaire… » marmonna Lachésis.
S’équipant tout de même d’une armure sous leur manteau et leurs habits de fonctionnaires, ainsi que de gantelets rapides à mettre, les deux sœurs se rendirent à la taverne du père Mercier en compagnie de quelques gardes de confiance. L’établissement était plein à craquer, toutes les tables discutant vivement entre elles, même si le ton se fit plus bas quand leur groupe passaient à portée de voix. Le soldat de la porte les vit passer depuis sa table, sauta de sa chaise et les conduisit au bar où se trouvait le patron de l’établissement, le hélant sans hésiter.
« Eh ! Mercier ! Elles sont là !
– Ah ! Bonsoir mes dames. Je vous sers un verre d’eau ? Leur proposa-t-il simplement. Je n’ai plus rien d’autre.
– Bonsoir, et ne vous en faites pas pour cela, lui assura Lachésis. On aimerait surtout vous poser des questions sur ce qui a bien pu se passer à Fhirdiad, et ce n’est surement pas Rufus qui nous dira la vérité alors, on aimerait avoir la version des citoyens de la ville.
– Elle pourrait parler à l’albinois, il sait de quoi il parle. Et c’est les Charon, elles crachaient aussi sur le Lambert et le connard.
– Hum… je sais pas, il a pas mal toussé… et imagine si…
– Non, c’est bon, ne t’en fais pas, ça ira. C’est juste mes poumons qui sont fragiles… et l’air ambiant en ville ne m’aide pas…
Un jeune homme d’un peu moins de vingt ans sortit de l’arrière-boutique, enveloppé dans une couverture mais, la main qui la tenait était couverte d’encre. Au nom de la Déesse… c’était fou à quel point il pouvait ressembler à Sa Majesté Ludovic dans sa jeunesse ! Lachésis était petite à l’époque du coup d’État contre le roi Clovis mais, elle était sûr que ce jeune albinois aurait pu se faire passer pour le roi à cette époque… le père Mercier se tourna vers lui, le soutenant doucement, prévenant avec inquiétude.
– Fait tout de même attention Ludovic, l’air de Fhirdiad semble être encore plus mauvais pour toi que pour nous autres… ça doit te changer de celui d’Albinéa…
– Oui, il est bien meilleur là où je vivais avant mais, ne t’en fais pas, je peux tenir. On m’a prévenu de votre arrivée, j’imagine que vous êtes les filles de la matriarche Catherine Charon, Lachésis et Thècle, les salua-t-il. Ludovic Hange, albinois et scribe au palais, on m’a beaucoup parlé de vous.
– Enchanté Citoyen Hange, le salua Lachésis à la manière charonis. Nous aurions des questions à vous poser sur l’état de la capitale. Que s’est-il passé pendant notre absence ? On se croirait de retour à l’époque de Clovis ou d’avant les grands travaux d’assainissement.
– Une décision de Rufus, les sommes allouées à l’entretien des canalisations et des égouts ont été redirigés vers le maintien de l’unité du Royaume, et la future expédition punitive contre Gautier… déclara-t-il en s’asseyant face aux deux sœurs, ajoutant en les voyant écarquiller les yeux, elles n’avaient pas dû avoir de nouvelles de la capitale pendant plusieurs semaines. Enfin, commençons par le commencement avec ce qui s’est passé après votre départ…
Ludovic et les fhirdiadais résumèrent les derniers évènements aux charonis, détaillant seulement les éléments les plus importants. À la fin de leur histoire, Thècle passa sa main sur son visage, fatiguée rien qu’à entendre tout ceci…
– Déesse… quelle honte pour Faerghus… il est tellement incompétent qu’il vaut mieux être transformé en loup que de le subir ! Et pauvre Félix quand il va voir son père et son oncle arrivés devant lui en étant des loups ! Et ces méthodes de gouvernement… c’est pas le fils de son père, mais de son grand-père… autant pour Rufus que pour Lambert… c’est une honte d’aussi mal géré ses caisses et son Royaume… qu’est-ce que je dis, il ne doit même pas savoir ce qu’il se passe dans son propre palais alors, dans tout Faerghus, n’y pensons même pas ! Tu m’étonnes que les Gautier se soient barrés chez les srengs ! Et bien en plus si le nouveau margrave a accepté d’espionner le roi pour que leurs émissaires puissent mesurer à quel point il est incompétent ! Et pour qu’il admette nous avoir espionner, il ne doit plus en avoir rien à cirer de Faerghus ! On se retrouve avec le garde-frontière du côté ennemi à cause des conneries de Lambert et Rufus !
– Nous sommes bien d’accord… déclara Ludovic en hochant la tête. J’imagine que la situation dans le domaine royal n’est guère plus reluisante.
– Non… pour résumer rapidement, il n’a plus un sou en caisse dans une bonne partie du domaine royal et on a dû arracher la moindre pièce de cuivre à tous les commerçants et bourgeois vu que Rufus veut des espèces sonnantes et trébuchantes, pas des paiements en nature, sauf si c’est des fournitures militaires. Au moins, on a pu épargner les paysans les plus pauvres qui n’ont pratiquement jamais vu une pièce de monnaie de leur vie mais sinon, on a fait raquer tout le monde, du bailli au commerçant en passant par le curé. Autant vous dire que cela a encore plus sali l’image du roi…
– Et encore Lachésis, ça, c’est pour les ordinaires, image ce que cela aurait été si on avait dû récolter les extraordinaires dans tout le Royaume, lui rappela sa sœur. Là, c’est bon, tout le monde ressortait encore plus les fourches qu’ils ne le font déjà avec les levées en masses d’hommes et de vivres, et on reviendrait à l’époque des Grandes Jacqueries d’avant l’indépendance. On se dirige vers ça de toute manière… enfin, on devait déjà engueuler Lambert mais, on va encore plus lui arracher le crâne…
– Il invoque Héléna pour nous dire de nous calmer comme il l’aurait fait avec Sylvain, je ne réponds plus de rien… ajouta l’ainée. Tenter de le convaincre de parler en invoquant son ami Félix, alors que c’est Lambert lui-même qui a mis la famille de ce gosse en miettes. On va avoir du boulot pour relever le niveau de la capitale… au moins pour éviter que notre sœur soit la femme de l’homme qui a mené Faerghus à sa perte, il a déjà assez souillé sa tombe comme ça…
– Hum… si je puis me permettre, je crois que ce n’est pas la peine de vous démenez pour cette raison…
Les deux sœurs se tournèrent vers une femme de l’âge de Lachésis, proche de la cinquantaine, accoudée au bar alors qu’elle serrait son verre dans ses mains. Un jeune bucheron blessé à la tête s’approcha d’elle, posant sa main sur ses épaules.
– Que veux-tu dire maman ? Tu sais quelque chose en rapport avec la reine ?
– La question, c’est plutôt quelle reine… la femme tourna la tête vers les sœurs et Ludovic, l’air sombre et blasé quand elle annonça. Le roi s’est remarié, ça fait déjà des années à présent. Le petit prince avait trois ans quand c’est arrivé…
Lachésis et Thècle n’en crurent pas leurs oreilles quand cette femme leur annonça une nouvelle pareille. Non… c’était pas possible… leur famille gérait tous les papiers et l’administration du Royaume, ils étaient les gratte-papiers de la couronne depuis des générations ! Ils auraient forcément dû voir les papiers d’un maudit mariage ! Même morganatique !
– Quoi… ne put s’empêcher de lâcher la cadette avant de demander. Comment pourriez-vous être au courant ? Nous n’avons jamais rien vu qui allait dans ce sens ! Avez-vous une preuve de ce que vous avancez ?
– C’est parce que la Dame numéro deux vivait en recluse, même si elle apparaissait parfois officiellement. C’était Patricia Arnim, la « sœur » de Cornélia Arnim, marmonna-t-elle en faisant des guillemets autour du mot sœur. Hein… connerie, elles sont aussi sœurs que vous et moi. Tout ce qui existe dans le Royaume sur cette femme est faux. Je suis bien placé pour le savoir, j’étais une de ses servantes, et croyez-moi que si la paye était suffisamment généreuse pour que je ne révèle jamais son secret, vu le tempérament de chien de cette femme et comment le roi mène sa barque en ce moment, j’en ai plus rien à cirer. Et comme preuve, je dirais simplement qu’une nourrice normale n’a pas un carrosse attitré pour un voyage dans un autre pays, alors que toutes les autres s’entassent avec les autres domestiques. Elle avait eu le droit à une voiture pour elle toute seule car, elle a tanné le roi pour en avoir une afin de voyager avec plus de confort, et en privé, elle disait que c’était également pour donner plus de travail aux ducs de Fraldarius. Sa Majesté les avait mis dans la confidence pour avoir leur avis apparemment. Ils étaient contre mais, Lambert ne les a pas écoutés, évidemment… Patricia et eux ne s’appréciaient pas de base d’ailleurs, avant que cela tourne à la guerre ouverte après ce qui est arrivé au louveteau de la famille, quand il a failli être brûlé vif par Volkhard von Arundel.
– Patricia Arnim… marmonna Lachésis, pesant les arguments et informations qui arrivaient en essayant de ne pas se laisser influencer par son propre ressenti envers Lambert. Je voie de qui il s’agit et certes, le mariage avec une adrestienne de rang aussi modeste aurait pu être l’objet de contestation. Nous n’ignorons pas que nombre de grandes familles ont voulu succéder à notre sœur mais, malgré cette différence de rang, le mariage avec une roturière n’est pas interdit pour le roi. Cela aurait été d’un ridicule consommé quand le roi Loog lui-même était un fils bâtard ayant passé tout le début de sa vie à gagner sa pitance comme laboureur, et quand la quasi-totalité de ses proches alliés étaient également des enfants illégitimes ayant vécu comme des roturiers et étaient mariés à des roturiers. Même si nos relations avec l’Empire sont tendues, si cette Patricia Arnim a coupé tous les liens avec Adrestia et qu’elle a épousé tous les intérêts de Faerghus, il n’y aurait eu aucun problème à ce qu’elle convole avec le roi, surtout si elle est roturière, ce n’est pas la haute noblesse adrestienne, et Cornélia a rendu de grands services à la capitale et a une position considérable. Ils se seraient mariés de manière morganatique, certes, au moins pour éviter des problèmes de succession avec notre neveu mais, Dimitri restera toujours le premier-né du roi, avec un emblème et sa mère est la fille de la quatrième famille du Royaume en importance, et à octante-quatorze voix près, ça aurait été notre ancêtre Sybille qui aurait été élu reine à l’indépendance. Sa position d’héritier est donc complètement inattaquable, sauf si la nouvelle reine était une fille d’empereur, de roi ou de shah, ce qui ne semble pas être le cas, et qu’elle aurait eu un enfant avec un emblème majeur, ce qui n’est jamais arrivé, la Déesse soit louée. Quel intérêt a autant caché cette union ? Nous l’aurions certes mal pris sur le coup dans notre famille mais, la période de deuil était passé et si elle était digne de succéder à Héléna, nous l’aurions accepté, même si je doute qu’elle le soit si même les ducs de Fraldarius ne l’appréciaient guère. Et vous avez également dit qu’elle n’était pas vraiment la sœur de Cornélia Arnim, c’est exact ?
– Oui Dame Charon, elle prétend être sa sœur pour se cacher, et c’est justement là le problème, c’est qu’elle est une membre de la famille impériale d’Adrestia mais, pas par le sang, par alliance. C’était une ancienne concubine de l’empereur Ionius, Anselma von Arundel, ainsi que la mère d’une de ses héritières, la princesse Eldegard qui a l’emblème de Seiros. Cependant, Anselma a fui l’Empire suite à une crise et des tensions au sein du harem et elle est venue se réfugier auprès du roi. Ils se sont rapprochés et sont tombés amoureux l’un de l’autre, ce qui les a amenés à convoler ensemble. C’est pour ça qu’elle a défendu Arundel bec et ongle alors qu’il a failli brûlé vif un gosse, d’un parce que c’était son grand frère, et de deux parce qu’il avait ramené dans ses bagages la fille d’Anselma, Eldegard, pour la protéger d’une autre période de crise à Embarr et la ramener à sa mère. Sans cette sombre affaire, Sa Majesté aurait même souhaité qu’Eldegard reste indéfiniment à Fhirdiad pour faire plaisir à sa femme.
– Attendez… la coupa Thècle. Vous voulez dire que non seulement, Lambert est marié à une épouse de l’empereur et donc, c’est de la bigamie vue que ses concubines sont attachées à lui à vie, qui est aussi la mère d’une potentielle future impératrice… cinquième dans l’ordre de succession mais quand même, c’est tout à fait possible qu’elle le devienne étant donné que les empoisonnement sont monnaie courante dans le harem… qu’elle est la sœur d’un noble frontalier qui a été exilé à vie de Faerghus après une tentative d’homicide sur mineur avec circonstances aggravantes… qu’elle est ici sous un faux nom et avec de faux papiers, ce qui est complètement illégal… le tout pour la cacher de son premier mari, ce qui est compréhensible aux demeurants vu ce qu’elle a dû vivre mais, on n’aurait jamais pu nier être au courant de sa situation si sa véritable identité était découverte un jour, ce qui aurait été un casus belli de premier choix pour Ionius, encore plus si Lambert refusait de la renvoyer de l’autre côté de la frontière… et en plus, il voulait garder la propre fille d’Ionius, qui a les dents longues comme pas possible, qui ne nous a pas attaqué à son arrivée sur le trône uniquement parce qu’il avait peur de Sa Majesté Ludovic même s’il avait la tuberculose et a dû très vite faire face à de grandes oppositions en interne, dans le Royaume ? Dans son propre palais auprès de son fils qui plus est alors, si Ionius décide dans sa grande mansuétude de ne pas nous attaquer pour retenir sa fille en otage, il se contente de l’enlever, il pourrait enlever le fils de notre sœur au passage ? C’est bien ce que vous venez de nous dire ?!
– Oui, même si tout est au passé, elle est morte dans la Tragédie de Duscur… enfin, c’était bien mérité, elle poussait le roi à y aller… elle s’était éloignée de lui après qu’il ait exilé son frère pour tentative de meurtre…
– …Après qu’on lui ait mis la décision de justice dans les mains pour le forcer à prendre une décision vous voulez dire, la corrigea Lachésis en maugréant, comprenant mieux le bourbier où c’était enfoncé Lambert quatre ans auparavant. On ne l’aurait pas forcé à se décider, il serait encore en train de réfléchir si oui ou non, il fallait exiler un homme qui a tenté de tuer un gosse de neuf ans sans raison. Enfin, si c’était le frère de sa… de sa femme… pas étonnant qu’il ait autant hésité à le bannir, même si c’était une sentence extrêmement clémente pour son cas… nous qui croyons que c’était à cause de son habitude de détester mettre les mains dans la boue et se les salir, c’est encore plus pathétique qu’on ne le pensait… il délègue toujours ce genre de jugement, que ce soit aux Fraldarius ou nous… Déesse, Nitsa doit se retourner dans sa tombe ! Arundel mettait même son fils en danger ! Il aurait très bien pu recommencer et brûler vif Dimitri après avoir été à deux doigts de tuer Félix ! Tout ça pour les beaux yeux de cette femme ?! Et c’était quoi son rapport avec Duscur qu’on en finisse ?
– Et bien, elle a dit qu’elle voulait le suivre en Duscur, et que ce serait l’occasion de renouer ensemble pendant ce voyage… si j’ai bien compris, le seigneur Alix est venu lui voler dans les plumes à ce sujet et le seigneur Rodrigue a aussi tenté de le faire revenir à la raison concernant Son Altesse mais, rien à faire, le roi n’écoutait que Patricia et son frère… alors…
Le bruit du poing de Thècle qui s’abattit sur le comptoir la fit taire, son visage furieux éclairé par son emblème. Elle était hors d’elle… tout… tout…
– Tous ces morts… ma grande sœur… mon petit frère… ma propre fille… mes neveux et nièces, mes beaux-frères et belles-sœurs… nos citoyens… tous ces gens… tous ces gens sont morts parce que cet abruti voulait absolument renouer avec sa femme, femme qui est un risque pour la sécurité nationale au passage, qui a eu le culot de le pousser dans cette direction parce qu’elle n’était pas contente car pour une fois, Lambert a agi en roi et banni quelqu’un de dangereux et encore, uniquement parce que notre famille était sur ces talons avec une Myrina furieuse derrière l’épaule ! C’est ce que vous êtes en train de nous dire ?!
La servante hocha la tête, provoquant encore plus l’ire des deux sœurs. Se reprenant un peu, Lachésis demanda, même si elle ne se faisait guère d’illusion là-dessus, histoire de voir à quel point Lambert avait craché sur tout, autant son rôle de roi, de père et de mari.
– Au moins… est-ce qu’au moins, elle était digne d’Héléna ? Lambert, je n’en parle pas, seule une truie est digne de lui, et se serait insulté la truie de lui imposer un mari pareil mais, est-ce qu’au moins humainement, cette Patricia ou Anselma était digne de la grande reine qu’était ma sœur ? Est-ce qu’elle était digne d’être la belle-mère du fils d’Héléna et a été une aussi bonne mère pour lui que notre Nitsa l’aurait été ?
– Hélas non… au début, ça allait mais, je pense qu’elle était un peu intimidée et encore choquée par ce qu’elle avait fui, elle tentait même de se lier d’amitié avec les Fraldarius. Mais assez vite, sa vraie nature est ressortie… elle était capricieuse, il fallait sans cesse que tout ce qu’on faisait corresponde exactement à ce qu’elle voulait, même si c’était impossible à réaliser. Ça devait être pile ce à quoi elle pensait et ce qu’elle voulait sinon, elle n’acceptait rien, que ce soit sa nourriture, ses vêtements, la décoration de ses appartements ou même la réalité. Les Fraldarius lui disaient souvent non et la ramenaient sur le sol de Fodlan alors, elle ne les aimait pas, point. Et elle était aussi extrêmement jalouse, même des gens qui ne peuvent plus rien lui prendre… je pense que c’est une habitude qu’elle a pris au harem impérial mais, elle ne supportait pas que Lambert parle de sa première femme devant elle, même si c’était au prince, alors que Sa Majesté Héléna est sa mère. Un autre point de friction avec les Fraldarius d’ailleurs, ils ne se gênaient pas pour parler de Dame Héléna devant elle. Donc non, elle n’était pas digne de lui succéder à la place d’épouse de roi… c’est pour ça que j’en ai plus rien à secouer de balancer tout ça, j’ai été chassé sans salaire maintenant qu’elle est morte, c’était une patronne horrible et Lambert fait n’importe quoi, il ne mérite pas que je me taise !
– Cette femme est jalouse au point d’envier une morte ? Et au point d’interdire à son mari de parler à son enfant de sa mère qui ne l’a jamais connu ? Mais achevez-nous à ce stade d’indignité !
– J’ignorais également tout cela, marmonna Ludovic après Thècle, attentif sans rien laisser transparaitre. Enfin, en cherchant un peu, on devrait retrouver ce qui est lié à cette Patricia, Anselma ou peu importe. En tout cas, Lambert prouve une fois de plus qu’il pense plus à ce qu’il veut lui et son entourage proche, qu’à ce dont le Royaume a besoin. Il y a eu un conflit avec l’Empire autour du plateau de Brionnic, n’est-ce pas ? Alors, autant éviter un maximum de donner plus d’argument à Ionius pour convaincre son ministre des armées de nous attaquer, encore moins pour « sauver » une personne ou deux au détriment de milliers d’autres.
– Dans les deux cas, il aura de nos nouvelles dès demain, croyez-nous sur parole, menacèrent les deux sœurs, furieuses et humiliées.
Elles descendirent d’une traite leur verre qu’avait rerempli le père Mercier pour se calmer, puis les remercièrent pour ses informations et de repartirent, elles avaient une longue nuit qui les attendaient, surtout qu’elles avaient bien l’intention de prendre Lambert au saut du lit. L’élément crucial d’une embuscade était l’effet de surprise qui empêchait de s’organiser correctement et de se défendre, faute de renseignement ou de préparation insuffisante.
Cette caricature de roi avait envoyé leur famille à la mort dans une embuscade à cause de sa stupidité, il méritait de se prendre un retour de bâton équivalent.
De son côté, le père Mercier regarda Ludovic poser encore quelques questions à la femme, tout en prenant des nouvelles du bucheron avec qui il avait combattu au marché noir, Tristan, même s’il lui passa une tisane avec un peu de menthe forte trouvée à l’orée de la forêt. L’odeur fraiche lui débouchait bien les bronches, même si c’était mettre un bandage sur une jambe de bois. L’air même de la ville attaquait ses poumons sans pitié, comme s’il les pourrissait à l’intérieur même de son corps… ça devait le faire souffrir horriblement mais, Ludovic ne montrait rien et gardait la tête haute malgré tout…
« Le drame de Ludovic, c’est d’avoir un corps aussi fragile et d’être mal-né malgré son emblème… songea-t-il en lui donnant le breuvage tout chaud. Il serait né dans une grande famille, il aurait fait un excellent seigneur, même s’il aurait eu un règne court si sa santé ne suivait pas… »
Le jeune homme prit le verre en le remerciant, le tavernier décryptant son sourire si discret mais reconnaissant.
« Je vous rendrais votre gentillesse, je vous le promets, » souffla Ludovic une fois ses bronches dégagées.
Le connaissant, le père Mercier n’en doutait pas une seconde.
*
Quand il ouvrit les yeux, Lambert mit un peu de temps à comprendre où et quand il était. Il faisait sombre, la nuit ne devrait pas tarder à tomber et des nuages recouvraient le soleil, plongeant le ciel dans l’obscurité profonde et dans un torrent de pluie démentielle… on se croirait en plein milieu de la nuit…
Une petite flamme s’alluma dans le coin de ses yeux, éclairant tout son monde alors qu’il se rendait compte qu’il était dans la grande salle de Garreg Mach… Héléna la tenait dans sa main, illuminant une table où était assis Rodrigue et Alix côte à côte en se partageant un livre, faisant face à sa première épouse et Félicia ainsi qu’Ivy qui était assis à l’envers sur une chaise, les bras croisé sur le dossier et la tête dessus… c’était à la fois si proche et si lointain… à peine vingt ans pourtant et tant de chose avait changé… Lambert se souvient alors de ce jour-là, à l’académie des officiers… un orage de tous les diables les avaient obligés à passer leur dimanche à l’intérieur alors, en se perdant dans la bibliothèque en cherchant de quoi lire pour passer le temps, les jumeaux étaient tombés sur un recueil de chant de Faerghus. Ils s’étaient donc amusés à chanter les différents airs du recueil une bonne partie de l’après-midi pour tout le monde, une petite troupe finissant par se former autour d’eux pour les écouter. Leur voix avait toujours été magnifique…
La lumière de la flamme éclaira le visage halé d’Héléna, faisant revivre ses yeux d’aigue-marine et sa longue chevelure blonde tressée, notant avec nostalgie et regret qu’elle partageait sa crinière indomptable avec leur fils… son visage était à la fois si semblable et si différent de celui de Patricia… comme éclairé par une chandelle, on ne pouvait que voir son calme, son sérieux et son doux sourire à la fois si rare et si précieux… elle rayonnait force et de santé dans chaque morceau de son être…
« Héléna… »
Le veuf leva la main, la tendit vers sa première épouse, cherchant à se rapprocher de sa douce chandelle qui lui avait réchauffé les mains tant de fois, le guidant sur le bon chemin avec sa lumière rassurante…
Les jumeaux changèrent alors d’air, se mettant à entamer la « Supplique de Fraldarius », même si aucun des deux n’aimaient les hypothèses autour de cette chanson. Ils appréciaient la chanter pour toutes les émotions à l’intérieur mais, trouvait que l’interprétation des érudits autour ne collait vraiment pas à ce qu’ils ressentaient dans les paroles…
« Dans la nuit sans étoile, le vent mugit dans le noir,
Les ronces m’écorchent et m’enserrent en riant,
Les chaines cruelles boivent sans soif mon sang,
Ô dieux, à la lune je ne peux que hurler mon désespoir, »
La voix des jumeaux s’immisça dans ses pensées, les parasitant avec leurs paroles étranges et inquiétantes alors que la flamme dans les mains d’Héléna faiblissait…
Deux yeux bleus d’eau percèrent la pénombre, avant qu’en n’émerge une silhouette longiligne, forte et presque invisible dans l’obscurité, avant qu’il ouvre une gueule écarlate, remplie de longs crocs comme d’immenses croissants de lune, coupants comme des sabres… Lambert s’écria alors, même s’il le reconnut tout de suite, mort de peur pour son épouse.
« Héléna ! Attention ! »
« Dans le froid de l’hiver, la bise se moque de moi,
Tous mes os se figent un par un,
Ils se pétrifient jusqu’à la fin,
Ô dieux, à la lune je ne peux que hurler mon effroi,
Cependant, le loup se contenta de lui donner un petit coup de truffe à la jeune femme, attirant son attention avant de lui montrer un chemin. Sans hésiter malgré sa méfiance naturelle, peut-être parce qu’elle reconnaissait ses yeux d’eau, Héléna le suivit sans hésiter, s’enfonçant dans un couloir sombre avec lui.
Fou d’inquiétude et de peur que ça dégénère après sa crise de colère, Lambert les suivit en courant, essayant de les rattraper mais, quand il sortit du boyau, il n’était plus à Garreg Mach… non… non… il était de nouveau entouré des corps Duscur…
Héléna portait à présent sa longue robe blanche et bordeaux, brodé de son emblème et de l’astre céruléen, ses longs cheveux dénoués battant en silence dans le vent à la fois brûlant et glaciale, portant ses mots étranglés alors qu’elle se baissait vers les morts…
« Nia… Momon… »
Elle se releva, ses gestes saccadés faisant penser à ceux d’une poupée désarticulée, choquée en découvrant d’autres corps portant leur emblème, des visages d’adultes qu’elle n’avait connu que pendant leur enfance, des gardes et des fidèles de sa famille…
« Tous… tout le monde… »
Sa voix s’étrangla d’un coup alors qu’elle s’élançait vers la dernière personne que Lambert aurait voulu qu’elle voie, n’arrivant pas à la rejoindre avant qu’elle ne trouve la tâche bleu roi dans cet océan de blanc et de brun-rouge…
« Oh non ! Dimitri ! »
Héléna se précipita vers lui en enjambant les corps comme elle pouvait, le prenant tout de suite dans ses bras en utilisant la magie de soin, murmurant à leur fils, même s’il ne pouvait pas l’entendre, brûlé et étranglé de fumée…
« Dimitri… tient bon… tient bon… je vais te soigner… Mitsos… »
« Dans le noir des ténèbres, même le soleil cruel est ennemi,
Mes yeux déjà asséchés de larmes brûlent,
À sa vue dont ils ne supportent plus la férule,
Ô dieux, à la belle lune j’hurle, elle est ici ma seule amie. »
Le loup réapparut, s’asseyant à ses côtés en passant sa truffe sur les cheveux calcinés du blessé… Héléna se tourna vers lui, le fixant droit dans les yeux, telle qu’elle était avant sa mort. Sa peau semblait livide malgré son teint halé, des cernes sombres et profondes balafrant son visage, ses longs cheveux hirsutes et cassants comme de la paille… tel que la peste l’avait laissé…
« Tel que toi, tu l’as épuisée… susurra le loup sans qu’Héléna semble l’entendre, cette dernière lui demandant sans hésiter.
– Qui… qui a fait ça à mon fils ?
Sans un mot, le loup tourna alors son regard vers Lambert, retroussant ses babines dans un sourire satisfait quand Héléna se redressa, fixant son mari alors que son visage choqué changeait, s’enflammait de colère, le criblant du regard avec fureur.
« Ô Lune, grande lune si belle qui m’écoute toujours chaque nuit,
Ce soir, malgré les ronces qui m’étranglent et toujours me lacèrent,
Je te hurle mon désespoir, je te hurle ma rage, je te hurle ma prière,
Ô Lune, entend mon sort hurler au fond de cette prison de suie ! »
– Lambert… comment as-tu pu… comment as-tu pu emmener notre fils ici… comment as-tu pu emmener mon fils dans une expédition aussi dangereuse ?! Tu aurais dû le laisser au palais en sécurité ! Il n’avait rien à faire dans une expédition pareille !
– Héléna… je… je te jure que je ne pensais pas que ce serait aussi dangereux pour lui… lui promit-il en essayant de s’approcher d’elle, ouvrant ses bras. J’aurais su, jamais je ne l’aurais…
– Tout le monde t’a prévenu, le coupa-t-elle en se fermant, se mettant entre Lambert et Dimitri, comme pour le protéger. Myrina t’a dit et répété que ce passage était très dangereux et qu’il ne fallait surtout pas t’attarder dans ce piège à rat. Kimon t’a dit que tes lettres étaient mal faites et tes promesses irréalistes alors, il fallait travailler à nouveau avec les ambassadeurs pour trouver des accords plus réalistes mais que dans tous les cas, cela allait abimer nos relations avec Duscur, ce qui incitait à encore plus de vigilance. Lachésis t’a dit plusieurs fois qu’il fallait faire arrêter Kleiman et le mettre sous les verrous afin d’éviter qu’il n’aggrave encore plus la situation, et Thècle qu’elle avait besoin de plus de temps pour examiner son cas pour le juger. Tu as refusé et résultat, il continue à massacrer d’autres êtres humains sur la frontière sans que tu ne remarques rien et avec l’accord de Rufus. Rodrigue t’a répété plusieurs fois à quel point c’était dangereux pour Dimitri de l’emmener, et à quel point ils n’avaient pas le temps de tout préparer correctement pour assurer au maximum la sécurité de tout le convoi, Alix aussi te l’a encore répété avec force. Mais tu n’as écouté personne et maintenant, tout le monde est mort par ta faute ! Tu as le sang de notre propre enfant sur les mains !
– Héléna… je… je…
« Même si je suis prisonnier, je m’évaderai !
Même si je ne suis plus que mon désespoir, je m’en servirai !
Même couvert de chaines, jusqu’à la dernière je les lacérerai !
Ô lune ! Au pire des maléfices je me sacrifierai ! »
Il tenta encore de s’approcher malgré tout mais, sa première épouse enflamma ses mains avant de les serrer en poing, prête à frapper pour défendre Dimitri derrière elle, tout semblable à plusieurs représentations de la Flamme Passionnée, protégeant les siens en s’enflammant elle-même. La douce chandelle semblait être tombé dans l’huile, se propageant partout autour d’eux pour plonger la vallée étroite dans des flammes bleues, embrasant un grand bûcher funéraire pour les morts et un cocon protecteur pour Dimitri.
Lambert paniqua, sentit ses doigts fondre dans cette fournaise de plus en plus infernal, emportant Héléna à qui Dimitri s’accrochait à présent, le laissant seul. Il crut entendre la voix de Patricia au loin, l’appelant vers elle mais, ses appels ne firent que rendre les flammes encore plus fortes, plus cruelles, creusant sa peau alors qu’il tentait en vain de trouver une issue, un passage, une échappatoire… n’importe quoi qui pouvait le faire sortir d’ici !
« Que les dieux qui m’abandonnent me haïssent aujourd’hui,
Car moi la pauvre créature enfermée sort ses crocs acérés,
Même si devenir une bête est le pire des sorts à redouter,
Je suis prêt à en être une pour sortir de cette prison honnie ! »
En levant les yeux, suivant l’origine du chant qui résonnait tout autour de lui, l’homme vit à nouveau le loup le fixer depuis le sommet des ravins, la tête sur ses pattes, souriant toujours à pleines dents en le voyant se débattre, se tortiller dans les flammes en essayant en vain de s’échapper.
« Toi… ! »
Emporté par sa propre colère de la farce grotesque que lui imposait le loup qui avait remplacé son ami, Lambert arriva à trouver assez d’élan pour sauter, attraper le rebord de la falaise et à se hisser là où était la bête cruelle, rien que pour lui faire ravaler son sourire après avoir monté Héléna contre lui. C’était sa faute s’il cauchemardait à ce point ! C’était sa faute si elle était aussi en colère et fatiguée !
Cependant, quand il arriva à se hisser au sommet battu par le blizzard, le loup s’était un peu éloigné, riant toujours à la manière de Foa alors qu’il se relevait, un rire saccadé et malade, comme s’il se moquait de lui, le trouvait pathétique de tenter de l’attraper.
« Reviens ! Reviens et rends sa place à…
– Seulement si tu arrives à me rattraper ! Ghia ! Ghihi ! Ghihihi ! Que la Lune voie qui gagne ! »
Il repartit en riant, tâchant la blancheur éclatante des lieux avec sa noirceur de ténèbres, le forçant à s’enfoncer dans le blizzard. Lambert le suivit comme il pouvait mais, il était bien plus lourd que lui, ses pas s’enfonçant dans la neige épaisse, le noyant presque dans la poudreuse tranchante, alors que le loup courrait à vive allure sur le manteau neigeux et craquant, seules de légères traces de pattes vite recouvertes par le blizzard marquant son passage alors qu’il chantait à nouveau.
« La roue du destin tourne et tourne,
Les routes se mêlent et s’entremêlent,
Les saisons passent et vite trépassent,
On ne reconnait plus rien du tout !
Je cherche mon chemin ! S’écria le pauvre fol,
De quel chemin parles-tu ? Répondit la Lune
Le glorieux chemin que m’a destiné la fortune !
Qu’il est orgueilleux ! Ce pauvre fol est frivole !
Car notre chemin n’est jamais par un autre tracé,
Il est toujours fait de milles et milliers de pas bien décidés,
Il est toujours soigneusement pavé par notre seule volonté,
Tu as toi-même décidé par tes choix de te blesser !
Mon pauvre fol orgueilleux ! Ta pitoyable errance…
…n’est que le résultat de ta propre ignorance ! »
« Tais-toi ! C’est faux et tu le sais ! Je n’ai jamais décidé que tout tournerait ainsi ! Jamais je ne voulais que…
– Mais tu as tout de même décidé que tu mènerais le Royaume à sa perte.
Lambert s’arrêta net, figé en découvrant son père au sommet de la montagne, Areadbhar luisant dans ses mains, en grand habit de monarque, la couronne d’or de Loog ceignant son front, illuminé par la Lune… après avoir rencontré Blaiddyd en personne, Lambert ne pouvait que voir que Ludovic avait exactement les mêmes yeux que leur ancêtre… le loup était là aussi, allongé aux côtés de l’ancien roi, toujours aussi satisfait de lui-même, le narguant toujours… c’était encore plus cruel de sa part en sachant ce que son père allait lui faire remarquer…
– Regarde Lambert, lui ordonna son père en montrant la vallée en contrebas. Regarde le résultat de ton indécision et de tes décisions. Regarde les conséquences de tes actes.
Bien obligé d’avancer, l’homme obéit et regarda au bas de la colline. Tout était sombre, tout était plongé dans le noir sans aucun soleil à l’horizon… comme sans lendemain… il n’y avait personne aux alentours, juste des ombres indéfinis, comme vidé de toute vie…
– Non… il y a encore de la vie en Faerghus… on arrivera à se relever… on…
– Tu répares ce que tu as brisé toi-même, répliqua Ludovic avec sa voix froide, serrant Areadbhar entre ses mains. J’avais laissé derrière moi un Royaume sain, prospère après tant d’année de guerre et de terreur… toute ma vie, j’ai travaillé afin que le règne de mon père ne se répète pas… que tant de personnes ne subissent pas à nouveau de telles atrocités…
– Mais je n’ai jamais voulu faire le moindre mal à mes sujets ! Je ne les ai jamais entrainés dans des guerres sanglantes !
– Non, en effet. Mais tu méprises leurs vies tout autant que lui, bien que ce soit de manière différente. Clovis se moquait éperdument de la vie des autres, seule la sienne comptait, et il les envoyait à l’abattoir sans hésiter ou remord. Toi, à cause de ton inconscience et de ta naïveté, tu agis sans prendre en considération les risques qu’encours tout le monde, car tu es persuadé que tout se passera bien et que sinon, ce sera possible de réparer ce que tu as brisé, alors que rien ne peut rendre une vie perdue ou réparer cette absence… le tout en écoutant de moins en moins les voix qui s’élevaient contre toi et te conseillaient d’être plus prudent, et en n’écoutant que les personnes qui ne cherchaient qu’à profiter de la situation… souffla-t-il en passant sa main sur la tête du loup, avant de le fixer droit dans les yeux. Et vois où tout ceci t’a mené… mon plus grand regret est d’être mort aussi tôt, trop vite pour t’empêcher d’accéder au pouvoir. Tu n’as pas les épaules pour être roi, tu n’es pas fait ni digne d’une telle tâche, » sanctionna-t-il alors que du sang tuberculeux coulait de sa bouche, comme quand il retenait ses toux avant de mourir, mais il restait malgré tout droit et ferme, seuls ses poings tremblant de colère. « À cause de ma propre faiblesse, j’ai laissé le Royaume entre les mains d’un inconscient qui a tout détruit sur son passage en étant persuadé de bien agir, et cela l’a conduit à sa ruine. Le Royaume est meurtri par le deuil, la colère et le ressentiment, la faim le gangrène, la maladie guette dans la pénombre, attend son heure pour tourmenter encore plus notre peuple… il se délite même, Gautier est déjà en train de faire sécession vers Sreng où ils ne seront plus obligés d’obéir à tes ordres lunaires, et que crois-tu qui se passera quand Fraldarius apprendra ce que tu as fait à ses ducs ? Quand ils verront Rodrigue et Alix revenir sous la forme de loups tourmentés par le désespoir ? Que pensera Galatéa en voyant que Rufus les a déjà abandonnés ? Charon en voyant ta mauvaise gestion et quand ils apprendront l’affront que tu as fait à leur sœur ? Que penses-tu ce qui va arriver à Faerghus après tout ce que tu as fait et laissé faire ?
Lambert ne répondit pas, regardant son père sans savoir quoi dire… à part pour le fait que les Charon n’apprendront jamais pour Patricia, encore plus maintenant que… il avala sa salive en repoussant tout ce qui avait pu lui arriver…
– Et elle, elle est partie volontairement dans un voyage qu’elle a voulu. Elle n’a pas été arraché de force à ses proches.
L’homme jeta un regard au loup, à présent debout en regardant au loin, semblant chercher quelque chose dans les flammes. De près, on voyait ses côtes saillantes, des blessures sanguinolentes tachant sa fourrure de nuit, que ses grands yeux de chat étaient rougis de larmes… Ludovic se baissa vers le loup pour passer ses mains sur la tête du loup, doux et calme, moins froid avec lui qu’il ne l’avait jamais été avec presque personne d’autre… même si Lambert savait en son for intérieur que son père avait été chaleureux avec lui, souvent même avant que la politique et la question de la succession n’envenime leur relation, il ne put empêcher la jalousie de ronger son cœur, sachant à quel point Ludovic aurait préféré que ce soit ce loup son héritier plutôt que lui…
– Que de vies perdues et ruinées à cause de ton inconscience et de ma propre faiblesse…
Le loup passa un coup de langue sur la joue de Ludovic, avant que l’ancien roi ne se relève et le regarde dans les yeux, sa colère gelant Lambert sur place.
– Que pensais-tu accomplir en te comportant en tyran n’écoutant que ses ennemis ?
Lambert n’eut pas le temps de répondre, Ludovic disparut dans un tourbillon de neige, le lacérant de toute part alors que tout devenait de plus en plus sombre tout autour de lui… le plongeant dans les ténèbres les plus froides et terrifiantes…
Un fredonnement incompréhensible grouilla dans l’obscurité humide, le glaçant malgré sa familiarité…
Les ténèbres se dissipèrent à peine, alors que Lambert échouait dans une forêt noueuse et sombre… il faisait tellement humide, on se serait cru dans l’eau tellement l’air en était saturé… ces bois n’étaient pas éclairés par le soleil, seule la lune, l’Astre Céruléen et les étoiles tâchaient la nuit, éclaboussant les branches noires et emmêlées les unes les autres de leur lueur blafarde… ce n’était même pas ce qui illuminait vraiment sa vision, mais une forme blanche au fond du chemin, appelant encore et encore quelque chose mais, Lambert ne comprenait pas un seul mot de ce que disait la silhouette, floue comme un reflet dans une flaque… il s’approcha, hésitant avant de vraiment de retrouver le loup qui reprenait forme humaine en chantant toujours…
« Au clair de la lune, le vent chante,
Tu pleures dans cette forêt de cendres,
Les nuages vont alors tous descendre,
Pour que plus jamais, le mal te hante.
Au clair de la lune, les loups murmurent,
Sans un bruit, ils s’approchent de tes blessures,
Ils t’entourent, te réchauffent avec leur fourrure,
Cette protection si douce te rassure.
Au clair de la lune, la forêt te protègera toujours ici,
Aux hurlements des loups, la brise te réconforte,
Tous pansent tes blessures et au loin les emporte,
Dans leur rassurante étreinte, enfin tu t’endors guéri. »
Rodrigue était apparu face à lui, tout différent de celui qu’il était avant de se transformer. Ses joues étaient de nouveau pleines, ses gestes plus assurés et précis, ses pas bien plus stables, son dos bien droit, son maintien fier et royal… il semblait à nouveau en pleine santé, comme avant… une grande peau du loup recouvrait ses épaules comme une grande cape, cachant un peu son habit sarcelle et blanc pur, le rendant presque lumineux au milieu des ténèbres. Son chapelet était autour de son cou plutôt que sur son poignet droit, l’emblème de Fraldarius reposant sur son cœur, de nouveau en bon état alors qu’avec le temps, l’homme l’avait tout abimé à force de faire rouler les perles et de serrer les breloques dans ses prières… Un cercle d’argent orné de pierres de lune ceignait ses boucles noires, vibrant presque avec sa peau si pale… il avait l’air d’un meneur de loup, comme un être de légende sorti tout droit d’une chanson de geste… le roi de la forêt et de la nuit venant voir en personne qui avait osé franchir la frontière de son Royaume…
Ses yeux de chat se posèrent sur Lambert, profond comme le lac, illisibles… ce n’est qu’à ce moment-là que l’homme se rendit compte que le loup… l’homme face à lui… Rodrigue… peut-être… avait un foulard autour de lui, fait pour porter un enfant, vide, ainsi qu’une besace surement remplie de quoi soigner… il devait encore le chercher partout…
« Que… que veux-tu ? Demanda Lambert. C’est toi qui as provoqué tout ceci, n’est-ce pas… ?
– Quoi donc ?
– Tout ce qui vient de se passer ! Héléna ! Ludovic ! Duscur ! Dimitri ! Même la voix de Patricia ! C’est toi qui me les as montrés ! C’est toi qui les as amenés ici et les monter contre moi !
– Toi ou moi ?
– Qu’est-ce que tu veux dire ? Explique-toi à la fin ! Et pourquoi tu te riais de moi tout à l’heure ?!
– Est-ce tes actions ou les miennes qui les ont rendus furieux ? Personnellement, j’ai ma réponse, se moqua-t-il avec un sourire qu’il n’avait jamais vu sur le visage de Rodrigue. Dans tous les cas, c’est bien mérité. Ce mépris et ce rejet sont tout ce que tu mérites.
Lambert eut un mouvement de recul face à son ami. Même s’il était redevenu humain, tout son comportement ressemblait à celui d’un loup tournant autour de sa proie, l’épuisant avant de sauter sur elle et lui rompre le cou pour la dévorer…
Rodrigue voulait le dévorer… il attendait le moindre signe de faiblesse pour lui sauter dessus et finir de le décapiter, il en était sûr… !
– Comment as-tu pu changer comme ça… osa demander Lambert. Nous… nous étions amis…
– Amis… répéta-t-il en posant sa main sur son menton, l’étudiant avec un mélange de mépris et de sarcasme, jouant encore avec lui en le faisant attendre. Amis ou outils… tu n’as fait que m’utiliser pour faire ton travail à ta place, tout comme Rufus… m’épuiser jusqu’à la dernière goutte de force et d’espoir… comme tu l’as fait pour Héléna… puis tu m’as tout pris… tout… tu m’as pris tout ce qui comptait pour moi, le tout en souriant tout le temps et en étant persuadé de le faire pour le bien de tous, alors que tu ne faisais que satisfaire tes propres désirs et ton égocentrisme…
– Tu sais bien que je ne pensais pas à mal… marmonna encore Lambert en détournant le regard, ne pouvant pas supporter de voir ce qu’était devenu son ami, ce regard froid et cruel sur son visage d’habitude si gentil et chaleureux. Je ne pensais pas que je te faisais souffrir au point de te… !
– Allons, relève la tête, lui ordonna-t-il sur un ton amical et enjoué, encore plus terrifiant que tout le reste ici, comme si tout ceci n’était qu’un jeu pour lui. Ait au moins le courage de regarder tes victimes en face quand elle vienne te demander des comptes. Et tu ne savais pas que tu me faisais souffrir ? Répéta-t-il. Tu ne savais pas qu’emmener mon enfant et mon compère de force dans un voyage aussi dangereux me faisait souffrir ?
Il fit un premier pas de loup dans sa direction.
– Tu ne savais pas que nous forcer à tous la main d’envoyer nos sujets et nos proches à la mort nous faisait souffrir ?
Un autre pas.
– Tu ne savais pas à quel point être obligé de te laisser autant de pouvoir sur Glenn me faisait souffrir ?
Encore un autre pas.
– Tu ne savais pas qu’agir comme si la mort de son père n’était pas importante pour Dimitri, que tu traites la mort aussi à la légère me faisait souffrir ?
Malgré la menace, Lambert était incapable de bouger, happé par le tourbillon de question de l’entité face à lui, harponné par ses yeux si bleu posés sur lui.
– Tu ne savais pas que devoir tout faire pour encore réparer tes erreurs à ta place me faisait souffrir ?
Rodrigue était maintenant face à lui, posant encore et encore des questions avec ce sourire de loup, de plus en plus sombre et menaçant, semblant immense malgré sa plus petite taille.
– Tu ne savais pas que travailler pour l’homme qui a tué mon fils et mon compère me faisait souffrir ?
Rodrigue leva ses mains, armées de longs ongles semblables à des griffes, souriant toujours, la lune se reflétant sur ses crocs blancs.
– Tu ne savais pas que m’arracher mon louveteau et mon frère me faisait souffrir ?
Il enroula ses doigts griffus autour de sa gorge, le tirant jusqu’à ce qu’il soit front contre front en crachant la dernière question.
– Tu ne savais pas à quel point je te hais pour m’avoir tout prit ? À quel point je te hais de toute mon âme depuis ce jour où tu es rentré sans eux ? Que tu es naïf… c’est à vomir…
Il serra en grognant, son sourire et son masque abandonné, ne laissant qu’une émotion brute de haine, de dégout et de détestation gravé au plus profond de sa voix et de son être.
– Rends-les-moi… rends-les-moi ! Rends-moi tout ce que tu m’as volé !
– Rodrigue ! » Protesta Lambert en tentant de se libérer, accrochant ses propres mains à celles de l’homme en échouant à le faire lâcher prise malgré sa force… est-ce qu’il était vraiment devenu un être surnaturel pendant qu’il s’était transformé ?! Il semblait sortir d’un autre monde ! « Je t’en supplie ! Calme-toi !
– Rends-les-moi ! Je veux mes enfants ! Je veux ma famille ! » S’écria-t-il, tout croc dehors, en serrant encore plus fort, assez pour le griffer… du sang coulait le long de sa gorge… il était sur le point de l’égorger ! « Tu as répandu le sang de Glenn et de Nicola pour survivre comme le vampire que tu es ! C’est à cause de toi qu’ils sont morts ! Rends-les-moi tous les deux !
– Je ne peux pas ramener les morts !
– Il fallait y penser avant ! Tu nous demandes l’impossible alors, fait-le aussi ! C’est leur sang qui te permet de vivre aujourd’hui ! Rends-le-leur ! Rends-leurs tout le sang que tu leur as volé !
– Rodrigue… tu m’étrangles !
– Rends-moi Glenn ! Rends-moi Nicola ! Et surtout, rends-moi Félix ! Rends-moi mon louveteau ! Tu es allé jusqu’à me prendre mon seul enfant qui me restait ! La dernière personne que Félicia a rencontrée et aimée plus que sa vie avec Glenn ! Tu nous as pris notre dernier petit ! La personne que j’aime le plus au monde ! Tu as même osé m’arracher Félix par caprice après avoir tué Glenn par inconscience ! Je veux retrouver mon louveteau ! Rends-le-moi !
– Rodrigue ! Je… Lambert haleta, ayant du mal à parler, perdant de plus en plus d’air. Je ne peux pas le récupérer comme ça… Dimitri doit vou…
– Rends-moi mes fils ! Rends-moi le seul fils qui t’a échappé ! Rends-moi Félix ! Arrête de te comporter comme un enfant gâté et rends-moi Félix ! Je veux ma famille ! Lui, tu ne pourras pas me le voler ! Pas lui aussi ! Je ferais tout pour récupérer mon enfant ! Tout ! » Lui jura-t-il en serrant encore plus fort ! Il allait finir par faire sauter sa tête en déchirant son cou ! « Alors, rends-le-moi ! Maintenant !
– Rodrigue ! Par pitié ! Arrête ! »
Lambert se réveilla d’un coup en hurlant, reprenant son souffle à grandes bouffées sans pouvoir s’empêcher de presser ses mains contre sa gorge, s’attendant pratiquement à sentir du sang et des entailles profondes sous ses doigts… il sentait encore les mains de son ami la saisir et serrer… lui hurler de lui rendre sa famille… lui hurler sa haine… non… ce n’était pas possible… Rodrigue ne pouvait pas le considérer ainsi… le haïr avec autant de force… ce n’était qu’un cauchemar… rien qu’un cauchemar… rien de plus…
Pourtant, il entendait encore le cri, le hurlement du loup résonné dans la nuit alors qu’il s’échappait enfin de ce rêve étrange…
« Je te hais ! »
L’homme fit tout pour repousser ce mensonge… c’était un mensonge, c’était forcé… Rodrigue ne pouvait pas…
Malgré tout, le rêve continua à le hanter une bonne partie de la matinée, tellement qu’il finit par se résoudre par aller voir Rufus pour en parler malgré tout… il avait beau jurer qu’il n’avait rien à voir avec les exactions de Kleiman, que c’était juste un appui de circonstance pour une situation très tendue qui demandait tous les bras disponibles pour s’en sortir, Lambert ne pouvait s’empêcher de ressentir une certaine appréhension avec lui… comme si quelque chose dans ses mots sonnaient faux… cependant, Rufus restait son grand frère… son grand frère à qui il pouvait tout dire et tout partager, même les choses les plus inavouables ou gênantes… son grand frère qui l’avait toujours mis en confiance, pour le meilleur comme pour le pire mais, c’était déjà beaucoup quand on passait derrière un roi de la stature de Ludovic… il ne pouvait pas s’empêcher de lui faire confiance pour quelque chose d’aussi étrange qu’un rêve pareil… même si ça concernait Rodrigue et qu’il n’ignorait pas leur antipathie réciproque…
Lambert alla dans le bureau de son frère mais, en voyant qu’il n’était pas là, il décida de l’attendre, il ne devrait pas s’absenter bien longtemps… Rufus travaillait bien plus qu’avant la Tragédie, il avait aussi droit de prendre une pause de temps en temps…
« Même s’il aurait pu en accorder aussi à Rodrigue… enfin, c’est fait maintenant… »
Une petite cassette dans un coin du bureau attira l’attention de l’homme. Elle était tout simple, décoré de quelques vrilles végétales mais, il la reconnaitrait entre mille… Rufus y tenait beaucoup… la seule fois où il avait disputé Dimitri, c’était quand il avait voulu la récupérer pour qu’elle soit le coffre au trésor d’un roi maléfique dans un de ses jeux… même Lambert n’avait jamais vu ce qui avait à l’intérieur… il s’était toujours imaginé qu’il s’agissait de la correspondance intime de son frère, d’où son angoisse que qui que ce soit voit le contenu de cette cassette… même si Rufus avait aussi promis avec aplomb de lui montrer son contenu quand il reviendrait triomphant de Duscur… bon, pour le triomphant, c’était raté mais…
« Non… c’est à lui… c’est sa vie privée… il me le montrera quand il voudra… »
Mais c’était si tentant… et Rufus lui avait dit qu’il lui montrerait en plus…
Il ne perdait rien à juste la manipuler un peu…
La première chose qui étonna Lambert en la prenant dans ses mains était le poids de la boite. Elle semblait pleine à ras bord s’il se fiait à son poids, alors qu’elle semblait plus légère quand Rufus lui avait montré la dernière fois…
« Qu’est-ce qui a bien pu… »
Il ne put résister et força la boite, l’ouvrant sans souci avec sa force.
La cassette ne contenait que du papier, des lettres mêmes à première vue mais, ce qui étonna Lambert, c’était qu’il ne s’agissait pas de l’écriture soignée de Rufus… non… elle était bien plus biscornu, comme écrite par quelqu’un de plus jeune ou un gaucher étalant l’encre avec sa main en rédigeant… et il y avait plusieurs scriptes…
Même s’il se força à penser qu’il s’agissait des lettres de ses amants, des soupçons empoisonnèrent le cœur de Lambert alors qu’il dépliait une missive au sceau déjà cassé…
« Papa, pourquoi tu ne m’écris plus ?! J’ai plus de nouvelles de toi depuis des semaines ! Qu’est-ce qui se passe ?! »
« C’est l’écriture de Félix ! Mais qu’est-ce qu’une de ses lettres pour son père fait là ?! »
Lambert en sortit une autre, reconnaissant l’écriture d’Alix, le début de la lettre étant dans le même ton que la précédente.
« Rodrigue, je sais que tu ne vas pas bien, je le sens, je sens que tu es mal et que ça ne s’améliore pas… je ne sais pas pourquoi je n’ai plus de lettre de toi, est-ce que c’est à cause de ça ? »
Son sang se gelant de plus en plus, Lambert en sortit deux autres, portant cette fois l’écriture de Rodrigue, destinées à son fils et à son frère, également décachetées comme si elles avaient déjà été lues. Son ami parlait de ses mêmes inquiétudes, des lettres qui n’arrivaient pas et de son inquiétude… Même demande, même inquiétude… Déesse ! Qu’est-ce qu’elles faisaient là ?!
« Non ! On m’a volé mes lettres ! Alix a demandé à Ivy de lui faire passer une lettre de sa part où il disait qu’il n’en recevait plus de ma part, alors que je lui écris tous les jours et lui aussi ! Quelqu’un vole les siennes et celles de Félix ! C’est pour ça que je n’ai plus de nouvelles ! »
Il entendait encore le gémissement paniqué de Rodrigue, tout le désespoir qu’il n’avait pas perçu au départ dans sa voix, toute l’inquiétude et la peur qui se mêlaient ensemble à l’intérieur…
« Rufus ne peut tout de même pas être… »
Cependant, malgré tous ses efforts pour trouver des excuses à son frère, Lambert dut se rendre à l’évidence en se rendant compte que toute la correspondance volée de Rodrigue était là… les lettres qu’il avait envoyées, celles qu’il avait reçu… tout… tout était là ! Tout était ouvert ! Rufus n’avait tout de même pas tout lu ?!
Aucun doute, c’était lui le voleur de leur correspondance… mais… mais pourquoi ? Pourquoi faire ça ? Pourquoi faire quelque chose d’aussi cruel ?! Rufus détestait Rodrigue et Alix de toute son âme à cause de Ludovic mais, pas à ce point tout de même !
Lambert pensait ne pas pouvoir être plus horrifié mais, quand il vit des papiers roulés tout au fond de la cassette, semblant plus anciens et usés, même tâchés de sang pour certains, un doute noir lui dévora le cœur… non… non… non…
Il attrapa un rouleau et le déroula en tremblant…
« À mon Royaume, que j’ai toujours désiré servir au mieux… »
L’homme ne put que reconnaitre l’écriture de son père, la plume tremblante de Ludovic… le parchemin était même tâché de ses crachats de sang à cause de sa tuberculose…
Comme happé par le rouleau, Lambert ne put s’empêcher de continuer à lire les mots, même s’il se doutait du contenu… voir même le redoutait plus encore que les fantômes et les cauchemars…
« Malgré l’horreur, je n’ai jamais oublié le règne de mon père. Toute ma vie durant, je n’ai jamais oublié ces rues couvertes de sang, la terreur et la faim mais, ce qui me marqua le plus était son aplomb. Clovis était persuadé d’être dans son bon droit et ne le cachait pas. Même si ces actes étaient immoraux, il s’appuyait sur la loi en la détournant à son profit, devenant inarrêtable dans sa position de roi pour commettre toutes ses exactions. Dès lors, mon seul objectif fut de mettre Faerghus à l’abri d’un autre souverain tel que lui. « Protéger et servir le peuple du Saint-Royaume de Faerghus », tel a été la devise qui a guidé chacun de mes pas avec l’aide de mes proches pour que jamais, je n’en dévie un seul instant…
Lambert sentir son cœur battre à toute vitesse dans sa poitrine. Ce… ce parchemin… c’était le testament de son père… c’était le testament de Ludovic ! C’était Rufus qui l’avait pendant toutes ses années ?!
Cependant, une grande crainte demeurait : comment empêcher un autre Clovis d’arriver ? Comment empêcher qu’un autre souverain tel que lui ne monte sur le trône ? Ne soit imposer par le hasard cruel de la naissance ? Clovis était le fils ainé de sa mère et malheureusement pour l’orgueil de notre lignée, elle n’était guère plus recommandable que son fils. Elle était seulement qu’un peu plus discrète que lui mais, possédait les mêmes torts, centrant de plus en plus de pouvoir sur elle-même au détriment de ses contradicteurs mais, par ce geste, elle détruisait de précieux garde-fous qui pouvaient endiguer les exactions du pouvoir royal, soigneusement construit par Loog le Lion et sa fille Sophie la Sage. Ces deux souverains ont été élus avec peu d’avance, savaient qu’ils devaient composer avec l’ensemble de leur royaume et de leur peuple pour faire grandir Faerghus sans plus de violence après la guerre, que des contradicteurs n’étaient point des ennemis à anéantir mais, des personnes nécessaires à toute remise en question de chaque action, afin de peser le pour et le contre puis, changer d’avis ou camper sur ses positions une fois que nous ayons entendu tous les arguments.
Le passage à la succession filiale nous a assené un coup majeur, nous avons commencé à nous croire tel les Hresvelg, choisis par la Déesse pour régner et le pouvoir nous ait monté à la tête. Notre objectif n’était plus de servir notre peuple comme l’avait voulu le roi Loog, mais que notre peuple nous serve afin de gagner de plus en plus de pouvoir, centralisant toujours plus les fonctions de commandement sur notre propre personne et dépouillant nos adversaires des armes qui leur permettait de nous arrêter quand nos actions devenaient dangereuses pour notre peuple. Au comble de notre hubris, nous avons même commencé à traiter toute une lignée comme des objets jetables, des boucliers qui ne servent qu’à prendre les coups à notre place pour que nous puissions survivre, pendant que cette famille portait perpétuellement le deuil de tous ses membres sacrifiés aux Blaiddyd… Nos ancêtres doivent rougir de honte devant notre décadence…
J’aimerais dire que tout ceci s’est arrêté avec la mort de mon père mais, je ne me fais guère d’illusion. Le hasard fait qu’à chaque fois, à chaque naissance, à chaque génération, il y aura toujours un risque qu’à nouveau, un autre Clovis naisse. Je n’ai échappé à la décadence de ma famille que grâce à mon corps faible malgré mon emblème, inapte à la guerre et facilement malade, ce qui m’a permis de vivre au sein d’une famille aimante et normale, pour qui je ne ressent que de l’affection, et que je ne remercierais jamais assez pour leur accueil et leur amour, même si je les ai à mon tour meurtri d’un deuil dont je porte la responsabilité et la culpabilité chaque jour.
J’ai tout fait pour bien éduquer mes enfants, pour les emmener au plus loin des conceptions de leur grand-père et leur inculquer que ce n’est pas le peuple qui doit servir le roi, mais le roi qui doit toujours servir son peuple en premier lieu. Cependant, je me suis rendu compte que cela ne faisait pas tout… Mon fils Lambert est un homme au grand cœur, gentil et chaleureux, ainsi qu’un guerrier accompli à la force extraordinaire. Je suis fier de ses prouesses au combat et heureux d’être son père malgré notre relation compliquée. Il reste mon fils et je l’aime de tout mon cœur mais, cette amour ne peut masquer l’ampleur de ses défauts moraux.
Il est chaleureux mais, également négligent et naïf. Malgré tous mes efforts, jamais je ne suis arrivé à lui faire comprendre qu’on ne peut aider tout le monde, qu’il fallait choisir qui aider car, tout le monde n’a pas besoin d’aide de la même manière et qu’il fallait concentrer le soutien au plus faible mais, dans une vision naïve de l’égalité, il reste persuadé que le mieux à faire est d’aider tout le monde à part égale, sans se soucier du contexte de départ, ce qui le rend très inefficace et indécis dans des situations où il doit justement trancher un conflit sans pouvoir satisfaire tout le monde. Sa négligence envers ses proches combinée à cette naïveté et son entêtement pousse ces derniers à devoir ajuster tout ce qu’il fait, rattrapant avec les quelques pouvoirs que nous leurs avons laissés ou rendus ce qu’ils peuvent pour éviter de léser le Royaume.
La première victime de cette situation est malheureusement ma belle-fille, Héléna. C’est une femme brillante, avec un grand avenir devant elle, sachant convaincre même les plus entêtés comme son mari mais, cela est se fait au prix de grands efforts et de longues négociations qui ont malheureusement eu raison de sa santé. Puisse-t-elle me pardonner un jour de lui avoir imposer un tel époux, elle qui méritait de pouvoir monter bien plus haut que de se contenter d’être l’ombre balayant derrière le roi. Elle attend à présent leur enfant, et j’espère pouvoir vivre assez longtemps pour pouvoir rencontrer ce petit être que mon cœur sait déjà être exceptionnel, que j’aimerais de tout l’amour qu’il reste dans ma carcasse rongée par la tuberculose, mais mon esprit ne cesse de me rappeler à l’ordre, de me demander s’il ne risquerait pas d’avoir hérité des défauts de son père plutôt que des qualités de sa mère… et dans le même souffle, m’excuser envers lui et sa mère de leur imposer un père que je sais être aussi négligent. Je prie pour que la paternité le rende au moins responsable et prudent avec la santé de son enfant pour que jamais, il ne le mette en danger.
Au fil du temps, il s’est imposé à moi une chose : jamais mon fils ne doit monter sur le trône. Cette nouvelle position peut autant le rendre plus responsable, enfin lui faire prendre conscience des choses mais, je sais que cet optimisme n’est nourri que par mon affection, et je ne puis m’appuyer uniquement sur elle pour confier le destin de Faerghus à qui que ce soit. Ma raison ne peut que me rappeler à quel point le risque qu’il prenne encore plus confiance en lui ne le mène sur une pente glissante, une pente où il n’écoutera plus personne, même ses amis les plus chers à son cœur et ne se fassent manipuler par des ennemis qui sauront profiter de ses failles. Héléna s’épuise bien assez chaque jour pour éviter que cela arrive, je ne veux pas lui causer encore plus de tort.
Aussi trouverez-vous dans les papiers accompagnant ce testament la procédure complète à suivre pour que le prochain souverain soit élu, à la manière de Loog le Lion et de sa fille Sophie. C’est un projet qui me tient à cœur depuis des années et que je voulais mettre en place depuis mon accession au trône mais, mon corps me trahit avant que je ne puit l’organiser moi-même. Il est à peine fini mais, mes poumons me tuent lentement, rongent ma vie et l’absorbent pour nourrir la tuberculose qu’ils abritent. Je vous prie de pardonner mon inconscience et mon retard, tout le temps que j’ai mis avec mes proches à conclure ce système et de ne pouvoir le mettre en place moi-même. Ainsi, ce sera aux citoyens de Faerghus de choisir eux-mêmes le souverain qui leur convient, et ainsi, ils échapperont aux cruels hasards de la naissance, ainsi que de nouveaux garde-fous pour éviter tout débordement tel que le pays en a connu sous trop de mes ancêtres.
Ainsi, en mon âme et conscience, je me dois de l’admettre et reconnaitre que dans la situation actuelle, si je devais voter pour élire le prochain roi, ma voix irait aux jumeaux Rodrigue Achille Fraldarius et Alix Persée Fraldarius. Selon mon expérience, mon esprit et ma propre réflexion, ainsi que l’observation de leurs parcours et décisions antérieurs, ils sont les plus à même de prendre soin du Royaume pour le mener vers un jour meilleur.
Quant à mes fils, je me doute que Rufus ne me pardonnera surement jamais de refuser le trône à son frère. Lambert est de loin la personne qu’il aime le plus au monde, et je remercie la Déesse que mes fils s’entendent si bien mais, la raison doit l’emporter sur l’affection. Bien que je ne puisse pas arracher notre domaine à son contrôle, il sera au moins entouré par des conseillers et des baillis dont la fidélité est acquise à notre peuple et non à notre famille, et je ne doute point que les Charon sauront fournir des personnes compétentes et fidèles à Héléna. Je ne puis qu’espérer qu’elle trouvera quelqu’un qui l’aidera à échapper à tout ceci et si la situation s’empirerait encore, la force de quitter une personne ne lui apportant rien d’autre que de l’épuisement malgré ses sentiments pour Lambert.
Beaucoup diront sans doute que ces lignes ne sont que folies, nourries par la tuberculose qui me rongerait l’esprit mais, je jure devant la Déesse avoir encore toute ma tête. Toute ma vie, j’ai travaillé pour être digne des habitants du Saint-Royaume de Faerghus, digne de ce peuple fort et courageux qui s’est révolté contre l’injustice et la cruauté de l’empereur pour faire nation et vivre selon ses propres aspiration, digne de ce hasard qui m’avait élu roi d’un si grand peuple. Je suis conscient que l’élection du roi ne règlera pas tous les problèmes de notre pays, beaucoup de travail doit encore être fait avant que les sujets… que dis-je, les citoyens de Faerghus vivent dans un pays sain et absout des difficultés que nous connaissons à présent. J’ai commencé à tracer cette voie tout en reconstruisant le Royaume à partir des décombres qu’a laissé Clovis dans son sillage, je regrette de ne pouvoir plus avancer alors que mon corps me trahit. Je garde cependant l’espoir que les prochains souverains qui me suivront sauront tous avancer dans cette direction. Si tel que je l’espère, Rodrigue Achille et Alix Persée Fraldarius, sont élus, j’ai peu de doute sur le fait qu’ils sauront être dignes de cette mission.
Je vous souhaite une vie longue, heureuse et en sécurité à tous. J’espère de tout mon cœur que mes fils continueront à grandir et s’amélioreront avec le temps, bien malgré tous mes doutes. On dirait bien que ma raison ne peut pas complètement prendre le pas sur mon affection, et me pousse à croire à un avenir radieux pour eux. Je prie également pour que mon successeur connaisse un long règne de paix, une paix que mérite ce Royaume si résilient malgré toutes les difficultés qu’il a vécues.
En mon âme et conscience.
Ludovic le Troisième Clodomir Blaiddyd, dit le Prudent. »
Lambert se laissa tomber sur la chaise au fur et à mesure de la lecture, ne pouvant s’empêcher de relire plusieurs fois tout le rouleau. L’écriture était tremblante, saccadé comme si Ludovic s’était arrêté plusieurs fois à cause de ses toux, le parchemin tâché de sang témoignant qu’il avait encore dû en cracher, rendant la fin pratiquement illisible sous le sang, les tâches et l’encre baveuse, comme si on avait roulé le testament avant qu’elle n’ait fini de sécher…
« Ainsi, en mon âme et conscience, je me dois de l’admettre et reconnaitre que dans la situation actuelle, si je devais voter pour élire le prochain roi, ma voix irait aux jumeaux Rodrigue Achille Fraldarius et Alix Persée Fraldarius. Selon mon expérience, mon esprit et ma propre réflexion, ainsi que l’observation de leurs parcours et décisions antérieurs, ils sont les plus à même de prendre soin du Royaume pour le mener vers un jour meilleur. »
L’homme ne pouvait s’empêcher de relire ce passage encore et encore. Les noms étaient recouverts d’une énorme tâche de sang assez épaisse, ce serait surement illisible dans quelques années quand le parchemin aura encore vieilli mais, malgré tout, Lambert ne pouvait que les décrypter, les relisant encore et encore.
Son père l’avait complètement déshérité au profit de Rodrigue et Alix.
Des souvenirs parasites refaisaient surface, rappelant des séances de travail les réunissant tous, autant Héléna que les jumeaux. Lambert parlait beaucoup mais, se faisait souvent rappeler à l’ordre et réexpliquer les choses. Face à lui, Rodrigue analysait les situations en a rien de temps, devinant facilement l’origine des tensions, pendant qu’Alix proposait des solutions et Héléna le cadre pour les mettre en place. L’impression d’être à la traine malgré toutes les explications… le regard fier de son père qui couvait les jumeaux en disant qu’ils ressemblaient à leurs parents… même si Lambert n’avait jamais voulu ressembler à Ludovic à cause de leurs différences de caractère, encore moins à sa mère assoiffée de sang, il ne put s’empêcher de les envier… de vouloir entendre le même compliment sur son travail… comme eux deux… voir son père être fier de lui ainsi…
Ludovic lui faisait si peu confiance qu’il aurait préféré confier aux jumeaux de Fraldarius son précieux royaume, ce à quoi il tenait le plus au monde et pour lequel il s’était battu comme un lion depuis toujours… disait même qu’il s’excusait envers Héléna de l’avoir marié à lui… qu’elle aurait mérité mieux que balayer derrière lui…
À cette lecture, plusieurs souvenirs prirent une teinte différente, même les plus anodins. Même si Ludovic l’avait enlacé plusieurs fois pendant son mariage, Lambert ne put que noter qu’il l’avait aussi fait une fois avec Rodrigue et Félicia, leur souhaitant quelque chose qu’il n’avait pas entendu, même si le sourire de Rodrigue trahissait que c’était des vœux plutôt que des recommandations… sa proximité bien plus calme avec les jumeaux, ainsi qu’avec Héléna, les longues heures où ils pouvaient discuter tous les deux, alors que Lambert avait du mal à lui parler longtemps, cela finissait souvent en dialogue de sourd des deux côtés… même des souvenirs d’enfance prenaient un gout amer, les fois où son père se penchait vers eux pour leur parler, son regard attentionné…
Est-ce que… est-ce que Ludovic… est-ce que son propre père…
« Non… faut que je me reprenne… c’est la tuberculose… elle lui a fait perdre tous ses sens… Ludovic m’aimait aussi… il le dit dans son testament alors qu’il n’a aucun sens… et quand nous étions petit, c’était surtout de la culpabilité pour les jumeaux… Ludovic ne s’est jamais pardonné la mort de Guillaume. Il en a toujours pris la responsabilité… même ici, il le dit… ce qu’il ressentait, c’était surement de l’affection, mais aussi de la pitié et de la culpabilité… il s’en voulait pour la mort de leur père… »
« C’est ma faute… j’aurais dû être plus prudent et mieux anticipé les risques… Guillaume aurait survécu et les Fraldarius n’auraient pas été encore endeuillé par notre faute… à cause de mon inconscience, Guillaume est mort… lui avait déjà dit Ludovic sur la fin de sa vie, le visage encore plus sombre que d’habitude, son deuil ressortant encore vingt ans plus tard. J’espère que tu n’auras jamais à porter une telle responsabilité… autant ce deuil que la mort d’un de tes sujets. »
« Porter une telle responsabilité… le deuil d’un Fraldarius et d’un de mes sujets… si tu savais père… si tu savais ce que j’ai fait… »
Lambert relisait encore et encore le testament, ainsi que les autres travaux cachés dans cette cassette, presque compulsivement pour tenter de comprendre son père, l’entendre peut-être le sermonner pour ce qu’il avait fait, vouloir le faire parler même depuis sa tombe pour savoir quoi faire de ce testament dans une situation pareille, s’il devait le révéler et l’appliquer dès maintenant même si c’était évident que tout avait été écrit sous la dicté de la tuberculose mais, est-ce que cela ne ferait pas exploser le Royaume à un moment pareil ?! Enfer ! Il ne savait même pas s’il voulait que Rodrigue, Alix ou Héléna soient là pour en discuter vu comment Ludovic parlait d’eux ! Mais il avait tellement besoin de leurs bons conseils !
Cependant, la seule personne qui passa la porte n’était ni le Rodrigue qu’il connaissait qui saurait gérer la situation, ni Alix prêt à lui remettre les pendules à l’heure, ou Héléna lui présenter les différents chemins possibles en le conseillant pour le pousser vers le bon, mais c’était Rufus. Rufus qui avait…
Récupérant plus d’énergie que jamais depuis la Tragédie, Lambert se redressa d’un coup en montrant les lettres et le testament, fou de rage et de trahison.
« Rufus ! Tu peux m’expliquer ?! Qu’est-ce que ça faisait dans ta cassette ?!
– Tu l’as ouverte ?! Couina pratiquement son frère, pris au dépourvu par la question furieuse.
– Tu m’avais dit que tu me la montrerais après le voyage ! Et n’essaye pas d’esquiver la question ! Qu’est-ce que la correspondance de Rodrigue, Alix et Félix fait dans ta cassette ?! Et pourquoi le testament de notre père et ses travaux sur la monarchie élective y sont aussi ?! C’est toi qui as appelé les secours quand Ludovic s’est effondré à cause de sa tuberculose ! Est-ce que tu en as profité pour voler son testament et ses travaux ?!
– Calme-toi Lambert, je peux t’expliquer. Ludovic ne m’a pas laissé le choix… il ne savait plus ce qu’il faisait…
– Comment ça ? En quoi ? Et ça ne me dit pas pourquoi tu as cette correspondance ! Rodrigue l’a cherché partout !
– Ludovic allait te déshériter pour donner le pouvoir aux fils de Guillaume ! Il allait détruire notre famille pour préférer celle de son soi-disant grand frère ! Il n’avait aucun respect pour toi ! Il ne pensait qu’à ces foutus jumeaux qu’ils mettaient sur un piédestal en te dénigrant, car il aurait voulu qu’ils soient à ta place ! C’était pour te protéger !
Rufus l’avait pratiquement craché avec tout le venin, toute la haine qu’il ressentait pour Ludovic et pour les jumeaux. Il continua, incontrôlable.
– Ludovic te détestait ! Tu viens de le lire non ?! Il n’avait aucune confiance en toi ! Il te crache dessus dans tout ce foutu papier ! Tu es roi ! C’est toi qui devais devenir roi ! C’est ton héritage ! ça nous appartient ! Notre famille est la famille royale de Faerghus depuis le début du Royaume ! C’est Loog qui a mené la révolte des Bâtards et en a fait la guerre du Lion et de l’Aigle ! C’est lui qui a gagné ! C’est lui qui a été acclamé vainqueur ! Personne d’autre ! Et lui, parce qu’il a rencontré un mauvais roi dans toute sa vie, il en fait une généralité et il a voulu tout détruire sur son passage ! Et il a voulu donner le pouvoir à ces foutus jumeaux car c’était les fils de Guillaume ! Il se cachait derrière son petit doigt en disant qu’ils étaient plus compétents que toi mais, c’est de la connerie ! Il ne voyait que les fils de Guillaume en eux ! Rien d’autre ! C’était les fils de son grand frère alors, tout devait leur revenir ! Il ose même cracher sur ton mariage ! Soi-disant que tu avais épuisé Héléna et fait perdre la santé ! Il était malade et il a perdu l’esprit ! Tu n’as jamais fait ça ! Tu y tenais à Héléna même si elle était trop bien pour toi ! C’était juste la petite créature de Ludovic et de la matriarche Catherine là pour te faire faire ce qu’eux voulaient ! Et même si c’était sa créature, tu ne lui aurais jamais fait de mal ! Il délirait ! Et il a osé me dire de faire ce qui est bon pour le Royaume et pas pour moi-même ! C’était lui qui faisait tout avoir ce que lui voulait au dépend du Royaume ! Tout ce que j’ai fait, c’était pour te protéger ! …
Lambert le fit taire en posant ses mains sur les épaules, le regardant droit dans les yeux en lui demandant.
– D’accord pour le testament. Je veux bien comprendre ton raisonnement, même s’il est complètement faux. Notre père appréciait les jumeaux mais, pas plus que nous. On était ses fils et il nous aimait tous les deux, je le sais. Pour les jumeaux… c’était compliqué… tu sais bien qu’il s’est toujours senti coupable de la mort de Guillaume alors, il tentait de compenser envers eux mais, ce n’était pas de l’affection… juste de la culpabilité… rien de plus, j’en suis sûr… tout comme Héléna, il pensait juste qu’elle ferait une bonne reine pour Faerghus et il a vu juste, pas la peine d’en faire sa créature… mais, je te comprends aussi. Tu es mon grand frère, tu pensais que Ludovic voulait me faire du mal en me déshéritant, même s’il avait sans doute ses raisons à lui et que tu n’avais pas à voler son testament. J’aurais voulu le lire honnêtement, même si ça m’a fait très mal de voir à quel point il ne me faisait pas confiance vis-à-vis du Royaume, encore plus maintenant… je ne sais même pas si je l’aurais appliqué, c’est évident que c’est la tuberculose qui lui a fait écrire tout ça… je veux dire, regarde un peu l’état du parchemin ! Il est couvert de crachat de sang ! Il ne savait plus du tout ce qu’il faisait ! ça aurait été facile de le faire casser… Mais ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi tu as volé la correspondance de Rodrigue, Alix et Félix ? Pourquoi tu as fait ça ? Elle est même ouverte alors, tu l’as surement lu… pourquoi ? C’était inutile et cruel…
Le visage de Rufus s’assombrit, essayant d’éviter le regard de Lambert alors qu’il marmonnait.
– Il te conseillait mal et te poussait à prendre de mauvaises décisions, comme quand tu as envoyé Dimitri à Charon. Il aurait dû rester ici. Je pensais qu’il finirait par partir si je le fatiguais assez alors, je lui ai pris ces lettres, pour le motiver encore plus à rentrer chez lui.
– C’était mon idée d’envoyer Dimitri à Charon, et on a bien fait, il guérit bien mieux avec le bon air de la montagne qu’ici. Et si tu voulais le faire partir, pourquoi tu as dit que c’était une bonne idée qu’il se soigne ici ? Tu aurais plutôt dû l’encourager à partir, non ? Rufus… il soupira, n’en pouvant plus de tout ceci, trop de question tournant dans sa tête et voulant juste une réponse. Écoute… je t’ai toujours fait confiance et ta parole est vraiment très importante pour moi. Tu es mon grand frère et je sais que je peux toujours compter sur toi. C’est pour ça que je suis très souvent ce que tu me conseilles de faire, car je sais que je peux te faire confiance mais… mais en ce moment, j’ai l’impression que… que c’est plus compliqué. D’abord, il y a la manière dont tu as traité Rodrigue, puis tu as remis des peines de Clovis pour la justice, puis il y a Kleiman qui arrive au palais et prend part à tout alors que c’est lui qui a commencé toute cette histoire, puis on retrouve un sac rempli de têtes humaines dans leurs appartements et ils repartent en trombe, et maintenant, je retrouve la correspondance volée de mon meilleur ami et le testament de notre père dans ta cassette. Par pitié Rufus, dit moi la vérité, qu’est-ce qui se passe dans ta tête ? L’implora-t-il en redoutant le pire. J’aimerais te faire confiance mais, ça devient très difficile avec tout ça !
– Tu ne voyais pas le vrai visage Rodrigue… marmonna-t-il.
– C’est-à-dire ? Explique-toi à la fin !
– C’était un enragé lui aussi ! Toujours à faire ce qu’il voulait et à avantager son fief, toujours à te dire non, toujours à nous mettre des bâtons dans les roues, toujours à être apprécié de tous et de Ludovic le premier ! Je ne sais pas par quel maléfice il réussissait, autant lui qu’Alix mais, ils ont toujours eu la faveur de tous, ils ont toujours réussi partout et charmé tout le monde à tes dépends ! Alors qu’ils ont toujours été plus faible que toi et ce ne sont que des ducs ! Ce ne sont que des ducs et que fait cet imbécile de Jacque quand il leur demande de les prendre à leur service, pour réparer sa « faute » d’avoir laissé Félix seul avec Arundel sans imaginer qu’il pourrait l’attaquer ? Il s’agenouille devant eux en leur demandant à rentrer dans leur garde pour rattraper son erreur, alors qu’il est à ton service ! Ils se comportaient quasiment comme des rois ! C’est pas qu’ils sont devenus des loups, c’est que leur apparence ressemble enfin à ce qu’ils sont vraiment ! C’était tout ce qu’il méritait !
Lambert eu alors un mouvement de recul, comme si son grand frère c’était transformé d’un coup en monstre, comprenant d’un coup tout ce qui était arrivé à son ami et pourquoi il avait dû subir tout ceci, tout son corps fondant d’un coup comme neige au soleil.
– Tu leur as volé leurs lettres par haine… tu voulais le faire souffrir… c’est ça ? Tout ce que tu voulais, c’est faire souffrir Rodrigue… tout ça car… car…
Sans attendre de réponse et un nouveau mensonge de la part de Rufus, Lambert partit sans se retourner, ne voulant pas en entendre plus, serrant la cassette et son contenu contre lui, s’y accrochant presque comme à une ancre, même si elle le noyait par sa simple existence. Comment… comment son frère avait-il pu… comment avait-il pu être aussi ignoble juste parce que… parce que leur père appréciait beaucoup les jumeaux ? Tout ça pour ça ?! Pour un ressentiment envers quelqu’un de mort depuis quatorze ans et alors le Royaume était au plus mal ?! Toute cette souffrance pour ça ? Par haine ?! Qu’il ait vu ça comme une petite mesquinerie ne l’étonnerait même plus à ce stade !
« Alors, même mon propre frère peut me trahir… Rufus… alors qui… qui est encore… »
« Est… ta… faute… ! »
« Tu n’as écouté personne et maintenant, tout le monde est mort par ta faute ! Tu as le sang de notre propre enfant sur les mains ! »
« Que pensais-tu accomplir en te comportant en tyran n’écoutant que ses ennemis ? »
« Je te hais ! »
Seuls les cris et le jugement lui répondirent… les doigts des fantômes finissant le travail de cette hache en l’étranglant encore et encore…
En arrivant dans son bureau avec l’espoir de pouvoir se poser une seconde et réfléchir à tout ce qui c’était passé, il trouva Lachésis et Thècle, visiblement furieuses malgré la façade de froideur.
L’homme avait l’impression d’observer la scène de loin, comme s’il n’en faisait pas partie, spectateur de cette farce qu’il avait écrit lui-même.
Les deux sœurs l’informèrent que l’état des comptes était catastrophique et que les baillis qu’il avait choisis lui-même étaient des incompétents.
« Je comprends… je ferais plus attention…
– Il fallait le faire avant… »
Lachésis lui apprit qu’elles savaient tout ce qui s’était passé à la capitale pendant leur absence, à quel point c’était une honte pour tout Faerghus et qu’elles avaient donc décidé de retourner dans leur famille.
« Ce serait préférable pour le Royaume que vous restiez…
– Pour finir transformer en loup nous aussi et user jusqu’à la corde par votre incompétence ? Il en est hors de question. »
Thècle ajouta que comme le voulait la coutume pour les magistrats en fin de carrière, elles rapporteraient à Charon tous leurs documents, leurs notes et leurs archives de la capitale, ainsi que leurs hommes et une grande partie de leur vivre selon le précédent instauré par Sylvain le Renard.
« Les Gautier en ont eu le droit, je me voie mal vous le refuser…
– Bien. »
Et enfin, elles enfoncèrent un dernier clou dans son cercueil en lui crachant au visage qu’elles savaient pour Patricia, qu’elles savaient ce qu’il avait osé donner comme belle-mère à leur neveu, tous les dangers auxquels il avait exposé le Royaume en l’épousant, et que les Charon n’oublieraient pas cette insulte envers deux d’entre eux.
« Pourquoi ? Finit par demander Thècle, essayant de comprendre. Pourquoi avoir exposé le Royaume à de tels danger pour une seule femme indigne de succéder à notre sœur ?
– Je l’aimais… répondit l’homme dans un souffle sans énergie.
– Si vous l’avez traité comme Héléna, pauvre femme, cracha Lachésis. Et ce n’est guère une raison suffisante pour faire planer un risque d’invasion sur la tête de tous vos sujets. Notre sœur rougirait de honte en voyant votre déchéance. »
Et qu’est-ce qu’il pouvait bien répondre à ça ? Qu’est-ce qu’il pouvait bien répondre d’autre ? Comment il pouvait se justifier ? Toutes ses décisions lui semblaient faciles, bancales et inutiles maintenant qu’on lui demandait des comptes sur chacune d’entre elles…
Devant son silence, les deux sœurs lui jetèrent à nouveau un regard mauvais avant de se détourner, partant en claquant la porte.
Lambert leva les yeux vers la chaise face à lui, même s’il savait qu’elle était complètement vide, espérant trouver quelqu’un, une âme bienveillante, un peu d’aide comme il en avait toujours trouvé à ses côtés.
Seul le Rodrigue de son cauchemar répondit à sa supplique, le toisant de haut avant de lui grogner au visage, le lacérant de ses griffes, gravant ses mots dans sa peau avec ses crocs à chaque souffle, chaque morsure…
« Il fallait y penser avant. »
Pour la première fois de sa vie, Lambert se sentit terriblement seul…
*
Rodrigue passa sa main sur sa fourrure, l’approchant pour la première fois depuis qu’ils s’étaient retransformés quelques jours auparavant. Alix et lui s’étaient reposé et avaient recommencé à prendre en main le duché, reconnaissant envers l’excellent travail de Loréa qui avait su le maintenir et résister aux insistances de Rufus. Mais depuis cette nuit, il ne l’avait toujours pas touché à nouveau, contrairement à son frère… ni même se regarder dans un miroir sans col, son cou à présent recouvert d’une grande marque sarcelle, l’entourant tout entier comme un collier… il n’avait pas trop de séquelle à part ses sens plus forts, surtout sa vue de nuit, son gout pour la viande encore plus prononcé, et il était encore plus dans la tête de son jumeau, plus souvent, même s’ils n’étaient pas sûr que c’était à cause de leur état d’esprit actuel ou si ce serait permanent… pour ce qui était positif…
La fourrure était douce sous ses doigts, épaisse et moelleuse, comme pour accueillir un petit voulant faire sa sieste dans un endroit chaud où il serait en sécurité… bien plus rassurante que ce collier gravé dans son cou, apparut un jour après qu’il ait retrouvé sa forme humaine… en regardant au niveau de la gorge de sa fourrure, il arrivait à distinguer le même motif que sur sa propre peau…
« Tu peux attendre encore un peu si tu ne te sens pas près, lui assura Alix, comme toujours à ses côtés. Ça n’a eu aucun effet sur moi mais, c’est toi le magicien et la source de la transformation. Tu es resté en loup bien plus longtemps que moi. On ne sait pas comment tu vas réagir avec ta magie…
– …je ne préfère pas… j’ai peur de la fuir si je repousse trop… les semaines qui ont passé sont déjà flous, je ne veux pas avoir l’impression que l’avenir le sera aussi à cause de cette fourrure… au moins, on sait comment me ramener si je me transforme à nouveau en l’ayant sur les épaules…
– Dans tous les cas, on va mettre un moment avant de se remettre complètement de tout ça mais, si c’est ce que tu veux, c’est toi qui te sens.
Le père lui serra la main en réponse, comme quand ils étaient petits pour ne pas se séparer, cherchant de la force dans sa présence avant de draper la fourrure noire sur ses épaules. Elle n’était pas très lourde malgré son ampleur, l’enveloppant complètement des pieds à la tête… malgré ses craintes, il y avait un côté… apaisant à ce poids, comme un bouclier qui le protégeait… mais, rien ne se passait, rien d’étrange, il restait bien humain… au moins, cela confirmait que cela ne ferait pas comme avec celle des selkies, il ne se transformerait pas dès qu’il mettait cette peau…
– Il n’y a rien… souffla-t-il de soulagement. Il n’y a rien…
– C’est déjà un bon début, lui assura Alix.
Voulant en finir aussi avec cette crainte, Rodrigue fit craquer un éclair dans sa main, faisant un exercice simple en le passant d’une paume à l’autre, avant de le faire disparaitre et de le remplacer par un sort de foi, le nosferatu brillant entre ses doigts avant qu’il ne l’étouffe. Rien non plus pour la magie de base… et il ne pourrait pas tester la magie de plus haut niveau aujourd’hui, Pierrick lui interdisait encore et son corps sortait d’une rude épreuve, il ne devait pas le maltraiter encore plus…
Ses épaules retombant de soulagement, l’homme s’autorisa un instant de répit, se laissant tomber sur son lit avec la fourrure. Alix mit aussi la sienne sur ses épaules, avant d’en mettre un pan sur celle de son frère, ce dernier faisant exactement la même chose avant de se laisser tomber épaule contre épaule côte à côte.
– Il ne s’est rien passé… la Déesse soit louée… il ne s’est rien passé…
– Ouais, on va rester humains pendant un bon moment on dirait… tant qu’on est tous les trois, on le restera…
– Oui… arriva à sourire une seconde l’ainé avant d’avouer, redevenant plus sombre. Je ne me souviens presque rien de ces dernières semaines… juste de quand je t’ai retrouvé, quand on a retrouvé Félix et mon envie de le revoir… de tous vous revoir… tous… souffla-t-il, le cadet comprenant que trop bien le « tous ». Le reste… impossible de le voir correctement…
– …Comme si c’était baigné de brume… compléta Alix. C’est pas bien plus net de mon côté… aucune idée si c’est une bonne ou une mauvaise chose… d’un côté, j’aimais courir partout avec toi mais, je n’ai pas envie de me souvenir de tout ce que j’ai déchiré avec les dents… bon, baffer Rufus, c’est pas mal comme souvenir mais, d’avoir le gout de son sang dans la bouche quand je lui déchiquetais le bras, moins … ni de quand je t’entendais pleurer et chanter tous les soirs en suppliant car, tu étais seul et qu’on voulait se revoir…
– Ça, c’est difficile à oublier… surtout tout ce qui s’est passé avant qu’on se transforme… Rodrigue se recroquevilla dans sa fourrure, comme si elle le protégerait à nouveau de cet homme. Ô Déesse et Lune… cela faisait si mal… je… c’était comme si cela les amusait tous de me déchiqueter le cœur… je n’en pouvais plus… cette transformation… c’était plus une cachette et un échappatoire qu’une vraie solution… juste pour ne plus souffrir…
– C’est normal… tout depuis des mois… c’était juste un cauchemar éveillé, autant en tant qu’humain que loup… enfin, c’est fini maintenant… on ne les reverra pas de sitôt… je ne les laisserais plus te faire plus de mal, c’est promis, lui jura Alix sans hésiter.
– Moi aussi, je te protégerais… d’eux tous et de leurs ordres absurdes… autant toi que Félix… plus rien ne vous arrivera… pas tant que je serais là…
Ils restèrent encore quelques instants l’un contre l’autre, quand ils flairèrent l’odeur du louveteau, arrivant à grands pas, une bonne odeur de groseilles fraiches avec lui… c’était la saison après tout et ils aimaient tous ces fruits dans la famille…
« Papa ? Alix ? Vous êtes là ? Demanda Félix en passant la tête dans la chambre de son père.
– Oui, entre Félix, » l’autorisa en souriant Rodrigue, toujours soulagé de le voir, son instinct lui répétant encore et encore de le garder auprès de lui, lui rappelant à quel point il avait été proche de le perdre, encore plus renforcé par la perte de Glenn si peu de temps auparavant… leur famille avait subi trop de chose en trop peu de temps…
« Il y a encore plein de groseilles dans la forêt, même si vous avez surement déjà deviné, anticipa-t-il, avant de se refermer un peu en voyant les jumeaux dans leur fourrure. Tu l’as mise ?
– Oui… je devais le faire… pour savoir… et pour le moment, rien n’a changé et cela n’a aucun effet sur moi, même quand j’utilise de la magie faible, ne t’en fais pas, lui jura-t-il. Pour le moment, je la contrôle…
– D’accord… mais fait attention quand même. »
Il les rejoignit et Rodrigue ne put s’empêcher de le tirer sur ses genoux, voulant juste rester au plus près de son fils… même s’il faisait tout pour ne pas devenir envahissant, il était devenu très collant une fois redevenu humain, cherchant toujours une trace récente du passage de ses proches, le simple fait de les savoir près de lui, qu’il pourrait arriver rapidement pour les aider et les protéger… heureusement que ses sens étaient devenus aussi aiguisés que ceux des loups, cela aidait dans ce genre de situation… pas plus tard que la semaine dernière, il n’avait pas vu Félix de toute la matinée alors, le père s’était mis à paniquer en l’appelant de toutes ses forces et à retourner toute la pièce où il était afin de trouver une trace de son petit… heureusement que Loréa avait pu vite lui remettre les idées en place, Rodrigue priant pour que Félix n’ait pas vent de ce qui s’était passé… il avait trop peur que son petit culpabilise comme quand il l’avait retrouvé… mais Félix avait senti que quelque chose n’allait pas et avait fait si attention au moindre de ses faits et gestes que Rodrigue lui avait avoué… tout le monde portait des pommes de senteurs avec un parfum spécifique à présent, histoire que l’odeur soit plus présente et que les jumeaux ne fassent pas une autre crise… c’était presque une obsession à ce stade, encore plus que pour Alix… d’après Pierrick, c’était à cause de la séparation trop violente avec sa famille, surtout aussi peu de temps après la mort de Glenn… il les avait déjà perdu une fois alors, son esprit refusait et craignait plus que tout que cela recommence…
« Là aussi, seul le temps vous permettra à tous les deux de guérir… »
Rodrigue priait pour que le médecin dise vrai… au moins, les pommes de senteur les avait un peu aidés, c’était un début…
Pour oublier son angoisse et plus profiter de la présence de son fils, le père croqua dans une des baies fraichement cueillies et passé à l’eau du lac, souriant en retrouvant le gout acide qu’ils aimaient tous.
« Elles sont très bonnes, merci beaucoup Félix.
– Avec tout ça, on avait manqué le début des fruits rouges ! On a du retard à rattraper ! En plus, depuis qu’on envoie plus rien à Fhridiad, étrangement, on a des rations plus grosses pour manger, qui l’eut cru ? Se moqua un peu Alix.
– Tout le monde, et tout le monde mange mieux maintenant, c’est mieux, répliqua Félix en avalant une baie. On est allé en chercher avec Cassandra avant qu’elle n’aille aider la patrouille aérienne…
Cependant, malgré tout, Rodrigue ne pouvait que voir l’air sombre sur le visage de son fils, un peu ailleurs.
– Il y a quelque chose qui ne va pas Félix ? Lui demanda-t-il alors, sachant que le laisser tout seul avec des pensées sombres n’apporterait rien de bon.
– C’est rien… c’est juste que… d’habitude… il fit une pause, cherchant ses mots avant de dire, ces mots si simples qui étaient aussi les plus difficiles. C’est avec Glenn…
Les jumeaux ne comprirent que trop bien, entendant presque l’ainé des deux louveteaux dire à quel point son petit frère était adorable de leur apporter des baies, juste pour le voir s’énerver à cause des taquineries, puis de le remercier en appréciant les fruits avec eux, même tous les jours… encore plus une fois revenu alors que du côté de Fraldarius, les choses commençaient à se tasser après la Tragédie, les gens étaient surtout remonté contre les dernières exactions de la capitale et tournaient toute leur rage contre la famille royale rendu responsable de tous les deuils, et même s’ils étaient dans une situation périlleuse de quasi révolte contre le pouvoir royal, les choses allaient mieux en interne. La disette s’éloignait de plus en plus de leurs foyers mais, les fantômes demeuraient, plus présent que jamais après le choc et les semaines mouvementés pour survivre… il devait encore plus hanté Félix… c’était la première fois qu’il vivait le deuil de quelqu’un d’aussi proche de lui… il était trop petit pour celui de Félicia… il l’était encore… la mort arrivait toujours trop tôt…
Rodrigue posa alors sa main dans son dos, protecteur, alors qu’il murmurait.
– Oui… il devrait y avoir Glenn…
– C’est pas juste… il devrait être là… pourquoi c’est sa chambre à lui qui est vide ?
– C’est toujours injuste, encore plus dans une situation comme celle-ci, souffla-t-il en lui frottant le dos, sentant que ses larmes n’étaient pas loin. C’est toujours dur et ça fait mal… il n’y a que le temps et le soutien qui peuvent guérir ce genre de plaie, même si elle reste toujours…
– Combien de temps ?
– Cela dépends des gens… et tu n’as pas besoin de ne plus avoir mal tout de suite… il faut que tu prennes le temps qu’il te faut pour guérir… pour ne pas être obsédé par la mort de la personne, et arriver à se raccrocher aux bons souvenirs…
– Mais ça fait mal… je veux Glenn… je veux qu’il revienne… mais je ne veux pas avoir mal… marmonna Félix en se serrant un peu plus contre son père, se cachant dans son étreinte, comme si la tristesse et le deuil ne le trouveraient pas à l’intérieur.
– Mais si tu bouches tes émotions ou fait tout pour ne pas être triste, ça va exploser un jour ou l’autre, ajouta Alix en passant sa main sur la tête de son neveu. On a mis un an avant d’accepter que notre père ne reviendrait pas, ça pourrait prendre plus de temps, et c’est pas grave. Le tout, c’est que tu ne te noies pas tout seul dedans, et que tu ne t’isoles pas sinon, ça va te dévorer aussi. Le tout, c’est que ton deuil ne te tire pas vers le bas et que tu arrives à aller mieux.
– Le principal, c’est de ne pas rester seul avec sa propre souffrance et sa tristesse, c’est le meilleur moyen pour sombrer. Tant que nous restons tous ensemble, nous arriverons à surmonter cette épreuve… qu’en penses-tu louveteau ?
– D’accord… moi aussi, je resterais avec toi papa… et avec toi aussi Alix… leur jura Félix, restant encore dans l’étreinte rassurante. « La meute est forte ensemble »… c’est ce que disait Glenn…
– Il avait bien raison, » sourit un peu Rodrigue malgré la tristesse, essayant de s’accrocher aux souvenirs de son fils ainé souriant alors qu’ils étaient en famille.
Ils passèrent un peu de temps ensemble, les jumeaux n’ayant pas encore retrouver assez de force pour travailler toute la journée, même s’ils avaient repris. Ils ne pouvaient pas laisser tout le travail de gestion du duché uniquement à Loréa, ils devaient le reprendre en main mais, Pierrick les mettait en garde contre le risque de rechute. Mieux valait éviter de trop forcer pour le moment.
Félix continuait de leur montrer les leçons qu’il avait pu faire pendant ces dernières semaines. Rodrigue sourit en voyant tout le travail de son fils, fier de voir qu’il s’était accroché malgré tout pour continuer à être assidu dans ses études. Tout ceci lui serait très utile quand il serait grand…
Ils entendirent tous un grondement sortir de sa poitrine.
Sur le coup, l’homme ne comprit pas trop, commençant à s’inquiéter de ce que cela voulait dire qu’il pouvait faire ce bruit et comment il avait pu le faire physiquement, jusqu’à ce qu’après avoir été étonné comme eux, son louveteau se mette à sourire en déclarant.
« Tu ronronnes comme un chat !
Il sourit alors, passant sa main sur la tête de son petit en soufflant, moins anxieux que tout à l’heure à cause de ce grondement.
– C’est parce que je suis très fier de toi… »
*
Quand les côtes de Kleiman sortirent de l’horizon, Ivy regarda tout autour d’elle, tentant d’évaluer encore une fois les forces en présence. Il y avait son navire autant fait pour le commerce que pour les combats maritimes, mais aussi tout un tas d’embarcations diverses et variées, autant de pêche en haute mer que de cabotage, de grands commerces ou fluviales qui avaient osé les suivre sur des eaux bien plus houleuses. Tout le monde savait que Kleiman était dangereux, c’était évident, et plus personne ne pouvait entrer dans sa ville sans que plusieurs marins ne disparaissent alors, entre ça, la colère générale contre l’inaction du pouvoir royal, et les talents d’orateur d’Oswald, les marins de toute la côte nord-ouest de Faerghus les avaient rejoints. Plusieurs langskips srengs glissaient à toutes vitesses devant eux, ayant même eu le temps de se rendre en Duscur pour rendre les têtes des morts à leurs frères afin qu’ils puissent avoir les hommages funéraires, mais aussi les informer de l’objectif de cet escadron de marine hétéroclite, autant pour avoir des renforts que pour éviter qu’ils ne croient à une autre invasion. Bon, officiellement, les duscuriens n’avaient rien répondu pour ne pas encore plus compliqué leurs relations avec Faerghus mais, plusieurs navires de grandes guildes commerçantes avaient pris la mer avec des cargaisons diverses pour les rejoindre, avec la complaisance discrète d’un chef local.
Même après une vie entière à parcourir toutes les mers, Ivy avait rarement vu une compagnie aussi hétérogène, une bonne partie parlant mal la langue des autres mais, le langage des ports permettait de se comprendre entre eux afin de manœuvrer efficacement tous ensemble.
Tout ce monde acceptait de coopérer dans un seul but : arrêter Kleiman et sa soif de sang, autant duscurien que des simples passants dans sa ville.
« Qui aurait pu croire que tout ceci pourrait arriver et qu’on serait entrainé dans une histoire pareille… marmonna Ivy.
– Recommencer est un meilleur mot qu’arriver…
Elle regarda Oswald, son regard sombre braqué vers la côte. Il était en habit simple d’archer, bien protéger par son armure, son carquois rempli de flèche, comme un soldat ordinaire, à l’exception de la capuche tout autour de sa tête pour éviter qu’on le reconnaisse. Elle ne l’avait jamais vu aussi renfermé sur lui-même, même si ses yeux restaient déterminés.
– Les cinq messagers ne sont pas revenus. Ils auraient dû revenir depuis au moins trois jours alors qu’on demandait juste à Kleiman de s’expliquer sur la disparition de vingt-sept personnes. Ma main au feu, nous retrouverons leur tête sur une pique au-dessus des portes du port… ou alors, il va nous les renvoyer couper en morceaux… c’était dans les « bonnes » habitudes de Clovis… j’espérais que tout ceci se serait terminé une fois que Clovis a été décapité et envoyé dans le caveau des criminels… Justine aussi disait que c’était terminé… qu’on aurait pu se dire que nos enfants ne vivraient jamais des choses pareilles, mais tout recommence encore… il serra le poing sur son carquois. Ludovic doit se retourner dans sa tombe en voyant la déchéance de son sang.
Ivy hocha la tête, comprenant le tourment qui l’habitait. Oswald avait surement vu plus de choses dans sa vie que bien des gens avec qui il avait grandi, leur avait même survécu pour la plupart, et il avait survécu au règne de Clovis sans que l’Alliance ne soit envahi avec Justine von Daphnel. Il aurait surement préféré finir sa longue vie sans devoir affronter tout ça.
– On a ça maintenant alors, mieux vaut le régler maintenant avant que ça n’empire et tant qu’on le peut encore. En plus, les espions srengs ne se sont pas fait repérer depuis qu’ils sont infiltrés et ils ont pu saboter les chaines qui protègent l’entrée du port. On est aussi arrivé à avoir une bonne idée d’à quoi ressemble l’intérieur des murailles avec les corbeaux des srengs, et comme vous l’avez dit, on voit d’ici que Kleiman est un seigneur mineur avec juste une grosse maison qui n’est pas construite comme une forteresse, ça devrait nous simplifier la tâche, même si on doit faire attention à ce qu’il nous réserve.
Oswald hocha la tête, arrivant à fendre un léger sourire.
– Vous avez raison. Si les messagers ne reviennent pas, raison de plus pour se dépêcher avant que les espions n’y passent aussi. Nous devons arrêter tout ceci, au moins en coupant la tête du pire, et je fais confiance aux faerghiens pour finir d’arracher les racines du mal. Pour le moment, concentrons-nous sur la bataille qui nous attend. Merci capitaine.
– C’est normal.
– Eh ! Les leicesters !
Oswald baissa la tête vers le navire duscurien juste en-dessous de lui, la capitaine leur hurlant que c’était l’heure. Ivy répondit qu’ils étaient prêts.
Les navires se mirent alors en ordre de bataille comme ils pouvaient malgré leurs différences de structures et d’expérience, celui d’Ivy et des quelques corsaires expérimentés menant les autres afin de les protéger, leur coque étant faite pour résister à des assauts. Entre eux, les navires srengs avaient rangé leurs voiles afin d’être plus discrets, se cachant pour que les défenseurs ne les voient pas foncer vers les chaines sabotées. Derrière, en seconde ligne, les navires plus fragiles se tenaient prêts. Dotés de rames, ils seraient chargés de tous les emmener dans le port, plus rapide et maniable que les grosses caravelles à voiles. Leur objectif était au moins d’atteindre le port, puis s’enfoncer en ville jusqu’à la maison seigneuriale. Une fois là-bas, il faudrait capturer Kleiman et ses hommes de confiances au plus vite et le mettre aux arrêts avant qu’ils ne puissent s’enfuir.
Ils devaient être rapide, précis et tout faire pour éviter de trop grosses pertes à cause de leurs forces limitées et très diverses. Il n’aurait droit qu’à un seul essai sinon, la corde tendue qui les tenait tous ensemble cèderait et ils se disperseraient surement sur le champ…
« Comme quand on a une proie qui ne nous a pas repérés dans notre ligne de mire… »
Oswald empoigna plus fermement son arc, faisant une prière aux Braves et à sa bonne amie Justine. Il ne louperait pas sa cible.
Les navires s’étaient approchés à portée de voix quand un homme leur hurla depuis le haut des remparts.
« Halte-là navires ! Que faites-vous ici !
– Nous sommes de la corporation des marchands de Faerghus et des navigateurs venus d’autres horizons ! S’écria la capitaine qui avait été élue pour les représenter, une pure faerghienne, afin de mettre les gardes plus en confiance que si c’était des étrangers qui arrivaient en masse sans aucun représentant faerghien. Nous avons envoyé cinq messagers auprès de votre seigneur afin de lui demander pourquoi des matelots et des civils disparaissaient aussi souvent dans ce port ! Etant donné qu’ils ne sont pas revenus depuis trois jours, nous sommes venus en masse lui demander de répondre à nos questions et de faire en sorte que ces disparitions cessent !
– Et notre seigneur les a envoyés paitre ! Nous n’avons à répondre que devant son seigneur Mateus et le roi !
– Mais un seigneur, aussi petit soit-il, se doit aussi d’assurer la sécurité sur ses terres ! S’il ne remplit pas ce devoir, nous pouvons venir directement lui demander des comptes ! En vertu de ce droit, nous voulons lui parler tous autant que nous sommes ! Et s’il les a repoussés, où sont passées ces cinq personnes ?!
– Ce n’est pas notre problème ! Foutez le camp maintenant ! Ou nous emploieront la force contre vous ! Que vous soyez faerghiens, leicesters, ou des meurtriers de duscuriens ! Nous sommes déjà très cléments de ne pas avoir incendié les navires qui transportent les assassins de nos frères !
Il eut quelques minutes de concertations entre les bateaux, autant pour vérifier que tous étaient prêt discrètement, que pour éviter que les défenseurs se méfient, ainsi que pour donner un peu plus de temps aux espions à l’intérieur de finir leur travail. La femme finit par hurler, en cœur avec tous les autres navires qui hurlèrent dans leur langue respective.
– Nous refusons !!! Nous rentrerons !!! Et nous libérerons nos camarades !!!
– Vous choisissez donc de finir par le fond ! Arbalétriers ! En position !
– Navigateurs du Midgard ! Cria Oswald en sreng. À vous !
– On a vu ! Que Thor combatte à nos côtés ! RAMEZ !!!
Tous les capitaines srengs abattirent le dos de leurs armes sur le tambour des rameurs, donnant le signal de départ.
Les navires cachés filèrent tout de suite vers les portes, glissant à toutes vitesses sur les eaux vers les dessous de la porte, s’attaquant tout de suite à la chaine qui le fermait. Normalement, des assommoirs étaient placés juste au-dessus des chaines pour contrer ce genre d’attaque sans devoir passer la tête au-dessus des créneaux mais…
– Les assommoirs ont été bouchés ! On a été saboté !
« Les espions srengs n’ont pas volé leur réputation d’être plus redoutables à dix qu’une armée de dix mille soldats ! »
Un énorme trait passa tout près d’eux, endommageant le bastingage. Le prochain tir atteindrait leur coque, c’était sûr ! Oswald repéra aussi vite qu’il put la meurtrière où devait être caché une arbalète de tour, prête à enfoncer leur pont. Il leva tout de suite son arc, se concentra sur la trajectoire qu’avait emprunté le trait, et tira sans hésiter. La flèche arriva à passer la meurtrière et étant donné qu’aucun carreau d’arbalète ne suivit le premier, il avait dû toucher le responsable de l’arme. Kleiman était officiellement un seigneur sans beaucoup de ressource, il ne devait pas avoir les moyens d’avoir plusieurs engins de guerre aussi puissant et couteux qu’une arbalète de tour, ni beaucoup d’homme aptes à la manier. Les assaillants devraient être tranquilles un moment avant que les défenseurs n’arrivent à trouver quelqu’un d’autre pour la réarmer et l’utiliser.
Au bout de quelques minutes, le cri rauque d’un cor se fit entendre.
– Le signal ! Aux navires à rames ! S’époumonna Ivy en quittant son poste en rassemblant ses hommes, Noce répétant ses ordres en volant de partout.
Oswald obéit, sautant lui-même dans le premier navire qui arriva avec la capitaine. Une fois la chaloupe pleine, les marins se mirent tous sur les rames, ramant au rythme du tambour pour s’harmoniser entre eux. Les minutes sans pouvoir rien faire d’autres qu’attendre paraissaient interminables, à la fois dans l’attente d’arriver et prêt à contre-attaquer dès qu’un ennemi était à portée de flèche.
Une fois les portes et les chaines passées, l’archer put mieux voir l’aspect de la ville. Effectivement, petite ville sans trop de moyens et avec des voisins pas trop agressifs… il n’y avait même pas de quais pour débarquer, seulement une jetée où s’échouaient les bateaux de pêche mais, ça les arrangeait.
Les marins attendirent à peine que la coque des chaloupes soient à terre, sautant sans hésiter au sol pour continuer à avancer vers la maison seigneuriale.
« Navires srengs ! Navires duscuriens ! Occupez-vous de tenir les rues ! » Leur rappela Oswald avant de descendre à terre. Les habitants sortiraient moins pour se défendre en voyant des ennemis occuper le terrain, ce qui éviteraient des heurts avec la population de la cité.
Suivant Ivy qu’il couvrait avec ses flèches et remerciant son emblème de l’empêcher d’être trop fatigué malgré ses os qui vieillissaient, Oswald et les autres fodlans s’élancèrent dans la rue principale avant d’entrer dans la maison seigneuriale, peu empêcher par la garde déjà occupée sur le port, et la quelque vingtaine d’hommes restant n’était guère suffisante pour arrêter une grosse centaine de marins déterminés.
Une odeur de cadavre et de corruption piqua les narines des assaillants dès qu’ils rentrèrent dans la cour.
« Cette odeur… Attention ! Les mages noirs sont ici ! Restez sur vos gardes ! Rappela le grand-duc alors que son emblème se calmait une seconde, ayant déjà prévenu tous les navires que Kleiman pourrait utiliser une magie interdite.
– Oswald ! Là-haut !
L’archer regarda dans la direction qu’Ivy lui disait, réagit au quart de tour quand il vit un éclat de magie noire se former et décocha une flèche dessus, la faisant exploser au-dessus d’eux avant que le sort ne touche qui que ce soit. Dans le même temps, Ivy passa sur le côté de l’archer, embrochant un ennemi fonçant sur lui sur le fil de son épée, surveillant derrière son épaule pendant qu’Oswald surveillait le ciel en ordonnant.
– Par ici ! Vite ! Ils sont surement à l’intérieur !
Après avoir enfoncé la porte, les marins entrèrent en trombe dans la grande salle où ils trouvèrent Kleiman, entouré de ses conseillers et de plusieurs mages étranges, avec des motifs qui disaient quelque chose à Oswald…
« Les mages noirs de l’époque de la guerre du Lion et de l’Aigle ! Ils portaient ses motifs-là ! Méfiez-vous des gens en noir ! C’est les plus dangereux ! »
Comme pour souligner ce qu’il venait de dire, une magicienne commença à charger un sort et le lança en vitesse, balayant un marin en un instant, puis un autre qui tentait de l’attaquer par derrière. Le sort ne toucha qu’eux mais, il ne laissa que des sortes de momie complètement desséchées, comme vidées d’eau, de sang et d’énergie vitale, tombant au sol dans un fracas d’os morbide, provoquant la panique et la fuite d’une partie d’entre eux pour éviter d’être le suivant.
Ivy tira Oswald derrière un escalier pour se protéger des sorts, l’aidant alors que la fatigue retenue par l’emblème commençait à l’engourdir et brûler ses muscles vieillissants… C’était pas vrai ! Pile au pire moment ! Sans l’Infaillible pour continuer à le stimuler même pendant un temps calme de la bataille, il disparaissait de plus en plus vite ! Il ne devait pas lâcher maintenant ! La magicienne noire s’approcha comme si elle ne craignait pas de se prendre une flèche ou un projectile, observant tout autour d’elle avec un petit sourire vicieux, les provoquant sans vergogne. Elle empestait la magie noire…
« Les insectes tentent de se débattre à ce que je voie… susurra-t-elle avant d’ajouter en regardant dans leur direction. Enfin, on a aussi un insecte plutôt rare… ça fait longtemps que je n’avais pas eu l’occasion d’attraper un emblème majeur… allons petit emblème majeur… montre toi… »
« Merde ! C’est quoi cette femme ?! Enragea à mi-mot Ivy. Votre emblème a disparu avant qu’on entre ! Et elle a fait quoi à ces gars ?! C’est ça les effets de la magie noire ?!
– Elle porte les mêmes motifs que ceux du bataillon puant… haleta Oswald. Et c’est bien elle qui sent la magie noire…
– Ah ça pour puer, elle pue… elle comme tous les autres qui ont ce motif d’œil… »
« Allons… lequel d’entre vous est l’emblème majeur ? Honnêtement, il m’intéresse plus que vous tous réunis alors, on peut faire deux choses. Soit, je vous attrape un par un et je vous transforme tous comme les deux insectes qui tombent en poussière sur le plancher pour faire le tri, l’emblème majeur résistera mieux à mes sorts, soit vous me livrez et je vous laisse tous partir en vie.
Un silence retentissant tomba dans la pièce, juste occupée par Kleiman et ses hommes en train de se débattre contre la porte de la trappe qui devait leur servir à s’enfuir, bloquée par une hache qui avait volé quand les assaillants étaient entrés. Ivy et Oswald échangèrent un regard lourd alors que la femme continua, s’échangeant la même question ainsi que la même réponse.
– Cela me semble un marché correct. De toute façon, de misérables insectes tel que vous ne pourrez jamais battre un être qui vous est aussi supérieur tel que moi, vous venez de le voir par vous-mêmes alors, saisissez donc votre chance de survivre et de continuer votre pitoyable existence. Il suffit juste de me donner l’emblème majeur. Vous avez la parole de Bias, la Meneuse Érudite…
Elle fut exaucée quand Ivy poussa aussi violemment qu’elle put Oswald hors de leur cachette, le plus loin possible d’elle. Le vieil homme se recroquevilla sur lui-même, la face tournée vers le sol, sa capuche défaite laissant voir ses cheveux gris et sa fatigue rendant le moindre de ses mouvements tremblants et incertains, se tenant la poitrine comme si son cœur était sur le point de lâcher à cause de toutes ses émotions.
La femme eut un sourire carnassier, s’approchant du vieillard en déclarant.
– Évidemment, vous préférez vivre, c’est bien. Vous avez un minimum d’instinct de survie mais bon, c’est la base pour les bêtes. Et dommage, l’emblème majeur est décrépit et ancien, il ne va plus survivre longtemps et n’a sans doute plus la force de sa jeunesse… les bêtes de votre genre vieillisse si vite… marmonna-t-elle en se baissant vers lui. Enfin, c’est devenu si rare les majeurs à présent, on fera avec… vient donc…
Avant qu’elle n’ait pu finir sa phrase, Oswald se retourna d’un coup et lui envoya le pot minuscule autour de son cou en plein visage, libérant toute la poudre urticante qu’elle contenait, puis l’homme enfonça la pointe d’une de ses flèches en plein dans l’œil, lui transperçant surement le crâne. Bias siffla de douleur en se redressant mais, avant qu’elle n’ait pu s’en débarrasser ou attaquer à nouveau, une épée lui traversa tout le dos pour ressortir de sa poitrine.
– Pour un être supérieur, t’es aussi fragile que les « insectes » qu’on est, marmonna Ivy.
Elle serra le manche de son épée puis, la ressortit d’un coup du corps de la magicienne, laissa un sang rouge très sombre, presque noir s’écouler sur le sol alors que Bias s’effondrait, morte comme tout le monde le serait après une blessure pareille. Les autres mages avec les mêmes motifs qu’elles se mirent tous à paniquer, laissant le temps aux autres assaillants de les maitriser avec Kleiman et le reste de ses sbires.
Reprenant son souffle, Ivy s’approcha Oswald en lui demandant.
« Tout va bien ?
– Oui, ça va, même si ce genre de cabriole n’est plus de mon âge, répondit-il en cherchant un peu son équilibre à cause de la fatigue.
– Bah, pour un gars de quatre-vingts balais, vous vous en sortez plutôt bien, lui assura-t-elle en l’aidant à se rester debout avant d’avouer, même si j’ai eu peur que vous ne vous repreniez pas assez vite.
– J’ai encore quelques ressources on dirait… il eut un sourire en voyant Kleiman ligoté avec ses sous-fifres, alignés le long du mur et désarmés. Au moins, nous les avons attrapé… J’ai bien fait de vous faire confiance. »
*
Une fois Kleiman capturé, la plupart des gardes s’étaient rendus sans trop de difficultés, épuisés par les derniers évènements, même si une partie s’était battue jusqu’au bout en visant particulièrement les duscuriens ou toutes personnes avec une peau un peu sombre, soit à peu près n’importe qui qui passait son temps dehors. Ceux-là avaient refusé de se rendre et avaient préféré se faire tuer plutôt que capturer. Bon, au moins, c’était déjà un problème de régler pour le coup, aussi sordide la conclusion pouvait l’être. Leur patron était tout aussi loquace qu’eux, refusant de dire quoi que ce soit quand Oswald, Ivy et tous les autres le pressèrent de question, se murant dans le silence. On le menacerait de lui arracher la langue qu’il ne parlerait pas, même au sujet de cette Bias.
Et enfin, il restait le groupe de mages étranges avec ce motif d’œil sur eux, rendus inoffensif grâce à des menottes duscuriennes bloquant leur magie. Au début, Ivy crut qu’il faisait partie d’un peuple vivant à Morfis à cause de leur peau extrêmement pale, pratiquement cadavérique, combinée à leur couleur d’yeux et de cheveux très rares mais, ils ne parlaient pas la même langue qu’eux. Enfin, ils semblaient comprendre le fodlan mais, pas moyen de les faire parler eux aussi.
« Rrrrhhhaaaa… ! Pas moyen de les faire passer à table ! Enragea Ivy après une nouvelle tentative de les interroger. Soit ils restent muets comme des carpes, soit ils nous insultent en nous traitant d’insecte !
– C’est vrai qu’ils n’ont pas l’air de vouloir parler mais, restons patient, une partie semble plus se taire par peur que par défi. Ils sont tout maigre et dès qu’on les approche ou élève un peu la voix, ils se recroquevillent sur eux-mêmes quand on arrive comme des personnes battues, fit remarquer Oswald. Les deux qui nous insultent constamment semblent être les sous-chefs après cette Bias et encadrer les autres. Tant qu’ils seront là, ils ne diront rien.
– Hum… alors, autant les séparer et tous les séparer, au moins les chefs de file. Les langues devraient se délier un peu sans eux.
– Oui, et il faut également bien les traiter, cela les mettra en confiance pour qu’ils nous expliquent ce qui se passe ici et nous ouvrent les portes qui nous résistent encore… avec ce genre de personne, un bon repas et de l’attention est le meilleur moyen de les faire parler… »
Sans hésiter, ils isolèrent les chefs de file, puis firent attendre un peu les autres en leur donnant un repas maigre pour le midi. Ce temps seuls avec eux-mêmes et sans nouvelle les angoisseraient sans doute, ils se demanderaient ce qui allait arriver à leurs chefs d’un côté et à eux de l’autre, ce qui rendraient tout geste bienveillant à leur égard plus fort.
Le soir, Oswald leur fit apporter une miche de pain chacun, un grand bol de soupe et une pomme, tout en précisant à ceux qui leur donnerait d’être agréables avec eux. Le petit groupe de sept personnes se tenaient recroquevillés dans un coin, évitant la lumière du soleil couchant, fuyant même la lumière de la bougie en mettant leurs mains sur leurs yeux. Après tout ce qu’il avait vu ces dernières semaines, Oswald devait avouer qu’il serait presque prêt à croire qu’ils étaient comme les vampires des légendes craignant la lumière mais, s’il se fiait à leur réaction quand ils avaient été emmenés ici, c’était plus qu’ils étaient très sensibles à la lumière, comme des créatures des cavernes.
« Veuillez m’excuser, je ne voulais pas vous faire mal, s’excusa-t-il en soufflant sa chandelle, la remplaçant par une petite boule lumineuse plus tamisée. Cela vous convient mieux ?
– … oui… c’est pour nous ? Demanda un homme en montrant les plateaux avec méfiance.
– Oui, c’est votre repas pour ce soir. Vous pouvez manger à votre saoul, leur assura-t-il, ne vous gêner pas.
– De la nourriture d’inférieur, marmonna une femme, le nez retroussé de dégout.
– C’est ça ou vous sautez à la corde alors, fait pas la fine bouche, grogna Ivy, son poignard et son épée à sa hanche afin de dissuader le moindre soupçon d’attaque sur Oswald.
– Une bête qui n’a même pas d’emblème n’est qu’un insecte, rétorqua-t-elle avec bravache.
Cependant, à part ses deux-là, les autres prirent leur propre assiette, tremblant un peu d’appréhension avant de gouter leur soupe. Une d’entre elle eut l’air étonné, regardant son simple bol de brouet comme si elle tenait le plus grand festin de tout Fodlan entre ses mains, avant d’en reprendre une cuillère sans hésiter.
– Vous appréciez on dirait, lui sourit Oswald, affable. C’est encore meilleur si vous mettez du pain avec.
Elle le regarda avec des yeux ronds, se recroquevillant à nouveau quand il lui adressa la parole mais, elle l’écouta, plongeant sa miche dans sa soupe avant de le croquer, ayant à son tour un grand sourire en disant quelque chose dans sa langue qui devait se traduire par « c’est bon », avant de déclarer en fodlan.
– C’est bon.
Elle se fit cependant tout de suite reprendre par la femme qui avait traité Ivy d’insecte, la réprimandant sévèrement à son ton mais, l’homme à côté de celle qui appréciait son repas dû la défendre car, l’orgueilleuse se tut et se résigna à manger son propre repas en ronchonnant. Ils parlaient entre eux une langue étrange… ça ne ressemblait ni au fodlan, ni à l’almyrois, ni au sreng, ni au duscurien, ni à aucune langue qu’Oswald avait entendu pendant sa vie. Soit ils venaient vraiment de contrées reculées, soit ils avaient développé leur propre langage pour communiquer discrètement ensemble.
Celle qui les avait remerciés finit la première en savourant sa pomme après avoir demandé ce que c’était, puis déclara.
– Merci pour ce repas. C’était très bon…
– C’est normal. Je suis content que cela vous ait plu… est-ce que je peux vous demander votre nom ?
– … matricule 456.
– Un matricule ? Vous n’avez pas de prénom à vous ?
– Non, l’Agastya et les grands Meneurs nous interdisent de dire notre nom.
– Ah ? Et pourquoi donc ?
– C’est ainsi, ils nous l’interdisent. Ils sont les seuls à avoir le privilège d’en porter un. Les ouvriers comme nous ne portent qu’un matricule. C’est déjà un grand honneur pour des inférieurs tel que nous d’avoir un numéro attribué par le Grand Agastya…
– C’est débile, ça vous réduit à un numéro alors que vous êtes des humains, comme eux, marmonna la capitaine. Y a que les bagnards et les criminels qui ont des matricules, et c’est pour bien leur rappeler que leurs actes sont tellement horribles qu’ils sont à peine humains.
– Un insecte ne peut pas comprendre que l’on doit le respect aux esprits supérieurs tel que les grands Meneurs et surtout envers l’Agastya, grogna l’orgueilleuse en faisant mine de les regarder de haut, même si Ivy la reprit à nouveau.
– Alors, si nous, on vous appelle par votre matricule, on vous est supérieur étant donné que c’est les « esprits supérieurs » qui vous appelle par des numéros et on est leur ait supérieur car en plus d’avoir un prénom avec un titre, on a en plus un nom de famille alors qu’eux n’en ont pas. Si on est des insectes à ce point, on peut vous appeler par un prénom, et c’est plus agréable pour tout le monde.
– De plus, chez nous, c’est très impoli d’appeler quelqu’un par un numéro, c’est comme ça qu’on parle des criminels comme vient de le dire le capitaine Drake. Par exemple, je m’appelle Oswald, enchanté de faire votre connaissance, déclara-t-il en levant sa main droite. Et vous ?
L’orgueilleuse foudroya la plus bavarde du regard, lui interdisant de parler mais, au bout de quelques secondes et hésitations, elle leva à son tour sa main pour la poser sur son front en déclarant, avant de serrer celle de l’homme.
– Alors… Pomme… ou Soupe… c’est bon… enchanté de faire votre connaissance Oswald.
– Moi de même. Et Pomme est un joli prénom.
L’homme qui l’avait défendu écarquilla les yeux en la voyant serrer la main d’Oswald, lui demandant quelque chose dans leur langue en paniquant, même si Pomme répondit en lui montrant sa paume.
– Bah non… y a rien, tu voies ?
Il eut l’air étonné, puis demanda, visiblement sans voix par cette simple poignée de main.
– Je… je peux aussi ?
– Bien sûr. Enchanté… ?
– Je ne sais pas… Ivy ? C’est joli… si deux personnes ont le droit de porter le même prénom…
– Bien sûr, on ne s’en sortirait plus sinon mais, c’est plus un prénom de femme mais, tu pourrais t’appeler Vivian ? Lui proposa la capitaine. On reste dans les mêmes sonorités comme ça.
Il hocha la tête avant de serrer à son tour la main d’Oswald avec appréhension, avant de la retirer avec étonnement en voyant qu’elle était toujours comme avant. Les trois qui n’avaient rien dit suivirent aussi en se présentant en utilisant apparemment des mots de leur langue, qui eurent la même réaction.
– On… on nous avait toujours dit que pour des ouvriers tels que nous, toucher une bête avec un emblème majeur nous brûlerait… surtout les tarés comme moi et matri… Vivian… avoua Pomme en regardant leurs mains à tous. Que le sang des enfants de la Noyeuse nous dévorerait les mains si on le faisait… quand c’est l’emblème mineur, ça piquerait comme du salpêtre mais, que les emblèmes majeurs brûleraient comme le soleil… que seuls les esprits supérieurs comme les grands Meneurs et l’Agastya étaient assez forts pour résister…
– Et bien, je dois avouer que c’est la première fois que j’entends une telle histoire ! Je vous rassure, je n’ai jamais brûlé personne en leur serrant la main ! » S’esclaffa Oswald, riant à moitié noir. Ces personnes avaient été maintenus dans l’ignorance, surement pendant des années afin de mieux les contrôler, comme dans les sectes les plus dangereuses. Qu’ils ne se rendent même pas compte de ce qu’ils faisaient ne l’étonnerait même pas vu ce qu’il avait devant le nez. Enfin, ça les rendrait plus facile à manipuler maintenant qu’ils voyaient de leurs yeux des preuves de ces mensonges.
Ils finirent tous de manger, le remerciant dans leur langue et en fodlan, avant que le grand-duc ne leur avoue, l’air sombre.
« Merci pour votre confiance. Je dois être honnête avec vous, l’heure en ville est très grave. Énormément de marins ont disparus dans ce port et nous avons des raisons de penser que votre employeur, Kleiman, est à l’origine de ses disparitions. À l’origine, nous sommes venus ici pour retrouver ces disparus et éviter qu’il y en ait d’autres. Après la démonstration de force de cette femme, Bias, nous sommes tous très inquiets pour eux. Étant donné que vous étiez en train de vous enfuir avec lui, nous avons toutes les raisons de penser que vous êtes leurs complices, et vous risquez d’être punis de la même façon qu’eux, même si vous n’étiez que des exécutants… leur apprit-il, voyant leurs joues blêmir de plus en plus au fil de ses mots. Cependant, si vous acceptez de nous aider, on pourra s’arranger pour vous éviter de finir comme lui. Par contre, il va falloir nous aider à retrouver les disparus et nous dire tout ce que vous savez.
Oswald les observa, voyant toute l’hésitation se peindre sur leurs visages anxieux. Pomme finit par ouvrir la bouche, tremblante comme une feuille.
– D’acc…
– Non !!! …
Celle qui les avait traités d’insecte s’énerva, reprenant violemment la jeune fille qui se décomposa, morte de peur mais, Oswald intervient, alors qu’Ivy faisait reculer la femme en colère.
– Cause correct aux tiens, c’est pas des chiens.
– La capitaine Drake a raison, on ne parle pas comme ça aux autres. Écoutez, je voie que vous avez peur et qu’elle vient de vous menacer mais, si vous nous aider et nous avouez tout ce qui s’est passé ici, nous vous aiderons et vous ne serez pas en danger, vous avez ma parole.
Pomme le dévisagea, demandant en tremblant, Vivian se tenant à elle en serrant leurs mains ensemble.
– Même contre l’Agastya ? Même contre l’être le plus puissant ? L’Agastya est l’Agastya, l’incarnation de la connaissance et de la puissance sur terre, le chef suprême des terres de la Grande Sphygi qu’il dirige… per… personne ne doit lui désobéir, le questionner ou lui résister…
– Oui, même contre lui s’il veut vous faire du mal ou vous forcer à faire des choses que vous ne voulez pas. C’est lui qui vous a raconté l’histoire que si vous touchiez quelqu’un avec un emblème mineur, vous serez brûlé ?
Pomme se mordit la lèvre avant d’hocher la tête.
– Pour quelqu’un qui sait tout, il vous a dit de sacrés mensonges, leur fit remarquer Ivy avec un air narquois après Oswald. Et s’il est aussi fort que cette Bias, on devrait s’en sortir, on a eu qu’à lui balancer de la poudre urticante dans la gueule et à l’embrocher avec une épée pour la battre. Même si votre Agastya est plus fort, on devrait arriver à le battre en faisant fonctionner nos neurones. Alors, faites ce que vous pensez être juste selon vous, pas selon votre Grand Con si génial qu’il est obligé de mentir en permanence pour se faire obéir car, un peuple qui réfléchit, c’est chiant à gérer.
– Agastya… crrrrétin… marmonna Noce sur son épaule.
La jeune femme finit par craquer, hochant la tête alors qu’elle prenait peut-être une des premières décisions de sa vie.
– Je vous montrerais et vous dirais tout… maintenant que la Meneuse Érudite est morte, sa magie ne devrait plus rien verrouiller… Juste… juste je ne veux pas retourner à Shambhala.
– Moi aussi, je veux bien vous aider, ajouta Vivian. Mais par pitié, ne nous renvoyez pas là-bas… ils nous tueront pour vous avoir parlés…
– Cela devrait pouvoir se faire, leur assura Oswald.
Les deux mages se levèrent, sous le regard effrayé des trois qui avaient serré la main du descendant de Riegan, et celui désapprobateur des deux derniers mais, ils restèrent fermes sur leur décision et les suivirent hors de la pièce. Les deux amis – peut-être… ça ressemblait à de l’amitié selon le grand-duc mais, il n’était pas sûr qu’ils sachent même ce que c’était… – les ramenèrent dans la grande pièce centrale, leur disant que leur « laboratoire » était sous la grosse dalle par où Kleiman et eux-mêmes avaient tenté de s’enfuir. Avec l’aide de plusieurs forgerons et tailleurs de pierre de la ville, ils arrivèrent à la forcer malgré les déformations, puis des hommes en armes descendirent les premier, suivit d’Ivy, Oswald, Pomme et Vivian.
Le boyau était assez étroit, à peine large comme un chevalier en armure, mais pour des personnes aussi maigres et de petite taille que les deux mages, cela restait praticable. Aucune torche n’éclairait l’endroit, remplacé par des sortes de longs rubans luisant, encastrés de chaque côté du couloir, indiquant le chemin dans la pénombre. Si c’était les lumières auxquels ils étaient habitués et qu’ils passaient beaucoup de temps sous terre, ce n'était pas très étonnant qu’une flamme leur fasse mal aux yeux, manque d’habitude… une odeur de plus en plus nauséabonde envahissait leurs narines alors que les deux mages baissaient la tête, gagnés par la honte… une odeur de cadavre et de fumée… de magie noire…
Le groupe marchait depuis quelques minutes quand Oswald commença à entendre les hoquets de stupeurs des hommes d’armes devant eux, avant qu’il ne voie le laboratoire de lui-même, ne pouvant contenir son incompréhension mêlée d’horreur à son tour. Le boyau débouchait dans une énorme cavité éclairée par des pierres semblables aux veines luisantes, éclairant un ensemble de table semblable à celle des chirurgiens mais, avec d’énormes attaches pour tenir les membres, l’odeur de sang séché et de chair putrifié rendant l’air pratiquement irrespirables prenant tout son sens en les voyant. Plus au fond, il y avait un couloir avec deux côtés bien distincts : à leur gauche, il y avait des rangées de dizaine de tubes transparentes comme du verre où flottaient des sortes de boules, et à droite, un damier de pressoirs énormes, de sorte de cuves surplombés de cheminé, et de grands casiers entre les deux.
C’était ordonné au cordeau… presque scientifiquement…
« Qu’est-ce qu’il y a dans les cuves et les casiers ? Osa demander Oswald, son sang se gelant de plus en plus en devinant ce qu’ils contenaient.
– Vos semblables qu’on a récupéré encore vivant au projet Delta qui a eu lieu quelques lieux plus à l’ouest, et des personnes sur le port, dont je m’occupe, répondit Pomme avec une toute petite voix, les yeux baissés, serrant sa tresse rose vif dans ses mains. Dans les casiers, c’est les corps des morts dont s’occupe Vivian. On est deux défaillants alors, on a la tâche de s’occuper de vos semblables, que ce soit pour les maintenir en vie pour moi ou se débarrasser des restes pour Vivian… c’est ce qui est le plus dégradant.
– Et qu’est-ce qui est pas dégradant pour vous ? » Demanda un soldat duscurien en regardant la scène avec horreur, conscient que plusieurs de ses frères et sœurs avaient dû passer par cette sale macabre. Au nom des Braves, heureusement que les murs ne pouvaient pas parler, même si le simple fait d’imaginer tout ce qui avait pu se produire ici rendait ce silence encore plus insupportable et dérangeant… c’était presque… bien trop calme…
« Assister la Meneuse Érudite… répondit difficilement Vivian.
– C’est-à-dire ? Demanda Ivy, tenant quelques minutes Noce contre sa poitrine pour qu’il se calme malgré l’odeur atroce et le manque de lumière.
– Projet Alpha… continua le mage. Endurcissement des corps et transformation des métabolismes… étude de sujets vivants pour comprendre leur fonctionnement interne et l’utiliser afin de faciliter les expérimentations des Meneurs…
– Attendez… vous êtes en train de nous dire que vous découpiez des gens vivants ?! Mais quel être humain peut être assez tordu pour faire une chose pareille à ses semblables ?! S’énerva-t-elle, Noce contre elle.
– Nous ne sommes pas humains… pas comme vous en tout cas…
– Oui, esprits supérieurs, inférieurs, insectes… tout ça, on connait, vos copains nous l’ont dit tout à l’heure, les coupa Ivy, furieuse et dégoutée, regardant de partout autour d’elle comme si elle cherchait quelque chose. Mais personne ne se sent mal de juste découper des gens encore en vie ?! Vous n’avez pas d’empathie pour eux ?!
– C’est quoi l’empathie ?
Ivy dévisagea Pomme, ne sachant pas si elle devait être en colère ou compréhensive. Aux yeux de cette mage, c’était une question parfaitement normale, elle la posait presque en toute innocence, ne sachant même pas ce que c’était alors que pour la plupart des gens, c’était tout de même la base les émotions et les sentiments. Vu le niveau, c’était même limite énorme qu’elle ait juste osée la poser sa question…
– L’empathie, c’est la capacité à se mettre à la place des autres pour les comprendre et agir en conséquence, expliqua-t-elle lentement en laissant Noce regagner son épaule. Par exemple, quand quelqu’un a mal, tu comprends ce que ça fait et tu tentes de l’aider normalement.
– Ah, c’est comme pour les défaillants comme nous deux alors, comprit Vivian. C’est pour ça qu’on s’occupe des… des « stocks »… c’est pour corriger nos défaillances et nos tares à force…
– Vous voulez dire que l’empathie, c’est pas normal chez vous ? Demanda une guerrière sreng, sans voix.
– Non, c’est les défaillants et les insectes qui s’en font pour les autres. Quand des ouvriers comme nous tombent, tu les laisses par terre, ils n’étaient pas dignes du Grand Plan de l’Agastya… même les Meneurs… nous avons échoué, on sera juste remplacés par d���autres matricules… en particulier ceux comme nous qui sont tarés…
– C’est-à-dire ? Vous avez des problèmes physiques ou mentaux ?
– Non, on serait inepte au travail, on serait déjà mort depuis longtemps, on ne servirait à rien à la cause, c’est notre âme notre problème… on ne sait pas pourquoi… juste… ça fait mal de voir tout ça… marmonna Vivian, complètement perdu, tordant ses longs doigts blancs ensemble alors qu’il secouait la tête, agitant ses boucles orange qui cachait ses yeux de la même couleur perdus dans le vague. On ne sait pas… on ne sait pas… mais, on ne peut pas s’en empêcher… c’est comme si on avait des épingles dans la poitrine… ça fait un peu moins mal quand on leur ferme les yeux et on les met correctement mais, ça fait toujours mal de les entendre… même quand on les entend depuis toujours… et on arrive pas à se concentrer uniquement sur le Grand Plan selon le désir de l’Agastya… on ne sait pas ce qui ne va pas chez nous… on est comme le Traitre Abominable dont on doit taire le nom… on arrive pas à être ce qu’on nous demande être…
– C’est pas une tare alors, c’est juste que vous n’avez pas été cassé par cet Agastya, répliqua Oswald sans hésiter. C’est normal de ressentir de l’empathie pour les autres et d’être mal quand des choses horribles leur arrivent comme… comme tout ce qui a pu se passer ici. Ce Traitre Abominable devait être comme vous et être capable de ressentir de l’empathie malgré tout ce qui lui était arrivé… au contraire, soyez fier de lui ressembler.
Pomme et Vivian échangèrent un regard, perdus, mêmes s’ils firent un signe de tête qui ressemblait à un acquiescement pour eux. Déesse… des êtres vivants incapables de ressentir de l’empathie ou faisant tout pour l’éliminer… c’était la première fois qu’il voyait une telle chose…
Une fois à peu près remis de ce qu’ils venaient d’apprendre, ils se mirent à prendre possession des lieux et à s’organiser pour sortir les rescapés de cet enfer au plus vite. D’après Pomme, le liquide où ils étaient les maintenait en vie et évitait que leurs blessures s’aggravent mais, elle comprit à peu près pourquoi c’était important pour eux de les extirper de ces bocaux.
« Quel était le but de ce « plan Delta » dont viennent toutes ses personnes ? Lui demanda Oswald pendant qu’Ivy et un soldat tiraient une des messagers qu’ils avaient envoyés auprès de Kleiman de sa cuve, étalant lui-même une couverture où l’allonger.
– Je ne connais pas les détails mais, si j’ai bien entendu ce que disait la Meneuse Érudite, ce n’était pas pour nous faire des stocks de cobaye… d’après elle, c’était pour plonger cette partie des protégés de la Noyeuse dans la discorde et le chaos, afin de mieux les infiltrer et de pouvoir faire avancer le Grand Plan. Une autre meneuse est dans votre capitale à vous alors, le chaos l’aidera à avoir plus d’influence… expliqua Pomme en déplaçant des pierres sur une surface rocheuse, semblant actionner des mécanismes par ses quelques gestes alors qu’elle ne pouvait toujours pas utiliser de magie.
– Et vous connaissez le nom de cette meneuse ? Son vrai nom je veux dire, comme Bias.
– … nous, nous l’appelons « Grande Savante » et son prénom, c’est Périandre mais, ce n’est pas sous ce nom que vous la connaissez… et qu’elle a pris la place de quelqu’un d’important… on peut prendre l’apparence des autres de… je vous expliquerait après mais, vous la prenez pour quelqu’un d’autre dont elle a volé le visage et l’identité… je n’en sais pas plus, je n’ai jamais été sous ces ordres, cela fait des années que je suis dévouée au service de Bias… la Meneuse Érudite ! La Meneuse Érudite ! Pardon !
– Allons, ne vous en faites pas, elle est morte à présent, elle ne pourra plus vous faire de mal car, vous l’appeler par son prénom. Et merci, c’est déjà beaucoup d’informations qui nous seront très utiles, » lui assura Oswald, déjà bien content d’avoir trouvé quelqu’un d’un peu plus bavard que Kleiman.
Ils continuèrent à avancer et à tirer les rescapés de Duscur et des enlèvements à Kleiman, quand Ivy se figea, regardant une cuve un peu plus loin.
« Ivyyyy… appela Noce, solidement accroché à l’épaule de son amie.
Elle courut alors d’un coup vers cette cuve, appelant tout de suite Pomme qui arriva sur ses talons avec Oswald.
– Il est en vie ? Par pitié, dit-moi qu’il est en vie et qu’il va vivre… déclara-t-elle, entre le grognement et la supplique, jetant des regards angoissés à celui qui dormait dans ce bocal.
Il s’agissait d’un jeune homme recroquevillé sur lui-même, ses bras forts entourant ses jambes pour les tenir contre sa poitrine pale et couverte de cicatrice de brûlures, surement mortelles si la technologie des « agarthans » – soit le nom de leur peuple ou de leur secte si Oswald avait bien compris – ne l’avait pas sauvé. Sa peau était très pale, contrastant avec ses longs cheveux noirs et bouclés, retenus dans une épaisse tresse qui flottait autour de lui. En le voyant, il comprit tout de suite la raison de la panique d’Ivy…
« C’est fou ce qu’il ressemble à son père… »
– Oui, il l’est. De peu mais, il vivra. Périandre et Myson avaient dit qu’on aurait bientôt d’autres membres de la même famille avec un emblème mineur et un emblème majeur alors, il fallait le laisser de côté pour comparer les trois alors, je l’ai mis au fond…
– D’accord, tu m’expliqueras en détail tout ce que tu sais après mais avant, il faut qu’on le tire de là !
– Bien sûr.
Pomme répéta la même série de mouvements sur la plaque que tout à l’heure, pendant qu’Ivy et l’autre soldat tiraient l’homme inconscient de sa prison de verre, enlevant dans un ordre bien précis les tubes qui le reliaient à sa cuve en trouvant heureusement une respiration qui agitait encore sa poitrine.
La capitaine l’allongea délicatement sur la couverture qu’avait étendu Oswald, l’installant bien avant de lui tourner la tête, comme un noyé pour éviter qu’il ne recrache le liquide de la cuve sur lui ou qu’il reste bloqué dans ses poumons. Puis, tout doucement, les deux leicesters le tournèrent sur l’épaule, l’aidant à vomir.
– Allez… grogna Ivy, tendu comme un cordage de navire. Crache…
– … k… kof ! Kof ! Kreuf !!! Kra…
Le jeune homme rendit tous le liquide bleu luisant présent en lui, crachotant encore alors qu’il essayait de parler.
– Attention, te presse pas trop, t’étouffe pas alors que tu as encore de l’eau dans les poumons…
– I… Ivy… c’est… mais que… les yeux de chat du jeune homme s’écarquillèrent encre plus, même si leurs iris bleu d’eau restaient encore floues, s’affolant à cause des dernières choses qu’il avait vu, surement induit en erreur par l’odeur de sang omniprésente. Non… non… tu dois… les flammes… le sort… Dimitri… tout… ce… krreeeuufff… ! Kof ! Kof !
– Eh ! Je t’ai dit de ne pas t’étouffer ! Le rappela-t-elle à l’ordre alors qu’il crachait encore. Déjà que t’es une vraie pierre, va pas t’étouffer même à terre ! Pour résumer très vite, même si ça c’est mal fini, Dimitri va bien, et même si t’as dû en voir, tu es en sécurité maintenant.
– En… mais… mais comment… ? Je… qu’est-ce… qu’est-ce qui s’est passé… ? Où… où est-ce qu’on est ? Mon… mon père est là ? Et… et Félix ? Tu sais s’ils vont bien… ? Et Alix…
– Là aussi, très longue histoire mais, on va tout te raconter mais pour l’instant, tu dois te reposer. Je te raconterais tout quand tu te seras un peu remis. D’accord Glenn ?
Les yeux du jeune homme rencontrèrent ceux de la meilleure amie de sa mère, cherchant quelque chose de familier et de rassurant… il voulait presque l’entendre raconter ces dernières anecdotes de voyage, leur décrire ses mésaventures dont elle se tirait toujours et si tout c’était passé comme ça l’arrangeait à Almyra… juste pour retrouver quelque chose de normal… tout était tellement flou dans sa tête… la dernière chose dont il se souvenait, c’était des flammes de partout, des cris, et des mages étranges qui le tiraient du mélange de boue, de suie et de sa propre mare de sang… de la sorte de potion immonde qu’ils lui firent boire… puis, plus rien, un grand noir vide et glaçant… il avait tellement de questions… mais Glenn n’arriva qu’à supplier Ivy avant de s’évanouir à nouveau…
– Je veux rentrer chez moi… je veux mon père… Félix… et Alix… je veux retrouver… ma famille…
– Bien sûr, je te ramènerais chez toi, je te le promets, lui jura Ivy en passant sa main sur sa tête.
Glenn se laissa alors happer à nouveau par le sommeil, assez confiant en Ivy pour savoir qu’elle tiendrait parole…
#fe3h#écriture de curieuse#route cf + divergente canon#plus ou moins#j'espère que ça vous plait surtout !#on reprend en douceur après la FE OC Week !#C'étais prêt depuis un moment mais je voulais faire que 5 billets à la base jusqu'à voir le nombre de page et oui...#mieux vaut faire ça en un billet supplémentaire... ce sera mieux et moins condensé en reblog#La distribution de claque recommence ! J'ai beaucoup aimé écrire la scène de rêve ! J'espère qu'elle vous plaira !#(c'est les scènes que je préfère en général : les scènes de rêve ou irréalistes où les persos sont en plein trip#On peut mettre la réalité au placard et y aller à fond sur les symboles et les choses irréalistes tout en gardant la logique propre des rêv#diatribe des avertissements inspirée par une conversation avec un ami hors Tumblr qui a passé +30 minutes à cracher sur un jeu#auquel il n'a pas joué depuis 20 ans et qu'il déteste mais qu'il ne peut pas s'empêcher de cracher dessus en disant que c'est de la m*#avec quelqu'un -moi- qui aime ce jeu vu que c'est sa série de coeur alors pas très agréable à vivre et ça donne envie de rappeler :#Eh... [nom censuré]... ou le dernier jeu est mal fichu. Et si tu n'aime pas cette licence on peut parler d'autre chose...#donc bref : vous aimez pas un truc ou vous n'adhérer pas à un truc soit ne lisez pas soit évitez de le tartiner à la figure de gens l'aiman#ou alors assumez que vous avez donné une chance à quelque chose que vous doutez ne pas aimer pour voir#Enfin fin du négatif bonne lecture à tous !
6 notes · View notes
rown-cheese · 9 months
Text
Mes lectures de 2024! ✧⁠◝⁠(⁠⁰⁠▿⁠⁰⁠)⁠◜⁠✧
Quelque chose que j'ai très fort envie de faire pour la nouvelle année, c'est répertorier toutes mes lectures que je ferai cette année (romans, BDs, etc...)! Rien qu'aujourd'hui, j'ai pu lire deux petites BDs et finir un tout petit roman (je n'aurai pas tout le temps ce rythme) mais il est tard, ahah, alors je pense que j'en parlerai demain, parce que ça me permettra de faire tout ça correctement, eheh
Je ne sais pas trop comment parler de mes lectures pour l'année à venir alors si vous avez un conseil, je prends, mais je vais au moins faire mes présentations comme ceci:
Nom du livre et de l'auteurice
Photo du livre
Résumé du livre avec mes mots à moi
Prévention sur les CW/TW potentiels qui m'ont marqué, et si le livre prend la peine de nous prévenir pour ça
Commentaire personnel sur le livre et à quel point je l'ai aimé ou non, et si je le recommande ou non
Aussi! Je me suis mis pour objectif de lire 35 livres cette année, donc un rythme de 2-3 livres par mois alors voyons si j'y arrive!
Et puis, si vous voulez me conseiller un livre, faites donc mais je ne confirme en rien de si/quand je vais l'acheter et de quand je le lirai, ahah :'))
J'espère que je pourrai réussir à vous intéresser avec ma future liste, et peut-être même que je vous donnerai envie de découvrir certains d'entre eux!
(je ne crois pas avoir le savoir infini, bien sûr, et ce n'est pas parce que j'ai un avis sur un livre qu'il est universel, vous pouvez ne pas être d'accord, bien sûr)
49 notes · View notes
selidren · 12 days
Text
Tumblr media Tumblr media
Printemps 1924 - Champs-les-Sims
10/10
Ou alors elle se trouvera là où elle a toujours voulu être. J'admire chez elle cette certitude un peu illusoire avec laquelle elle mène sa vie. On a souvent l'impression qu'elle ne doute de rien, qu'elle sait exactement ce qu'il faut faire. Je vous ai déjà dit que c'est elle qui a encouragé ma liaison avec Jean ? Je ne crois pas. J'espère pour elle qu'elle vivra toutes ces magnifiques aventures qu'elle fantasme tant et qu'elle m'écrira les détails dans ses lettres. Je suis persuadée que de toute façon, nous ne la verrons plus beaucoup à la maison à partir de l'automne. J'espère bien revoir mon frère cependant. Il est n'est pas souvent là, et il me manque beaucoup. J'ai bien un autre petit frère, mais nous n'avons plus beaucoup de centres d'intérêt en commun depuis quelques années, et de toute façon, il va à son tour entrer au pensionnat cette année. Si j'ai un jour un fils, je ne sais pas si j'aurai envie de le laisser aller là-bas, il me manquerait encore plus qu'Antoine j'imagine.
Je sens que les changements seront plus radicaux que prévu. Petite Eugénie (qui adore écouter aux portes) dis que Papa et Maman veulent retourner en Egypte, mais ce serait pour s'y installer. Ce serait vraiment une catastrophe. Je n'ai absolument pas envie que cela arrive.
J'ai été ravie de vous écrire cher cousin.
Noé
Transcription :
Albertine « Cléo… Ma grande fille, pourquoi est-ce que cela a l’air de te bouleverser à ce point ? Et que faisais-tu à la boite aux lettres ? »
Cléopâtre « Maman, je… Comment se fait-il que je sois la seule que la passion fuit ? »
Albertine « Mais… mais de quoi parles-tu ? »
Cléopâtre « Vous et Papa, Sélène et son Berto, A… bref vous avez compris… Moi aussi je veux une histoire d’amour passionnée, des émotions qui tourbillonnent et qui vous donnent l’impression de vous noyer de bonheur… Moi, je brûle tout sur mon passage ! »
Albertine « Je ne comprends rien ma chérie… Tu y auras droit aussi un jour, j’en suis sure, qu’est-ce qui te fait croire le contraire ? »
Cléopâtre « Il y a ce garçon avec qui j’écris… Enfin, un ami d’Antoine. Il nous a mis en contact et… j’ai été très amoureuse Maman. Mais trop, beaucoup trop. »
Albertine « Oh ma chérie... »
Cléopâtre « Il m’a dit dans sa dernière lettre que j’étais trop brûlante pour lui, et qu’il ne pouvait pas me donner ce que je voulais alors… Je lui ai répondu. Je l’ai supplié… Mais je n’ai jamais eu de réponse. Alors j’attends. »
Albertine « Ma Cléo… Il y a tout à aimer en toi. Le feu qui t’animes ne brûle pas trop fort, il fait en réalité de toi quelqu’un de précieux. C’est un magnifique outil de création, et une lumière qui te fait briller. Si ce garçon ne peut pas le voir, c’est qu’il n’est pas celui qu’il te faut. Mais il n’est que le premier, il y en aura d’autres. »
Cléopâtre « Comment en être sure ? Et puis je l’aime... »
Albertine « Je sais que c’est très dur, mais il faut l’oublier. Si il ne veut pas que vous alliez plus loin, ce n’est pas la peine de persévérer. Je sais simplement que si ton père et moi avons pu nous trouver, il n’y a pas de raison que tu ne trouves pas quelqu’un un jour. Pleure autant que tu veux, cela te fera du bien. Puis, pense à la suite. Tu vas faire de brillantes études, et ta carrière littéraire sera plus brillante encore. »
Cléopâtre « Mais l’amour... »
Albertine « Cléo, tu as toujours aimé l’idée de l’amour. Mais il n’est pas tout. Si j’aime ton père, je n’ai pas que lui comme raison de vivre. Ne te définis pas comme une amoureuse avant tout. Tu le trouveras. Mais avant, pense à toi et à ce que tu accompliras. Et quoi qu’il arrive, n’oublie pas que ta Maman sera là pour t’aider ou même juste pour épancher tes larmes. »
9 notes · View notes
aisakalegacy · 28 days
Text
Tumblr media Tumblr media Tumblr media
Printemps 1924, Hylewood, Canada (9/14)
Lulu ne voulait pas devenir ingénieur, c’est ce que j’aurais aimé pour lui, mais j’aurais voulu que son père lui laisse le choix… Il n’est pas un grand travailleur, il aime mieux profiter de la vie. Encouragé par son frère, il s’est mis à la guitare, et il l’accompagne en chantant. Quand je les vois comme ça, j’ai l’impression que c’est tout ce qui leur faut.
La question de son avenir est de toute façon en train de se régler doucement. Il a commencé à travailler, mais Jules voudra vous écrire à ce sujet lui-même. Il a passé son examen et a obtenu le permis nécessaire pour conduire l’automobile, qu’on a fait transporter sur la rive en bateau à vapeur. Il prend la barque pour Gananoque le matin, et en trente minutes d’auto, il est à Kingston. Il a déjà dix-huit ans, il en aura dix-neuf cette année, et Jules pense qu’en tant qu’héritier de la famille, il est temps qu’il prenne le relais sur ces lettres. Vous rendez-vous compte que les familles de nos maris s’écrivent depuis plus d’un siècle ?
Même si nous ne nous sommes jamais rencontrées, je vous tiens parmi mes bonnes amies. D’ailleurs je parle de vous à mes amies comme l’une d’entre elles, et la distance n’est qu’un désagrément de circonstance. J’attends toujours vos nouvelles avec impatience, et je souhaiterais que nous continuons à correspondre.
Embrassez bien tout le monde de ma part.
Bien à vous,
Eugénie LeBris
━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━
De : [email protected] À : [email protected] Sujet : Lettres Eugénie et Albertine
Chers cousins français, J'ai cherché partout et je n'ai pas retrouvé les lettres entre Eugénie et Albertine postérieurs à 1924. Elles ont peut-être été jetées. Avez-vous par hasard conservé les lettres d'Eugénie et brouillons d'Albertine ? A bientôt, D. LeBris
[Transcription] Lucien LeBris : ♪ In olden days, a glimpse of stocking was looked on as something shocking, / But now, Lord knows… ♪ Dolorès, Agathon et Lucien LeBris : ♪ ANYTHING GOES!! ♪ Eugénie LeBris : Vous n'êtes pas en train de chanter des cochoncetés devant votre petite sœur, j'espère ? Agathon LeBris : Absolument pas, Maman ! Lucien LeBris : Nous ? Jamais !
youtube
10 notes · View notes
vaelyane · 11 months
Text
Tumblr media
🇬🇧 Hey there! Hope you're doing well! I got frustrated with Photoshop (which I've used for years) and decided to give Clip Studio Paint a try. I chose our favourite cunty old man, Astarion, for my very first painting with CSP, and I have to say… Not bad, for a first! I loved the gouache brushes. If you have any tips for a CSP noob, please let me know! Take care, everyone!
~~~~~~~~~~~~ 🇫🇷 Hey les amis ! J'espère que vous êtes en forme. Je me suis senti frustré par Photoshop (que j'utilise depuis des années), et je donne donc sa chance à Clip Studio Paint. J'ai choisi notre troll invétéré Astarion comme sujet pour le tester, et je dois dire... pas mal, pour un premier essai ! J'ai beaucoup aimé les brushes de gouache. Si vous avez des astuces pour un débutant avec ce logiciel, faites m'en part ! Prenez-soin de vous !
27 notes · View notes
wubblesred · 4 months
Text
Ghoulcy Week 2024 Day 7 SFW French
Bonjour chers habitants d'abri, nous voilà au dernier jour de la semaine ghoulcy. Le thème du jour 7 est test de loyauté. Il est un peu en lien avec les thèmes précédents. C'était très amusant et sympa d'avoir fait cette semaine ghoulcy et j'espère qu'il y en aura une autre l'année prochaine. J'espère que vous vous faites amuser et avez aimé mes textes. Belle journée et bonne lecture.
Cela faisait presque une heure que la brune hautaine avait emmener Lucy auprès de leur superviseur. Bordel sa femme avait à peine ouvert les yeux qu'on l'avait arracher à lui. Cooper tournait dans la pièce comme un lion en cage. Même pas une semaine mariés et déjà l'univers tentait de lui enlever une des seules choses qui valait le coup sur cette terre. Les questionnements défilaient en boucle dans son esprit mais une en particulière revenait sans cesse. Et si Lucy choisissait l'abri et non la goule. Ce dernier ne savait pas ce qu'il ferait si cela était le cas.
Lucy venait à peine de se réveiller et de se remettre d'avoir failli mourir que Birdie l'avait attraper et amener auprès du superviseur. Elle voulait simplement retrouver Cooper et qu'ils puissent reprendre la route tout les deux. Mais ces crétins ne voulaient rien écouter et préférait la jouer en pseudo héros.
« Écoute Gucy, je sais que nous avons un passé tumultueux mais tu as aider cet abri et nous souhaitons t'aider en retour. Donc, je te le redemande à nouveau, veux-tu que nous nous occupions de cette goule ? »
« Pour la centième fois, non ! J'apprécie vos inquiétudes mais comme il vous la sûrement signaler, c'est mon mari et je souhaite repartir avec lui. »
« Lucy, je viens de la surface, je connais les terres désolées mieux que personne ici, les goules, et surtout si celle-ci est bien celle que je pense, sont dangereuses. On ne se marie pas avec elles. » fut la remarque de Birdie prononça tout en s'agenouillant devant la jeune femme, lui parlant comme on parlerait à une enfant.
« Cooper et moi sommes liés d'une façon que personne à part nous pourrait comprendre. On la comprit en voyageant ensemble, nos âmes s'appellent. Je sais que d'un point de vue extérieur, ça parait fou et je dois vous semblez complètement barge. Cependant tout ce que je veux c'est être avec lui. Je n'ai pas envie qu'on se retrouve avec le même soucis que la dernière fois donc laissez-nous partir. Merci infiniment de m'avoir sauver, on est quittes donc n'en parlons plus. »
L'ancienne habitante d'abri était mal à l'aise de parler ainsi de ses sentiments. Elle n'avait pas encore parler entièrement de tout ce qu'elle ressentait à son mari et voilà qu'elle devait tout déballer à des inconnus. Elle savait bien que leur histoire était absolument folle seulement Lucy le sentait au fond d'elle, la goule et elle était liés d'une manière encore plus profonde que ce qu'ils pensaient au départ. L'âme de l'homme l'appelait, résonnait et fusionnait avec la sienne, tout les opposait et pourtant ensemble ils créaient une magnifique harmonie que Lucy ne souhaitait jamais arrêter.
Après encore une dizaine de discours sur la sécurité et les dangers des terres désolées, Benjamin et Birdie acceptèrent qu'elle retourne auprès de son mari et insistèrent même pour qu'ils prennent des vivres avec eux. Ce fut long et Lucy espérait vraiment que Cooper n'ait pas fait de massacre durant son absence. Mais surtout elle espérait qu'il soit toujours là.
Cela semblait être une éternité depuis le départ de sa femme et tout le monde refusait de lui donner la moindre information. Toujours confiner de la pièce de décontamination, la goule commençait à tout doucement perdre le contrôle mentalement et physiquement, ses fioles se trouvaient dans le sac de Lucy poser à côté de lui. Cela faisait plusieurs jours qu'il avait donner ses médicaments à la jeune femme, une façon de lui prouver qu'il lui faisait entièrement confiance. Maintenant, il refusait même de prendre sa dose si elle n'était pas préparer par son épouse, un comportement tout bonnement enfantin mais qu'il continuait d'avoir juste parce que ça faisait rire Lucy. C'était sa façon de se rendre utile pour son mari disait-elle. Bon sang, sa petite tueuse lui manquait, il voulait tellement la serrer contre lui, sentir sa douceur. Tellement absorber dans ses pensées, il ne prêta pas attention à la porte qui s'ouvrir et ne se rendit compte de la présence de quelqu'un que quand ce dernier lui sauta au cou. Reconnaissant immédiatement Lucy, il la serra dans ses bras et enfonça sa tête dans son cou.
Brusquement, une quinte de toux prit la gorge de la goule, signalant à sa femme qu'il était grandement temps qu'il prenne sa dose. En un rien de temps, Lucy attrapa son sac, prit une fiole et l'injecta dans le vaporisateur de Cooper avant de lui donner. Quand il fut rétablit, la jeune femme lui expliqua qu'ils devaient juste patienter pour recevoir des vivres et ensuite Benjamin et Birdie les raccompagneraient à la sortie et ils reprendront leur voyage.
Après un au revoir étrangement chaleureux de la part de l'abri 4, les époux reprirent leur route initiale. Lucy tenta de s'excuse de les avoir ralentit mais Cooper l'arrêta immédiatement, c'était seulement sa faute à lui d'avoir mis autant en danger sa femme. Il ajouta d'ailleurs qu'il aurait compris si elle avait voulu rester là-bas, loin de lui.
« Hey, on est mari et femme de un et de deux je t'aime, j'allais pas t'abandonner ainsi sous prétexte qu'on a tout les deux, d'ailleurs, oublié que les radiations m'affectaient plus que toi. »
« Tu avais de nouveau la sécurité d'un abri. Un semblant de vie normale. »
« Ma vie normale c'est toi maintenant, Coop. Et puis c'était pas mon abri. Si je dois revivre dans un abri ce sera l'abri 33 avec mon frère, Canigou, Janey et toi. D'ailleurs Norm va péter un câble en te voyant, ça va être drôle. Je pars à la surface quelques mois et je vais revenir mariée avec un enfant et un chien, il va rien comprendre. »
« Je pense qu'il sera pas le seul choqué en nous voyant arrivés, poupée. » Ne pu s'empêcher de rajouter en rigolant la goule imaginant déjà les visages indignés des nombreux habitants de l'abri 33.
« Tu viendrais vraiment avec moi là-bas, pour y vivre ? »
« Tout ce que j'ai fait hier et aujourd'hui ne te le prouve pas ? Je serai prêt à tout tant que ça me permet d'être avec toi. Comme tu l'as si bien dit, ma vie c'est toi maintenant. »
« Alors c'est décidé, allons chercher notre fille, percé le mystère derrière notre existence et rentrons à la maison. »
Pour sceller ce merveilleux accord Cooper décida de déposer un baiser sur les lèvres de son épouse avant de prendre sa main et continuer leur longue route vers leur maison.
5 notes · View notes
likielandco · 1 year
Note
Coucou coucou !
J'avais envie de te faire causer de Kaamelott donc j'espère que ce petit questionnaire ne te dérangera pas. J'aimerais bien que tu le fasses sur Guenievre 👉👈 (on sait à quel point tu apprécies ce personnage).
Apres, si ça te saoule, tu peux le faire pour un autre perso (ou pas du tout haha) ! No pressure.
N'hésites pas à épiloguer à l'envie, c'est sympa de découvrir les raisons derrière telle ou telle réponse. Mais si tu veux aller à l'essentiel, c'est bien aussi.
📚 Sa meilleure saison (et pourquoi surtout hehe) :
🤡 Sa réplique drôle préférée :
😢 Sa réplique PAS drôle préférée (s'il en a) :
😎 Son meilleur look (cela peut être une saison ou un épisode ou une scène) :
🌟 Sa meilleure coupe de cheveux (rhô la question à 2 balles ! ) :
🎭 Sa meilleure scène en terme d'acting (genre t'es tout wow devant) :
🔥 Sa meilleure répartie :
🤜🤛 Son meilleur duo (pas forcément un ship / plutôt avec quel autre personnage il a les meilleurs interactions à tes yeux) :
💔 Le truc chez ce perso qui te donnerait envie de casser des briques sur sa tête :
💗 Ce que tu aimes le plus chez ce perso :
🍿Sa meilleure scène / réplique dans KV1 :
🥚 Est ce qu'AA a fait du bon boulot sur ce perso dans Kv1, selon toi :
🎬 Qu'est ce que tu attends / espère le plus pour le perso dans KV2 :
Si tu as aimé ce petit questionnaire, tu peux taguer 2-3 personnes pour qu'elles le fassent sur le perso K de leur choix 😊
Merci merci d'avoir pris le temps de répondre en tout cas !
Coucou-coucou miung-dreamer! Je vais pas te mentir, j'évite de faire ça d'habitude car j'épilogue beaucoup trop et tout mon temps libre est déjà accaparée par LPDG, mais allez, pour toi, je me lance!
📚 Sa meilleure saison (et pourquoi surtout hehe) : Tu vois, je vais être chiante, je ne saurais pas choisir, elle est drôle, belle et ridicule du Livre I au Livre VI! L'accent de la saison un, la naïveté de la saison deux, la sass de la saison trois, la rebellion de la saison quatre, l'abnégation de la saison cinq, la jeunesse puis la résignation de la saison six... je peux pas choisir.
🤡 Sa réplique drôle préférée : Pour moi, le truc qui m'a fait hurlé de rire, c'est l'épisode "Au Bonheur Des Dames" - Livre III – épisode 55. Je te mets le script plus bas lol:
Arthur : (Agacé.) Qu'est-ce que c'est encore que cette nouveauté ? Guenièvre : (Enjouée.) La réunion des dames des chevaliers de la Table ronde ! Arthur : Sans déconner, vous n'avez rien d'autre à foutre ?Guenièvre : Déjà, non, nous n'avons pas grand-chose à... « foutre », comme vous dites... et puis euh... on a bien le droit de se réunir ! Arthur : Mais... pour faire quoi ? Guenièvre : Comme vous ! Pour euh... discuter ! Arthur: Oui non mais j'ai compris, mais... dans quel but ?Guenièvre: Ben comme vous ! Aucun.
Le "Aucun" m'a tuée, je saurais pas te dire pourquoi, mais en tout cas, il le méritait! 🤣🤣🤣🤣🤣
😢 Sa réplique PAS drôle préférée (s'il en a) :
Livre V, épisode 5 "Le Royaume Sans Tête" "Vous allez tenter de savoir si vous avez des enfants cachés, ça m'intéresse ! Et puis, euh… ça me concerne, quelque part, euh [...] Bah… un peu quand même, euh… si j'avais été fichue de vous les faire, vous seriez pas obligé d'aller les chercher ailleurs, alors"
😎 Son meilleur look (cela peut être une saison ou un épisode ou une scène) :
La robe bleu sombre, le bleu de la Carmélide, le bleu que mon headcanon désigne comme Picte, la robe qu'elle porte au chevet du lit de mort d'Arthur à Tintagel, durant, Dies Irae, épisode 9, Livre VI
🌟 Sa meilleure coupe de cheveux (rhô la question à 2 balles ! ) :
Pas à deux balles, juste étonnante! 😊 Je les aimes toutes, mais bon, j'avoue sans honte être en extase devant ses longs cheveux dans le film!
🎭 Sa meilleure scène en terme d'acting (genre t'es tout wow devant) :
La scène du film où elle recule quand Arthur grimpe la fenêtre de la tour. Pas un mot n'a besoin d'être échangé et AA explique ce que je ressens par rapport à l'acting de Anne, bien mieux que moi, c'est d'ailleurs pour ça que j'ai retranscrit le texte et que je l'ai partagé à l'époque, pour ceux qui n'avait pas la chance d'avoir le commentaire audio: « Et je trouve le regard de Anne absolument dingue dans cette scène. Il est… y’a tout dedans. Elle est en même temps intimidée, en même temps elle sait ce qui se passe, en même temps c’est surprenant, en même temps c’est familier. En même temps, elle accepte la douceur, en même temps elle est étonnée… je trouve son regard absolument fou. » Alexandre Astier à propos de Anne Girouard • Commentaire audio de Kaamelott Premier Volet
Tumblr media
(Gif de Dagonet)
🔥 Sa meilleure répartie :
"[...] comme vous me touchez pas, les choses de l'amour je m'assois dessus, et je parle au figuré, alors je me suis plongée dans la pâte d'amande !" 
Livre I - épisode 90 - La Pâte D'Amande
🤜🤛 Son meilleur duo (pas forcément un ship / plutôt avec quel autre personnage il a les meilleurs interactions à tes yeux) :
Nessa. Pour pleins de raisons qui ont avoir avec le film et ma fic, mais si tu regardes bien les Livres V, et le film, tu peux voir que Nessa est potentiellement la seule femme (avec Séli) qui nous offre un "range" formidable des émotions que peut avoir Guenièvre... pas juste l'épouse indésirable ou la gamine naïve. Avec Nessa, Guenièvre est écrit comme une vraie femme. Je ne sais pas si ça a dû sens, désolée.
💔 Le truc chez ce perso qui te donnerait envie de casser des briques sur sa tête :
Sa passivité, voir sa permissivité avec certaines personnes, presque toutes les personnes qui compte à ses yeux.
💗 Ce que tu aimes le plus chez ce perso :
C'est difficile comme question, j'aime presque tout. Peut-être.... la façon dont elle aime. Pas juste Arthur. La façon dont elle aime en général. Si l'amour était une personne, cette personne dirait je t'aime à Guenièvre.
🍿Sa meilleure scène / réplique dans KV1 :
C'est plus son silence qui m'a marqué dans KV1, après que Nessa quitte la tour, quand Arthur grimpe la même tour, etc...
🥚 Est ce qu'AA a fait du bon boulot sur ce perso dans Kv1, selon toi : Oui. Je sais que pleins de gens adorent critiquer sans réaliser les années de boulot que ça lui a pris pour faire ce film et se remémorer comment il a laissé ce personnage de Guenièvre, comment il aime ce personnage et comment il envisage son futur.... en ce qui me concerne, il a fait un boulot fantastique parce qu'il a donné à Guenièvre de la tendresse, de la familiarité, de la douceur, de l'espoir, après treize ans de vide. Beaucoup de personnes (surtout des hommes aigris, il faut se le dire) utilise des memes de Guenièvre à des fins très misogynes et cruelles. KV1 et AA n'ont pas rendu Guenièvre belle ou désirable, elle l'était déjà. KV1 et AA ont simplement recadrer les cons.
🎬 Qu'est ce que tu attends / espère le plus pour le perso dans KV2 :
Qu'elle reçoive la romance et l'amour dont elle rêve tant. Qu'elle perde sa virginité aussi parce qu'elle en a envie, on l'a vu dans les Livres, c'est pas drôle à regarder aujourd'hui, c'est cruel. Et finalement, qu'elle ne finisse pas dans un couvent comme dans toutes les versions misogynes de la légende Arthurienne.
Voilà, j'espère avoir bien répondu à tes questions, je ne sais même pas qui me suit, mais si vous voulez participer à ce questionnaire, allez-y, sentez-vous taguer! 🥰 
10 notes · View notes
weset-thedark-onfire · 8 months
Text
Tumblr media
Lectures du moment (début 2024)
Car ça m'inspire toujours de nouvelles lectures de voir les PAL des gens, voici mes lectures actuelles ou qui arriveront dans le mois de février ! Et si vous avez un livre en cours à partager, n'hésitez pas en commentaire :)
"Celle qui devint le soleil" de Shelley Parker-Chan : je reprend à zéro en français cette fois-ci, car la version originale était trop difficile à lire pour moi. Mais comme j'adorais déjà, hop on s'y remet en vf.
"The Wicked Bargain" de Gabe Cole Novoa : des pirates ? de la fantasy ? un·e perso principal·e transmasc' non binaire ? beaucoup d'attente pour ce livre, J'AVOUE.
"Different, not less" de Chloé Hayden : j'aime beaucoup ce que partage Chloé Hayden sur ses réseaux alors je ne pense pas être déçu de son livre, au contraire.
"Nos jours brûlés, tome 3 : le dernier feu" de Laura Nsafou : j'attendais d'être dans le bon mood pour lire le final de cette trilogie afrofuturiste que je vois aussi comme de la fantasy ! J'ai adoré les deux premiers donc j'espère fooort apprécier cette conclusion (et la plume de Laura Nsafou est si belle).
"La fille d'encre et d'étoiles" de Kiran Millwood Hargrave. J'ai beaucoup aimé "Les Graciées" de cette autrice alors j'ai envie d'en lire plus d'elle !
"Servir les riches : les domestiques chez les grandes fortunes" d'Alizée Delpierre. C'est un livre-entretiens, issu/remanié du mémoire de sociologie de l'autrice. Je l'ai terminé semaine dernière, c'était déprimant à souhait 🥲 Mais aussi intéressant d'avoir les points de vues de plusieurs personnes, profils, ages, genres... ! J'ai du souffler 23fois, m'énerver 80 fois sur les propos et me facepalmé autant. Palme d'or de l'absurdité et de l'irrespect (= jugement personnel) au gars riche qui demandait à être réveillé chaque matin avec une berceuse chantée en canon par 2 personnes qu'il engageait.
2 notes · View notes
oh-shinx · 1 year
Text
⚡BZZT BZZT! THE FOLLOWING AS BEEN WRITTEN USING ROTO-SPEECH-TO-TEXT! BZZT BZZT!⚡
"Merci de m'avoir laissé utiliser l'ascenseur, monsieur!!!"
"Rosie! Par ici!"
"Gwen!!!!!"
"Vous avez aimé la lovdisc en papier?"
"C'était certainement intéressant..."
"Et je vois que tu as tes cadeaux?"
"Mon... Ce sont des cadeaux pour moi????"
"J'espère vraiment qu'ils vous plairont!"
"Mais pourquoi?????"
"J'ai pensé que si je te complimentais avec des mots, tu pourrais encore t'évanouir!"
"... ç'est assez juste."
"En plus, je voulais te montrer à quel point je tiens à toi!"
"Et tu m'as traîné au sommet de la Tour Prismatique parce que???"
"Pour que je puisse voir la plus belle vue du monde à comparer avec le reste de la région!"
"Que veux-tu dire????"
"Je te regarde! Je ne mens pas quand je dis que tu es la plus belle fille que j'aie jamais rencontrée, peu importe ce que tu penses!"
"Hein!?!!?? Eh bien, je... je pense vraiment... TU ES VRAIMENT JOLIE AUSSI!!!!!!!!!!!"
"Eh bien, c'est malheureux pour le reste du monde, alors!"
"Pourquoi???"
"Parce que les plus jolies femmes du monde sortent ensemble, et que toutes les autres devront se contenter de moins! Si vous êtes d'accord avec les rencontres!"
".... J'aimerais ça."
⚡ BZZT BZZT! END OF MESSAGE! BZZT!⚡
11 notes · View notes
anticia24 · 1 year
Text
Tumblr media Tumblr media Tumblr media Tumblr media Tumblr media
Le foyer Sympa " Les Sympa semblent être le foyer parfait du moins en apparence. Mary-Sue est bien déterminé à devenir une figure éminente en politique quitte à consacrer tout son temps à cela et laisser son foyer à la dérive. Son mari délaissé, Daniel, a succombé au charme ravageur de sa domestique. Quant aux jumelles, les disputes et actes de rebellions de Lilith bouleverse le clame du foyer. Mary-Sue, découvrira-t-elle la liaison de son mari? Et arrivera-t-elle à clamer le jeu entre ses deux filles pour retrouver le clame dans son foyer? " Mary-Sue Sympa Fille adoptive de Marco et Coraline Rococo, Mary-Sue vécus au sein d'un foyer aimant et loin du besoin. Comme son père avant elle, elle fera de grandes études universitaires pour se lancer plus tard dans une carrière politique. Lors d'un déplacement, elle rencontrera l'homme qui partagera sa vie, Daniel Sympa. Amoureuse elle l'épousera très rapidement sans le consentement de ses parents qui n'appréciait que peut le jeune homme, ne le trouvant pas assez bien pour leur fille. De leur amour, viendront deux jumelles Angela et Lilith Sympa. Aujourd'hui Mary-Sue, est plus proche que jamais d'atteindre ses rêves de gloire dans la sphère politique, mais la discorde continuelle de ses filles et la liaison secret de son mari pourrait tout faire basculer. Daniel Sympa Fils de Jeff Sympa, Daniel vécu dans un foyer modeste avec pour seul souvenir de son enfance un père alcoolique rêvant de marcher sur Mars. Il quittera son foyer à 18 ans avec sa sœur, Jennifer Deschamps, pour s'éloigner de son père et de l'alcool qui pourrisait sa vie. Lors d'une sortie au restaurant avec sa sœur, pour fêter sa majorité, il tomba sur le charme d'une femme du nom de Mary-Sue. Ils étaient bien différents, elle rêvait grand avec que lui ne souhaitait que quelque chose de petit et simple. Mais le charme de cette femme déterminé était irrésistible. Après plusieurs années, un mariage heureux, la naissance de deux petites filles, la flamme commencent à s'éteindre. La solitude s'empare de Daniel, sa femme est de moins en moins à la maison accaparé par son travail. Ses filles sont aussi peut présente, occupé à penser à leur avenir et à leur petit amis. Alors quand sa nouvelle domestique, Kérine Hébert, poussa la porte de son foyer, Daniel ne put y résister. Il c'est que s'amouracher de sa sulfureuse domestiques métrait à mal son foyer mais la solitude était pour lui bien pire.  Angela Sympa Fille de Daniel et Mary-Sue Sympa, Angela est une jeune fille brillante et aimée de tous. Elle excelle dans toutes les matières et même le pom pom sim ne semble être difficile pour elle. Mais sa récente relation avec Kévin Hasseck le voyou du coin l'éloignera-t-elle de son glorieux avenir? Lilith Sympa Fille de Daniel et Mary-Sue Sympa, Lilith est la deuxième fille de la famille, née seulement 3 min 45 secondes après sa sœur Angela. Jusqu'à aujourd'hui, elle garde en elle un profond ressentiment pour ses parents, car ils se sont toujours plus intéressés à la brillante Angela qu'à la banal Lilith. Alors tout est sujet de dispute avec son foyer comme: son style, ses tatouages ou même sa relation avec Dirk Dourève. Arrivera-t-elle un jour à se réconcilier avec son foyer? Note de l'artiste: J'espère que ce premier relooking vous a plus. (est ce que l'un de vous avez vu l'indice dans le post précédant?) C'était un peut long mais je voulais présenter ma version des Sympa avec leurs espoirs, leurs conflits... J'ai utilisé les poses de @lou-from-moonwood, de @nell-le et de @helgatishaccreblog pour mon photo montage. Je me suis aussi inspiré des relookings de @sundaymorningsims4 pour faire les miens.
4 notes · View notes
solhrafn · 2 years
Note
est-ce que tu peux un peu nous parler de ton parcours pro en tant que photographe genre comment tu t'es lancé, comment ça t'es venu, tes potentiels doutes ou autre ?
Tumblr media
C'est marrant, avec @leonce-rature vous me posez tous deux grosso modo la même question. Bon j'espère que vous avez du temps parce que je suis en hyperfocus et donc je vais y aller dans les détails.
Alors je vais pas vous faire le coup de "j'ai toujours fait de la photographie" (ce gros cliché) mais par contre, j'ai toujours été entouré de photographie.
Ma maman en particulier, avait toujours un appareil sur elle (un Nikon EM dans les années 80 et début des 90 et un Minolta motorisé par la suite qu'elle n'a arrêté d'utiliser qu'avec l'arrivée de son premier smart phone - pour personnes âgées).
Prendre des photos pour elle ça à toujours été un truc d'angoissée existentielle. Documenter, avoir des souvenirs, apprivoiser l'horreur du temps qui passe et des moments qui ne durent qu'un court instant et qui ne surviennent qu'une seule fois. C'est pour ça qu'elle le faisait. J'ai les négatifs chez moi car je les scanne quand j'ai un peu de temps et je trouve ses images poétiques, certaines vachement bien, mais elle ne s'en est jamais rendu compte je pense.
J'ai donc grandi avec ça en background mais n'y ai jamais prêté attention à l'époque.
Après l'école secondaire, vers 2003, nous avons eu notre premier appareil photo numérique, ces petits compacts sony de 2 ou 4 mégapixels. Du coup c'est moi qui m'en suis chargé car transférer sur le pc, imprimer, tout ça, pour ma maman, ce n'était pas évident.
3 ans passent ainsi. Ce sont en fait quelques années d'errance en études supérieures que je ne finis pas (chaque année un nouveau truc) et durant ces années j'ai remarqué que j'utilisais l'appareil tout le temps.
J'ai eu un déclic après avoir fais quelques images le temps de voyages répartis sur un été et un automne et je me suis mis à chercher à faire des images en y réfléchissant un peu plus.
Tumblr media Tumblr media
2004, Pays-Bas, images originales qualité VGA (lol)
Après quelques mois d'obsession constante (merci TDAH non diagnostiqué) je suis même allé rechercher le Nikon EM de ma maman et me suis mis à l'utiliser aussi, j'ai acheté des livres (de reporters) et le papa d'un de mes potes avait fait des études de journalisme et avait fait de la photo argentique dans ce cadre là. Il m'a filé son agrandisseur, ses cuves et au bout d'une année je me suis rendu compte qu'il fallait que je me lance sérieusement.
Tumblr media
J'ai passé quelques temps à faire des photographies des SDF et mandiants de ma ville. C'était surtout pour apprendre à approcher les gens. Je suis super introverti et en y repensant je me demande comment j'ai bien pu faire.
Tumblr media
A côté de ce genre de challenge, à l'époque j'avais toujours un appareil sur moi et je photographiais tout, tout le temps. (Ca n'a pas trop changé, sauf pour le tout et le tout le temps). Tout était très nouveau et excitant et j'avais l'impression de tenir un moyen d'expression satisfaisant. J'aurais aimé pouvoir dessiner et peindre cela offre plus de libertés, notamment pouvoir vraiment donner forme à des univers intérieurs, mais je suis une clinche. J'arrivais à écrire mais ça prennait trop de temps et je ne pouvais pas le faire sur commande, je me décourageais vite. (Comme ce diagnostique TDAHP aurait pu être utile!)
J'ai été piqué par le truc suffisamment fort que je me suis dit qu'en faire mon métier pourrait être un bon plan. A l'époque en Belgique le métier de photographe était toujours soumis à l'accès à la profession, c'est à dire qu'il n'était pas question de travailler en tant que photographe sans avoir suivi les études ad hoc.
Vu qu'entre temps j'avais déjà trouvé un boulot dans un office de tourisme, j'ai suivi la formation en cours du soir. En 2006 l'accès à la profession a été levé, mais je me suis dit que j'allais tout de même continuer à suivre les modules, mais plus à mon aise. J'ai reçu mon diplôme de technicien en photographie en 2009 mais j'ai effectué mes premiers contrats dès 2007 (des concerts et des portraits surtout) pendant que j'étais encore en formation.
Tumblr media
2007, concerts de Jazz
Ensuite je suis retourné en cours du soir pour chopper ce qu'on appelle le Certificat d'Aptitude Pédagogique (CAP) qui permet d'enseigner toute connaissance technique / spécialisation que l'on peut avoir. (En gros c’est comme sciences de l’éducation, mais en version light et pratico-pratique).
En même temps je bossais toujours à l'OT et utilisais mes vacances pour faire des voyages photographiques. Je réalisais aussi les photos pour l'office, qui ont fini dans les brochures touristiques. Mon contrat est arrivé à terme en 2011 et entre ce moment et 2013 j'ai fait pas mal de freelancing très irrégulier en alternance avec le chômage.
Je suis parti en Islande plusieurs fois, je suis parti pas mal au Japon.
Tumblr media
Au total j'ai vécu 7 mois à Tokyo si on met les séjours bout-à-bout. Démarches de reportage et vivre ma vie, mais jamais pleinement assez. En tout cas, c'est le souvenir que j'en garde.
Je me dis que j’ai tout de même bien fait d'avoir pu vivre ces quelques années dans une boite à chaussures et m'être autorisé de voir un peu le monde, mais en prenant de la bouteille, je ne peux que regretter de ne pas avoir été au bout des choses. C'est sans doute juste ce côté perfectionniste qui parle... (encore une fois, un diagnostique aurait été précieux, bordel!).
Tumblr media
Je vivais tranquillou, sans me préoccuper de rien quand tout à coup, en 2013, boulversement dans ma vie, je tombe amoureux de celle qui deviendra mon épouse et je bazarde tout dans ma vie. (Ca n'a pas été forcément sans dégats). Je me remets à une formation que je suis de 2014 (année de notre mariage) jusqu'à 2015 pour devenir caméraman-monteur en télévision. A la fin de ma formation nous sommes partis en lune de miel, au Japon, évidemment.
Tumblr media
Lors de ce voyage (la dernière fois que j’y ai mis les pieds malheureusement) j’en ai profité pour realiser un court docu sur le japon, la photo, les découvertes, les rencontres, les amitiés...
youtube
A notre retour, on a vécu encore un peu dans ma boîte à chaussures pendant que je faisais des piges en tant que caméraman en télélocale et pour des boîtes de prod, jusqu'à ce que je trouve un poste dans le secteur jeunesse décroché grâce à toutes les cordes à mon arc.
Tumblr media
En 2016 je suis donc devenu éducateur aux médias et animateur socio-culturel. Mes missions : projets photographiques, audio-visuels avec des jeunes de 12 à 26 ans, éducation aux médias (des trucs ezpz comme les réséaux sociaux mais des trucs plus particuliers genre déontologie et démarche journalistique) mais aussi de l'éducation dans des domaines d'informations plus généraux (de l'EVRAS aux changements climatiques par exemple).
Je suis toujours à ce poste et c'est très chouette car très varié (fonctionnement par projet donc c'est bien pour mon cerveau qui ne supporte pas la routine) et il me permet d'utiliser toutes les formations que j'ai suivies... et plus encore car je continue à apprendre!
Je continue à faire des contrats photos et audiovisuels ainsi que donner des formations en plus de mon boulot actuel, mais c'est très disaparate, avec maintenant deux enfants et en étant neurodivergent j'ai pas trop d'énergie en réserve, sauf lorsque j'ai vraiment besoin/envie d'argent :P
Ah oui, le diagnostique tant attendu est tombé fin 2019 après avoir été suspecté pendant quelques années. Gérer le boulot, la famille, c'était devenu trop compliqué et je commençais à lâcher prise.
Si vous êtes nozy, y a aussi le tag me qui révèle des trucs en filigrane je crois...
6 notes · View notes
lilias42 · 2 years
Text
Nouveaux chapitres pour CF ! L'introduction et les deux premiers chapitres !
Coucou tout le monde ! Petit retour dans CF avec les trois premiers morceaux de l'histoire !
J'avoue qu'en ce moment, je fais pas mal de trucs dans le désordre alors, j'avance pas beaucoup sur CF, c'est une petite pause on va dire avant de repartir de plus belle. Cependant, j'ai relu l'intro de cette histoire y a peu le temps pour la corriger et ça fait un moment que je voulais la mettre ici, histoire de mettre le début de cette histoire (et il faudra que je réfléchisse à un résumé de quatrième de couverture aussi)
Donc, pas de note de début cette fois, on commence in medias res sous la coupe ! Bonne lecture !
Ah si ! Erratum, j'ai une note à faire ! La prière que chante Rodrigue dans le chapitre 1 est inspirée de la traduction française officielle de la prière chrétienne "Pater Noster", mais adaptée à Fodlan.
(voilà ce que je t'avais dit @ladyniniane ! J'espère que ça te plaira !)
Introduction
« La Déesse fit les plan… plantes et les bêtes… peuplant la… la terre et les cieux ; Elle cré… créa aussi les hommes.
– Bien Rodrigue, à vous Alix.
Le petit garçon releva le nez de son missel pour regarder son frère, se mettant à lire à son tour comme il pouvait.
– Les hommes dé… désiraient le pou… pouvoir et la Déesse ré…pon…dit à leur demande… Pourquoi les hommes voulaient le pouvoir Rosemonde ?
– C’est expliqué après, vous le savez, continuez.
– Je sais… c’est « Elle acc… accor…da les biens faits…
– Non, pas comme ça, répétez. « Bienfaits », en un seul mot.
– Bien… bienfaits des cieux, les bienfaits de la terre et les bienfaits de la magie… » Oui mais, pourquoi elle ne leur a pas donné avant ?
– Et pourquoi les animaux et les plantes n’ont pas demandé le pouvoir comme les hommes ? Ils n’en ont pas besoin ? Ajouta Rodrigue.
– C’est simplement que les animaux ont des griffes et des crocs pour se protéger et chasser, des choses que nous, les humains, n’avons pas. C’est pour cela que nous devons cultiver la terre pour nous nourrir et que nous pouvons utiliser la magie pour nous défendre contre le danger. Mais ce n’ait pas le sujet de la leçon, nous verrons ça plus tard. Vous avez déjà posé beaucoup de questions et j’aimerais que nous finissions cette leçon de lecture. Alors, continuez.
– Y a des trous dans l’histoire… marmonna Alix en posant sa joue sur son poing. Papa et maman, ils disent que c’est bien de poser des questions.
– Papa taquine même souvent la prêtresse en lui en posant quand il va à l’église, ajouta Rodrigue avant de se rappeler. Mais maman a dit que les trous, c’est parce que les textes sont très, très, très vieux alors, on en a perdu.
– Dommage, j’aurais bien aimé savoir pourquoi ils ont pas demandé des trucs les’animaux…
– Un peu de concentration tous les deux, il faut qu’on reprenne la leçon et que vous appreniez à lire. Rodrigue, reprenez et Alix, tenez-vous correctement.
– Oui Rosemonde, obéit-il en reprenant son livre pour continuer, même s’il s’arrêta assez vite. « Les hommes u… u…
– Il est compliqué celui-là, « usèrent ».
– uzère… de l'art de la magie et acc… accrurent leur pouvoir ; mais les zom…
– Pas de liaisons ici, il y a un « h » qui la coupe.
– D’accord… « …les… » il fit une grosse coupure pour être sûr de ne pas faire une faute. « …hommes ne virent pas que le pouvoir attirait le mal. »… Pourquoi le pouvoir de la Déesse attire le mal ? La questionna-t-il encore, curieux. La Déesse, elle est gentille alors, elle peut pas faire des choses méchantes ?
– La Déesse ne fait jamais de mauvaises choses quand elle utilise ses pouvoirs, parce qu’elle n’oublie jamais le bien et le mal. Même ses actes durs sont toujours justes. Par contre, quand c’est les hommes qui l’utilisent, il est tellement grand qu’ils peuvent oublier le bien et le mal car, ce pouvoir est assez puissant pour tout faire.
– Alors, pourquoi elle l’a donné comme ça ? Elle ne pouvait pas en donner moins pour qu’on fasse pas de bêtise ? Demanda à son tour Alix, tout aussi curieux que son frère.
– Hum… je ne connais pas assez les Écritures pour répondre à toutes vos questions. Vous pourrez demander à la prêtresse quand vous la croiserez ou au prochain office.
– Oh non… ça endort l’office…
– Alix, ne parlez pas comme ça. Vous n’allez tout de même pas faire comme votre père et avoir aussi peu de considération pour la Déesse ?
– Bah c’est pas grave, intervient Rodrigue pour soutenir son frère. J’en aurais pour nous deux vu qu’Alix aime pas !
– C’est vrai ! On est pareil donc, ce que fait Rod, c’est comme si c’était moi qui le faisais !
– Non, ça ne marche pas comme ça…
– Tout se passe bien ?
Les deux frères se retournèrent et virent leur maman entrer dans la pièce, accompagné de leur tonton Nicola. Ce n’était pas vraiment leur tonton mais, c’était leur compère et le meilleur copain de leur papa donc, c’était pareil, même s’il avait une tresse marron comme le poil d’un ours et les yeux de la même couleur, pas des cheveux noirs comme la nuit comme leur papa ou jaune, orange miel comme leur maman. Ils sautèrent de leur chaise pour aller faire un câlin à leur maman. Alix commença à lui parler de la leçon, vite suivit par Rodrigue qui complétait ses phrases.
– On s’entraine à lire…
– …Donc on lit les Écritures…
– …mais y a plein de trous…
– …tu peux nous expliquer ?
– D’accord, cela doit être dur parfois. Vous vous en sortez bien pour lire ? Et qu’est-ce que vous ne comprenez pas ? Les questionna-t-elle.
– Oui, ils lisent de mieux en mieux, même si cela manque encore de fluidité, intervient Rosemonde. Par contre, ils n’arrêtent pas de poser des questions sur plusieurs points…
– Tant mieux alors, c’est sain de poser des questions et de remettre en question les choses, assura Aliénor, son regard tout vert allant vers Rosemonde.
– Tout de même Dame Aliénor, il s’agit de la Parole de la Déesse…
– Non, il faut aussi savoir La remettre en question, cela leur permettra de construire leur propre moral quand ils seront grands, lui jura leur maman. Guillaume partage mon point de vue sur le sujet, même si notre foi est très différente. Je préfère que nos louveteaux commencent par se poser des questions plutôt que de croire tout ce qu’on leur raconte, même s’ils critiquent jusqu’aux Écritures. Ils réfléchissent quand quelque chose leur semble étrange au moins. Guillaume en est très fier.
– Ah ça… pour être les fils du Loup, ils le sont… ce ne sont pas vos enfants pour rien… marmonna Rosemonde, même si un petit sourire fier ornait sa bouche fine.
– Nous sommes bien d’accord, répondit Aliénor. Bon, il faut qu’on retourne tous au travail, je reviendrai plus tard pour voir comment ça se passe…
« Eh ! Regardez ! S’écria un domestique qui devait se trouver dans une pièce d’à côté. C’est pas le convoi royal ? Là-bas ! Aux portes !
– Oui ! On dirait bien ! Je vois l’étendard du roi ! »
Rodrigue eut un grand sourire en regardant son frère qui s’exclamait, tout identique tous les deux, entendant à peine leur maman dire qu’ils rentraient bien plus tôt que prévu.
« Tu as entendu ?!
– Oui ! Oncle Ludovic arrive ! Alors…
Ils s’écrièrent ensemble en sautant hors de la pièce.
– Papa est de retour !
– Rodrigue ! Alix ! Ne courrez pas dans les couloirs ! Et attention dans les escaliers ! Les reprit leur nounou.
– Oui Rosemonde ! Répondirent-ils en se précipitant quand même hors de la pièce pour retrouver leur papa. Le revoir plus vite valait bien de se faire gronder après.
Ils bousculèrent un peu un serviteur qui venait leur annoncer ce qu’ils avaient déjà entendu, l’homme riant un peu en les voyant aussi press��s.
– Doucement les louveteaux ! Le seigneur Guillaume ne va pas se renvoler tout de suite !
Rodrigue l’écouta à peine, courant plutôt à toute vitesse avec son frère à travers les couloirs de leur maison. Papa était rentré ! Il avait dit qu’il reviendrait quand les capucines fleuriraient mais, il était déjà de retour !
« Papa est le meilleur ! Il a déjà fini tous ses devoirs ! S’exclama Alix avec joie à l’idée de le retrouver.
– Oui ! Et il est rentré plus vite ! » Sourit Rodrigue à son frère en arrivant aux escaliers qui les forcèrent à ralentir le rythme. Les marches étaient encore trop hautes pour eux, ils ne pouvaient pas encore les dégringoler sans tomber. Ils ne pourraient le faire que quand ils seraient aussi grand que leur maman ou leur papa. « Par contre, on ne va pas pouvoir faire notre plan…
– Oui, c’est vrai… on n’a qu’à remplacer les capucines par des ancolies, c’est pareil ! Sourit le deuxième-né en ayant la bonne idée. Et ce sera joli dans sa tresse aussi !
– C’est vrai ! Se rappela Rodrigue. En plus, Bruno dit qu’elles restent pas longtemps, faut les lui mettre dans sa natte avant qu’elles repartent chez elles !
– Et cette fois, on ne se fera pas prendre quand on les mettra ! On fait comme on l’a dit ! Tu lui demandes comment bien écrire avec ta main gauche…
– Et toi, tu les mets dedans !
– On est d’accord alors !
– Et cette fois, ça va marcher !
– Oh oui ! Cette fois, papa ne le verra même pas ! Ça sera joli ! Rit Alix, les deux frères se tapant dans la main pour se mettre d’accord, alors qu’il arrivait sur la dernière marche. Prêt ?
– Oui ! Répondit Rodrigue en se mettant aussi en position.
– Et… hop !
Ils sautèrent en même temps au sol, faisant le concours de celui qui irait le plus loin mais, comme à chaque fois, ils firent la même distance au pouce près. C’était normal après tout, ils étaient jumeaux alors, ils faisaient presque tout pareil. Ils étaient même nés identiques, c’était normal.
– Faites attention dans les escaliers, les prévient leur maman, les suivant de près dans le colimaçon.
– Oui maman !
– On a sauté que de la dernière marche… la rassura Rodrigue.
– …et on est encore à égalité ! Continua Alix avant de dire à nouveau à son frère. Car on est vrais jumeaux !
– Pour toujours ! Compléta-t-il.
Ils repartirent à toute vitesse dans les couloirs sans l’attendre, trop impatients de revoir leur papa. Ils s’excuseraient plus tard pour ça.
Après encore quelques grandes foulées dans les couloirs, ils arrivèrent dans la cour où se trouvait le carrosse d’Oncle Ludovic. C’était bizarre… c’était pas le même que d’habitude… l’autre devait être cassé, ça devait casser comme leurs petits chevaux de bois, les jumeaux avaient brisé la patte d’un l’autre jour en jouant aux chevaliers, même si Bruno avait dit qu’il pourrait le réparer cette fois.
Leur oncle était déjà descendu alors, leur papa ne devait pas être loin. Il y avait même Lambert ! Il était avec Gustave ! Bon, Rufus aussi mais, ça voulait surement dire qu’ils allaient rester longtemps vu que leur travail s’était fini plus vite ! Il y avait quelqu’un de penché à l’intérieur du carrosse, leur papa devait l’aider à descendre quelque chose de la voiture !
– Papa ! Tu es là !
Cependant, ce ne fut pas leur papa qui sortit du carrosse mais, un autre homme, qui aidait le premier à porter une grande boite en bois sombre, aussi grande que Nicola. Oncle Ludovic se tourna vers eux en les attendant appeler leur papa. Il était tout blanc et semblait très triste. C’était bizarre, papa l’aidait souvent pourtant, et leur oncle n’était jamais triste quand il venait ici au printemps d’habitude. Très occupé et c’était dur de savoir s’il était en colère ou pas mais, pas triste.
– Rodrigue… Alix…
– Oncle Ludovic… où est papa ? Demanda le premier-né.
– Il va bientôt arrivé ? Continua le second jumeau. Il nous a manqué !
– Papa a encore du travail chez toi ?
– Pourquoi tu n’es pas avec lui alors ?
Oncle Ludovic devient encore plus pale, mal à l’aise. Il devait être malade s’il était blanc comme ça. Il jeta un œil à la boite en bois, avant de bégayer après s’être rapproché d’eux et s’être baissé à leur hauteur, comme leur papa et leur maman quand ils leur expliquaient quelque chose de dur. Les deux frères ne l’avaient jamais vu comme ça, aussi hésitant et triste. Il avait les yeux tout rouge… il devait être fatigué… il avait vraiment besoin de l’aide de leur papa pour travailler.
– Gui… Guillaume est… est dans… il regarda encore la boite en se taisant, les frères comprenant que leur papa était dedans, alors que leur oncle continuait avec peu de voix. Je… Je suis désolé… c… c’était pour me protéger… Guillaume… votre père… votre père est…
Oncle Ludovic les serra tous les deux contre sa poitrine en retenant ses larmes, posant la tête des jumeaux contre ses épaules alors qu’il leur annonçait quelque chose en rapport avec leur papa mais, sans qu’ils comprennent vraiment. Rodrigue en tout cas ne comprenait pas, et en jetant un regard à Alix, il sut que lui non plus.
En six ans d’existence, c’était la première fois qu’il était confronté à ça d’aussi près, quand les gens allaient dormir dans une boite. Alix et lui ne connaissaient pas leurs grands-parents, ils étaient morts peu de temps après la naissance de leur papa à la guerre. Quand ils avaient demandé à leur nounou pourquoi ils n’avaient pas de grand-maman comme à Lambert, elle leur avait dit qu’elle était partie très loin pour le bien du Royaume et qu’elle ne reviendrait pas, tout comme son mari. Leur papa, il leur avait dit qu’elle et leur papi étaient partis très loin, avec la Déesse dans l’astre céruléen et qu’ils veillaient sur eux de là-bas avant de naitre à nouveau.
C’était un des rares moments où il ne leur souriait pas.
Leur papa semblait toujours gentil avec eux, sauf quand ils faisaient une bêtise où il était sévère, ou quand il n’était pas un peu énervé contre leur oncle Ludovic et les vassaux. Il chantait aussi tout le temps à tue-tête, comme si le silence le gênait, reprit en chœur par ses jumeaux au grand dam de leur nounou. D’après Rosemonde, « les chansons des sous-lards de l’armée ne convenaient pas à deux jeunes ducs » et elles étaient trop grossières pour eux. Eux, ça les faisait rire de chanter avec Guillaume.
C’était surement pour ça qu’ils ne comprenaient pas.
– Ne pleure pas Oncle Ludovic… papa va se réveiller et tout arranger, comme toujours ! S’exclama Alix.
– C’est vrai, papa ne dors jamais très longtemps, comme maman. Il se couche toujours après nous, il est toujours debout quand on se réveille la nuit et il est toujours levé avant nous. Il va vite se réveiller, assura Rodrigue en tendant sa main pour essuyer ses larmes.
– Rod a raison ! Il va vite se réveiller ! Il ne faut pas pleurer parce qu’il dort plus que d’habitude ! Ça lui fera du bien ! Par contre… il s’éloigna un peu de l’adulte pour pouvoir échanger un regard et des mots silencieux avec son frère.
– Moi aussi, répondit-il à la suite qu’il avait devinée sans souci.
Les deux petits visages complètement identiques se tournèrent alors vers leur oncle, plantant leurs yeux étonnés dans les siens en demandant d’une même voix.
– Pourquoi papa dort dans une boite ?
Ludovic eut un regard triste, puis souffla en posant une de ses mains sur leur épaule, sans arriver à trouver ses mots.
– Rodrigue, Alix… votre père ne se réveillera plus. Il est avec vos grands-parents à présent. Il… il est mort à ma place… il ne se réveillera plus…
– Quoi ? Deux hoquets lui répondirent en même temps, alors qu’Alix s’exclama, se différenciant du calme apparent de son frère.
– Pourquoi il ne se réveillera plus ?! Il nous avait promis qu’il allait vite revenir pour jouer ! Papa n’est pas un menteur ! Aussi sûr que Rodrigue est moi et que je suis Rodrigue !
– Papa ne ment pas, c’est un adulte. Sa chanson avant de partir, c’était même pour nous jurer que quand il reviendra, il serait bien et qu’on ne se séparera plus. Un adulte, ça ment pas non ? Pourquoi tu dis qu’il ne reviendra pas alors ? C’est si bien d’être mort ?
– Il préfère être avec papi et mamie qu’avec nous ?
– On a fait quelque chose de mal ?
– C’est peut-être parce qu’on arrête pas d’échanger nos places pour pas faire ce qu’on aime pas ? Proposa Alix en regardant son frère.
– C’est vrai que Rosemonde a dit qu’elle allait écrire à papa pour lui en parler car, ça ne gêne pas trop maman qu’on le fasse, même si elle nous fait la morale après pour nous dire pourquoi c’est pas bien… il est en colère à cause de ça ?
– On peut arrêter si c’est ce qui le met en colère. C’était juste pour pas m’entrainer à la lance alors que j’aime pas ça et que Rodrigue préfère la manier plutôt que l’épée…
– Oui, ça nous fait juste rire que personne n’arrive à nous différencier à part papa et maman. Si c’est ça, on arrête…
– Mes enfants… les coupa doucement Ludovic. Votre père ne serait jamais assez en colère contre vous deux pour partir loin de vous. Ça le faisait plutôt rire de vous voir inventer des stratégies pour échanger vos places sans que les adultes le voient, ou pour mettre des fleurs dans sa natte. Les adultes peuvent mentir mais pour ça, il ne mentait pas. Vous étiez ses deux petits louveteaux. Il aurait eu le choix, il serait avec vous à cet instant, avec votre mère.
– Alors pourquoi il n’est pas là ? » Demandèrent-ils ensemble, le fixant avec leurs grands yeux de chats bleu comme l’eau du lac, exactement les mêmes que ceux de Guillaume… comme leurs cheveux, leur teint, leur petite silhouette…
« Déesse… ce que vous ressemblez à votre père… ce que vous vous ressemblez les uns les autres… » songea le roi en cherchant ses mots, ne sachant pas comment expliquer qu’un humain pouvait vouloir en assassiner un autre, tout ça pour empêcher une paix et en criant que c’était au nom de la Déesse. Surtout pour ces deux-là… il… il n’aurait jamais cru devoir leur annoncer la mort de leur père… Guillaume était si fort… l’était encore plus depuis que la Déesse les avait bénis Aliénor et lui de deux petits louveteaux…
Ludovic ne pouvait pas oublier le jour où ils étaient nés, comment Guillaume tournait en rond en attendant qu’Aliénor accouche, n’ayant pas le droit de rentrer étant donné que le travail était compliqué. Le bébé s’était présenté dans le mauvais sens, les pieds les premiers. Ce n’était pas un bon signe, surtout après toutes les fausses couches d’Aliénor… Une aide finit par enfin l’autoriser à entrer dans la pièce, le nouveau-né était pratiquement sorti à part un bras, quand la sage-femme ne s’écria.
« Attendez ! Attendez ! Ne le laissez pas encore rentrer ! Il y a un deuxième bébé ! Il tient la main de son frère ! »
Guillaume était pratiquement tombé par terre d’étonnement, de joie et d’inquiétude en entendant la nouvelle. Après tout ce temps et faux espoirs, son Aliénor et lui avaient des jumeaux pour leur premier enfantement qui arrivait à terme, se tenant même pas la main pour ne pas être séparés. Des jumeaux…
Il se souvenait du sourire de Guillaume, de sa joie à l’idée d’avoir des jumeaux, rassurant le premier-né qu’on lui avait confié. Le petit appelait son frère de tous ses petits poumons alors, le nouveau père lui assurait qu’il arriverait bientôt, qu’ils ne seraient pas séparés longtemps, tout en priant pour qu’Aliénor ressorte vivante de cette épreuve, même s’il croyait peu… Guillaume n’avait jamais été aussi doux avec quelqu’un d’autre de sa vie, cajolant le bébé pour le rassurer alors qu’il était loin de son frère, les notes toutes douces qui calmèrent un peu les pleurs…
« Il doit être terrifié loin de son jumeau dans un endroit aussi nouveau… ne t’en fais pas mon bébé, ça va aller… tu vas vite le retrouver et tu es en sécurité ici, tout comme ton frère ou ta sœur… vous êtes en sécurité, je vous protégerai tous les deux jusqu’à mon dernier souffle, je vous le promets… »
Les larmes de joie de Guillaume avaient coulé sans s’arrêter quand il prit ses deux fils pour la première fois contre lui aux côtés d’Aliénor, le premier-né s’arrêtant de pleurer en retrouvant son double, tout identique à lui. Les nouveaux parents leur donnèrent le nom des parents de Guillaume, Rodrigue et Alix, morts à la guerre quand il avait à peine trois ans. Il arriva à rire en disant qu’il avait de la chance que le nom de sa mère soit unisexe, leur jurant de toujours les aimer. Que Guillaume avait aimé ses fils de tout son cœur et de toutes ses tripes dès le premier jour de leur existence. Il arrivait même à les différencier instinctivement, même quand ils faisaient tout pour rester identiques. Un vrai « loup » avec ses petits, ses crocs d’habitude tout le temps sortis pour le bien de son fief et du Royaume se cachant sous ses rares sourires, qu’il ne montrait vraiment qu’à sa famille…
« Il aurait tant voulu rester en vie avec vous… il ne voulait pas mourir… il voulait revenir vers vous… vous revoir… puissiez-vous me pardonner un jour pour avoir provoqué la mort de votre père… cela arrive bien trop souvent… votre père avait déjà perdu ses parents avant de pouvoir le connaitre… ils ont également donné leur vie pour le Royaume… votre famille a versé trop de sang et de larmes pour la mienne… puissiez-vous nous pardonner… »
Ludovic tenta donc, même s’il n’était pas sûr de lui, ne trouvant pas de meilleure tournure.
– Un… un homme très méchant a tenté de me faire du mal. Votre père l’a arrêté mais, c’est à lui qu’il a fait beaucoup de mal et il ne s’est pas relevé. Il…
Les mots se bloquèrent dans sa gorge mais, le regard perdu des petits les poussèrent à sortir, alors que l’adulte priait pour que cela adoucisse un peu le sort de leur père, même si ce dernier allait surement revenir de la réincarnation pour le chercher en enfer, afin de lui tirer les oreilles de désaccord. Déesse, ce qu’il serait furieux contre lui… mais il ne voyait rien d’autre pour adoucir la situation aux enfants et leur expliquer, c’était la seule image de la mort qu’ils connaissaient en lien avec celle de leur père.
– Guillaume est mort comme un vrai chevalier…
Cette fois, les deux petits comprirent, s’attrapant la main instinctivement pour ne pas se lâcher. Ça avait toujours été normal de se tenir ainsi, depuis qu'il était né même…
– Il ne se réveillera pas ?
– Non. Il va rester dans son cercueil…
– Il ne chantera plus ?
– Non. Il ne pourra plus chanter à présent…
– Même les chansons de l’armée qui mettent Rosemonde en colère ?
– Même elles…
– Il ne nous racontera plus d’histoire ?
– Non, il ne pourra plus… même les histoires de chevaliers et de gentils voleurs…
– Il ne jouera plus avec nous ?
– Non… il ne pourra plus…
– Il ne rira plus avec maman sans qu’on comprenne vraiment.
– Non plus… même s’il adorait votre mère…
– On ne pourra plus lui mettre des fleurs dans les cheveux sans qu’il le voie et se faire toujours prendre…
– Non… hum… un petit éclat de rire triste arriva à sortir de sa gorge. Vous le faisiez toujours rire quand vous tentiez de le faire…
– Il ne te dira plus « c’est mon boulot de t’empêcher de faire des conneries » ?
– Non… c’est vrai qu’il me le disait trop souvent…
– Il restera avec papi et mamie maintenant ? Et il va se réincarner aussi ?
– Oui… je suis vraiment désolé… Guillaume aurait préféré rester avec vous deux plus longtemps aux côtés de votre mère… mais quitte à mourir, je crois que c’est ce qu’il aurait voulu… pour protéger la paix afin que vous grandissiez bien sans vous inquiétez de la guerre… tenta-t-il avant de répéter. Il est mort comme un vrai chevalier… comme un vrai chevalier… même s’il voulait rester avec vous… Guillaume voulait tellement rester avec vous…
– – Non, non… tu mens… refusèrent-ils en donnant un petit coup de poing faible sur sa poitrine, comprenant qu’Oncle Ludovic leur disait que leur papa ne reviendrait plus jamais, ajoutant d’autres petits coups impuissants à chaque phrase. T’es un vilain menteur Oncle Ludovic… c’est pas vrai… papa va se réveiller… il va revenir… il a promis… papa va revenir, sourire et chanter… c’est toi qui mens… papa est pas avec papi et mamie… on va le dire à papa et maman… t’as pas le droit de mentir… papa va te gronder… papa va… papa… notre papa… on veut papa !
Les deux jumeaux s’effondrèrent contre l’épaule de l’homme, pleurant à chaudes larmes en réclamant leur père, voulant plus que tout le revoir et qu’il se réveille avec son grand sourire. Aliénor essayait de rester à peu près entière derrière eux malgré sa peine, soutenant ses enfants avec Ludovic, même s’ils étaient inconsolables… Ce dernier ne lâcha pas les louveteaux jusqu’à ce qu’ils s’épuisent à force de pleurer et d’appeler leur père. Ils se tenaient toujours tous les deux. Après avoir confié Lambert et Rufus à Gustave, il les prit alors dans ses bras pour les porter dans leur lit, suivit d’Aliénor qui n’avait plus assez de force pour les porter, même si elle resta toujours à la hauteur de ses enfants.
« Je n’ai pas le temps d’être triste », déclara-t-elle quand il lui demanda comment elle allait, « ni même pour te tirer les oreilles pour avoir comparé Guillaume à un chevalier. Ça a tué ses parents je te rappelle et on n’avait pas le temps pour se prendre la tête avec ça. On a toujours visé au plus efficace pour notre fief et notre famille… même si c’était surement pour le mieux… il n’aurait surement pas compris sinon, surtout qu’ils aiment beaucoup les histoires de chevalerie, marmonna-t-elle en priant pour que ses fils ne l’entendent pas dans leur sommeil. Je dois m’occuper d’eux et du duché… Gui ne me le pardonnerait jamais si quelque chose leur arrivait… je dois être forte pour eux… »
On enterra Guillaume dans sa boite le lendemain, au bord du lac comme il l’avait toujours voulu d’après leur maman. Il aurait deux tombes, une au bord de l’eau et une autre dans le caveau familial, sur la seule ile de Lac Egua, celui du Brave Fraldarius toujours pur.
Habillés de la même façon en noir et blanc, les jumeaux se tenaient toujours par la main, ne se lâchant pas, même pour poser le dernier repas de leur papa sur un petit bateau de bois puis, le pousser sur la surface. Ils avaient trop peur pour se lâcher, trop peur que l’autre s’en aille aussi pour toujours pour seulement y penser.
Délaissant ses bleus habituels, Aliénor s’était drapée de noir et de blanc, ses cheveux blonds-roux couvert d’une mantille noire, tout comme Nicola à ses côtés. La seule chose de couleur qu’elle portait était une broche d’argent, frappée avec leur emblème, un cadeau de Guillaume. Elle s’était baissée afin d’être à leur hauteur, la main sur leurs épaules. Lambert était à côté d’eux, Rufus aussi, Ludovic juste derrière la famille Fraldarius. L’homme immense avait tenté de poser une cape sur leurs épaules mais, ils l’avaient repoussé. C’était le geste de leur papa. Leur papa se mettait toujours derrière eux et les enveloppait avec les pans de ses très longues capes très chaudes, autant pour les garder à proximité que pour les protéger du froid. Rodrigue disait souvent que quand il serait grand, il aurait la même cape immense que lui. Ça faisait rire leur papa… il ne l’entendrait plus maintenant. Ni rire, ni sourire, ni lire, ni chanter… plus rien… il ne l’entendrait plus jamais à part son silence…
Pendant la cérémonie, le prêtre répéta les mots de Ludovic.
« Sa Grâce le Duc Guillaume Ulysse Fraldarius, le septième du nom, dit le Loup, en protégeant sa Majesté le roi Ludovic le IIIème, a agi comme le devrait tout homme de Faerghus. Dans sa mort triste, nous devons trouver de la joie en voyant le roi sain et sauf ainsi qu’un exemple à suivre. Même s’il a laissé derrière lui une veuve et deux enfants encore trop jeunes, il a sacrifié jusqu’à sa vie pour son roi. Par cet acte instinctif d’abnégation pure, il a eu la mort la plus honorable. Pour Faerghus et pour le roi, Sa Grâce Guillaume le Loup est mort comme un vrai chevalier… »
« Lui aussi dit ça… pensa Rodrigue en serrant la main d’Alix dans la sienne, pleurant à nouveau quand on mit de la terre sur la boite où était son papa. Comme Ludovic… comme nounou… cela doit être vrai… »
                                                                          Chapitre 1                   
« Il manque un tranchoir et un tailloir. Et une chaise.
– Comment ça seigneur Alix ?
– Il manque ceux de papa… répondit Rodrigue à la place de son frère. Et « seigneur », c’est papa, pas nous…
Il sauta de sa chaise avec son propre tranchoir et le tailloir de son frère dans les mains, puis alla les poser à la place où devait être Guillaume. Ça faisait trois semaines qu’on avait enterré leur papa dans la terre du lac dans la boite, trois semaines que tout était en noir et blanc, que tout était silencieux. C’était pas comme leur papa… Guillaume, il souriait toujours avec eux, n’aimait pas les couleurs aussi sombres, et détestait encore plus le silence. Il n’aimerait pas une forteresse comme ça… c’était comme s’il n’avait jamais été là… et pourtant, même si on leur parlait tout le temps de leur « père », ça sonnait toujours faux, comme des mensonges. Ni l’un ni l’autre des jumeaux ne comprenaient tout, à part que ce n’était pas comme leur papa… c’était pas comme lui… et on ne les appelait plus par leur nom maintenant… c’était juste « seigneur Rodrigue » et « seigneur Alix », ou « Vôtre Grâce » les rares fois où ils étaient séparés, ou « Vos Grâces », plus Rodrigue et Alix, sauf leur maman et Nicola qui les appelaient toujours par leur prénom, ou « les louveteaux » quand ils leur parlaient à tous les deux en même temps, comme le faisait leur papa.
Le cuisinier eut un air triste et répondit.
– Excusez-moi pour cet oubli. Je vous apporte un autre tranchoir et tailloir. Par contre, maintenant que… maintenant, on doit tous vous appelez ainsi.
– Maman ne le fait pas, rétorqua Alix. Nicola aussi.
– Dame Aliénor est votre mère, c’est normal, et le Sieur Terrail est un ami d’enfance de votre père, ils ont beaucoup fait ensemble tous les trois. C’est pour ça qu’il se permet d’être plus familier avec vous. C’est parce que vous êtes tous les deux quasiment ducs maintenant.
– C’est papa le duc, c’est son travail, rétorquèrent-ils d’une même voix.
Le cuisinier ne répondit pas, l’air encore plus triste, comme figé par leur regard identique. Tout en noir et blanc, ils se ressemblaient encore plus… et sur les lèvres de l’homme, Rodrigue pouvait encore lire les mêmes mots : « ce qu’ils ressemblaient à leur père »… mais ils lui ressemblaient depuis toujours non ? Et pourquoi ils disaient tous « père » ? Avant qu’il soit dans la boite, tout le monde leur disait « papa », pas « père »… pourquoi tout changeait d’un coup ? Papa, c’était papa, pas père.
– Que se passe-t-il ?
– Ah ! Dame Aliénor !
Les jumeaux se tournèrent vers leur maman qui venait d’entrer, elle aussi tout habillée de noir. Même ses cheveux blonds-roux devenaient noirs sous sa grande mantille… c’était la seule qui n’avait pas trop changé avec Nicola. Elle était toute triste car, Guillaume était dans la boite, et souvent fatiguée mais, elle continuait à agir comme leur maman. C’était rassurant…
– Il a oublié de faire la place de papa alors, on lui a donné une partie de nos affaires, lui expliqua l’ainé en montrant là où devrait être la chaise de Guillaume.
– Je vois. Ça arrive ce genre d’oubli.
– Oui mais, depuis que papa est dans la boite et mort comme un vrai chevalier, tout le monde oublie de le faire.
– Les choses sont un peu compliquées en ce moment, souffla-t-elle simplement en s’approchant. Tout le monde est triste car, papa est mort en faisant son travail.
Elle passa sa main sur les cheveux des louveteaux puis, les rassit sur leur chaise, avant qu’ils ne fassent tous ensemble une prière de remerciement à la Déesse pour leur permettre de bien manger. Ces mains étaient toutes chaudes contrairement à la forteresse, c’était bien… ils mangèrent ensemble en parlant de ce qu’ils avaient fait ce matin, Aliénor les écoutant patiemment, toujours attentive. C’était la meilleure des mamans… normal, elle était toujours avec le meilleur des papas… elle était très, très occupée en ce moment, comme papa avant mais, elle faisait tout pour arriver à manger et passer le soir avec eux, leur lisant des contes et des légendes pendant la veillée au coin du feu. Ils lui réclamaient toujours la légende du Brave Fraldarius ou celle de Kyphon et de Loog, c’était leur préférée. Les aventures de leur ancêtre avec le Roi Lion tout en s’occupant de sa fille Clothilde… ça leur faisait penser à Guillaume quand il n’était pas encore dans une boite.
Après le repas, Aliénor dut retourner travailler, et les jumeaux filèrent dans le jardin, le seul endroit où le silence n’était pas total, toujours occupé par les bruits de la nature, du lac et du travail des jardiniers pour le garder aussi beau. C’était le début du printemps en plus. Ça sentait toujours bon par-dessus l’odeur de fumier en ce moment. S’ils trouvaient Bruno après avoir joué, ils lui demanderaient s’ils pouvaient l’aider à s’occuper des fleurs de potentilles, c’était les préférées de leur papa… il ne les verrait pas fleurir cette année dans sa boite dans la terre…
Les deux petits jouaient avec des petits animaux de bois sur le sol, quand le jardinier les trouva assis par terre.
« Ah ! Rodrigue ! Alix ! Vous êtes là les louveteaux ! Votre gouvernante vous cherchait ! Il ne fait pas un peu frais par terre ? Vous ne jouez pas dans la grande salle ?
– Bonjour Bruno ! Répondirent-ils en souriant. Lui, il les appelait toujours par leur prénom.
– Non, ça va, on est bien là ! Et on est mieux dans le jardin ! S’exclama Alix, tout content d’entendre quelqu’un continuer à leur parler normalement.
– C’est bien vrai ! Si seulement cette vieille rigide de Rosemonde voulait bien l’entendre…
– En plus, y a le portrait qui fait peur dans la grande salle. C’est papa mais, c’est pas papa… ajouta l’ainé en s’accrochant à son frère. On est mieux près du lac.
– Ah oui… il est horrible ce portrait de Gui’. Même lui le détestait mais, il avait dû être sérieux tout le long et bon, notre Gui’ quand il était sérieux… mouais, il pouvait faire assez peur. Surtout qu’il souriait tout le temps avec vous, ça fait une sacrée différence.
– Papa fait pas peur… qu’est-ce que tu dis Bruno ?
– Oh, trois fois rien, ce n’est pas important, je m’égare. L’important, c’est que votre papa, il vous adorait et aimait sourire avec vous, leur assura-t-il avant d’ajouter. Au fait, les lilas viennent de fleurir, ils sont magnifiques ! Vous voulez le voir ?
– Oh oui ! Et on pourra t’aider à t’occuper des potentilles ?
– Bien sûr les p’tits loups… leur sourit-il plus doucement.
Les deux enfants rangèrent leurs jouets à leur place, pendant que Bruno prévenait une domestique qu’il les avait retrouvés puis, ils suivirent le jardinier jusqu’aux arbustes de lilas et effectivement, ils étaient tous en fleur ! On aurait dit que des boules de laine blanches, violettes, mauves et bleutés étaient accrochées aux branches ! C’était si joli !
– C’est super beau ! Ils doivent être super vieux pour avoir autant de fleur !
– Ah ! Ah ! Non, ce n’est pas comme les coccinelles ! Certains sont un peu vieux oui, mais les blancs doivent avoir une petite dizaine d’année ! C’est pas si vieux pour un arbre. C’est encore des louveteaux, comme vous deux !
– Vraiment ? Et on grandira autant qu’eux ?
– J’en suis sûr.
– Mais on sera encore pareil ? Demanda Rodrigue. J’ai pas envie qu’on ne soit plus pareil avec Alix, même si tout le monde à part maman et papa se trompe quand on est habillé de la même manière.
– Moi aussi, je veux pas me différencier de Rod ! En plus, on est déjà bien assez différents comme ça !
– Ah ça, l’avenir nous le dira. Et même si vous devenez très différents l’un de l’autre, vous resterez toujours des jumeaux, rien ne pourra vous enlever ça.
L’image de la boite passa dans la tête de Rodrigue, tout ce qu’elle enfermait et avait mis dans la terre froide : leur papa, son sourire, ses chansons, sa chaleur, son énergie, la joie de leur maison… est-ce que les boites pouvaient tout enlever quand on les mettait dans la terre ? Et est-ce que… est-ce que ça pouvait même enterrer ça ? Est-ce que vraiment rien pouvait leur enlever le fait qu’ils étaient des jumeaux ? Même…
– Même la mort ? Même si elle a réussi à prendre papa ?
– Ah non ! Ne parle pas de ça Rod ! S’exclama Alix d’un coup, horrifié en attrapant ses mains, comme toujours. Je ne veux même pas penser à être sans toi ! Ce serait mon pire cauchemar si tu n’étais plus là ! On ne sera jamais séparés ! Même par la mort ! On sera toujours ensemble !
– Alix… oui, tu as raison, arriva-t-il à sourire en resserrant les mains de son frère. On sera toujours ensemble ! Tu seras toujours moi…
– …Et tu seras toujours moi aussi ! Je suis toi et tu es moi ! Pour toujours !
Bruno n’intervient pas, se contentant de passer doucement sa main sur leur tête, silencieux. Ils se mirent à s’occuper des lilas avec lui, fredonnant une chanson de Guillaume. Ça leur faisait du bien de chanter un peu… c’était comme s’il était avec eux d’une certaine manière… ils en récupéreraient quelques gerbes pour aller lui donner sur sa tombe…
« Un jour notre papa m’a dit,
Vous êtes mes azalées mes fils,
Quand il nous a vu tout surpris,
Il a alors ri dans sa grande pelisse.
Je n’ai pas compris pourquoi papa ri,
Mais j’ai quand même aussi ri fort avec lui,
Car il est toujours bon et bien de rire,
Alors on rit toujours ensemble dans la nuit
Un jour, mon papa a dit à ma maman,
Mon amour, nos enfants sont de lierre,
Maman a alors répondu tout en riant,
De lierre et de nigelle mon tendre cher,
Quand ils nous ont vu tout surpris,
Ils ont encore ri dans leur pelisse.
Je n’ai pas compris pourquoi ils ont ri tous deux,
Mais j’ai quand même aussi ri très fort avec eux,
Car il est toujours bon et bien de rire tous ensemble,
Alors on rit toujours jusqu’à ce que la terre tremble,
Un jour, papa nous a dit,
Vous êtes comme le myosotis,
Quand il nous a vu surpris,
Il a expliqué dans un sourire.
La joie d’un amour sincère dans la belle azalée,
Par la nigelle et le lierre pour à jamais nous lier,
Le myosotis conserve votre souvenir dans l’éternité,
Telle est la couronne qui dans mon cœur est tressée.
Ce fut à notre tour de bien rire,
Alors papa, il doit alors y fleurir,
Un grand drap de potentilles,
Pour toute notre petite famille. »
Ils aidèrent Bruno jusqu’à ce qu’ils entendent Rosemonde les appeler, ça voulait surement dire qu’ils devaient retourner étudier. Le jardinier leur passa de l’eau sur les mains de son arrosoir, puis les laissa se les sécher avec un torchon pour nettoyer le plus gros de la saleté, même s’ils devraient changer de chausses et taper leurs chaussures pour ne pas mettre de la terre partout à l’intérieur. Il les raccompagna jusqu’à la gouvernante pour lui expliquer mais, dès qu’elle les vit, Rosemonde devient toute blanche en s’écriant, furieuse.
« Au nom de la Déesse, qu’est-ce qui s’est passé ? Vous êtes dans un état déplorable !
– Mais… mais on a rien fait de mal ! On a juste voulu aider Bruno… bafouilla Rodrigue sans comprendre.
– C’est vrai ! C’est tout ! C’est pas la première fois qu’on le fait !
– Ne vous en faites pas Rosemonde, ils m’ont juste donné un petit coup de main. Ils jouaient dans la cour alors, j’en ai profité pour leur montrer les lilas en fleur et ils ont voulu m’aider. Ça leur a un peu changé les idées. Dame Aliénor ne me l’a jamais interdit, tout comme le Sieur Guillaume.
– Je comprends Plantet mais, ils ne peuvent plus s’abaisser à gratter la terre comme deux fils de paysans. C’était déjà bien peu digne de fils de Fraldarius de se mêler ainsi des tâches des domestiques mais, à présent, ils sont les ducs. Ils doivent tenir leur rang en toute circonstance, ce qui n’est guère le cas quand ils mettent les mains dans la terre de cette façon ! Je sais que le sieur Guillaume le tolérait mais, cela reste indigne d’un homme de si haute naissance !
Alix et Rodrigue échangèrent un regard sans comprendre. C’était vraiment mal ce qu’ils venaient de faire ? Ils le faisaient tout le temps pourtant, et leurs parents ne leur disaient rien… bon, d’accord, Rosemonde n’aimait pas trop mais, papa et maman lui disaient de les laisser faire. C’était si mal que ça d’aider Bruno à s’occuper des lilas ? Pourquoi elle disait qu’ils ne devaient pas le faire car, ils étaient fils de Fraldarius ou de duc ? Ils savaient qu’ils auraient beaucoup de travail et qu’ils devraient protéger les roturiers quand ils seraient grands mais, pourquoi c’était mal d’aider Bruno ? Et pourquoi elle l’appelait Plantet et pas Bruno comme d’habitude ? Ils avaient fait une si grosse bêtise que ça ? Les jumeaux ne comprenaient plus rien…
– Enfin Rosemonde, ne parlez pas comme une adrestienne à autant séparer les choses, le roi Loog en personne faisait son pain et son ménage lui-même. Je veux bien que maintenant, ils sont plus ducs qu’avant mais, ce sont aussi des enfants et les enfants ont besoin de souffler un peu. J’ai jamais vu la forteresse ducale aussi silencieuse de ma vie, et je connaissais Gui’ depuis qu’il était en langes. Un tel silence l’aurait rendu fou. Un décalage pareil entre ce qui se passe d’habitude et maintenant doit rendre le tout encore plus violent pour eux. Non, croyez-moi, un bon moment dehors sans penser à tout ça et en chantant un peu comme avec Gui’ ne peut leur faire que du bien.
– Là n’est pas la question. Ce n’est pas très respectueux envers son âme du Sieur Guillaume d’agir comme s’il était encore là. Le chant était sa grande passion et son don, on ne peut nier qu’il avait une des plus belles voix de tout Fodlan mais, nous ne pouvons pas singer son chant, et nous devons respecter les morts en observant le silence afin de ne pas gêner le recueillement de chacun. De plus, même si je comprends votre raisonnement, nous ne pouvons pas nier ce qu’ils sont à présent : les ducs en titre. Ils ne règnent pas, ils sont trop petits et notre Dame assure la régence jusqu’à leur majorité mais, ils restent ducs et ils doivent montrer l’exemple. J’en suis la première désolée mais, pour eux, le temps de l’enfance et de l’insouciance est terminée et ils doivent agir selon leur…
– Mais papa ne voudrait jamais ça ! Il ne voudrait pas ! Il détestait trop le silence ! Et ils ne nous disaient pas ça ! C’est pas papa… ou… ou… Ouuuuuiiiinnnn !!!!
Rosemonde s’arrêta de parler en entendant Rodrigue fondre en larmes. Il n’en pouvait plus, il n’en pouvait juste plus d’entendre tout ça. Ce n’était pas leur papa, pas leur vrai papa ! Leur papa ne voudrait jamais un tel silence de… de… un silence de mort ! Il détestait le silence ! Il ne voudrait jamais ça ! Et pourquoi tout changeait d’un coup ?! Leur papa n’était plus là mais, il jouait souvent avec eux et ils riaient tous ensemble ! Pourquoi ils ne pouvaient pas continuer à le faire ? Leur papa ne voulait pas qu’ils jouent sans lui ? Ils ne comprenaient plus rien !
– Rodrigue… Ne pleure pas… Alix lui prit à nouveau la main, tout aussi secoué que lui par les mots de Rosemonde. On n’est pas les ducs ! On ne le sera jamais ! C’est papa ! »
Le cadet entraina son frère en le tirant vers la forteresse pour les éloigner de leur gouvernante, courant dans les couloirs en passant entre les jambes des serviteurs, avant de pousser la porte de la pièce où travaillait leur maman. Elle sursauta sur sa chaise quand ses petits entrèrent en trombe et s’accrochèrent aux pans de sa robe, tous les deux en larmes maintenant. Elle lâcha son travail pour se glisser vers eux, passant sa main sur leur dos avec douceur, comme toujours avec eux. Quand ils commencèrent à se calmer, Aliénor les redressa un peu pour leur demander.
« Vous voulez en parler ? Qu’est-ce qui s’est passé ? »
Les deux petits lui expliquèrent ce qui venaient de se passer avec Rosemonde, répétant encore.
« C’est pas nous les ducs… c’est papa…
– C’est vrai que vous êtes encore petits pour l’être. Vous le serez quand vous serez aussi grand que papa. Pour l’instant, vous avez le droit d’être des enfants. Et vous avez le droit de chanter. Guillaume ne se taisait jamais, il ne voudrait pas vous priver du chant, surtout si ça vous fait du bien. J’en parlerai avec Rosemonde. Elle n’a pas à vous priver des choses qui vont font du bien, surtout en justifiant ses actes avec Guillaume… »
Les mots d’Aliénor les rassurèrent un peu, même s’ils ne la lâchèrent pas de la journée, faisant leur sieste dans son bureau pour rester avec elle.
Quand le soleil se coucha, elle les emmena à la chapelle ducale pour prier pour l’âme de Guillaume. Il risquait de passer un peu de temps avec la Déesse avant de se réincarner… d’habitude, Alix ne suivait pas autant son frère et sa maman à l’église. Il était comme Guillaume sur ce point, il ne croyait pas beaucoup. Mais là, les deux jumeaux se collaient encore plus que d’habitude. Si l’un d’eux partait ou s’ils se sépareraient, ils étaient sûrs de le retrouver dans une boite. Leur maman aussi… il ne fallait surtout pas se séparer…
Rodrigue récita ses prières sur le bout des doigts, fredonnant doucement le Mater Nostra que lui avait appris sa maman. Il faisait rouler à chaque mot un chapelet dans ses doigts que son papa lui avait offert, avec des perles de roseaux et les emblèmes des Braves et des Saints en breloque. Toutes étaient là, afin de prier la personne qui pouvait le plus les aider, comme Cichol et Cethleann aujourd’hui car, ils étaient liés à la famille. Il avait aussi son propre emblème dans les mains et celle de Sothis pour qu’ils protègent son papa. Guillaume ne croyait pas vraiment en la Déesse mais, il ne l’avait jamais empêché de prier autant qu’Aliénor, disant que cela ne lui faisait rien de mal.
« Toi Notre Mère, toi qui es aux cieux,
Que ton nom si respecté soit sanctifié,
Que ta bienveillance reste en ces lieux,
Que ta volonté soit faite pour l’éternité,
Accorde-nous du pain et de l’eau pour aujourd’hui,
Pardonne-nous pour nos offenses si grandes et si graves,
Nous serons sages pour que tu reviennes cette nuit,
Nous ne laisserons plus tenter par le pouvoir qui déprave,
Veilles sur nous, veilles sur les défunts,
Veilles sur nous et délivre-nous du mal,
Que ta Volonté soit faite.
Amen. »
Cela lui avait toujours fait du bien de prier. C’était comme pouvoir confier les choses qui lui faisait le plus mal au cœur, tout en sachant qu’il ne ferait pas mal à la personne en face. Le petit garçon pouvait tout dire à Alix, son papa et à sa maman mais, cela les inquiéterait alors qu’avec la Déesse, ça ne lui ferait pas aussi mal et elle pourrait surement intervenir. C’était peut-être pour ça qu’il se mettait à lui demander des choses que personne d’autre qu’elle pouvait faire.
« S’il te plait Déesse… supplia-t-il avant de réciter la formule que sa maman lui avait appris, celle à dire avant un vœu. Déesse de justice et de paix, envoie ton esprit sur les peuples en conflit, pour que le pardon et la réconciliation construisent une paix durable dans les cœurs et entre les hommes… ne mets pas Alix et maman dans une boite… s’il te plait… »
Rodrigue alluma une petite bougie sur l’autel, ainsi que sur celui de Saint Cichol et de Fraldarius pour qu’il protège sa famille, croisant la prêtresse au passage qui manipula les chandelles à sa place, il n’avait pas le droit de toucher au feu. Il en profita pour attraper le pan de son aube et il lui demanda. Elle devait savoir.
« Dites Ma Sœur, où est papa ?
Une prêtresse, c’était forcément très proche de la Déesse non ? Elle devait bien savoir. La femme âgée eut un sourire triste puis, se baissa à sa hauteur en lui assurant.
– Maintenant, Votre père est auprès de la Déesse. Elle l’a rappelé à Elle quand il est mort, comme tous les chevaliers qui ont été dignes de leur titre.
– Et pourquoi il n’est pas avec nous ? On a fait des bêtises ?
– Bien sûr que non. C’est juste que quand on… on part, il faut un peu de temps pour se reposer avant de revenir dans ce monde, surtout quand on part comme un vrai chevalier… votre père est seulement très fatigué.
– Alors, il reviendra quand il se sera reposé ?
– D’une certaine manière mon enfant… d’une certaine manière… souffla-t-elle d’un ton énigmatique. Il viendra surement vous voir…
Rodrigue ne comprit pas vraiment pourquoi elle hésitait autant à lui répondre… « Il viendrait surement vous voir »… ça voulait surement dire que les légendes sur les revenants étaient vraies ! Il en parla avec Alix et sa maman en sortant de la chapelle. Son frère retrouva d’un coup son énergie folle en se rappelant les légendes, avant de s’écrier.
« Il faut qu’on lui fasse comprendre qu’il peut rester ! Vient Rod !
– Eh ! Attends-moi Alix ! »
Ils filèrent dans les cuisines pour demander s’ils pouvaient faire un ragout de poisson que leur papa adorait. Leur papa adorait le poisson, surtout ceux du lac. Ça lui fera plaisir d’en trouver prêt pour lui quand il reviendra une fois bien reposer ! Les cuisiniers les laissèrent faire, et les jumeaux préparèrent aussi bien que possible une truite pour leur papa avec leur aide puis, ils posèrent le ragout sur la table de la salle où ils mangeaient. Ils allèrent aussi décrocher le portrait qui faisait peur pour le remplacer maladroitement par celui d’une de leur chambre, où c’était vraiment leur papa, avec un grand sourire. La Déesse était d’accord pour qu’il le fasse de toute façon, leur emblème les avaient aidé à enlever la planche de bois très lourde barbouillée de peinture, pour éviter qu’ils ne tombent à cause de son poids.
En courant dans tous les coins, ils entendirent des gens que n’aimait pas beaucoup leur papa discuter à voix basse. Ils chuchotaient entre eux qu’avec son sale caractère, Guillaume s’était fait beaucoup d’ennemis alors, si ce n’était pas en protégeant le roi, il allait sans doute se faire tuer à un moment ou un autre. Les jumeaux ne les écoutèrent pas. Leur papa était très gentil avec eux, il était juste sévère. C’était normal d’être sévère avec les personnes qui faisaient des bêtises. Ces gens étaient juste des méchants. Personne ne pouvait dire que c’était bien mérité de mourir comme ça.
Leur papa ne l’avait pas « bien mérité », il était juste mort comme un vrai chevalier, comme leur mamie et leur papi. C’était tout.
Le soir, quand leur maman les mit au lit, ils allèrent tous les deux dans celui d’Alix. Depuis que leur papa était mort comme un vrai chevalier, ils le faisaient plus souvent qu’avant, ayant peur de ne pas retrouver l’autre à son réveil. Quand ils le faisaient, leur maman les laissaient faire en ce moment, même si avant, elle était comme Rosemonde et ne voulait pas qu’ils prennent l’habitude de ne pas dormir chacun dans leur lit, sauf parfois, comme quand Guillaume était chez leur oncle Ludovic… avant de partir chez lui, leurs parents les laissaient même parfois dormir avec eux.
« En plus, si on reste tous les deux, papa… hum… ! Je suis coincé ! Râla Alix alors qu’il s’était perdu dans sa chemise pour la nuit, avant qu’Aliénor n’aide sa tête à trouver le bon chemin vers le trou pour elle. Merci maman ! En plus, papa pourra venir nous voir tous les deux si on est ensemble !
– C’est vrai ! Ajouta Rodrigue en posant son oreiller sur le lit de son frère.
– Hum… Rodrigue… Alix… les reprit doucement leur maman, essayant de ne pas être trop brusque avec eux. Même si Guillaume venait vous voir, il ne pourrait rester. Les revenants sont comme… comme les fantômes… même s’ils peuvent venir vous voir, ils ne peuvent pas rester, ni faire les mêmes choses que nous… Guillaume veille sur vous d’une certaine manière mais, il ne reviendra jamais vraiment non plus…
– Oui mais, on pourra le voir non ? Demanda son premier-né. On veut le revoir encore une fois… s’il revient, on pourra le voir alors, même s’il reste pas… il reviendra non ?
– Oui, c’est tout ce qu’on veut, le soutient son frère. On veut juste encore voir papa… il viendra bien non s’il n’est pas loin ?
Le visage de leur maman devient très triste, comme si elle avait une boule dans la gorge qui ne voulait pas la laisser parler. Elle leur embrassa le front en chuchotant, passant sa main dans leurs cheveux.
– C’est une histoire compliquée…
– Bah non, on veut juste voir papa, et papa aussi doit vouloir nous voir. Toi aussi, il doit vouloir te voir maman ! Il ne veut pas venir papa ?
– Bien sûr que non… votre père détestait s’éloigner de vous et rester loin de la maison… vous êtes nos petits louveteaux… enfin, elle les coucha en relevant l’édredon tout chaud, maintenant, c’est l’heure de dormir… vous avez tout ?
– Si Alix est là, oui !
– Et si Rodrigue est là, aussi ! S’exclamèrent les deux jumeaux l’un après l’autre. Et tu ne pars pas pendant la nuit ! J’aurais peur que tu ne reviennes pas si t’es pas là !
– Promis ! Et toi aussi, si tu vas faire pipi, tu me réveilles et on y va ensemble… je ne veux pas que tu ne reviennes pas…
Leur maman sembla éviter de dire quelque chose avant d’ajouter avec un sourire un peu triste, comment souvent depuis que papa était dans une boite.
– D’accord… Hum… et si je vous racontais comment le Brave Fraldarius a rencontré Blaiddyd et Dominic ?
– – Oh oui ! S’il te plait ! Racontes-là nous maman ! S’agitèrent-ils, tout contents d’entendre cette histoire.
– Une fois que vous serez de nouveau couché et sages.
Les deux jumeaux se recouchèrent tout de suite, l’un contre l’autre en attendant l’histoire. Une fois que le silence régna, Aliénor commença à raconter, faisant les voix alors qu’ils l’écoutaient religieusement.
– A l’aube des temps, alors que la Déesse n’était pas encore connue de tous, Fraldarius, votre ancêtre, serait né du lac même. Fils de l’eau, il fut élevé par son père adoptif au bord de sa Mère alors que les humains commençaient à peine à peupler Fodlan, ignorant encore le nom de la Déesse qui leur avait donné la vie. Dans le but d’aider son peuple et sa Mère, Fraldarius décida d’apprendre à maitriser l’eau pour rendre celle du lac buvable à tout instant, afin de préserver son peuple et son père des maladies.
– Fraldarius est très gentil, souffla Rodrigue, ses paupières commençant déjà à s’alourdir de sommeil.
– Cependant, un jour alors que son village encore fragile se réveillait, un grand vacarme résonna de toute part et ils furent attaquer par un des peuples voisins au leur ! Son père y mourut, et Fraldarius fut capturé par l’homme qui avait tué son père, l’emmenant au loin avec lui pour en faire son esclave.
– Oh non ! C’est la pire partie de l’histoire ! Il est méchant ! Il n’a pas le droit de faire du mal au papa ! S’écria Alix en remuant dans tous les sens.
– Alix, du calme, tu vas finir par frapper ton frère en t’agitant comme ça, le reprit Aliénor en posant sa main sur ses épaules pour le calmer. Je peux reprendre ?
– Oui maman ! Répondirent-ils tous les deux.
– Bien… pendant le voyage, il rencontra une autre prisonnière de guerre, Dominic, fille de la forêt…
– Ton ancêtre à toi maman… souligna Rodrigue.
– Oui… elle aussi avait été arraché à son village et à sa famille qui avait trouvé la mort dans l’attaque. Ils se rapprochèrent alors tous les deux, le même chagrin, la même peine, le même désir de rentrer chez eux et la même soif de vengeance les animant à présent, avec le don pour la magie et la musique mais, il ne rencontra pas qu’elle. Dans la maison de leur ravisseur, ils rencontrèrent un autre enfant de leur âge, fils de l’hiver, en secret tout aussi passionné qu’eux de magie, mais étant esclave depuis sa naissance, il n’avait pas de nom. Ils décidèrent alors de lui donner le nom de Blaiddyd, de l’endroit où il allait promener les bêtes, tous finissant berger, propriété du ravisseur et assassin des proches de Dominic et Fraldarius. Le temps passa, les été et les hivers se succédèrent au rythme des lunes. Petit à petit, les trois enfants se lièrent, amoureux de la magie et de la musique, devenant chaque jour de plus en plus puissant afin de pouvoir s’enfuir et retourner dans leur peuple un jour prochain…
Aliénor fit une pause pour regarder ses fils. Ils dormaient déjà l'un contre l'autre. Avec toutes les émotions de ses derniers jours, ils étaient épuisés, même s’ils avaient du mal à s'assoupir. Ils avaient peur que l’un ou l’autre disparaisse… tellement qu’ils n’arrivaient plus à dormir séparer, ils étaient tout le temps collé… ce n’était pas étonnant… ils avaient beaucoup de chemin à faire ensemble pour arriver à se remettre… ils étaient trop jeunes pour pleurer leur père…
La mère les recoucha correctement sous l’édredon d’Alix, ses jumeaux se serrant d’eux-mêmes, afin d’être au plus près l’un sur l’autre. L’un bougeait, l’autre se réveillerait… mais elle faisait tout de même gardé la porte de leur chambre par un garde chargé de veiller sur eux, c’était plus prudent. Elle embrassa leur petite frimousse avant de repartir vers son bureau. Elle avait encore des lettres à lire avant de dormir elle-même…
En retournant dans son étude pour finir son travail de la journée, Aliénor passa dans la salle où ils mangeaient tous ensemble, et vit le plat froid attendre quelqu’un qui ne reviendrait jamais à sa place, recouvert d’une assiette pour empêcher les chats de le manger. Épuisée, elle se laissa tomber sur son propre siège à ses côtés, fixant la chaise voisine comme s’il était là à l’écouter, même si c’était impossible.
« J’aimerais tellement que tu sois là… pour tenir le fief, je m’en sors, notre peuple nous soutient dans son immense majorité et pleure ta perte autant que nous, et on a bien fait le ménage en arrivant. La plupart de nos vassaux te respectait ou te craignait trop pour se révolter, quand ils ne nous doivent pas tout. Ceux qui sont passés entre les gouttes sont les plus difficiles à contrôler mais bon, eux aussi, quand ce n’est pas leurs voisins qui leur règlent leur compte pour trahison en pleine période de deuil, c’est leur propre population qui tente de les pendre pour oser s’en prendre à une veuve et des orphelins fraichement endeuillés, surtout que les roturiers te sont reconnaissant pour tes hôpitaux et tes écoles. Le vrai problème, ce sont les seigneurs extérieurs, et les ambitieux de tout bord… si tu m’avais dit que ma main pleine d’encre vaudrait aussi chère un jour, je ne t’aurais pas cru…
Elle fit une pause, regardant son alliance en la tournant autour de son doigt, libéra ses longs cheveux blonds de leur mantille noire et de leur chignon. Elle était encore à l’ancienne, apparaitre les cheveux détachés et sans chapeau devant quelqu’un d’autre que son mari la gênait un peu, même si de moins en moins d’hommes et de femmes se couvraient la tête en permanence en public. Là, elle était seule, et Guillaume aimait beaucoup ses mèches blondes, c’était presque leur petit secret à eux deux de se voir les cheveux détachés… elle passa ses doigts dedans, pensant au nombre de fois qu’elle avait peigné la longue chevelure de son mari, ses épaisses boucles noires toutes douces, enfermées à la va-vite dans une longue tresse tombant jusqu’à ses hanches… il ne prenait jamais le temps de les couper ou alors, il prenait sa dague et tranchait tout d’un coup… du Guillaume tout craché… même s’il avait arrêté quand leurs louveteaux avaient commencé à marcher, il aimait trop quand leurs petits essayaient de mettre des fleurs dans sa natte sans se faire repérer, même si c’était toujours un échec cuisant. Ils étaient bien trop adorables quand ils le faisaient… même s’ils se faisaient prendre à chaque fois, Rodrigue et Alix riaient toujours tellement quand Guillaume les attrapait… elle ne les avait plus entendus rire depuis trop longtemps, les rires étant remplacés par les pleurs, l’incompréhension et la peur…
– Il y en a un autre qui a tenté de m’enlever l’autre jour… rien de grave, je te rassure mais, c’est tout de même le troisième alors que ton corps a à peine eu le temps de refroidir… ils se jettent tous sur mon veuvage, comme les chiens errants qu’ils sont en croyant que convoler avec ta veuve leur donnera un quelconque droit sur tes louveteaux… s’ils croient qu’ils obtiendront quoi que ce soit de moi en me passant un bout de ferraille au doigt, ils se trompent lourdement. Je ne les laisserai jamais saccager tout notre travail », lui jura-t-elle, sortant les griffes en pensant à ces petits braquets jappant derrière sa famille, et qui pensaient que leurs petits jappements allaient réussir à faire trembler un loup féroce. « En plus, ils s’en prennent à moi pour le moment, je sais me défendre, et le premier à avoir essayé a fini sur une roue sur ordre de Ludovic, histoire que les autres ayant envie de se faire de l’argent avec mon veuvage réfléchissent à deux fois avant de tenter leur chance. Non, je ne m’inquiète vraiment pas pour moi… ce qui m’inquiète le plus, c’est s’ils décident de s’en prendre à nos petits…
Aliénor fit une pause, une boule de plus en plus grosse dans sa gorge, l’inquiétude lui serrant le cœur.
– Rodrigue et Alix sont prudents mais, ils restent des enfants, même s’ils risquent de grandir beaucoup plus vite dans une situation pareille. Parfois, il faut que le duc ou le futur duc soit présent afin que quelque chose se fasse, comme quand l’assemblée d’Egua enregistre une décision, même si c’est symbolique… alors, je leur fais prendre un de tes portraits pour faire comme si tu étais encore là et duc… même si en réalité, c’est eux… Ils ne comprennent pas encore que c’est eux, voir même que tu ne reviendras jamais… pour le moment, c’est plus un coup de main qu’ils te donnent ou je leur présente ça comme un jeu, j’essaye d’éviter de leur dire qu’ils font leurs devoirs ducaux… ils sont si petits… ils ont à peine six ans… je sais à quel point c’était dur pour toi, et même s’ils sont dans une situation moins difficile que toi, je voudrais leur éviter autant que possible d’avoir à prendre des responsabilités d’adulte… je sais que tu ne voudrais pas qu’ils aient autant de responsabilité que toi à leur âge… au moins, pour le moment, il n’y a pas d’assassins qui attentent à leur vie comme pour toi, et Ludovic est un précieux allié. Il endigue une bonne partie des velléités de certains… même s’il va falloir qu’on le ramène à la réalité avec Catherine, il faut avouer que faire pendre tous les cerveaux derrière ta mort alors qu’ils étaient nobles, et jurer que toute personne ayant trempé dans ce complot subirait le même sort, a calmé pas mal de monde. Mais je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter pour Rodrigue et Alix. Ils sont tellement jeunes, et tu leur manques tant… on est jamais assez vieux pour affronter ce genre d’épreuve… jamais… ils aimeraient tellement te voir… … … j’aimerais tellement te voir… qu’il ait raison et que tu viennes manger ce qu’ils t’apportent… tu me manque déjà… … … j’aimerais tellement que tu sois là Guillaume…
Elle sentit des larmes roulées les unes après les autres sur ses joues… elle leur avait pourtant interdit de se montrer à nouveau depuis qu’elle s’était effondrée une fois seule avec Nicola et Ludovic, après avoir appris ce qui s’était passé et avoir vu le corps de Guillaume dans son cercueil… elle n’arrivait juste pas à croire qu’il se soit fait tuer sans voir son cadavre… pas lui… pas Guillaume… il avait résisté à pire qu’un coup de couteau, ça n’avait pas pu le tuer… pas son loup de mari… pas son mari… pas lui… tout mais pas Guillaume… pas déjà… il allait survivre plus longtemps que les autres, vivre autant que Kyphon et Clothilde… ne pas mourir pendant sa trentaine comme trop de ses ancêtres… que ses propres parents morts dans leur vingtaine…
Mais quand ils avaient soulevé le couvercle, elle n’avait pu que le reconnaitre, habillé dans la sarcelle ducale, les plis du tissu cachant à peine la blessure mortelle en plein ventre… sa peau encore plus pale à cause de la perte de sang, sa longue tresse reposant sur son épaule, ses beaux yeux de chat provenant du Brave Fraldarius lui-même fermés à jamais, cachant pour toujours le bleu d’eau si semblable à celui du lac… même inanimé, son visage conservait son aspect mordant, ferme face à ses ennemis mais, cachait tout l’amour et la douceur qui se peignaient dans ses traits quand il était avec elle et surtout quand Guillaume restait avec leurs fils… Déesse… ce que leurs jumeaux ressemblaient à leur père… c’était Guillaume au même âge… leurs louveteaux étaient bien les fils de leur père…
« Comment cela a-t-il pu arriver ? » fut sa première question, vite suivit par :
« Reste avec nous… » puis d’un :
« Je t’aime… »
Elle l’avait embrassé une dernière fois avant de refermer le couvercle du cercueil pour toujours. Rodrigue et Alix dormaient, ils étaient tombés d’épuisement à force de pleurer mais, elle refusait de prendre le risque qu’ils voient le corps de leur père. La simple vue du cercueil avait déjà été une épreuve terrible pour eux, elle refusait de les traumatiser encore plus s’ils voyaient le cadavre inanimé de Guillaume… ils étaient trop jeunes pour voir le corps de leur père… bien trop jeunes… tous… Guillaume était mort si jeune…
Elle s’était effondrée, incapable de retenir ses larmes et sa peine. C’était injuste ! Qui était les monstres qui avaient osé leur faire ça ?! Qui étaient les lâches assoiffés de sang qui avaient voulu empêcher une paix ?! Rationnellement, elle connaissait tous les arguments en bois mouillé que les coupables avanceraient mais là, sur le coup de l’émotion, elle voulait juste entendre ce qu’ils avaient à dire sur le meurtre d’un père de deux enfants, que ce soit Guillaume ou Ludovic si leur bras armé avait atteint leur objectif. Qu’ils disent la vérité qu’ils se fichaient des autres et de la mort, qu’ils voulaient juste gagné de l’argent et du prestige facilement avec la guerre et le butin, comme au temps de Clovis le Sanglant avant que Ludovic, Catherine, Guillaume, elle-même et bien d’autres ne le renversent… qu’ils aient le courage d’avouer leur soif de sang et d’or devant elle au lieu de se cacher derrière leur petit doigt…
Ludovic et Nicola aussi avaient beaucoup pleuré avec elle… Nicola avait perdu son ami de toujours avec qui il avait survécu à leur minorité, presque comme son frère, avec qui ils avaient affronté et survécu à bien pire des dizaines de fois… c’était comme perdre un membre de sa propre famille… Guillaume était autant un membre de sa famille que Nicola en était un de la leur…
Et pour Ludovic, c’était encore pire… Aliénor ne l’avait presque jamais vu aussi émotif… lui qui était toujours froid et presque sans émotion apparente… elles étaient toujours très subtiles et faciles à manquer, c’était rare de le voir les extérioriser ainsi… les deux seules fois qu’elle l’avait vu pleurer, c’était de rage en voyant Clovis commencer une autre guerre sanglante qui tuerait trop d’innocents, puis de soulagement quand ils l’avaient enfin renversé. Il aurait aussi pleuré Guillaume en le voyant mort dans ses bras… il avait toujours été aux côtés de Ludovic depuis qu’il était petit, que ce soit quand il fallait tirer le gamin des champs de batailles de son père, ou quand un gosse de quatorze ans commençait à comploter pour renverser le dit père, puis qu’il mettait son plan en application quatre ans plus tard… encore plus après quand il lui avait fallu régner, ainsi que le ramener dans le droit chemin par la peau du cou quand il faisait des conneries… « c’est mon boulot de t’empêcher de faire des conneries », l’éternelle maxime de Guillaume qui répétait souvent au roi quand il s’entêtait… sa mort revenait à perdre son principal soutien et son grand frère pour Ludovic…
« Je suis désolé… Guillaume ne voulait pas mourir… il voulait vous revoir… il voulait revenir auprès de vous tous… je suis désolé que ce soit passé ainsi… »
Aliénor l’avait fait taire, ce n’était pas la faute de Ludovic. Il avait déjà tout fait pour rendre cette rencontre la plus sûre possible mais, il y avait toujours une zone d’ombre inévitable… et elle avait suffi pour que…
« Aaaoooouuuhhhh… Aaaoouuhhh… oouuuhhh… aaaaooouuuhhh… »
La veuve releva la tête en entendant un loup hurler à la lune. Il y en avait vraiment beaucoup sur leurs terres mais, assez peu d’attaques, la Déesse soit louée. Après tout, un loup et son louveteau ornait leur blason depuis Kyphon et sa fille Clothilde, en référence à leur surnom de « Loup » eux aussi, capable même d’en monter un géant… peut-être que les vrais lupins de leurs terres sentaient qu’ils avaient à faire avec des loups humains, qui savait ? C’était ce que disait la légende en tout cas… Rodrigue et Alix aimaient beaucoup cette histoire…
Elle les écouta, leur chant s’envolant vers l’astre lunaire et à l’étoile céruléenne, brillant dans le ciel comme si de rien n’était en bas… les réponses de ses amis à sa plainte ne tardèrent pas, plus forte, venant de partout et de plus en plus énergique au fil des minutes. Les hurlements semblaient de tout âge : des vieux, des jeunes, des adultes, des pas encore en âge, d’autres trop…
Aliénor sourit en les entendant, percevant presque la voix derrière les cris lupins et entendant ses mots piquants mais toujours attentionnés avec elle.
– Tu as raison, ce n’est pas mon genre de me morfondre. On s’en sortira, je ferais tout pour les protéger de la moindre menace, et même si tu n’es plus là, je sais que tu en feras autant de ton côté. Ce ne serait pas la première fois que tu interviens quand on s’y attend le moins. Un autre coup de bluff, n’est-ce pas ? En tout cas, je sais que tu n’es plus là mais, tout en étant proche en quelque sorte… tu ne nous abandonneras pas… elle embrassa son alliance en souriant un peu. Montrons-leurs que le loup n’a pas encore poussé son dernier cri et n’a pas encore perdu tous ses crocs.
Elle se releva en saluant la meute de loups hurlant à la lune, sentant la présence de Guillaume à ses côtés alors qu’elle retournait travailler, plus déterminée qu’elle ne l’avait été depuis sa mort.
                                                                                    Chapitre 2         
Les jours passaient et rien ne changeait vraiment. Les petits faisaient tous les jours quelque chose pour leur papa, le posait sur la table et chaque matin, ils étaient tristes de voir qu’il n’était toujours pas assez reposé pour venir les voir. Leur maman leur avait expliqué que s’il revenait, il ne pourrait rien toucher et qu’il devrait vite repartir pour ensuite revivre mais, les jumeaux continuaient quand même. Ça faisait un lien avec leur papa…
Leur maman restait autant que possible avec eux, elle évitait même de quitter la maison pour rester avec eux. C’était bien, ils ne voulaient pas que leur maman rentre aussi dans une boite. Ils ne voulaient pas qu’elle soit aussi fatiguée que papa…
Cependant, environ un mois et demi après que la boite de Guillaume avait été mise dans le sol, un messager vient voir leur maman pour lui demander de venir dans une ville plus au nord, dans la forteresse de Crèvecœur. Ils ne comprirent pas vraiment la raison, à part que cela avait avoir avec le nord et surtout, que c’était à cinq jours au moins de chez eux, et ils qu’étaient trop petits pour la suivre.
« Non maman ! Ne pars pas ! »
Ils s’accrochèrent de toutes leurs maigres forces à la robe de leur maman. Elle allait partir, tomber sur quelqu’un de méchant et elle rentrerait dans une boite ! C’était sûr ! Ils ne voulaient pas la perdre ! Ils ne voulaient pas la perdre ! Ils voulaient garder leur maman ! C’était leur maman ! Elle n’avait pas à partir ! Elle devait rester avec eux ! Ils pleurèrent même pour qu’elle ne parte pas, refusant qu’elle meure comme un vrai chevalier aussi.
« Chut… chut… ça va aller… ça va aller… ne pleurez pas… je ne mourrai pas, c’est promis… je dois y aller, c’est mon devoir mais, je ne mourrai pas…
– Pourquoi c’est ton devoir ? Demanda Rodrigue. Nicola ne peut pas y aller tout seul ?
– Les adultes n’ont pas des devoirs comme ça à faire ! Restes ! S’exclama Alix.
– Tout le monde a des devoirs. Le mien en tant que duchesse et de régente, c’est de protéger le fief, comme Guillaume le faisait. C’est le devoir de tous les seigneurs de protéger leur fief et leur peuple, ainsi que tous ceux qui leur sont chers. Tout le monde n’a pas le temps d’apprendre à se défendre alors, nous qui avons ce temps, nous devons les défendre de toutes nos forces. Autant les personnes plus faibles que les plus jeunes, que les plus vieux et les personnes qui nous sont chers, comme les loups défendent leur meute. Votre père s’entrainait et travaillait beaucoup pour protéger son fief, mais aussi pour vous protéger tous les deux.
– Pour de vrai ?
– Bien sûr… pourquoi vous mentirais-je ? Votre père vous adorait et voulait tout faire pour vous protéger… elle les attira contre elle et les embrassa tous les deux. Vous êtes nos louveteaux… Il voulait vous protéger plus que tout au monde… »
Ils se calmèrent un peu grâce aux mots de leur maman mais, ils restèrent inquiets… cela devient pire toute la journée, puis ils ne purent plus se tenir quand leur maman était sur le point de partir. Il y aurait Nicola avec eux et ils l’adoraient mais, ce n’était pas pareil, ce n’était pas maman…
Les jumeaux filèrent alors sur le bord du lac pour se calmer avant d’aller lui dire au revoir, même s’ils ne voulaient pas… peut-être que s’ils ne venaient pas lui dire au revoir, leur maman ne partirait pas et elle resterait… ils pourraient même dormir un peu sous les buissons pour se cacher encore plus et l’empêcher de partir… ils avaient sommeil…
Il y avait beaucoup de brume aujourd’hui au-dessus de l’eau et elle était sombre, on n’y voyait pas à trois pas. Se prenant la main pour ne pas se perdre, les jumeaux marchèrent un peu le long de l’eau, n’entendant rien d’autre que son clapotis. C’était un jour étrange aujourd’hui…
Rodrigue crut entendre quelque chose souffler dans son oreille, une voix peut-être. Il tourna la tête vers le lac et vit alors des petites lumières sur la surface de l’eau.
« Alix… regarde…
– Qu’est-ce que c’est ? Demanda-t-il, ses doigts se resserrant sur les siens. Tu crois que… tu crois que c’est papa ?
Leur papa les emmenait souvent sur le lac, leur parlant de tous les détails à savoir sur leur fief. C’était peut-être qu’il voulait rentrer par le lac ? Ils ne savaient pas… et ils ne voyaient pas assez bien dans le brouillard pour le dire. Mais ils voulaient le voir là, dans la brume, au-dessus de l’eau…
Ils se tournèrent vers l’onde en levant leur main libre, ne se lâchant pas.
– Papa…
Ils mirent les pieds dans l’eau sombre.
– Papa… c’est toi ? Papa… papa !
Ils s’avancèrent jusqu’à avoir de l’eau jusqu’à la poitrine, même si c’était très difficile de marcher dedans. Elle était méchante l’eau ! Elle les empêchait d’aller voir leur papa ! Puis ils entendirent la voix de leur maman à travers la brume.
– Rodrigue ?! Alix ?! Où êtes-vous ?! Ô Déesse ! Rodrigue ! Alix ! N’avancez plus !
Elle se précipita à toute vitesse dans l'eau et les tira en arrière alors qu’ils protestaient, la main toujours tendue vers les lumières.
– Non ! Non maman ! C’est papa ! Papa est là ! Regarde ! C’est papa !
– Rodrigue… Alix… ce n’est pas Guillaume… ce n’est pas lui… il n’est pas là… il ne vous mettrait jamais en danger… jamais… il ferait toujours tout pour vous protéger… toujours… il a toujours fait passer sa famille avant tout autre chose… ce n’est qu’une illusion… des feux follets… ce n’est pas Guillaume. Quel père digne de ce nom mettrait en danger ses enfants ?! Ô Déesse… Déesse… j’ai eu si peur… Déesse…
– Maman… ils sentirent les larmes d’Aliénor rouler sur ses joues, se tournant vers elle pour les essuyer avec leurs mains trempées. Maman… ne pleure pas…
– Ce n’est rien… ça va aller… ça va aller… j’ai juste… ô Déesse… j’ai eu tellement peur… ne me refaites jamais une peur pareille… j’ai bien cru que j’allais vous perdre tous les deux vous aussi…
– Maman… » répétèrent les jumeaux, ayant très mal dans leur poitrine de voir leur maman pleurer comme ça, ils n’avaient pas voulu lui faire autant de peine ! Ils voulaient juste qu’elle ne parte pas, c’était tout ! Ils ne pensaient pas… Ils devaient faire attention à ce qu’ils faisaient sinon, leur maman pleurerait encore et ils n’aimaient pas ça… « On ne te fera plus peur… c’est promis… ne pleure pas… »
Leur maman retarda un peu son départ pour Crèvecœur afin de rester un peu plus avec eux mais, quand elle partit, les jumeaux lui promirent de rester très sages avec Nicola et Rosemonde. Quand elle n'était pas là, ils travaillèrent bien, même si Rosemonde les grondait un peu parfois mais, elle leur laissait aussi du temps pour jouer tous les deux dans le jardin avec Bruno, mais aussi la fille de Nicola, Loréa, ils s’entendaient bien tous les trois.
Quand leur maman revient, elle ne les lâcha plus des yeux ou alors, il fallait que quelqu’un de confiance les surveille. Ce fut long avant qu’elle n’accepte de les lâcher un peu mais, c’était normal… il ne voulait plus l’inquiéter comme ce jour-là.
Avec le temps, les jumeaux acceptèrent petit à petit que les gens les appellent « seigneur » ou « Votre Grâce » sans se fâcher, les surnoms étant souvent changés en « petits seigneurs » ou « Petite Grâce », les vrais étaient pour leur papa. Ils ne voulaient pas donner encore plus de travail à leur maman en refusant quelque chose comme ça. Ils devaient être aussi forts que leur papa et leur maman. Ils savaient qu’ils ne pouvaient pas faire autant de chose qu’eux car, ils étaient trop petits mais, ils feraient tout pour être aussi forts qu’eux.
Ils avaient arrêté de compter le nombre de jour depuis que leur papa était dans une boite mais, un jour d’été, ils arrêtèrent de poser de la nourriture pour lui sur la table. Ils avaient compris que Guillaume ne reviendrait pas.
Ce jour-là, les jumeaux passèrent la journée à remplir un petit coffre plein de choses, plein de souvenirs. Ils la remplirent de tout ce qui était important pour eux et leur papa puis, après que leur maman ait aussi mis quelques objets à l’intérieur, ils l’enterrèrent sous les fleurs de potentilles que leur papa aimait tant.
Il y avait des objets et une lettre, pour leur papa, même s’il ne la lirait jamais. Peut-être que Rodrigue et Alix déterreraient la boite un jour, quand ils seront aussi grands que leur papa. Peut-être pas. Ils verraient bien… mais cette fois, ils comprenaient mieux ce qui se passait… ils allèrent ensuite au lac avec leur maman et un dernier repas pour leur papa qu’ils posèrent sur une petite barque. Les jumeaux avaient l’impression que quelqu’un était là, dans le lac tout autour d’eux, alors qu’ils s’avançaient plus facilement dans l’eau que ce jour-là… ils devinèrent qui c’était et lui dirent tous les deux, s’en voulant de ne pas avoir été gentil alors qu’Il les avait sauvés avec leur maman…
« Désolé d’avoir dit que tu étais méchant Fraldarius… on est désolé… merci de nous avoir aidé… »
Rodrigue et Alix sentirent une chatouille sur leurs chevilles dans l’eau, et ils surent que leur ancêtre leur pardonnait de s’être mal comportés. Ils poussèrent alors la petite embarcation en disant, comme ils s’étaient mis d’accord tous les deux.
« Au revoir papa… on se reverra mais, après avoir vu la Déesse… tu seras fier de nous et on sera aussi fort que toi, on te le promet…
Leur maman se baissa alors à leur hauteur, les embrassant tous les deux sur le front alors qu’elle leur promettait.
– Vous vous en sortez très bien. Votre père sera toujours fier de vous, louveteaux. »
****************************************************************
Vus que c'est un peu plus court que d'habitude (enfin, comparé à ce que je peux sortir en ce moment vu que c'est souvent des arcs entier que je pose dessus), petites anecdotes !
-A la base (soit au tout début début), Aliénor ne devait pas être aussi développée ou même existée. Les jumeaux étaient sensés être orphelins des deux parents et être élevés par Ludovic (Nicola n'existait pas encore à l'époque), et ils considéraient ce dernier comme leur père vu qu'ils ne se souvenaient déjà plus de Guillaume (on devait direct passé de l'intro [donc grosso modo l'intro à partir du moment où Ludovic commence à dire ce qui s'était passé avec Guillaume jusqu'à la fin de cette partie] à la partie à GM). C'est qu'après en écrivant l'histoire que j'ai eu plus d'idée autour de leur enfance et de leur mère qu'elle s'est ajouté au lot, notamment en écrivant l'UA "Bye !" où Guillaume et Aliénor sont encore en vie
-quand je me suis dit que leur mère allait s'appeler Aliénor, sa personnalité s'est écrite toute seule car bon, juste le nom la rend badass de base vu la personnalité de l'Aliénor historique
-Ludovic aussi était très différent, c'est même un des personnages qui a le plus changé entre son apparition dans ma tête et ce qu'il est à présent : à la base, cela devait être un jeune roi assez incertain qui s'accrochait beaucoup à Guillaume pour régner car, son père Clovis était incompétent sans être aussi dangereux mais, avait laissé le Royaume dans un sale état, et la mort de Guillaume le forçait à s'affirmer (il l'est encore un peu dans "Bye !" avec des circonstances différentes). Ce n'est qu'en écrivant le reste de l'histoire qu'il est devenu aussi froid et peu expansif, et que Clovis soit devenu un monstre assoiffé de sang que Ludovic met hors d'état de nuire d'un coup d'état, ce qui le rend plus intéressant à mon avis, surtout vis à vis de Lambert dont il est l'opposé.
-Dans la même veine, c'est quand Clovis est devenu un tyran que Ludovic a commencé à être aussi froid : c'est sa personnalité de base de ne pas être expansif sur ce qu'il ressent mais, c'était aussi un système de défense pour rester impénétrable pour Clovis (les deux se tiraient joyeusement des flèches dans les pattes)
-Mettez Ludovic et Byleth dans la même pièce et vous entendrez les mouches volées. J'ai tendance à penser à Byleth quand j'écris Ludovic, ils sont aussi inexpressif l'un que l'autre (au début pour Byleth)
-Lors de l'histoire d'Aliénor au chapitre 1, c'était à la base une histoire sur Kyphon et un loup avec qui il s'était lié d'amitié, qui l'avait suivi partout et dont les descendants continueraient de veiller sur la famille ducale. Cela racontait notamment comment cette louve l'avait protégé des hommes de son père (qui le reconnaissait que parce qu'il n'avait plus d'héritier, tout en le considérant comme une femme alors que c'est un homme trans) alors qu'il accouchait de sa fille et toute la relation entre "la Noiraude" et la petite famille de Kyphon jusqu'à sa mort, ainsi qu'une anecdote de jeunesse de Guillaume et Nicola qui, attaqués par des hommes de Clovis le Sanglant, ont été sauvé par un grand loup noir, et tout le monde est persuadé que c'était un petit de la Noiraude... sauf que ça faisait 9 pages et que ça n'allait pas être exploité plus tard, l'ancêtre le plus mise en avant dans cet histoire étant le Brave Fraldarius de première génération Pertinax. Donc, coupé au montage.
-faudrait que je voie si j'ai pas trop la flemme de le faire vu que c'est un micro-détail mais, je vais peut-être ajouté que Ludovic a les yeux vairons, comme son ancêtre Simplex qui a l'oeil gauche de Pertinax après qu'il ait été crevé. ça pourrait ressortir de temps en temps, et pour Ludovic, ça pourrait faire ressortir son lien avec les Fraldarius.
4 notes · View notes
nilaread · 2 years
Text
Love story , tome 1 : Anatomy
Tumblr media
Édimbourg, 1817.
Hazel est une jeune aristocrate à l'avenir tout tracé. Promise à un cousin, son rôle est de se préparer à devenir une épouse dévouée et soumise. Pourtant, Hazel rejette cette fatalité. Passionnée de médecine et aspirante chirurgienne, elle décide de braver les interdits liés à son sexe et à sa classe sociale pour suivre en secret des cours d'anatomie.
C'est alors qu'elle fait la rencontre de Jack, un voleur de cadavres travaillant pour le compte de l'université où elle étudie. À ses côtés, elle se sent plus libre et audacieuse que jamais. Et quand elle découvre que certains grands chirurgiens et membres de l'aristocratie réalisent d'étranges expériences sur les cadavres, elle décide de mener l'enquête...
Bonjour mes étoiles, j'espère que vous allez bien !✬
On se retrouve aujourd'hui pour ma revue s'agissant du livre Anatomy. Dans ce premier tome, nous suivons l'histoire d'Hazel, interne en médecine et dont le rêve est de devenir chirurgienne un jour. Problème : la société secrète des anatomistes qu'elle souhaite intégrer n'est ouverte qu'aux hommes.
L'écriture de Dana Shwartz est très fluide, c'est un livre que j'ai lu assez rapidement. L'histoire était prenante et j'ai vraiment apprécié la détermination et le courage dont faisait preuve Hazel afin de poursuivre ses rêves sans oublier ses valeurs.
J'ai beaucoup aimé le fait de me retrouver propulsée à Edimbourg dans les années 1807, ayant une appétence pour les romans historiques. Mention spéciale pour l'univers médical également.
Une suite est annoncée pour 2023 en version anglaise. Je n'ai pas encore de visibilité quant à la sortie du second tome en France. Mais il est certain que j'aimerais beaucoup lire la suite !
Connaissez-vous ce livre ? Avez-vous envie de le lire ?
Détails sur le produit Éditeur ‏ : ‎ Albin Michel (29 juin 2022) Langue ‏ : ‎ Français Broché ‏ : ‎ 408 pages ISBN-10 ‏ : ‎ 2226472983 ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2226472984 Âge de lecture ‏ : ‎ Dès 13 ans Poids de l'article ‏ : ‎ 440 g Dimensions ‏ : ‎ 14.6 x 2.7 x 21.5 cm
2 notes · View notes
iflybae · 12 days
Text
Tumblr media Tumblr media Tumblr media Tumblr media
240914 ist_theboyz update
THE BOYZ WORLD TOUR : ZENERATION II à PARIS fini 🇫🇷 Vous m’avez beaucoup manqué les THE B de Paris〰️❤️ J'espère que vous avez aimé le concert qu’on a fait ensemble et que vous avez gardé de bons souvenirs🫶🏻 À bientôt❗️
0 notes
tndn-btg · 4 months
Note
Merci de ne pas poster
Je ne suis probablement pas la personne que vous espérez contacter, je suis désolé. Je ne sais même pas vraiment si vous êtes la personne que j'essaie de joindre, je viens de tomber sur un compte que j'ai googlé l'année dernière en voyant des posts après un concert qui semblaient m'inquiéter.
Si vous êtes la personne que je pense que vous êtes, je voulais juste vous dire que toutes ces années, j'ai pensé que cette horrible sensation que j'avais dans l'estomac était que j'avais besoin de excuses de votre part. Maintenant que je suis plus âgée et plus mature, j'ai réalisé que je devais vraiment m'excuser auprès de toi.
J'ai vécu une situation difficile où j'ai été placé dans votre perspective et j'ai réalisé que si c'était vous, vous aviez dû réagir de cette façon parce que je vous avais blessé ou effrayé. pour cela, je ne peux pas être assez désolé. Je suis désolé d'avoir vécu quelque chose de similaire pour réaliser à quel point je t'ai blessé, j'aurais dû le savoir dès le début.
Je suis désolé d'avoir réagi avec colère au lieu d'admettre que j'ai été blessé, et je suis désolé de m'être impliqué avec toi et tu sais qui. Je te promets que je n'avais pas de mauvaises intentions, il a juste dit des choses qui m'ont fait peur par rapport à ce qu'il avait prévu avec toi et j'avais peur que tu sois blessé. J'aurais dû t'envoyer des captures d'écran ou au moins communiquer avec toi, j'aurais aimé faire quelque chose parce que je t'appréciais en tant qu'ami dans ma vie. merci d'avoir été là pour moi quand j'en avais le plus besoin.
tu sembles aller beaucoup mieux dans la vie que la dernière fois que je t'ai vu et je suis si heureux pour toi et je suis si heureux que tu aies trouvé de bonnes personnes pour toi, je te souhaite seulement le meilleur
Je ne voulais pas vous contacter via Discord au cas où vous seriez mal à l'aise, mais si vous avez des questions, vous pouvez me contacter à @dromevideo, mais ne vous sentez pas obligé de le faire.
Je jure que je ne te contacterai plus, je suis désolé pour ce mois inquiétant, j'avais juste besoin de m'excuser et je ne savais pas comment faire, j'espère que cela t'a permis de tourner la page car c'était un gros poids sur ma poitrine .
i feel awful posting this anon, but the username you gave me is not working on like any social media platform i have frantically tried to put it in. i would really really want to reach out and talk over some points with you bc i am like. now absolutely certain this is who i think it is and i have not. not thought about you for a very long time. and i missed you a lot and if there's a chance in hell i can explain everything on my end too to you i want to it in a heartbeat, i just feel like you're owed something private. if you can please please tell me what platform that @ is for or friend me on your end because i do really really want to talk. please don't be sorry. you've apologized plenty already and i don't want you to be sorry anymore. you didn't do anything wrong
0 notes
zestickers · 9 months
Text
Bonjour !
Bonjour à tous, 😊
Je suis nouvelle sur cette plateforme et je suis ravie de faire partie de cette communauté créative. 🎨 Je suis une créatrice de stickers ronds, conçus pour diverses occasions et besoins.
Vous trouverez dans ma collection des stickers pour des événements spéciaux comme Noël 🎄 et les anniversaires 🎂. Ces stickers ajoutent une touche festive et personnalisée à vos cadeaux et décorations.
De plus, j'offre également des stickers pour les artisans. 🛠️ Si vous cherchez à ajouter une touche décorative à vos créations, mes stickers pourraient être la solution parfaite.
Je suis impatiente de partager mon travail avec vous et j'espère que vous l'apprécierez autant que j'ai aimé le créer. 🌟 N'hésitez pas à me contacter si vous avez des questions ou des demandes spécifiques.
Merci et à bientôt ! 👋
1 note · View note